Découvrez l'Arménie : Géographie

Dire que l’Arménie est un pays de montagnes relève du pléonasme. L’Arménie est montagne, et cette région de 300 000 km², à cheval sur la Turquie et l’Iran, a d’ailleurs été désignée sur les cartes sous le nom de massif arménien. Un haut plateau plus exactement, parcouru de chaînes et hérissé de volcans éteints, et cerné par les puissants appareils montagneux d’Asie Mineure, de Perse et du Caucase. L’Arménie actuelle ( 30 000 km²) n’est que le rebord septentrional et oriental de ce plateau, dont elle a hérité d’une petite partie, qui occupe néanmoins tout l’ouest du pays et en constitue le centre nerveux et le poumon économique, avec la capitale Erevan. Le reste est un enchevêtrement de montagnes de plus de 3 000 m, entaillées de vallées profondes, dont les monts du Haut-Karabagh constituent les contreforts orientaux, ultime rempart naturel entre le monde arménien et la plaine azerbaïdjanaise du Chirvan qui s’étend jusqu’à la Caspienne.

Un travail de titans

Véritable épine dorsale du pays qu’elles parcourent du nord au sud sur près de 400 km, ces montagnes prolongent la chaîne du Caucase, ce qui leur a valu l’appellation de « Petit Caucase », qui transcrit mal l’originalité de cet ensemble montagneux qui ne saurait passer pour un appendice de la grande chaîne du Nord tout juste bon à opérer la jonction avec les massifs montagneux iraniens et leurs lointains prolongements himalayens. Résultant de l’action conjuguée de l’écorce terrestre et de puissants systèmes volcaniques, ces montagnes ont développé des lignes bien caractéristiques malgré la diversité des paysages. Située sur la ligne de faille géologique où les plateformes continentale, arabique et russe, continuent à se heurter avec une violence attestée par le tremblement de terre du 7 décembre 1988 de Gyumri, qui fit 25 000 morts, l’Arménie témoigne de ce travail tectonique et éruptif. Renvoyant l’écho de quelque impitoyable bataille de titans, ce chaos de roches a toujours impressionné ses habitants. Si les forces telluriques se manifestent par des séismes parfois dévastateurs, les volcans sont éteints depuis un temps tel qu’on ne dispose d’aucun témoignage humain de leur activité, sauf pour l’Ararat, dont la dernière éruption remonte au XIXe siècle. L’Arakadz quant à lui, ne s’est plus manifesté depuis 5 000 ans. Ces volcans ont recouvert d’un épais manteau de lave une nature apaisée, dont les arêtes ont été comme rabotées, ramollies sous l’action des roches en fusion.

Des montagnes servies sur un plateau

Ce long travail volcanique, conjugué à l’érosion naturelle, explique les sommets aux formes douces typiques de ces montagnes, que l’on retrouve même dans les chaînes plus alpines du nord – Gougark, Pambak – ou du sud – Zanguézour. Voilà pourquoi les montagnes paraissent parfois moins élevées que ne l’indiquent les cartes, leur piémont saturé de matériaux volcaniques se situant à haute altitude. Les trois quarts du pays s’étagent entre 1 000 et 2 500 m, l’altitude ne descendant que dans les vallées. Peu de place aux plaines donc : si les montagnes d’Arménie donnent naissance à plusieurs des affluents de la Koura (au nord) et de l’Araxe (au sud), aucun des deux grands fleuves caucasiens n’y fait son lit. Au nord-est, le Debet  traverse un bout de plaine dont l’altitude descend à 400 m – la cote la plus basse – avant de rejoindre la Koura en Géorgie. La seule plaine digne de ce nom est créée par un bout de l’Araxe, qui se jette dans la Caspienne après avoir mêlé ses eaux à celles de la Koura, 500 km à l’est, en Azerbaïdjan. Marquant la frontière avec la Turquie, puis au sud, après avoir longé l’enclave azerbaïdjanaise du Nakhitchevan, celle avec l’Iran – l’Araxe est le fleuve arménien par excellence ; sur un cours de près d’un millier de kilomètres, l’Arménie n’a hérité que d’une centaine de km, mais son bassin couvre 76 % du territoire.

L’Ararat et l’Arakadz

Autant que l’Araxe, c’est le mont Ararat (Massis en arménien), dont les glaciers culminent à 5 160 m, de l’autre côté du fleuve, en Turquie, qui donne son identité et son nom à cette plaine, où le haut plateau arménien s’abaisse à 700 m. C’est dans cette « plaine de l’Ararat », transformée en « grenier à blé » à force d’irrigation, que bat le cœur du pays, avec la capitale Erevan, et la Ville sainte, Etchmiadzine. Cette succession de vergers, de champs et de vignobles donne une certaine idée du « paradis terrestre » que la Genèse situait en Arménie. Flanqué du cône parfait de son frère cadet, le petit Massis, l’Ararat fait figure de patriarche, dominant avec une majesté empreinte de mystère la plaine où serpente l’Araxe. L’Ararat fait de l’ombre à l’autre montagne qui lui fait face, au nord : volcan éteint lui aussi, l’Arakadz dresse plus discrètement son quadruple sommet enneigé dont le plus élevé culmine à 4 095 m, le plus haut sommet du pays, même si ses flancs en pente douce ne le laissent pas paraître. L’Arakadz est le grand architecte de cet altiplano arménien, aux vastes horizons. Après avoir craché des masses énormes de lave surélevant sa base, la montagne a pris l’aspect d’une immense coupole autour de laquelle s’articule l’Arménie centrale. Au sud, elle s’étale jusqu’à la plaine de l’Araxe, dont un affluent, l’Akhourian, court le long de son flanc occidental, délimitant la frontière avec la Turquie. Plus abrupt, son versant nord, abritant de petits glaciers, règne sur un monde radicalement différent : à près de 2 000 m au-dessus du niveau de la mer, entre la frontière turque et les montagnes du Djavakhk (mont Legli, 3 196 m), la plaine du Chirak déroule ses étendues steppiques de Gyumri jusqu’à la Géorgie.

Le Sevan, une mer intérieure

À l’est, l’Arakadz se noie dans le filet d’eau de la rivière Hrazdan, qui marque la limite orientale du plateau. S’écoulant entre les derniers contreforts de l’Arakadz et les monts volcaniques de Kégham (Ajdahak, 3 598 m), le Hrazdan déverse vers le sud dans l’Araxe, après un cours de 80 km et 1 300 m de dénivelé, les eaux du lac Sevan, situé encore plus à l’est. À 1 900 m d’altitude, cette nappe d’eau douce inondée de soleil, occupant une cuvette de 1 500 km², entre monts du Kegham à l’ouest et du Sevan à l’est, est le joyau d’un pays privé de mer. Érigé en parc national, le bassin du Sevan se situe au cœur de l’arc montagneux de l’Arménie orientale. Au-delà du col du Sevan, par où passe la route allant d’Erevan à Tbilissi, la région septentrionale du Gougark est un monde forestier alternant des chaînes plissées de type alpin et des sommets aux arêtes plus vives, où les appareils volcaniques cèdent la place à des formations cristallines. Le même type de relief se retrouve au sud du Sevan, au-delà de la chaîne volcanique de Vardénis (3 500 m) qui borde sa rive méridionale et que l’on franchit par le col de Selim, pour atteindre le Vayots Dzor et le Zanguézour. Constituée de puissantes chaînes fortement marquées par le volcanisme, cette région est creusée de gorges grandioses comme celles des fleuves Arpa et Vorotan. La chaîne du Zanguézour, où s’élèvent les plus hauts sommets après l’Arakadz (mont Kapoudjouk, 3 970 m), présente des versants escarpés et des crêtes rocheuses. Les plaines sont inexistantes, sauf à l’extrême sud, à Méghri, où l’Araxe, qui dessine ici la frontière avec l’Iran, s’est aménagé une petite vallée.

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