Les musique et danses traditionnelles

Impossible de faire l’impasse sur elles tant elles sont omniprésentes aux Fidji ; le meke est la grande danse traditionnelle locale. D’ailleurs, on parle de « danse », mais ici musique et chant sont aussi importants que les mouvements gracieux des danseurs, ces derniers racontant une histoire – variant selon le genre : danse de la guerre, danse de l’éventail, danse de la lance, danse de la massue, danse debout et assise, etc. Le meke peut être également exécuté pour raconter des événements importants, tels que l'intronisation d'un chef.

Une danse intense, vigoureuse où tous les muscles s’expriment, obéissant aux rythmes enlevés et complexes des percussions parmi lesquelles le lalinemeke. Ce tambour est un modèle réduit du lali, l’imposant instrument national (il mesure entre 60 centimètres et 2 mètres). Où que vous alliez, ouvrez bien les yeux, il y en aura sûrement un dans les parages. Tronc d’arbre (le vesi, choisi pour sa densité et sa résonance) auquel on a donné une forme incurvée et reposant sur deux rondins de cocotier, le lali se joue en le frappant à l’aide de deux baguettes en bambou.

Traditionnellement, le meke joue un rôle primordial dans le quotidien des Fidjiens. Il est organisé à chaque étape importante d’une communauté – naissance, décès, guerre, etc. – et il est aujourd’hui encore très présent et accompagne chaque fête. On peut aussi le voir – dans des versions repensées pour l’œil touristique – dans des endroits comme le Fiji Culture Village de Nadi, village entièrement reconstitué exposant la vie traditionnelle du Pacifique. Une vraie immersion ponctuée d’une démonstration de meke.

Les fans de rugby le savent bien, l’équipe des Fidji possède elle aussi son équivalent du haka. Appelée « cibi » (prononcer « thimbi ») cette danse portée par un cri de guerre s’exécute avant chaque rencontre afin d’impressionner l’adversaire et se motiver pour le match à venir. Depuis 1939, la date de son instauration, le rituel est le même et voit les athlètes se mettre en demi-cercle, le leader au centre, et avancer vers l’adversaire en lançant des cris de guerre.

Aussi, il est important d’aborder les profondes influences indiennes dans les pratiques traditionnelles fidjiennes. Dans l’archipel, on entend notamment des bhajans, une musique religieuse jouée à l’harmonium et au dholak (tambour), mais aussi des formes musicales classiques indiennes comme le ghazal et le thumri. Le premier, le ghazal est une poésie lyrique d'amour d’origine perse, qui a gagné en popularité avec le temps dans le monde indo-pakistanais. Le thumri, quant à lui, exprime aussi les sentiments, mais à travers une forme plus improvisée et très ornementale, tout en sensualité, et accompagnée de tabla.

Icône injustement méconnue – mais en voie de redécouverte – Mushtari Begum (1934-2004) fut la première interprète de ghazal et de thumri née aux Fidji. Disciple de son père, Ustad Amjad Ali, un interprète de thumri originaire de Lucknow, en Inde, elle était réputée pour ses extraordinaires capacités vocales et flirta avec les sommets des ventes dans l'industrie musicale des Fidji. Le titre de Malika-e-Ghazal ou « Reine du Ghazal » lui a été décerné en 1973 par le Haut Consulat indien des îles Fidji.

Autre grand nom local, Cassius Khan est une star internationale du tabla (percussion composée d'une paire de fûts) et considéré comme un magicien du ghazal. Ce disciple majeur de Mushtari Begum s’est fait connaître pour la majesté avec laquelle il joue de son instrument tout en chantant simultanément des ghazals. Né à Lautoka, il réside actuellement à Vancouver et est reconnu autant comme un trésor national au Canada qu’aux Fidji. Sa réputation est telle qu’il fut le premier musicien de ghazal et tabla à se produire au festival SXSW d’Austin (en 2008).

Pour compléter ce trio, citons également Sashi Roy, célèbre joueur de dholak – un tambour à deux peaux (combinant des sons rythmiques aigus et graves) – natif de Nadi. En innovant sur la technique de jeu à plusieurs dholak, il s’est imposé comme l'un des solistes les plus reconnus de son instrument.

La musique populaire

Petit archipel à l’industrie musicale plutôt dynamique, les Fidji ont multiplié les succès commerciaux locaux. Des cartons dont le retentissement ne dépasse généralement pas l’Océanie et ne parviennent pas jusqu’à nos oreilles. Cela dit, ces stars fidjiennes sont écoutées (et souvent adorées) en Australie, en Nouvelle-Zélande, aux Samoa, aux Tonga ou en Nouvelle-Calédonie.

Les années 1980 voient apparaître les premières méga-stars locales comme Laisa Vulakoro. Surnommée « la reine du vude » – d’après un style populaire totalement fidjien, qui combine le disco, la country, le rock et la musique folklorique locale, en particulier le rythme meke – Laisa est l’artiste incontournable aux Fidji. Une position renforcée par ses engagements et prises de position, comme contre le coup d'Etat militaire de 2006 qu’elle condamne dans une lettre publiée par un journal local. Un geste qui lui valut une perquisition de son domicile, un interrogatoire et une menace d’emprisonnement. Grande personnalité médiatique, elle a été juge pour l’émission Fiji Talent, équivalent fidjien d’American Idol aux Etats-Unis ou de la Nouvelle Star en France.

Autre nom important aux Fidji, Rosiloa – autrefois appelé « Black Rose » – est un groupe classé comme « World Music » mais qui, véritablement, mélange le meke à des rythmes et sons de danse plus modernes. Très connu même hors de ses frontières, le groupe a pu effectuer une tournée outre Pacifique aux Etats-Unis.

A ranger du côté des légendes locales, Daniel Rae Costello est un multi-instrumentiste dont le timbre de voix et la proposition très ancrée dans les sonorités locales, lui ont assuré une adhésion indéfectible du public.

Pêle-mêle, citons également deux idoles locales du R’n’B Paulini et Elena Baravilala, ainsi que Sakiusa Bulicokocoko (1950-2007) dont les chansons comme Veibogi kece ont accompagné plusieurs générations de Fidjiens, ou encore George Veikoso et Kula Kei Uluivuya, deux noms très appréciés du reggae.

Plus récemment, les auditeurs du monde entier ont pu découvrir Jesswar, artiste hip-hop aux collaborations internationales (comme la rappeuse texane Erica Banks).

N’oublions pas non plus de mentionner Wilma Smith, violoniste née à Suva ayant collaboré avec quelques entités symphoniques d’Océanie comme l'Orchestre symphonique de Nouvelle-Zélande, l’Orchestre symphonique de Melbourne ou encore le Boston Symphony Orchestra, et qui a même dirigé le Harvard Chamber Orchestra. Prestige ultime, elle joue sur un violon Guadagnini de 1761.