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Le sanctuaire Kumano Nachi Taisha. shutterstock.com-Piyawannee Sadsumpan.jpg

Éprouver la spiritualité japonaise

Depuis les temps préhistoriques, Kumano est reconnu comme un site sacré associé au culte de la nature. Mais c'est à partir du VIe siècle, et l'arrivée du bouddhisme sur les terres nippones, que la région devient un site de pratique convoité. Le bouddhisme prenant de plus en plus d’importance au Japon, ce sont alors aux IXe et Xe siècles que les sites sacrés, que l'on connaît aujourd'hui, se forment. Ce réseau complexe de chemins et de sentiers démontre à merveille le cadre religieux de la région et son fort caractère spirituel. Y sont représentés le shintoïsme, le bouddhisme et également l'école bouddhiste Shingon, un aspect ésotérique du bouddhisme, peu connu en Occident. Plus communément appelée secte Shingon, l'école bouddhiste Shingon a été introduite au Japon par le moine Kukai (Kobo Daishi de son nom posthume) au VIIIe siècle. On dénombre aussi le shugendō, cette tradition spirituelle millénaire japonaise de communion entre l'homme et la nature qui se situe au croisement du culte de la montagne, de la religion shintoïste ou encore bouddhiste et taoïste. C'est la force de ces croyances qui donne aux chemins leur côté mystique et sacré que le randonneur d'aujourd'hui peut ressentir en parcourant ces sentiers au milieu d'une nature luxuriante. Il faut savoir également que la famille impériale, au cours des XIe et XIIIe siècles, effectua près de 100 pèlerinages vers Kumano et son influence joua un rôle d'importance. Ces nombreux pèlerinages sont ainsi à l'origine de la construction de nombreux sanctuaires et hébergements. Cette période de l'histoire voit les principaux lieux de culte se développer pour arriver à leur statut que l'on peut encore apprécier de nos jours. Ces chemins de pèlerinage permettaient, et permettent toujours, de rejoindre les sites sacrés du Kumano Sanzan et les trois plus grands sanctuaires de Kumano : le grand sanctuaire de Kumano Hongu Taisha, le Kumano Nachi-taisha et le sanctuaire de Kumano Hayatama Taisha.

La magie des lieux

Ces chemins de pèlerinage sont des biens précieux uniques au monde de par la grandeur de leur histoire et de la nature qui les entoure. Les sites sacrés se répartissent sur plus de 500 hectares parmi la forêt qui recouvre ces montagnes sanctifiées depuis maintenant 1200 ans. Le cadre qui enveloppe ces sentiers est tout bonnement somptueux avec ses torrents, ses rivières, ses chutes d'eau, ses cèdres ou encore ses nombreux « Oji », ces sanctuaires secondaires des Grands Sanctuaires de Kumano qui ponctuent la route pour que les pèlerins puissent donner des offrandes. On dit qu'il y aurait 99 Oji, mais le nombre exact serait en fait inconnu. Cette culture vivante du Japon fascine toujours les visiteurs d'aujourd'hui, autant Japonais que visiteurs étrangers. Avant la pandémie, leur nombre pouvait atteindre 15 millions par an. En effet, bien au-delà du plaisir du corps et de l'esprit, lorsque l'on randonne sur des sentiers dépaysants et relativement sportifs (certaines portions sont d'ailleurs réservées aux personnes entraînées et équipées), c'est l'ambiance imprégnant ces sentiers qui rend l'expérience exceptionnelle. La magie qui se dégage de ces lieux est fascinante. Ces chemins, chargés d'histoire, ont vu défiler de très nombreux pèlerins depuis des siècles et des siècles. Ces arbres centenaires, jalonnant la route, ces montagnes sacrées, poussant l'homme dans ses retranchements, et ces temples et sanctuaires vénérés, offrant un moment de pause spirituelle aux pèlerins, sont autant d'éléments qui définissent la beauté, la valeur et l'aura de la péninsule de Kii. La faune et la flore locales ajoutent la touche finale à l'expérience. Un exemple avec la route Iseji, qui suit la côte est de la péninsule, entre le sanctuaire d'Ise-Jingu et Kumano Sanzan, qui offre aux randonneurs des portions pavées de pierres rondes, des montagnes, des forêts de bambous, des champs en terrasse et des plages. Un véritable régal pour les sens.

Expérience immatérielle

Au-delà du patrimoine naturel et matériel, la péninsule de Kii regorge de patrimoine immatériel. L'Unesco ne s'est d'ailleurs pas trompée en qualifiant les sanctuaires shintoïstes et les temples bouddhistes des monts Kii, et leurs rituels associés, de témoignages exceptionnels du développement d’une culture religieuse japonaise sur plus de mille ans. Les voyageurs, qui parcourent cette partie du Kansai pour profiter des chemins de pèlerinage, découvrent alors les richesses de la culture du pays. A Koyasan, pour ne citer que ce lieu, les visiteurs peuvent faire l'expérience de la cérémonie du feu, gomataki, une cérémonie souvent intimiste lors de laquelle un moine, au son des sûtras, fait brûler des plaquettes votives. C'est une expérience saisissante, voire hypnotisante. Il faut alors se lever très tôt, les cérémonies pouvant commencer dès 6h du matin. Les cérémonies bouddhiques dans les temples, dites o-tsutome, font aussi partie de cette culture immatérielle. Chaque jour, le grand prêtre et les moines entonnent des sûtras bouddhiques dans la salle principale du monastère. Cela fait partie intégrante du plaisir dont font l'expérience les visiteurs, qui se rendent dans la région à la découverte des chemins de pèlerinage du Kumano. Dans cette région, de nombreux monastères ouvrent d'ailleurs leurs portes pour une nuitée ou deux. On les appelle les shukubo. A l'origine, ils étaient de simples hébergements pour les moines itinérants, mais, durant la période d'Edo, le nombre de ces logements a augmenté, en raison du  nombre croissant de pèlerins. C'est l'occasion alors de goûter au shojin-ryori, la cuisine végétarienne des moines, qui condamnent le sacrifice de toute forme de vie dotée d'une conscience. Le patrimoine immatériel de la gastronomie fait donc partie intégrante de la richesse des chemins sacrés de Kii, qui font véritablement le lien entre la nature, la religion, la foi, l'art et la culture. C'est un lieu d'unité entre l'homme et la nature. Et puis, une fois les chaussures retirées, le visiteur ne boudera pas le plaisir de se glisser dans l'un des nombreux onsen, ces sources d'eau chaude, que l'on peut retrouver dans les célèbres villes de Kawayu, Yunomine ou encore Katsuura.

Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site : kansaiguide.jp/exciting/