Une économie essentiellement basée sur le secteur minier

Représentant plus de 10 % du PIB, le secteur agricole est important pour le Suriname : les principales cultures sont le riz (la moitié du total des terres cultivées), les fruits (bananes en tête) et les légumes. L'exportation de crevettes et poissons ainsi que l'industrie du bois – rendue possible grâce à l'abondance des ressources forestières tropicales – sont également des secteurs en croissance.

C'est toutefois de l'industrie minière que le Suriname dépend essentiellement, et notamment du traitement de la bauxite (transformé en aluminium), mais aussi de l'extraction d'or et de pétrole : ces activités représentent 30 % des recettes de l’Etat et environ 85 % des exportations, à destination de la Suisse (38 %), de Hong Kong (21,9 %), de la Belgique (10,1 %) et des E.A.U. (7,2 %). Et c'est justement là l'un des talons d’Achille de l'économie du pays : une telle dépendance vis-à-vis de l'industrie minière la rend extrêmement vulnérable en raison du fait que ces ressources sont d'une part non renouvelables, et d'autre part de la volatilité du prix des matières premières, comme on a pu le constater ces dernières années.
Deux autres éléments sont également à prendre en compte : en 2017, l'entreprise américaine Alcoa a annoncé, après un siècle d'exploitation, le retrait définitif des raffineries Suralco et des mines de bauxite, laissant le gouvernement surinamais certes libre d'en reprendre les rênes mais financièrement incapable de les faire fonctionner. L'une des solutions serait de reprendre en main le barrage hydroélectrique d'Afobaka, ce qui permettrait au Suriname de ne plus avoir à payer d'astronomiques factures d'électricité à la firme Suralco. L'autre élément problématique est lié à la filière aurifère qui, gangrenée par la fraude et le travail au noir, mériterait plus de transparence, notamment via la négociation d'accords entre le gouvernement et les multinationales. Les communautés de l'intérieur sont en général écartées de ces accords, et certaines voix commencent à s'élever pour faire valoir les droits collectifs de ces communautés sur le sol et le sous-sol.

Parallèlement, le Suriname possède un excellent potentiel en termes de tourisme (forêts tropicales, faune abondante, architecture coloniale à Paramaribo). Si l'écotourisme se développe peu à peu et constitue une niche économique importante, il est pourtant loin d'être exploité à son maximum, en raison de l'inaccessibilité de l'intérieur forestier. Cependant, les structures hôtelières se multiplient ces dernières années et l'offre touristique devient de plus en plus attrayante.

Dernier point, le Suriname commence à développer son industrie pétrolière : à l'instar de son voisin le Guyana et bien que la tendance mondiale serait plutôt à la décarbonation, d'immenses réserves ont été découvertes dans les sous-sols au large des côtes de ces deux pays, qui pourraient contenir des dizaines de milliards de dollars. Au Suriname, l’entreprise publique Staatsolie est déjà présente dans quelques petits champs pétroliers terrestres, mais c'est bien TotalEnergies qui a annoncé en septembre 2023 investir près de 9 milliards pour l'exploitation des réserves sous-marines estimées à 700 millions de barils.

Un échiquier politique ethnicisé

Même avant son indépendance (25 novembre 1975), la plupart des partis politiques – en plus d'être dirigés par des chefs plutôt autoritaires – étaient déjà fondés sur l'origine ethnique, ce qui n'aide pas vraiment à créer un consensus national. Depuis les élections de 1955, aucun parti n'a eu la majorité à l'Assemblée nationale : des coalitions sont ainsi toujours nécessaires pour former un gouvernement. Ainsi, en mai 2010, c'est l'alliance Megacombinatie, constituée du NDP de l'ancien dictateur Desi Bouterse (Parti démocratique national), du KTPI de l’ancien président Jules Wijdenbosch (Kerukanan Tulodo Pranatan Ingit, Parti pour l’Unité nationale et la Solidarité) et d’un petit parti hindoustani qui a emporté les élections législatives du 25 mai 2010.
Très affaiblie par cette cinglante défaite, l'une des ailes de l'opposition que constitue le NPS (Nationale Partij Suriname), censé représenter les intérêts de la communauté créole (un peu moins d'un tiers de la population), est en net déclin. L’autre formation de l’opposition, le VHP (Vooruitstrevende Hervormings Partij), défendant les intérêts de la population hindoustanie (28 % de la population), semble quant à elle plus dynamique, mais continue d'être assimilée à un groupe dominant économiquement et peu ouvert sur les autres communautés.
Asseyant son influence, le NDP de Desi Bouterse gagne de nouveau les élections parlementaires du 25 mai 2015, en emportant la majorité absolue des sièges (27 sièges sur 51). S'il n'a plus besoin de faire d'alliances pour gouverner, il doit toutefois composer avec d'autres partis pour être réélu à la présidence de la République, et il y parvient, le 14 juillet 2015. Il convient d'ajouter ici que la politique surinamaise est caractérisée par le clientélisme : une relation patron-client entre politicien et électeur au sein de laquelle le premier fournit au second une aide socio-économique (emplois, subventions, etc.) en échange d'un vote.

Lors des élections législatives de 2020, le VHP remporte vingt des cinquante et un sièges de députés et devient le principal parti politique surinamais. Le 13 juillet suivant, l'opposition refuse de participer à l'élection en ne proposant aucun candidat suite aux scandales entourant le président sortant. Santokhi est donc le seul candidat à l'élection présidentielle, élu par acclamation.

Position régionale et enjeux socio-économiques

Le Suriname est resté longtemps isolé sur la scène politique régionale du fait de son histoire (seul pays néerlandophone sur le continent), de son engagement aux côtés de Cuba, du Nicaragua, de la guérilla salvadorienne et du régime de Maurice Bishop à la Grenade au début des années 1980, mais aussi en raison du repli sur lui-même lors de l’insurrection noir-marron de 1986. Pour rompre cet isolement, après être devenu membre de l’OMC, le pays a rejoint diverses organisations régionales telles que le marché commun caribéen (CARICOM) ou encore l’Organisation du Traité de Coopération Amazonienne (OTCA). Du fait de l’importante communauté musulmane, le Suriname a aussi adhéré à l’Organisation de la Coopération Islamique (OCI).
Malgré ces efforts et cet engagement à coopérer avec ses voisins, le Suriname possède des zones d'ombres internes qu'il devra clarifier afin d'avancer : en matière de traite des êtres humains pour commencer. L'exploitation sexuelle des femmes et celle des enfants au travail sont un enjeu de taille, tout comme la régularisation de certains de ses travailleurs sans-papiers brésiliens, guyaniens (du Guyana) ou encore haïtiens. Egalement, il s'agit de trouver un équilibre entre les intérêts des groupes ethniques et ceux de la nation prise dans son ensemble. La concurrence ethnique qui a lieu dans la sphère politique est un obstacle imposant sur le chemin d'une gestion efficace de la gouvernance. Par ailleurs, l'accès inégal à l'éducation, surtout dans les zones les plus pauvres, tout comme l'accès à la santé et au logement restent des facteurs sociaux qui méritent une considérable amélioration.