Une terre profondément LGBTQI+

Les habitudes ont la dent dure : fief de la contre-culture et des mouvements de remise en question du mode de vie américain des années 1960, la Californie continue à se développer en marge des États-Unis. Aujourd'hui, cela se traduit par sa volonté de devenir un sanctuaire de l'IVG. En 2023, alors que 16 États interdisent le droit à l'avortement, elle passe des mesures pour accueillir légalement des femmes de tout le pays, avec un ensemble de 13 lois visant à faciliter l'accès à l'IVG et à en diminuer les coûts. Un projet pour lequel le gouverneur Gavin Newsom a promis un budget de 125 millions de dollars.

Par ailleurs considéré comme l'un des territoires les plus libéraux, le Golden State est particulièrement gay-friendly ; en témoignent les très fréquentés quartiers de West Hollywood, à Los Angeles, et du Castro, à San Francisco. C'est ici, véritable berceau des droits LGBTQI+ du pays, que la communauté possède ses racines. Tout commence dans la nuit du 28 juin 1969, à New York, quand une énième descente de police dans un bar gay pousse les clients à se révolter. Un an plus tard, la ville organise la première Marche des Fiertés avec Los Angeles et San Francisco. Forte de la libération sexuelle héritée du Summer of Love, qui s'y est déroulé en 1967, cette dernière s'impose comme un petit havre de paix. Peu à peu, une communauté venue de tous les États-Unis se forme autour du militant Harvey Milk, arrivé dans la ville en 1972.

Premier élu ouvertement gay de Californie – 1978 – il parraine un projet de loi essentiel, interdisant la discrimination dans l'attribution de l'emploi et des logements publics selon l'orientation sexuelle. Il sera assassiné l'année suivante. Un premier coup dur pour la communauté, qui souffrira d'un gros retour en arrière en 2008 : « l'annulation » de la légalisation du mariage pour tous, dont le droit avait été obtenu cinq mois et demi auparavant. Il faudra ensuite attendre 2013 pour que les couples homosexuels puissent officiellement s'unir. Depuis, les lois défendant les droits de la communauté LGBTQI+ se multiplient : un an plus tard, un texte imposant le respect de l’identité des élèves transgenres dans les écoles californiennes est entré en vigueur. Ils peuvent désormais utiliser les toilettes ou les vestiaires de leur choix et participer à des activités non-mixtes, par exemple. Autre progrès : la possibilité pour les personnes transgenres de changer leur genre sur les documents officiels, même si elles n'ont pas eu recours à des interventions chirurgicales.

Une légalisation quasi totale du cannabis

Le Golden State fait également partie des États les plus en avance quant à la légalisation du cannabis à usage récréatif. Une décision qui commence à mûrir en 2015, alors que le marché du cannabis vendu à des fins thérapeutiques atteint quelques milliards de dollars à l'échelle nationale. Considérables, les recettes intéressent plusieurs territoires du pays, poussant certains politiques à envisager la dépénalisation totale du cannabis. Ainsi, en marge de l’élection présidentielle de novembre 2016, de nombreux électeurs sont appelés à se prononcer sur des référendums portant sur le sujet.

C'est officiel : la Californie est le premier territoire de l'Ouest à sauter le pas. Elle sera suivie de près par le Nevada, la même année, puis par l'Arizona, en novembre 2020. Désormais, difficile de manquer les nombreux dispensaries installés çà et là dans les rues, semblables à de véritables épiceries fines, avec un choix de produits qui dépasse l'entendement. En revanche, puisque l'Utah est à majorité mormone – un culte qui proscrit les drogues – il accepte uniquement l'usage du cannabis pour des raisons médicales, et ce depuis novembre 2018.

Le pays de la liberté d'expression

Le caractère progressif de l'Ouest américain est tel que ce dernier est fréquemment perçu comme le laboratoire d'idées du monde occidental. Par exemple, c'est une actrice de Hollywood – Alyssa Milano – qui a lancé le mouvement #MeToo sur Twitter le 15 octobre 2017, en réponse aux accusations de viols, d'abus de pouvoir et de harcèlement sexuel à l'encontre du producteur Harvey Weinstein. Une liberté d'expression caractéristique du pays, celui du wokisme – un terme qui désigne le fait d'être conscient, « awake », des injustices subies par les minorités ethniques, sexuelles et religieuses – et des social justice warriors, cette appellation péjorative utilisée pour qualifier les défenseurs d'avancées sociétales souvent perçues comme extrêmes ou, du moins, trop bien-pensantes.

Cette tendance à communiquer ses opinions se manifeste également dans la « vraie vie ». Si les parodies de l'Américain moyen – telles que les séries télévisées Les Simpsons et American Dad! – le représentent devant la façade de sa maison, un grand drapeau aux couleurs du pays à ses côtés, il faut dire que la réalité n'est pas si éloignée. Ici, on est fier d'être États-Unien et, surtout, on ne se prive pas de le montrer : il en est de même pour les convictions personnelles. Ainsi, il est fréquent de passer devant des portails flanqués d'autocollants arc-en-ciel en soutien à la communauté LGBTQIA+, de l'inscription « Black Lives Matter » ou encore d'une photo de Donald Trump – même après que Joe Biden l'a remplacé à la tête du pays. De la même manière, faire l'étalage de sa richesse n'est pas mal vu ; au contraire. Là où un Français dira : « Je gagne bien ma vie », un Américain revendiquerait : « Je gagne 10 000 dollars par mois ».

Par ailleurs, le tabac est loin d'être aussi plébiscité que dans l'Hexagone. Si ce dernier compte 24 % de fumeurs, les États-Unis n'en recensent que 12,5 % – un chiffre en baisse depuis 2005, lorsqu'il atteignait 20,9 %. Berceau mondial de la théologie du mormonisme – au sein de laquelle l'usage du tabac est proscrit – l'Utah abrite le moins de fumeurs à l'échelle nationale, soit 9 %. Pour leur part, la Californie, l'Arizona et le Nevada en contiennent respectivement 11,2 %, 14 % et 15,7 %. Un fait qui pourrait surprendre venant du territoire où sont installées certaines des plus grandes compagnies de tabac du monde. Néanmoins, les interdictions pleuvent : à celle de fumer dans la plupart des restaurants, des bars et des casinos s'ajoutent celles de certaines villes, qui proscrivent également la cigarette dans les parcs, sur les plages ou aux arrêts de bus.

Enfin, contrairement à la France, l'accessibilité des personnes handicapées est une notion totalement intégrée à la société de l'Ouest américain : même les parcs nationaux et étatiques sont dotés de chemins pensés pour les fauteuils roulants – sans pour autant dénaturer les lieux. Un véritable exemple en la matière.