Guide de KINSHASA : Mode de vie

Vie sociale
Education

Le système scolaire congolais tire ses origines du modèle belge. Il est organisé conformément à la loi-cadre sur l'éducation nationale : maternelle (3 ans) ; primaire (6 ans) ; secondaire général, technique ou scientifique (6 ans) ; supérieur et universitaire (3 ans en cycle court, 2 ans de licence/master). Mais alors qu'elle possédait l'un des réseaux scolaires les plus performants d'Afrique et un taux d'alphabétisation exemplaire, la RDC a vu son système scolaire se dégrader au fil des ans.

L'enseignement est donc nettement au rabais actuellement et le système est gangrené par la corruption généralisée. Les parents ne peuvent plus payer le minerval trimestriel de leurs enfants, ce qui fait que les enseignants ne sont pas, ou irrégulièrement, payés, ceci expliquant aussi cela... Un réseau parallèle d'écoles privées existe pour ceux qui ont les moyens, ceux-ci envoyant le plus souvent leur progéniture étudier à l'étranger, ce qui contribue à cette fameuse fuite des cerveaux...

Auparavant, l'éducation était une charge collective garantie par la famille et la société, les parents du quartier ou du village pouvant suppléer à l'éducation des enfants... Ce phénomène a été perturbé par la longue crise économique et politique.
 Certaines familles, qui ne peuvent plus compter ni sur l'école ni sur les structures sociales traditionnelles pour assurer l'éducation de leurs enfants, se désinvestissent à présent de ce rôle.

Sans oublier le sacrifice financier que représente l'envoi d'un enfant à l'école... Ces enfants sont alors formés sur le tas, comme apprentis dans les commerces et les petites entreprises de la ville, quand ils ne rejoignent pas les rangs des "shégués" (enfants des rues) avec les conséquences dramatiques que l'on imagine sur la société congolaise de demain...

Ceci dit, le système éducatif à Kinshasa présente tout de même quelques offres de formation valables, essentiellement pour qui veut travailler dans le pays (l'équivalence et la valeur des diplômes nationaux n'étant pas toujours reconnues à l'étranger). Kinshasa compte une importante population universitaire, souvent détentrice de plusieurs diplômes de deuxième ou troisième cycle, et ce malgré les pratiques clientélistes déjà évoquées (ces fameuses CST, les "cotes sexuellement transmissibles"...).

Parmi les instituts et filières phares de l'enseignement supérieur à Kin, on peut citer : l'Institut Supérieur Pédagogique (ISP/Gombe), l'Institut Supérieur des Techniques Appliquées (ISTA), l'Institut Supérieur des Arts et Métiers (ISAM), l'Académie des Beaux-Arts, l'Institut National des Arts (INA), l'Institut Supérieur de Commerce (ISC), l'Institut du Bâtiment et des Travaux Publics (IBTP), l'Institut Supérieur d'Etudes Agronomiques, l'Institut National de Préparation Professionnelle (INPP), et tant d'autres.

Quant à l'enseignement universitaire, Kinshasa compte l'une des quatre universités officielles du pays avec l'Université de Kinshasa (UniKin), ainsi que l'Université Pédagogique Nationale (UPN). On compte aussi de nombreuses organisations confessionnelles : Facultés catholiques de Kinshasa, Université protestante au Congo, Université Simon Kimbangu, Université William Bôoth (Armée du Salut), Université Révérend Kim, etc. Parmi d'autres : Université Libre du Congo (ULK), Université Bel Campus...

Famille

La famille au Congo est reconnue par la Constitution ainsi que par le code de la famille comme la cellule mère de la nation. Si la naissance est toujours considérée comme une bénédiction parce qu'elle assure la pérennité du clan, la mort apparaît comme un désastre, et le mariage un pont entre les familles. Ces cérémonies sont l'occasion de faire le point sur l'état de la famille et de résoudre les différends éventuels au sein de celle-ci. Ces rassemblements sont en général présidés par la personne la plus âgée et donnent lieu à des retrouvailles et réjouissances. 


Dans l'espace et dans le temps, le lien familial est un mode pertinent d'organisation sociale avec comme structure permanente, à la fois virtuelle et physique, la "maison" qui regroupe tous ceux qui se trouvent autour d'un même "feu". La famille nucléaire est donc la "famille foyer" fondée sur une alliance entre deux familles "sang", masculine et féminine, quel que soit le régime de parenté.

Elargie aux différents degrés de parenté, la famille est considérée à la fois comme unité de production et d'intégration sociale. Son organisation résulte du besoin de conservation du groupe social formant une structure et de sa dépendance au milieu naturel. 
La forte solidarité qui se manifeste entre les membres de la famille élargie a pour objectif de bannir l'individualisme conduisant à l'exclusion sociale.

Mais une rupture s'est opérée au sein de la cellule familiale élargie, avec les changements économiques et l'urbanisation du pays. Cette rupture se matérialise par un déclin progressif des solidarités traditionnelles, de l'individualisation conduisant parfois à la marginalité dont les formes les plus graves sont la délinquance, la prostitution, l'abandon des enfants ou des personnes âgées. La famille congolaise est aujourd'hui confrontée à un dualisme culturel, entre le souci de conserver son identité culturelle et la nécessité de s'intégrer dans un monde en pleine mutation influencé par la culture occidentale.

Parenté et lignage

Deux régimes de parenté sont observés : le régime patrilinéaire et le régime matrilinéaire. La plupart des communautés congolaises sont devenues patrilinéaires de par l'influence coloniale. Dans ce système, la descendance se marque par les hommes. Puisque seuls les hommes transmettent la parenté, les enfants d'une femme ne font pas partie de sa parenté mais de celle de son mari.

Dans le système matrilinéaire ou matriarcat, la parenté se transmet par la femme : le statut social et l'héritage passent non pas d'une mère à ses filles mais des frères de la femme aux frères de ses filles. C'est le frère de la mère, l'oncle maternel, qui exerce l'autorité. La plupart des sociétés du Kongo Central fonctionnent encore sous ce régime, où la femme elle-même occupe tout de même un certain pouvoir au sein de son clan (chef coutumière...).

La forte solidarité qui caractérise la société congolaise dépend de l'ethnie et de son héritage culturel comme la langue et d'autres codes sociaux partagés par ses membres, ainsi que du lignage. Cette famille "sang" est de taille variable : c'est le regroupement de tous ceux qui ont conscience de la relation de consanguinité qui les unit et qui se considèrent comme descendants d'un ancêtre commun à partir duquel ils peuvent reconstituer une généalogie. Chaque individu a un rôle et une place bien déterminés au sein de cette communauté, qui lui sont transmis par son âge, son appartenance familiale, son origine sociale, son appartenance ethnique, sa caste, etc.

Le clan reste le socle regroupant des identités diverses ayant conscience d'appartenir à une même souche, même si la plupart du temps elles sont dispersées suivant des fortunes diverses. Les noms des clans sont des mots anciens, chargés d'histoire et qui désignent des noms soit d'ancêtres, soit de lieux mythiques. Le clan est doté d'une identité propre, bien établie et entretenue, qui ne peut souffrir d'aucune confusion.

Place de la femme

La femme congolaise urbaine, singulièrement la Kinoise issue de la classe moyenne, s'est relativement affranchie d'une série d'obstacles à son épanouissement, principalement d'ordre sexiste et en lien avec la tradition. Elle est aujourd'hui dépouillée de tout complexe, de l'université au bureau en passant par les affaires ou la politique. Du moins pour celle qui en a les moyens (scolarisation adéquate), car pour la plupart des femmes, les impératifs de survie économique restent un frein à la pratique d'autres activités en dehors des métiers de coiffure, couture, cuisine (les "3 C") ou de la vente au marché et au détail, et dans lesquelles les femmes congolaises sont souvent cloisonnées, par nécessité économique, faute d'autres débouchés ou d'instruction. Ce sont en effet souvent les femmes qui ramènent les revenus du ménage, dont elles assurent la gestion en bonnes mères de famille, avec une rigueur et un pragmatisme souvent exemplaires.

Les droits fondamentaux des femmes congolaises sont depuis peu pris en compte à un haut niveau de l'Etat, avec la création d'un "ministère du Genre, Famille et Enfant", dirigé par une femme. Celles-ci ont à présent officiellement droit à l'alphabétisation et peuvent librement, et à l'âge voulu, choisir leur partenaire ou le quitter sans perdre leurs droits.

La Constitution de la Troisième République consacre par ailleurs la parité entre les hommes et les femmes, tout en renforçant le rôle d'épouse et de mère, même si le frein le plus important à l'épanouissement des femmes au Congo reste la gestion des naissances et de la sexualité. Des campagnes en ville dénoncent une certaine dépravation des moeurs à l'oeuvre chez les jeunes Kinoises, pour les inciter à refuser des relations sexuelles en échange de cadeaux ou d'argent, de la part le plus souvent d'hommes mariés plus âgés, et dont elles deviennent dépendantes financièrement. Cette forme de prostitution ordinaire est un véritable fléau en ville, et un sacré frein à l'émancipation complète des femmes, ainsi qu'au bon équilibre de la société congolaise.

Révision du Code de la Famille

Sous la pression d'associations locales et d'ONG internationales, une révision du Code de la Famille de 1987 est en cours au sein du Parlement pour adapter une série de mesures afin de "mettre un terme à certaines pratiques rétrogrades, avilissantes et discriminatoires à l'égard de la femme et de l'enfant congolais" (selon les recommandations du Renadhoc, plate-forme nationale regroupant 750 ONG des droits de l'Homme en RDC).

Ces discriminations, à amender, sont notamment les suivantes :

l'obligation pour les femmes d'obtenir le consentement de leur époux pour tout acte juridique ; l'époux étant le chef de la famille ; le choix du lieu de résidence par l'époux

définition plus étendue du délit d'adultère pour les femmes que pour les hommes ; l'obligation pour la femme d'obéir à son époux ; la détention du livret de famille par l'époux

la différence entre l'âge minimum du mariage pour les filles et les garçons, qui doit être porté à 18 ans ; la persistance des pratiques telles que le mariage précoce, la polygamie et le lévirat, et les pratiques discriminatoires en ce qui concerne le legs de biens fonciers

la reproduction doit tenir compte de l'état de santé des époux : ceci vise à décourager toute conception selon laquelle la femme est une "machine à faire des enfants", et à éviter toute relation sexuelle forcée au sein du ménage

la femme doit contribuer au développement au même titre que l'homme et a donc le droit, conformément au point 17 de la Déclaration de Beijing de 1995, de maîtriser sa fécondité dans ce but

éviter la hiérarchisation des enfants entre ceux nés dans le mariage, ceux nés hors mariage mais affiliés du vivant de l'époux, les enfants que celui-ci a adoptés ainsi que les enfants à père juridique. Ces enfants deviennent tous égaux vis-à-vis des parents, et ont les mêmes droits et devoirs à leur égard.

Mœurs et faits de société
Deuil

Le mot désigne ici tout autant la perte de l'être cher que les funérailles. Le rituel des funérailles est empreint de tradition, mais on constate qu'il évolue en s'adaptant à des contingences d'ordre pratique en ville, où il n'est pas rare de manifester sa peine à grand renfort de musique tonitruante et de libations qui peuvent durer toute la nuit... A l'occasion du deuil, certaines familles dépensent des fortunes pour honorer le mort et manifester leur perte.

A Kinshasa, le décès est un moment de réjouissance. Le corps du défunt est exposé dans un lieu public, sa résidence étant bien souvent trop exiguë pour accueillir la multitude de personnes, proches ou anonymes, venues assister aux cérémonies. Les manifestations sont entrecoupées de pleurs, de chants, de séances de prière, et de moments plus festifs. L'inhumation se fait le lendemain.

Celle-ci est souvent suivie de concertations familiales pour résoudre les litiges éventuels (cause du décès, partage de l'héritage, prise en charge des enfants et de la veuve...). La mort, surtout quand il s'agit d'un proche, a en principe une cause qui doit être décelée, ce qui donne lieu à de nombreux abus, en rapport avec l'essor des Eglises de réveil qui désignent en général un responsable : l'ancêtre mécontent, le mauvais oeil ou la présence d'un "enfant sorcier" dans la famille...

Jusqu'à il y a peu, les veillées mortuaires s'étendaient souvent sur une période de 7 à 14 jours mais avec la crise économique, le corps reste maintenant à la morgue le temps de réunir les fonds et de trouver l'endroit où l'exposer. Une fois toutes ces formalités remplies, le corps est récupéré pour être exposé à l'endroit désigné sous une chapelle ardente, non sans faire le détour par la résidence du défunt ainsi que son lieu de travail.

Pour les cérémonies de fin de deuil, communément appelées "quarantième jour", c'est l'occasion pour les amis, les membres de la famille et les différents groupes, auxquels le défunt avait appartenu, de rivaliser par le port de tenues qui les distinguent les uns des autres. C'est davantage pour des raisons économiques que toutes ces cérémonies ont été réduites, même si le deuil continue en famille pendant plusieurs jours. Les membres de la famille venus de loin restent en général encore quelques jours pour se réconforter et financer une partie des frais.

Homosexualité

L'homosexualité n'est pas particulièrement tolérée ni bien accueillie au Congo, comme ailleurs en Afrique, au sein de sociétés encore relativement traditionnelles et fortement influencées par la religion qui condamne cette orientation sexuelle considérée comme déviante et immorale. Kinshasa et les grandes villes sont à peine plus progressistes à cet égard par rapport aux zones rurales... Il est donc préférable de rester discret, tant pour les Congolais que pour les étrangers. La plupart des hôtels locaux n'hésitent pas non plus à appliquer une forme de discrimination en prévoyant un supplément à payer pour l'occupation d'une même chambre par deux personnes du même sexe.

Que l'on soit un couple hétéro ou gay, congolais ou étranger, les marques d'affection et gestes amoureux se doivent d'être relativement discrets en rue ou dans les lieux publics. Même si en boîte ou dans les bars-terrasses, c'est autre chose... Par ailleurs, on voit souvent en ville deux hommes ou deux femmes adultes se tenir la main, ce qui ici ne signifie nullement qu'ils soient en couple, c'est simplement une marque d'affection assez courante entre amis.

Peine de mort

Font partie des délits passibles de la peine de mort : l'homicide, la trahison, l'espionnage et les délits contre l'Etat... sur un total de 79 chefs d'accusation. Au début des années 1990, la législation du pays était l'une des plus sévères en matière d'exécution des peines. Une lueur d'espoir est apparue en 1999 lorsque le ministre des Affaires étrangères de l'époque, She Okitundu, a mis en place un moratoire sur la peine de mort, qui sera révoqué en 2002 par le gouvernement de Joseph Kabila. En 2005, les députés congolais approuvent une nouvelle Constitution qui ne mentionne plus la peine de mort mais reprend néanmoins les anciens codes, notamment le code pénal, qui eux la mentionnent toujours... A l'heure actuelle, la peine capitale n'est donc pas abolie dans le droit puisque le terme apparaît toujours, mais est commuée d'office en peine à perpétuité. Cette position ambivalente illustre la difficulté de Kinshasa à y mettre un terme pour de bon, alors qu'elle a ratifié plusieurs traités sur la justice internationale et les droits humains, dont le Statut de la Cour pénale internationale (qui interdit le recours à la peine de mort).

Superstition et discrimination

La société kinoise compte de nombreux exclus et marginaux, que ce soit du fait de superstitions et croyances séculaires, ou d'absence de sécurité sociale et de structures d'accueil adaptées. Parmi les victimes de cette discrimination, on compte les personnes atteintes d'albinisme. Jusqu'à il y a peu, celles-ci étaient pourchassées, voire mutilées ou assassinées en raison de pratiques et croyances occultes et traditionnelles, liées au mauvais sort, ou de pouvoirs prétendus magiques que ces personnes posséderaient... Ces pratiques tendent heureusement à disparaître, et il semblerait que, de nos jours, ceux-ci soient mieux tolérés et acceptés au sein de la société kinoise.

Autre croyance aux conséquences sociales désastreuses : celles qui concernent les enfants accusés de sorcellerie, ou "ndokis". Ce phénomène s'est développé au milieu des années 1990 avec l'apparition des sectes religieuses. Des familles précarisées tiennent pour responsable de maux quelconques (maladie, décès, divorce...) un de leurs enfants qui est taxé de sorcier et devient rapidement maltraité avant d'être rejeté et abandonné, quand ils ne sont pas "désensorcelés" au moyen de pratiques proches de la torture... Des associations sont actives en ville pour tenter d'instaurer une médiation avec les familles, mais beaucoup de ces enfants rejoignent les rangs des nombreux shégués, ces enfants des rues survivant de mendicité et de petits larcins qui hantent le centre-ville, victimes eux aussi d'exclusion et d'abandon.

Kinshasa compte également de nombreux invalides et handicapés, suite notamment aux ravages de la polio, toujours active dans cette contrée. Ceux-ci se regroupent en général, et survivent comme ils peuvent. La plupart font preuve d'un courage exemplaire, construisant des fauteuils roulants originaux actionnés par les bras au moyen de pédales de vélo, et faisant office de coursiers notamment entre Brazzaville et Kinshasa. La success story des membres du groupe de musique Staff Benda Bilili, quasiment tous invalides et qui se produisent à présent sur toutes les scènes du monde, a permis de changer quelque peu le regard que les Kinois portent sur ces exclus et marginaux.

Tenues vestimentaires

Lors du retour à l'authenticité prôné par Mobutu dans les années 1970, celui-ci imposa le port de l'abacost ("à bas le costume") pour les hommes, et le port du pagne pour les femmes. Le premier - qui consiste en un costume pantalon avec veston à manches courtes porté sur un simple t-shirt blanc ou une chemise légère sans cravate - est globalement délaissé au profit du costume cravate à l'occidentale. Le pagne féminin par contre est toujours largement plébiscité, et "fait" la femme congolaise, réputée pour l'élégance de ses tenues, et dont il contribue en principe à "l'intégrité".

En souvenir des tissus anciens des ethnies traditionnelles, on en est arrivé à adopter ce rectangle de tissu imprimé lequel, drapé autour de la taille, couvre le corps des hanches aux genoux ou aux pieds. Soumis à différents codes dans la façon de l'attacher, le pagne est également destiné à de multiples usages : porte-bébé, couverture, linceul, couvre-chef, etc.

Il est aussi devenu un instrument de transmission de messages : proverbes, motifs particuliers, convictions politiques ou religieuses, de "l'oeil de ma rivale" au célèbre "mon mari est capable", en passant par le classique ABC, ou le récent "chignon de la princesse Mathilde".

Si le Congolais a principalement adopté le costume européen au détriment de l'abacost, la femme par contre manifeste très souvent son élégance et sa réussite sociale par le port du pagne. Simple pagne porté par les femmes africaines au départ, le tissu wax est même devenu en l'espace de quelques années une étoffe tendance des podiums de mode.

La sape

Ou la "Société des Ambianceurs et Personnes Elégantes". Cet acronyme désigne ce mouvement au départ purement d'ordre vestimentaire mais qui atteint une dimension sociale et culturelle. C'est à l'époque coloniale que naît cette association mentale qui instaure la primauté de l'élégance et de la sophistication comme signes extérieurs de pouvoir et de légitimation sociale, mais c'est réellement à partir des années 1980 que le mouvement prend de l'ampleur avec un certain Papa Wemba notamment, considéré comme ambassadeur de la sape. Toute une génération se met alors à vénérer les fringues de marque et les accessoires de luxe venus d'Europe. Aujourd'hui, ce phénomène s'est métamorphosé en une forme de spectacle de rue extravagant entre la performance et le folklore. C'est même devenu une religion, dénommée "Kitendi" (Tissu), et fondée par le Kinois Stervos Niarkos autoproclamé "pape de la sape", sur la tombe duquel tous les sapeurs viennent se recueillir chaque 10 février dans le cimetière de la Gombe (le spectacle vaut la peine !).

Mais la sape, c'est bien plus qu'un simple mouvement de jeunes qui s'habillent de façon ostentatoire, ou d'une extravagance gratuite. C'est devenu "un combat symbolique contre la misère terne dans laquelle ils vivent" (selon le photographe Yves Sambu). Ce phénomène est propre aux deux Congo, même si des différences sont apparues entre deux tendances (la sape à Kin et la sapologie à Brazza). La sape commence même à attirer l'attention de grands créateurs, qui s'en inspirent pour leurs créations. De nombreux documentaires et reportages étrangers lui sont régulièrement dédiés, consacrant l'originalité et la fantaisie des Kinois, de leur culture et de leurs codes sociaux.

Patience et longueur de temps…

Ici, c'est sûr, on prend le temps. Que ce soit pour bavarder, refaire le monde, prendre un verre, draguer, faire son marché... ou tout simplement rêver. Une expression locale affirme qu'en Europe, on a l'heure, mais qu'ici on a le temps ! A méditer... Les nombreux embarras de circulation à Kinshasa contribuent aussi à rendre le temps plus élastique, et les heures de rendez-vous approximatives, parmi d'autres contraintes extérieures liées au transport ou au climat notamment.

Un autre concept associé au temps et à cette langueur kinoise caractéristique - et dont il vous faudra faire preuve en de nombreuses circonstances -, c'est la patience et la zénitude, l'arme ultime qui vous permettra bien souvent de passer à travers toutes les situations et tracasseries potentielles. Ça risque même de se finir dans la bonne humeur, sans avoir déboursé un franc en prime. Les Kinois, êtres sociaux par excellence, aiment avant tout l'interaction et nouer des relations.

De plus, ce qu'on pourrait prendre pour une forme d'oisiveté s'explique aussi par le sous-emploi et l'énorme taux de chômage à l'oeuvre au sein de la population kinoise, qui n'a souvent rien de mieux à faire que de traîner dans la rue ou en terrasse en attendant des jours meilleurs, même si la plupart font preuve d'un sens de la débrouille et d'une inventivité sans pareille pour gagner quelques francs en échange de travaux souvent pénibles.

Religion

La Constitution de 2006 a reconnu la RDC comme un Etat laïc, mais nul ne peut nier que la religion est très présente dans la vie quotidienne, quelle que soit la confession. C'est particulièrement visible et prenant à Kinshasa. Parmi les plus représentées, par ordre d'importance : la religion catholique (50 %), la religion protestante (20 %), le kimbanguisme (10 %), l'islam (5 %) et l'Eglise orthodoxe (moins de 5 %), auxquelles s'est ajouté le culte évangélique inspiré des Eglises de réveil (10 %) que l'on trouve partout au Congo et à Kinshasa, et qui recueille l'extrême ferveur (et désespoir) de la plupart des habitants au détriment des cultes classiques plus établis. Les Congolais n'ont cependant pas renoncé de manière absolue aux cultes traditionnels qui, par syncrétisme religieux, se mélangent à des cultes plus officiels et restent assez ancrés. Et qui influencent encore fortement la vie politique et sociale du pays.

Catholicisme

La première campagne d'évangélisation est concomitante à la découverte de l'embouchure du fleuve Congo en 1482 par le navigateur portugais Diogo Cão. A sa suite, les missionnaires européens catholiques et protestants ont pénétré le territoire dès le XIXe siècle, au gré des différentes vagues d'évangélisation, parfois brutales, des populations locales. Les premiers missionnaires belges (Pères Blancs) arrivèrent au Congo en 1888. Dès la création de l'Etat indépendant du Congo, l'Eglise s'est vu attribuer, outre une mission d'évangélisation, un rôle de civilisation des populations. Cette tâche comprenait notamment l'éducation, la santé et l'apprentissage de certaines activités économiques aux populations locales. Par la suite, la religion catholique, si bien ancrée, a continué à prospérer, s'imposant comme le culte principal aux dépens des cultes traditionnels, même si elle est aujourd'hui quelque peu en perte de vitesse - quoique toujours majoritaire - par rapport à la grande ferveur que suscitent les Eglises de réveil et autres avatars locaux évangélistes.

Kinshasa est l'un des six archidiocèses de l'Eglise catholique au Congo, qui administre elle-même de nombreux diocèses locaux. L'Eglise congolaise est chapeautée par la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO), c'est l'assemblée dans laquelle les évêques catholiques exercent conjointement leur charge pastorale. Ceux-ci se réunissent également au sein des assemblées épiscopales provinciales.

Protestantisme

Les premiers missionnaires de la Baptist Missionnary Society (BMS) arrivent au Congo en janvier 1878. En février, les pasteurs Graven et Telford de la Livingstone Inland Mission débutent l'oeuvre évangélique à Palabala dans la province du Kongo Central. Sachant que le pilier de la présence belge était l'église catholique, le mouvement protestant s'organise par étapes successives et consolide son action, notamment par l'identification du Congo comme le plus grand champ missionnaire au monde et par la construction de l'Union Mission House, une hôtellerie commune à toutes les missions protestantes au Congo.

En 1924, le Conseil Protestant du Congo voit le jour en vue d'harmoniser l'oeuvre évangélique et consolider l'unité des chrétiens protestants. Dix ans après, les instances de l'Eglise adoptent l'appellation d'Eglise du Christ au Congo en lieu et place du Conseil Protestant du Congo. Depuis lors, de réformes institutionnelles en regroupements, l'ECC s'est consolidée, les différentes missions devenant des sections de l'Eglise sous la conduite d'un président national. L'ECC compte environ 320 000 paroisses, 4 560 écoles primaires, 1 860 écoles secondaires, et une quarantaine d'institutions d'enseignement supérieur et universitaire à travers la RDC. Monseigneur Marini Bodho est l'actuel président national de l'Eglise du Christ au Congo.

Kimbanguisme

C'est la première Eglise non missionnaire fondée en Afrique, résultant d'un syncrétisme entre le protestantisme et la tradition africaine. Simon Kimbangu (1887-1951) reçoit le message divin à Nkamba au Kongo Central et commence sa mission en 1921, en appelant le peuple à s'émanciper de la tutelle de la colonie. Assez rapidement, il est emprisonné au Katanga où il meurt à plus de 2 000 kilomètres de son fief. Eparpillés à travers le pays, les fidèles de Kimbangu continuent de prêcher le message du prophète : c'est la naissance de l'église kimbanguiste. En 1959, la Belgique reconnaît officiellement le culte qui est admis en 1960 par le Conseil oecuménique protestant. Elle prend la dénomination de l'Eglise de Jésus-Christ sur la Terre par son envoyé spécial Simon Kimbangu.

De 1976 à 1981, les trois fils de Simon Kimbangu font ériger à Nkamba - la cité sainte du kimbanguisme aussi appelée "La Nouvelle Jérusalem" - un temple dont la construction aura duré cinq ans, et qui peut accueillir 37 000 personnes, ainsi que le centre d'accueil kimbanguiste à Kinshasa, dans la commune de Kasa-Vubu. L'Eglise kimbanguiste compte aujourd'hui 17 millions de membres répartis en Afrique subsaharienne, principalement en RDC où elle représente dix millions de croyants, faisant de ce culte la troisième religion nationale. Les ministres du culte sont des pasteurs protestants nommés par le chef spirituel ou par un pasteur mandaté par celui-ci.

Au fil du temps, l'Eglise s'est structurée en faisant coexister plusieurs mouvements socioculturels en son sein, dont le fameux Orchestre Symphonique Kimbanguiste (OSK : voir par ailleurs). Voir aussi "Nkamba" dans le chapitre Kongo Central.

Islam

La présence discrète de la religion musulmane est surtout remarquée à l'est, dans les régions frontalières de pays tels que la Tanzanie et le Soudan, ainsi que dans la province du Maniema, considérée comme le berceau de l'islam au Congo. Cela s'explique par des raisons historiques liées à l'occupation arabe de cette région au XIXe siècle au cours des campagnes esclavagistes. Dans les autres coins du pays, l'islam reste surtout la religion des Waras ou Ndingaris, des membres de la communauté ouest-africaine pratiquant souvent le commerce dans les villes congolaises, dont Kinshasa.

Quelques mosquées sont implantées dans les zones où les Waras habitent et commercent dans la capitale congolaise, comme à Barumbu, Lingwala ou Zone ya Kin. La religion musulmane est représentée par la plus haute instance islamique, la Communauté Islamique en RDC (COMICO), qui rassemble tous les musulmans, sans distinction de races, d'ethnies ou nationalités.

Par ailleurs, des rumeurs de recrutement et d'endoctrinement circulent en ville. On raconte que de nombreux jeunes Kinois se convertissent à l'islam par opportunisme, en échange de promesses d'argent ou d'un travail... Un terrain certes fertile, qui pourrait faire le lit d'un possible radicalisme en ces heures troublées...

Eglises de réveil

Inspirées par le mouvement pentecôtiste aux Etats-Unis et par la mouvance du Renouveau charismatique, ces Eglises de réveil se déclarent issues du christianisme. L'émergence de ces communautés et Eglises au Congo est révélateur d'une société en pleine mutation et en recherche de repères. Plusieurs de ces communautés ont une doctrine ou des enseignements adaptés par des pasteurs indépendants tandis que d'autres font partie de dénominations structurées. Appelées aussi Eglises évangéliques, leurs pasteurs n'encouragent certes pas le voeu de pauvreté... Les thèmes abordés sont dans une très grande majorité ceux de l'Ancien Testament (bien qu'ils portent le nom évangélique) mais les pasteurs suivent également les enseignements de Jésus-Christ.

Considéré comme une réponse de Dieu à son peuple face à la crise multiforme qui sévit dans le pays depuis plusieurs décennies, le réveil spirituel au Congo a sensiblement influencé le comportement des Congolais. Il n'échappe pas à certains écueils et excès, ses leaders profitant généralement de manière outrancière de la foi (crédulité ?) des fidèles, prêts à se raccrocher à n'importe quoi pour échapper à la misère de leur quotidien, ce qui amène à de nombreux abus de la part d'autoproclamés "pasteurs" : désensorcellements, séances de miracles dans des stades... Pour augmenter leur sphère d'audience et d'influence, ces Eglises disposent souvent de chaînes de radio et de télévision, ce qui contribue à leur succès.

Bundu dia Kongo (BDK)

Il s'agit d'un mouvement assez obscur, au croisement du politique, du culturel et du religieux, créé en 1969 par un certain Ne Muanda Nsemi, dans le sillage des prophéties de Simon Kimbangu. Ce mouvement entend lutter pour la défense et la promotion des droits et intérêts du peuple Kongo à travers le monde. BDK prône l'établissement d'un Etat fédéral "Kongo" en Afrique centrale et "l'éradication de l'injustice sociale et économique imposée au peuple Kongo par les gouvernements locaux".

Le mouvement a été reconnu par la Constitution congolaise de 2006, avant d'en être retiré suite à de sanglants affrontements en 2007 à Matadi, Boma et Moanda. Certains de ses membres exercent par ailleurs un mandat politique ou ont des velléités en ce sens (député, candidat à la présidentielle...). Parmi leurs propositions : restauration de la "sorcellerie positive", abolition des frontières coloniales qui ont séparé les "frères et soeurs issus d'ancêtres communs", réhabilitation de l'héritage spirituel et historique des Grands Ancêtres, etc.

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