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Des inquiétudes liées à la criminalité

Les primaires qui se sont tenues en juin 2022 sont révélatrices du climat qui règne en Californie : elles montrent à quel point l'anxiété des citoyens au sujet de la sécurité publique s'est accrue. Selon un sondage mené par le UC Berkeley Institute of Governmental Studies, 75 % des votants estimaient que le nombre de crimes avait significativement augmenté à l'échelle étatique depuis 2020, tandis qu'ils étaient 83 % à penser que le problème des sans-abris s'était aggravé. Par ailleurs, même dans les villes où la situation s'était en réalité améliorée, les électeurs avaient rempli leur bulletin en ayant en tête des préoccupations. San Francisco a enregistré une chute considérable des crimes et délits contre les biens – en d'autres termes, les vols, les recels, les destructions et les dégradations, entre autres – depuis la prise de poste du quadragénaire en janvier 2020.

Le problème : une augmentation des homicides, ainsi qu'une vague de cambriolages – en hausse de 47 % – et de vols de véhicules – 36 %. D'autre part, la crise des sans-abris est bien réelle. Si le nombre d'individus à la rue accueillis en refuge – les seules données disponibles à ce jour – a diminué de 8 % à l'échelle nationale entre 2020 et 2021, il a augmenté de 7 % dans le Golden State. Au cœur des inquiétudes : les personnes invalides sans domicile fixe depuis au moins 12 mois – dont la présence au sein des refuges a connu une hausse de 49 % en un an – et l'explosion des overdoses au fentanyl chez les SDF de San Francisco – et, à une échelle plus large, de l'État. 50 fois plus fort que l'héroïne, cet opioïde a fait plus de 1 300 morts dans la ville entre avril 2020 et 2022. Bien que la maire, London Breed, a déclaré un état officiel d'urgence 17 décembre 2021, la situation continue de se dégrader en 2023, avec déjà 473 morts entre janvier et juillet.

Le changement climatique, un enjeu majeur

Après l'insécurité, la sécheresse est l'une des plus grandes préoccupations des Californiens. En 2018, ils ont subi l'incendie le plus mortel et le plus destructeur de leur histoire, Camp Fire, qui a fait 85 morts, décimé 62 053 hectares et ravagé la ville de Paradise – à 140 km au nord de Sacramento. Plus récemment, citons Dixie Fire, le feu de forêt qui détruira plus de 389 837 hectares du nord de l'État entre le 13 juillet et le 25 octobre 2021. À ce jour, il occupe la deuxième place du triste podium des plus gros incendies de l'histoire récente du Golden State. Malheureusement, le pire reste avenir. En juin 2022, les experts considéraient que la Californie faisait face à son pire épisode de sécheresse : en conséquence, quelque 6 millions d'habitants seront concernés par des restrictions de consommation d'eau pendant un an. Un nouveau coup dur, d'autant que les mesures prises dans le Golden State depuis une vingtaine d'années sont pour le moins exemplaires.

Ces avancées ont débuté en 2003, avec l'élection du républicain Arnold Schwarzenegger en tant que gouverneur de Californie. Application du protocole de Kyoto – au demeurant non ratifié par les États-Unis – passage du Global Warming Solutions Act en 2006 : l'acteur phare de Terminator s'est illustré pour son engagement écologique. Une action poursuivie par son successeur, Jerry Brown, en poste de 2011 à 2019. Actuellement au pouvoir, Gavin Newsom a repris le flambeau : en plus des appels qu'il adresse fréquemment à la population pour qu'elle réduise sa consommation d'eau, il a proposé d'allouer 2 milliards de dollars supplémentaires à la lutte contre la sécheresse en 2022. Plus récemment, le 15 septembre 2023, la Californie a lancé une action en justice contre cinq géants du pétrole : Exxon Mobil, Shell, BP, ConocoPhillips et Chevron. En cause : leur rôle dans le réchauffement climatique. « Pendant plus de cinquante ans, Big Oil nous a menti, cachant le fait qu'ils savaient depuis longtemps combien les énergies fossiles qu'ils produisaient étaient dangereuses pour notre planète », a accusé le politique. Son objectif : obtenir la création d'un fonds pour faire face aux dégâts futurs.

L'Arizona, un État en danger

Le Golden State n'est pas le seul à subir les affres du changement climatique. En plus de voir l'un de ses principaux réservoirs se vider – le Lake Mead, un lac artificiel qui alimente sa population, ainsi que celle du Nevada et de la California du Sud – l'Arizona souffre de vagues de canicule intenables, en particulier à Phoenix, considérée comme la ville la plus chaude du pays : ici, les températures deviennent vite dangereuses. Depuis 2018, le nombre de personnes décédées dans l'État en raison de la chaleur ne cesse d'augmenter : 251 à l'époque, contre 579 en 2023. En 2020, la température annuelle moyenne dans le comté de Maricopa – dont le siège est Phoenix – était de 3,4 °C de plus qu'en 1895, contre une hausse de près d'1 °C au niveau mondial. Conséquence : les étés sont plus chauds, plus longs et plus secs.

Outre les émissions de gaz à effets de serre à l'échelle locale comme planétaire, le problème vient de l'urbanisation et du développement rapide de Phoenix ces dernières décennies : ils l'ont rendue victime de l'effet « îlot de chaleur urbain ». En d'autres termes, les imposants buildings en verre, l'activité industrielle, ainsi que les grandes étendues de béton et d'asphalte absorbent et amplifient la chaleur du soleil. En somme, les hauts bâtiments créent des canyons dans lesquels elle reste bloquée près du sol. À l'inverse, la végétation, les plantes et les arbres – même ceux du désert – sont à l'origine d'un processus indispensable : l'évapotranspiration, permettant à l'environnement de se rafraîchir. De fait, en pavant le désert, les bâtisseurs de Phoenix lui ont fait perdre sa capacité réfrigérante.

L'absence d'une réelle politique environnementale a aggravé la situation : outre une initiative régionale sur le climat prise il a plus d'une décennie – et rapidement abandonnée – l'Arizona ne faisait partie d'aucun plan en la matière au niveau étatique... Du moins, jusqu'à l'arrivée de la gouverneure démocrate Katie Hobbs. Entrée en fonction le 2 janvier 2023, elle a fait rejoindre à son État l'US Climate Alliance en juillet de la même année. À ses côtés, la maire démocrate Kate Gallego et la conseillère Yassamin Ansari, qui constituaient le seul espoir de Phoenix avant l'arrivée de la politique. Présentes à la conférence de Glasgow de novembre 2021, elles avaient déjà contribué à créer le premier bureau dédié à la réponse à la chaleur du pays. En conséquence, Flagstaff, Phoenix, Tucson et Tempe ont mis en place des plans d'action climatique. Plus encore qu'ailleurs, l'Arizona se trouve à un tournant de son Histoire : les années à venir s'annoncent décisives.