Guide de KINSHASA : Kinshasa en 35 mots clés

Authenticité

Bien que le terme s'applique parfaitement à la destination, c'est dans un autre sens qu'on l'entend ici, celui de "zaïrianisation", soit cette campagne de recours à l'authenticité lancée par Mobutu dans les années 1970, visant à bannir tout ce qui pouvait rappeler l'Occident pour revenir aux valeurs profondes et aux attributs africains. C'est à cette occasion que le pays et le fleuve sont nommés Zaïre. Le maréchal prend également le patronyme de Mobutu Sese Seko, et oblige tous ses concitoyens à adopter des noms africains en ajoutant un post-nom. Il impose le port de l'abacost (costume à manches courtes) et du pagne notamment. Mais outre ces mesures quelque peu farfelues, la zaïrianisation comprenait surtout la nationalisation des biens commerciaux et fonciers d'étrangers, entraînant le départ des Européens et précipitant l'économie du Zaïre, alors florissante, dans sa chute.

Bière

C'est la boisson congolaise, et kinoise, par excellence. A Kin, pas de fête, réunion de famille ou simple échange sans bière ! On en trouve partout, jusqu'aux coins les plus reculés de la république, et elle est excellente. Héritage des "oncles" belges, on la produit toujours localement. Deux groupes brassicoles se disputent le marché avec leurs marques stars locales, promotionnées par les vedettes de la chanson congolaise : le groupe Heineken (Bralima) avec la Primus, et le groupe Castel (Bracongo) avec la Skoll. Mais elles produisent d'autres bières, tout aussi populaires, comme la Mutzig, la Turbo King, la Doppel, la Nkoyi... Choisir sa bière, c'est un peu choisir son camp et affirmer une forme d'identité. Et comme ici, on ne fait pas les choses à moitié, la plupart sont servies dans des bouteilles individuelles de 70 cl ! Va falloir assurer...

Bureau (2e, 3e...)

C'est toute la poésie du quotidien à la kinoise qui s'exprime ici... Le bureau, c'est le nom donné pudiquement à la maîtresse vivant le plus souvent aux crochets d'un mari adultère, qui est généralement numérotée : premier, deuxième, troisième... bureau, où celui-ci preste ses "heures supplémentaires". Il n'est pas rare que ces femmes aient des enfants de leur amant, composant ainsi des familles parallèles dans un contexte où la polygamie est plus ou moins tolérée - tant que l'homme est à même de subvenir aux besoins de tous ses "bureaux" - même si officiellement réprimée pour des motifs religieux notamment. Machisme oblige, il n'existe pas à ce jour de terme réciproque dédié aux "bureaux" masculins, ce qui est pourtant aussi une réalité, même si c'est nettement moins flagrant et revendiqué, voire carrément caché.

Cité

Impossible de déambuler à Kin sans entendre à tout bout de champ cette expression. Et sans s'interroger logiquement sur la localisation de cette entité qui semble si prégnante. Cela représente en fait la grande majorité de la ville : autrement dit les communes et quartiers dits populaires, par opposition au centre-ville (la Gombe) et aux quelques quartiers d'affaires ou résidentiels périphériques où se passe l'essentiel des activités économiques en ville. C'est clairement un héritage linguistique et urbanistique de la colonie, lorsque la capitale était divisée entre la ville européenne et la cité indigène, séparées par une ceinture verte ségrégationniste et sanitaire, censée empêcher la propagation du paludisme ou de la maladie du sommeil... C'est aussi le nom, dans un autre style, de ce complexe mégalo en construction à la dubaïote, appelé Cité du fleuve.

Délestage

Terme technique qui s'est ancré dans le langage courant et désigne les coupures régulières de courant dans le pays, selon le mode de fonctionnement adopté par les responsables de la SNEL (Société Nationale d'Electricité). Celui-ci consiste à brancher en alternance différents quartiers et régions, soit un système de vases communicants qui prive certaines zones d'électricité pour des périodes indéterminées, pendant qu'on en alimente d'autres, et ce de manière tout à fait variable et aléatoire. C'est la réalité quotidienne à Kin, alors que le pays aurait les moyens de fournir en électricité tout le continent au vu de ses énormes potentialités hydroélectriques. En attendant la fin des coûteux investissements et les phases finales de développement du fameux barrage d'Inga près de Matadi...

Diaspora

C'est la communauté de Congolais installés à l'étranger. Elle est assez importante, surtout en France et en Belgique. Ces dernières années, elle s'est illustrée en manifestant massivement dans les rues de Bruxelles ou Paris contre des actions controversées du président et du gouvernement. La diaspora congolaise a un rôle plus que symbolique de par son poids économique et intellectuel, et sa capacité à se mobiliser. On assiste depuis quelques années à un retour au pays, et à Kin, de jeunes diasporiens qui souhaitent investir leur temps, leur argent et leur énergie pour le Congo, voire découvrir leur pays d'origine pour ceux qui sont nés à l'étranger. Un vrai levier et un espoir pour l'avenir du pays, qui recommence à faire rêver... Les nationaux qualifient, non sans humour, ces compatriotes européens de "bounty" : noirs dehors et blancs dedans. A la chute de Mobutu, les Kinois les appelaient "diaspourris" en tant que supposés soutiens du régime, jugés arrogants et profiteurs.

Fleuve Congo

Artère naturelle mythique, qui a donné son nom au pays et permis sa découverte par les explorateurs portugais et belges. Indissociable de Kinshasa qu'il borde, et du Kongo Central qu'il traverse avant de se jeter avec fracas dans l'océan Atlantique. Il permet de belles échappées fluviales et escapades dominicales en périphérie de Kin... Cinquième au monde et deuxième du continent africain par sa longueur après le Nil, le fleuve Congo forme avec ses affluents le plus grand bassin derrière celui de l'Amazone. Cette artère majeure traverse le pays du sud au nord et d'est en ouest, avant de rejoindre l'océan au terme d'une course de 4 700 km. Le fleuve Congo (ex Zaïre) jouit par ailleurs d'un pouvoir symbolique fort et nourrit de nombreuses légendes (Mami Wata, pouvoir de guérison...). Il a aussi contribué au rayonnement du lingala à Kin et dans le pays, habituellement connu comme la langue des "gens du fleuve" (équateur).

Kitoko

"Bon" ou "beau" en lingala. De fait, y a de quoi se régaler gustativement et visuellement dans cette ville et dans ce pays culturellement si riches... C'est d'ailleurs le nom donné à la grande exposition "Beauté Congo Kitoko" dédiée à la RDC et célébrant ses beautés, qui s'est tenue à Paris à la Fondation Cartier pour l'art contemporain en 2015. Faisant la part belle à la création artistique au Congo, l'exposition se concentrait sur la peinture moderne dans les années 1920, mais rendait également compte de la richesse et du dynamisme créatifs du pays à travers la photographie et la musique contemporaines. Le catalogue publié à cette occasion constitue un ouvrage de référence sur la création artistique congolaise si unique. Quand enfin le Congo est célébré internationalement pour ses beautés et ses aspects positifs... Kitoko !

Kongo

Royaume originel composé des Bakongo (peuple kongo), qui occupait l'actuelle province du Kongo Central, le Kwango et Kwilu (ex Bandundu), ainsi qu'une partie du Congo voisin, de l'Angola et du Gabon. Des relations diplomatiques s'établirent avec la cour royale du Portugal au XVe siècle, suite à la découverte de l'embouchure du fleuve par Diogo Cão et son équipage. Le pays kongo était organisé en entités administratives extrêmement structurées et gérées par des chefs de clans, avec un pouvoir central basé à Mbanza Kongo. Les Bakongo composent une ethnie à l'identité et à la culture très riches et affirmées, ayant bénéficié de l'influence portugaise et d'un syncrétisme religieux et artistique. La province du Bas-Congo a retrouvé son nom initial, Kongo (Central), à la suite du redécoupage administratif de 2015. On y parle l'une des quatre langues nationales, le kikongo.

Léopard

Le léopard a une place importante dans certaines cultures africaines, et au Congo en particulier, où l'animal, considéré comme le roi des animaux, est l'attribut des chefs, à l'image de la fameuse toque de Mobutu. Au siècle passé, les hommes-léopards issus de la société secrète Aniota, popularisés par Tintin, ont aussi été à l'origine de nombreuses légendes de sorcellerie, ce félin étant considéré comme un messager entre les morts et les vivants, comme l'illustre son pelage tacheté. C'est aujourd'hui l'emblème du pays, présent sur les armoiries de la RDC avec la devise "Justice, Paix, Travail", et c'est aussi le symbole de l'équipe nationale de football appelée les Léopards, qui ont récemment brillé au CHAN et à la CAN. Quant à l'animal, discret et chassé pour sa fourrure, on le trouve encore dans certaines régions forestières du pays.

Makala

Cela désigne tout à la fois le charbon de bois, le foyer utilisé en brousse et en ville pour pallier les coupures de courant, et ce type de cuisson traditionnelle : poisson, poulet ou chèvre "au makala" soit cuits sur braise. Un délice ! Outre l'aspect culturel et gastronomique, c'est aussi un enjeu énergétique et environnemental de taille, quand on sait que la production de charbon de bois contribue directement à la déforestation un peu partout dans le pays, et dans les provinces périphériques de Kin, pour alimenter la capitale. Si le gigantesque potentiel hydroélectrique du pays et les infrastructures qui vont avec étaient optimisés, on n'en serait pas là... Plus accessoirement, Makala, c'est aussi le nom d'une commune de Kinshasa dans la Cité, popularisée par la prison centrale éponyme dont la seule évocation suscite une certaine crainte...

Malembe

C'est tout un art de vivre résumé par cette expression qui signifie en lingala "du calme", "doucement", et qui est d'application un peu partout dans le pays et dans les autres langues nationales. Vous l'entendrez, avec le geste des mains approprié, dans toutes sortes de contextes : adressé au chauffeur de taxi qui roule trop vite, ou par exemple si vous marchez d'un air pressé, que vous perdez votre patience ou vous énervez... Ça permet de tout dédramatiser. Un sacré concept en soi, dont on ferait bien parfois de s'inspirer.

Mangrove

Ecosystème naturel constitué de larges zones marécageuses, très riche en biodiversité, qui se développe notamment dans les estuaires d'eau saumâtre en région tropicale. C'est le cas à l'embouchure du fleuve Congo, dans la province du Kongo Central, véritable perle écotouristique d'une superficie de 768 km2, encore préservée, qui rivalise avec les beautés de l'est du pays. C'est devenu une réserve protégée en 1992 : le Parc marin des Mangroves. Dans ce lacis de bras d'eau, les palétuviers règnent en maître au milieu d'innombrables petites îles, et abritent une riche faune : hippos, singes, crocos, tortues, serpents et même une espèce endémique de lamantins. L'occasion de magnifiques excursions fluviales et d'un séjour intemporel au coeur de ces paysages uniques, facilement accessibles depuis Kinshasa.

Manioc

C'est l'aliment de base de la cuisine congolaise et le pilier du régime alimentaire local, bien que la plante du manioc ne soit pas originaire du continent africain. Il est décliné sous de multiples variations selon la partie de la plante qu'on utilise et la façon de le préparer : pondu (ou saka saka : feuilles pilées et agrémentées, qui ressemblent à des épinards), fufu (boule assez dense, genre purée ou polenta, confectionnée à partir de farine de manioc et/ou de maïs), chikwangue (pâte épaisse fermentée et emballée dans des feuilles), mais on le sert également sous forme de frites, de pommes de terre... Et il est de tous les repas. C'est souvent savoureux, quoiqu'un peu lassant à la longue pour les non-initiés.

Matabish

Synonyme de bakchich. C'est en général l'une des premières expressions que l'on entend, à peine le pied posé sur le tarmac de Ndjili. Désigne ce processus de petit racket quotidien à l'oeuvre par une grande majorité de la population, notamment de la fonction publique, peu ou pas rémunérée, et qui survit de ces quelques pourboires glanés ici et là. Cette habitude s'est généralisée un peu partout et on y échappe rarement, surtout en tant que "mundele" (Blanc). A Kin, le moindre service est rarement gratuit et se doit en principe d'être commissionné... C'est la dure loi de la survie économique qui consiste à rechercher partout un petit profit.

Matonge

Prononcez "Matongué". Ce quartier mythique de la commune de Kalamu est considéré comme le centre d'ambiance de la capitale et le temple de la sape depuis les années 1970-80. Plusieurs groupes musicaux d'envergure y sont nés. On le doit surtout à Papa Wemba qui y a érigé son fameux village Molokaï. De jour comme de nuit, Matonge reste un sanctuaire fréquenté par les amateurs de ndombolo. Les artères principales concentrent le plus grand nombre de terrasses en ville, qui rivalisent en décibels et voient défiler cabri, tiges et bières dans une ambiance bon enfant. Le quartier Matonge est aussi célèbre pour ses magasins spécialisés dans la vente de vêtements de haute couture (si chers aux sapeurs), ainsi que pour ses disquaires. La place des Artistes, avec le rond-point Victoire, est le point de transit majeur en ville. Le quartier Matonge de Bruxelles est aussi connu pour sa grosse communauté et son ambiance congolaise.

Mbongo

Argent en lingala. Vous l'entendrez le plus souvent sous les formules pesa mbongo (donne-moi de l'argent), ou mbongo eza te (il n'y a pas d'argent). Beaucoup de Congolais ont développé un rapport à l'argent et au travail presque d'ordre philosophique et davantage lié à un coup heureux du sort. On a coutume de dire qu'au Congo on ne gagne pas sa vie, on attrape l'argent, suite au hasard mais aussi grâce à l'ingéniosité et ce sens de la débrouille si caractéristiques de ses habitants. Soulignons tout de même ce courage et la persévérance face à l'adversité, dans des conditions de travail souvent très pénibles. Quoi qu'il en soit, l'argent gagné est généralement bien vite dépensé, pour ne pas dire littéralement flambé, dans une attitude typiquement épicurienne congolaise.

Mundele

Souvent associé à matabish... C'est le nom donné aux Blancs en lingala, et auquel on n'échappe pas non plus, où que l'on soit en ville et dans le pays. Ce n'est jamais méchant, même si c'est un peu agaçant à la longue, c'est davantage un surnom affectueux que les Congolais affublent à leurs nokos (oncles). A prendre avec humour.

Nganda / malewa

Mot emprunté aux pêcheurs qui appelaient ainsi leur campement au bord du fleuve. Ce terme s'est imposé pour désigner au départ des lieux de rencontre en ville un peu discrets, souvent situés dans des parcelles délimitées ou derrières des maisons. Aujourd'hui ce mot se réfère à tout débit de boissons - souvent rudimentaire et comprenant une terrasse parsemée de quelques tables et chaises en plastique - implanté partout en ville. Les ngandas, ou staff, sont souvent de hauts lieux de fête et de divertissement populaire. A Kinshasa, le qualificatif ntaba (chèvre en lingala) y est souvent ajouté, pour spécifier qu'on y vend des brochettes de cabri au makala, frappées le plus souvent de Skol ou de Primus et rehaussées de pili-pili. Un vrai régal ! Les malewas, quant à elles, sont des ngandas davantage dédiées à la restauration, sortes de cantines populaires très fréquentées le midi.

Réveil

C'est sûr qu'à Kin, tout est fait pour qu'on se réveille ! Mais le terme est surtout dédié à ces Eglises et communautés religieuses dites "de réveil" (évangéliques), inspirées du mouvement pentecôtiste américain. On en trouve à tous les coins de rue, et dans des lieux parfois improbables, avec un culte souvent très outrancier et personnalisé en fonction du "pasteur" qui se trouve aux commandes, et qui n'encourage certes pas le voeu de pauvreté, avec de nombreux abus à la clé. Les Eglises de réveil étant globalement, et particulièrement en RDC et à Kinshasa, considérées comme des sectes. A défaut d'obtenir gloire éternelle, fortune et félicité contre monnaie sonnante et trébuchante, ce qui est garanti, ils ne manqueront pas de vous réveiller au sens premier, les offices ayant souvent lieu la nuit, à grands coups de prêches, chants et incantations sonorisés et amplifiés comme il se doit.

Rumba / ndombolo

"Indépendance Cha Cha to zuwi ye... " comme le chantait Grand Kalle, l'un des pères de la rumba congolaise sur cet hymne devenu mythique. Développée à partir d'influences cubaines dans les années 1950, la rumba made in Congo a continué à se développer jusqu'à aujourd'hui, avec le ndombolo. Cette musique rythmée, typique par le son de la guitare et la voix aiguë des chanteurs, se caractérise également par une danse spécifique que l'on peut voir à l'oeuvre dans toutes les boîtes de la capitale et du pays. C'est l'orchestre Wenge Musica, formé à la fin des années 1980, qui est à l'origine du renouveau de ce courant musical, avec des artistes phares comme Werrason, JB Mpiana, Koffi Olomide, Fally Ipupa, Ferre Gola... Le ndombolo a inspiré de nombreux autres courants en Afrique : coupé décalé, soukous, lopélé, etc., confirmant le statut de la capitale de la RDC comme Mecque de la musique africaine et comme ville créative musicale telle que décrétée par l'Unesco.

Rumble in the Jungle

Nostalgie encore en évoquant cet événement mythique qui s'est tenu à Kinshasa, au stade Tata Raphaël, le 30 octobre 1974, mais qui fait encore la fierté de nombreux Kinois, plus de 40 après, et à quelques mois du décès de la légende Mohamed Ali. C'est le fameux "combat dans la jungle", ou "le combat du siècle", au cours duquel Ali a reconquis le titre de champion du monde poids lourds en battant George Foreman lors d'un combat épique. Mobutu, qui voyait dans l'événement une occasion de mettre le Zaïre, et lui-même, à l'honneur, a déboursé pour ce faire dix millions de dollars, en plus de moderniser pour l'occasion le parc hôtelier, le stade et les moyens de transport en ville. En marge du combat s'est tenu le tout aussi mythique festival Zaïre 74 organisé par Don King, qui a vu jouer au Théâtre de Verdure, et dans divers lieux de la capitale, James Brown, B.B. King, Manu Dibango, Myriam Makeba, etc. Quand Kin et le Zaïre faisaient rêver le monde...

Salongo

Moins présent aujourd'hui, quoiqu'encore évoqué par quelques nostalgiques zaïrois, pour convoquer ce temps où "tout allait bien" et où la capitale s'appelait encore Kin-la-belle avant de devenir Kin-la-poubelle, selon l'expression consacrée... C'est un concept développé par Mobutu, dans ses années de zaïrianisation sous influence communiste chinoise, qui consistait en une obligation pour la population à se soumettre une après-midi par semaine - le samedi habituellement - à des travaux collectifs d'intérêt général (ou travail manuel communautaire). Et à contribuer notamment à l'assainissement de la ville et à l'entretien des espaces publics (voiries, etc.). Des tentatives pour réhabiliter le salongo émergent parfois, çà et là, sans grand succès, quoiqu'on observe parfois des habitants volontaires en train de faucher (ou brûler, moins chouette !) les abords de routes, pour "faire propre"... Réminiscence d'une certaine époque qui a marqué le pays et la capitale.

Sape

Une autre curiosité congolaise et kinoise de taille - bien actuelle celle-là - qui commence à attirer l'attention de créateurs de renom dans le domaine de la mode ou des arts visuels. C'est la "Société des Ambianceurs et Personnes élégantes", soit un courant socio-vestimentaire unique à Kinshasa et à Brazzaville qui consiste à porter des vêtements de marque que l'on affiche ostensiblement, en adoptant une attitude extravagante. La sape est une forme de métissage du dandysme colonial belge, de la flamboyante identité zaïroise, et d'une fantaisie bon enfant bien kinoise. Les sapeurs, ces chantres de l'élégance hautement revendiquée, se réfugient dans l'art de s'habiller chicos pour fuir la misère environnante. Ils ont même érigé ce courant en religion (Kitendi), dont ils célèbrent le culte en février en mémoire du décès de leur maître sapeur Stervos Niarkos. L'influence de la sape se retrouve aujourd'hui jusqu'aux fashion shows européens, via des designers et collections inspirées de ce courant dandy à souhait. Et qui contribue ainsi à populariser la singularité et la créativité congolaises.

Shégué / kuluna

Suite à l'abandon par les parents et à l'absence de structures d'accueil adaptées, on assiste à ce phénomène de shégués (enfants des rues). Ceux-ci survivent de mendicité et de petits larcins, et sont visibles dans certains coins du centre-ville ou sur le boulevard du 30 juin. Les autorités de la ville sont complètement dépassées par ce problème qui prend de l'ampleur. Son corollaire : "ndoki" (enfant sorcier), un phénomène qui s'est développé avec l'apparition des sectes religieuses et qui consiste à stigmatiser un enfant au sein d'une famille précarisée, en l'accusant d'être responsable de maux quelconques. A force de mauvais traitements, ces enfants finissent en général dans la rue et rejoignent les rangs des nombreux shégués. Quant aux kulunas, plus âgés, il s'agit de bandes de jeunes délinquants commettant des vols dans la Cité, et qui sont en général plus violents. Les opérations de police "likofi" ont permis de neutraliser, avec la manière forte, la plupart de ces bandes.

Songi songi

Un "ragot" (souvent utilisé au pluriel, dans les faits). Tout un concept - celui de rapporter, déformer, amplifier... - voire presque un art de vivre, dans une ville où l'informel et l'oral tiennent une place prépondérante via la "radio trottoir". Et où la rumeur, incroyablement rapide et efficace, fait et défait des carrières et des réputations, de lieux ou de personnes, en moins de temps qu'il ne faut pour le dire. Concept par essence kinois - qui témoigne aussi d'une certaine forme de créativité et de fantaisie à l'oeuvre dans cette folle capitale - magnifiquement illustré dans le roman Mathématiques congolaises du talentueux écrivain In Koli Jean Bofane (Actes Sud).

Swag

Cool, hype ou branché. Qui a du style et charismatique. Ce qualificatif s'impose depuis peu à Kinshasa, notamment via une campagne publicitaire pour une bière vantée comme "jeune, belle et swag". Ça définit en effet un certain style de vie à la kinoise, empreint de frime bon enfant et surtout de cool attitude, auprès des jeunes branchés, qu'ils soient fortunés ou non, et qui développent leur style propre à coups de danse, fringues et phrasé caractéristiques. Un peu dans l'esprit de la sape (courant vestimentaire et sociologique, voir par ailleurs) et typiquement kinois.

Tracasseries

Corollaire de "matabish", auquel on peut ajouter tout un tas d'expressions savoureuses exprimant cet "art" développé au fil des ans par tout ce que la capitale compte de fonctionnaires, qui consiste à pratiquer un excès de zèle outrancier et une lenteur administrative procédurière, et ce afin d'arrondir les fins de mois difficiles, voire les mois tout court. C'est vrai dans le judiciaire et à beaucoup de niveaux de la vie quotidienne, dès lors qu'on doit s'acquitter de la moindre démarche administrative, ou qu'on se fait contrôler par les "roulages", ces policiers de la route. Dans les faits, ce n'est pas toujours plaisant ni rigolo, et cela s'apparente clairement à une forme de petite corruption généralisée, bien que compréhensible à certains égards... Une bonne dose de patience, d'humour, voire de culot permet en général de faire face à ces désagréments dont les Kinois sont les premiers à se lamenter, et à s'en amuser.

Viva la Musica

Impossible, à quelques mois du deuil national causé par la disparition du grand Papa Wemba, de ne pas évoquer son influence dans la musique congolaise et africaine, via cet orchestre emblématique créé en 1977. C'est à cette époque qu'il prend son célèbre pseudo, se proclame chef coutumier du village Molokaï dans le quartier de Matonge, et qu'il adopte ce style si particulier, préfigurant la sape, suivi en cela par des milliers de jeunes fans dont il devient le modèle, et qui entraîne un bouleversement total des codes de la jeunesse kinoise et congolaise. Bien plus qu'un groupe de talentueux musiciens, ce "label" Viva la Musica va accompagner Papa Wemba, et colorer toute la suite de sa prolifique carrière en lui permettant de développer sa touche si personnelle qui rayonnera dans toute la société congolaise, et à Kinshasa en particulier, jusqu'à sa mort et même au-delà... Viva la Musica c'est aussi une ode à la tradition musicale féconde de la capitale.

Wax

Désigne ces tissus (pagnes) aux divers imprimés et motifs colorés que l'on trouve au marché ou dans de nombreuses boutiques du centre-ville et dont les Kinoises sont très friandes. Celles-ci les déclinent en modèles et créations tous plus élégants les uns que les autres, et qui leur vont à merveille. Certains de ces pagnes portent des noms évocateurs et empreints d'une certaine poésie à la kinoise : "Mon mari est capable", "Si j'avais su", "Super de Paris", "Regard lubrique", "Cas de divorce", "Michelle Obama"... C'est Mobutu qui a imposé le port du pagne pour les femmes, et de l'abacost pour les hommes, dans le cadre du recours à l'authenticité dans les années 1970. L'usage est resté. Et c'est tant mieux.

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