Danse kathak © ShaikhMeraj - Shutterstock.com.jpg
iStock-469868231.jpg
iStock-176812253.jpg

Les musiques et danses traditionnelles

L’Inde est un pays d’une richesse culturelle unique. Et la quantité dantesque de musiques et danses traditionnelles originaires du Rajasthan ne fait pas mentir cette dernière assertion. Le Rajasthan est d’ailleurs réputé comme un des Etats indiens les plus fournis en musiciens traditionnels car c’est ici que l’on trouve des castes de musiciens nomades, célèbres dans tout le pays, comme les Manganyars ou les Langas. Ces derniers, les Langas, résident vers Jodhpur. À l'origine hindous, ils embrassèrent jadis l'islam de leurs protecteurs. Ils jouent une musique qui mêle mélodies classiques et rythmes populaires avec du sarangi, une vielle, le dholak, une percussion et le satârâ, une flûte. Quant aux  premiers, les Manghanyiars, ils vivent autour de Jaisalmer et de Barmer et sont des musiciens professionnels musulmans. Ils jouent des instruments légèrement différents, préférant le kamânche (une vielle à pique), la murali (une flûte nécessitant d’employer la technique de souffle continu) et les kartals (sorte de castagnettes).
Manganiyars comme Langas ne jouent que des ragas associés à des moments spécifiques de la journée ou à des saisons précises et possèdent aussi un répertoire de ragas réservé à toutes les occasions telles que les mariages, les naissances, etc. Les ragas sont un ensemble de règles de construction mélodique et s’apparentent au concept occidental de modes musicaux, typiques de la musique indienne.
Une autre caste rajpute importante est celle des Bhopa (et leurs épouses les Bhopi), des prêtres-chanteurs, chantres de la vie quotidienne rurale et de ses héros, comme Pabuji, divinité protectrice des humains et des troupeaux. Généralement, ils s’accompagnent au rawanata, vielle à archet formée d’une caisse de résonance en bronze ou en noix de coco, d’un manche en bambou et de dix-sept cordes.
Une forme de chant populaire vraiment typique du Rajasthan est le maand. Pas tout à fait raga à part entière, c’est un style sophistiqué de chant que l’on retrouve dans la musique folklorique de la région, narrant la grandeur des héros et rois rajputs du passé. Certains interprètent de maand ont acquis une notoriété nationale comme Allah Jilai Bai, chanteuse célèbre dans les années 1960 et 1970. Sa carrière débute alors qu'elle n'a que 10 ans puis elle a progressivement gagné en popularité dans tout le pays. En 1982, le gouvernement indien lui a même décerné le « Padma Shri », une haute distinction honorifique.
Côté danses, le Rajasthan est sans surprise un vrai trésor. L’une des plus célèbres est la kalbelia, l’une des formes chorégraphiques les plus sensuelles du Rajasthan. Exécutée aussi bien par les hommes que les femmes de la communauté du même nom, cette danse est un pilier de son identité et continue de célébrer ses moments heureux. Les Kalbelias étaient autrefois des charmeurs de serpents, chose discernable dans le tourbillonnement de la chorégraphie reproduisant le mouvement du reptile sur un rythme s’accélérant crescendo. Les musiciens accompagnent les danses avec du pungi, un instrument à vent en bois traditionnellement joué pour capturer des serpents, le daf, un grand tambour, le khanjari - un tambourin, le morchang, une guimbarde et le dholak un autre long tambour. Ces chants - tirés de récits folkloriques et mythologiques - et danses sont transmis oralement de génération en génération car il n'existe aucun texte ni manuels de formation. En 2010, ils ont été inscrits sur la liste du patrimoine immatériel de l'UNESCO. Quiconque se rend au Rajasthan durant le Holi, la fête des couleurs dédiée à Krishna, a de grandes chances de voir danser la kalbelia.
Autre pratique célèbre du Rajasthan : le kathak. Originellement uniquement masculine, cette danse narrative est aujourd’hui interprétée également par les femmes. Pilier des danses classiques du pays, le kathak a historiquement une importance sociale puisqu’elle contait autrefois la mythologie indienne - et permettait aussi de transmettre les textes sacrés à un public illettré. Originaire du nord, le kathak a subi l’influence artistique musulmane des Moghols. C’est une danse très rythmée qui requiert de vraies qualités athlétiques pour conserver une certaine grâce malgré la vitesse d’exécution. Reconnaissable à ses pirouettes entrecoupées de moments d'immobilité, le kathak a vu quelques personnalités se distinguer dans sa pratique, comme Birju Maharaj ou Maya Rao, devenus deux de ses plus célèbres danseurs. Il a également été porté sur le devant de la scène par le chorégraphe anglais Akram Khan, qui l’a fusionné avec la danse contemporaine occidentale.
Toujours parmi les pratiques chorégraphiques célèbres, le ghoomar est une danse généralement associée à la communauté Bhil mais aujourd’hui adoptée par l’ensemble du Rajasthan. Danse gracieuse et lente, elle voit des femmes voilées au niveau du visage tournoyer, habillées de robes fluides, accompagnant leur chorégraphie de gestes de mains particulièrement expressifs. Le ghoomar est souvent exécuté lors d'occasions spéciales, comme les mariages ou les événements religieux et peut parfois durer très longtemps. Il existe un sous-genre appelé « gair ghoomar » traditionnellement exécuté par les hommes, voyant les danseurs former des cercles et tourner sur eux-mêmes en entrechoquant des bâtons au rythme de la musique.
Comprenant aussi des bâtons, le dandiya ou dandiya raas est une danse mixte très colorée et populaire. Elle voit hommes et femmes danser par paires, en général en formant deux lignes, les partenaires se faisant face. Les lignes se meuvent dans le sens des aiguilles d'une montre, chaque danseur s'avançant au fil du rythme pour frapper les bâtons de son partenaire.
Quelques autres belles danses à mentionner : le chakri, associé à la communauté kanjar et exclusivement féminine et très tourbillonnante ; la mayur, provenant du sud du Rajasthan, dansée traditionnellement pour célébrer la mousson et rendre hommage à Shiva ; le bhavai, danse appelant autant d’habileté que d’agilité, exécutée par une femme portant 6 à 7 pots en cuivre ou en terre sur la tête tout en exécutant une chorégraphie ou en plaçant ses pieds sur de la vaisselle, du verre brisé ou le bord d’une épée, ou encore le kachhi ghodi, danse masculine figurant les histoires de bandits de la région de Shekhawati et voyant ses protagonistes exécuter la danse en montant des chevaux factices.
Pour aller à la rencontre des traditions rajputes certains événements sont particulièrement indiqués comme la fameuse Foire de Pushkar. Très populaire, la foire aux chameaux de Pushkar s’est peu à peu transformée en grand cirque touristique. Une occasion unique d’assister à de nombreux spectacles traditionnels : danses, musique, marionnettes, fête foraine et cirque… Dans un autre esprit, le Matasya Festival d’Alwar est l'un des rendez-vous les plus importants du Rajasthan, destiné à célébrer la culture populaire et rendre hommage aux ancêtres avec au programme chants et musiques traditionnelles. Enfin, le Desert Festival de Jaisalmer, organisé par l’office de tourisme du Rajasthan pour célébrer la pleine lune, est également l’occasion de nombreux spectacles de danses et de musiques traditionnelles.

La musique classique

Loin de l’acception occidentale du terme, la musique classique indienne est un genre très codifié, scindé en deux traditions majeures : la musique classique indienne du Nord appelée « musique hindoustanie » et celle du Sud, la musique carnatique. Ces deux familles n’ont longtemps fait qu’une, chose palpable dans le socle commun qu’elles partagent. Cela dit, quelques différences majeures les distinguent, la musique hindoustanie encourageant l'improvisation et explorant tous les aspects d'un raga tandis que sa fausse jumelle carnatique appelle plutôt des formes courtes et basées plus strictement sur la composition. Aussi, les influences des deux familles divergent. Au Sud, côté carnatique, elles sont très liées aux thèmes religieux hindous tandis qu’au Nord, la musique est plus marquée par l’influence profane des cours mogholes et des artistes venus d’Iran. Abdul Rashid Khan, dit « Rasan Piya » fut le grand représentant de la musique hindoustanie, Aruna Sairam et Amritha Murali sont celles de la musique carnatique.
L’orchestre comprend généralement un soliste (joueur de sitar, sarod, sarangi, violon, satara, flûte traversière en bambou ou simplement un vocaliste), un joueur de tabla (percussion du nord de l’Inde composée de deux tambours de tailles différentes et frappés avec les doigts ou la main) et un accompagnateur au tampura (instrument à cordes pincées servant de basse continue). L’une des spécificités de la musique classique indienne est qu’elle ne s’écrit pas mais se transmet de maître (pandit) à élève.

La musique populaire

Le Rajasthan a vu naître une constellation d’artistes populaires dans tout le pays. Parmi eux, Swaroop Khan est l'un des plus appréciés. Parfumant la tradition manganiyar de pop occidentale, ce chanteur s’est fait connaître après avoir concouru dans une des premières saisons d'Indian Idol. Depuis, il a enchaîné quelques succès dans l'industrie bollywoodienne. A Bollywood toujours, Ila Arun est à la fois chanteuse folklorique rajasthanie renommée et actrice indienne. Elle est connue pour sa voix solide et grave. Pour former un trio bollywoodien, citons également le célèbre Mame Khan, chanteur folklorique présent dans de nombreux films comme Luck by Chance (Zoya Akhtar, 2009) ou Sonchiriya (Abhishek Chaubey, 2019).
Autre sensation, Ashok Manda Bishnoi, connu sous son nom de scène Rapperiya Baalam, est un chanteur du Rajasthan connu pour ses morceaux de rap joyeux et bienveillants comme sa chanson Mharo Rajasthan qui l'a rendu populaire dans tout le pays. Enfin, citons le duo Sartaj et Sarwar, deux jeunes garçons qui ont commencé leur carrière en chantant dans une émission de téléréalité et qui ont doucement mais sûrement acquis une reconnaissance nationale.