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Une mosaïque de plus de 450 ethnies

Le patrimoine culturel et humain de la RDC est d’une richesse incroyable, avec près de 450 ethnies, et presque autant de langues, coutumes, et traditions. On peut les regrouper en grands ensembles répartis sur des territoires spécifiques :

- dans la région du centre-sud, soit le bas du Kasaï, le Tanganyika et le Haut-Katanga, on trouve les Luba ou Baluba qui constituent le groupe ethnique principal (18%) ;

- les Mongo (17%) occupent le nord-est, c’est-à-dire pratiquement toute l’ex grande province de l’Equateur et une partie du nord du Kasaï ;

- les Kongo ou Bakongo (12%), le troisième groupe ethnique, peuplent tout le territoire du Kongo Central autour de Kinshasa ;

- toute la région du sud de l’ex grand Katanga, le long de la frontière angolaise, est habitée quant à elle par les Lunda.

Autour de ces quatre grands ensembles, on trouve de nombreuses autres ethnies et groupes qui leur sont apparentés de près ou de loin, tels que les Téké, les Chokwé, les Kuba, les Tétéla, etc.

L’identité ethnique, porteuse d’un héritage spécifique, est d’une importance primordiale au Congo. Comme le souligne Isidore Ndaywel « le Congolais vit le culte des origines. A chaque individu correspond une appartenance familiale le rattachant à une communauté et à une terre ancestrale où reposent les ancêtres, même si on est citadin ou né à l’étranger ».

Groupe bantou. La majorité des ethnies, dont celles précitées, appartiennent au groupe bantou qui représente 80% de la population. Le terme bantou ne renvoie pas au départ à un groupe ethnique mais à une communauté linguistique qui couvre la plus grande partie de l’Afrique centrale et australe avec quelque 400 langues bantoues et apparentées. Ce sont les Bantous qui ont fondé les premiers grands royaumes du Congo. Plusieurs légendes existent quant à l’origine exacte du peuple bantou dont le nom vient du mot « bantu » désignant « les hommes ». Ce peuple serait originaire du Tchad actuel ou du Nigeria, et aurait émigré en direction du sud à la suite probable de l’assèchement de la zone sahélienne et de la pression démographique. Avant d’atteindre les terres congolaises, ces migrants se seraient divisés vers 3 000 avant J.-C. en deux branches constituant le noyau bantou occidental et le noyau bantou oriental.  Le groupe oriental préféra la savane du nord-est et du Kivu, et se spécialisa dans la culture des céréales et l’élevage du bétail. Le groupe occidental, le plus important, se répandit dans les forêts et continua cette expansion jusque dans le Maniema méridional.  En se mêlant aux autochtones, les uns et les autres furent à la base d’autres mouvements internes, opérant le mélange, avec ceux-ci, mais aussi entre les deux blocs in fine.

Peuples autochtones pygmées. Il s’agit probablement des premiers habitants du pays, leur existence étant déjà connue du temps d’Aristote et des Egyptiens. Les récentes études font remonter l’existence d’un ancêtre commun aux Bantous et Pygmées à environ 60 000 ans. Les peuples pygmées autochtones auraient été repoussés dès le second millénaire lors de l’expansion bantoue. Ils seraient entre 300 000 et 450 000 en RDC, essentiellement répartis en deux groupes : les Mbuti au nord-est, dans les forêts de l’Ituri, et les Twa au centre-ouest du pays.  Historiquement chasseurs-cueilleurs et semi-nomades, une grande partie de ces communautés s’est sédentarisée au cours du XXIe siècle. Ils possèdent une très grande connaissance de la forêt équatoriale, dont ils dépendent étroitement pour leur subsistance. Leur petite taille caractéristique (1,50 mètre de moyenne) proviendrait d’une adaptation génétique au milieu forestier. Leur survie est menacée par la dégradation en cours de leur écosystème du fait de la disparition progressive de la forêt et du braconnage. Ils font par ailleurs toujours l’objet de nombreuses discriminations.

Groupe nilotique. Ce groupe désigne à l’origine des populations qui habitent la vallée du Nil ou en sont originaires. Le terme nilotique a cependant davantage pris un sens linguistique, désignant tous les groupes parlant des langues apparentées à celles des Shilluk, des Dinka et des Nuer. Au Congo, on retrouve notamment les Alur, Kakwa, Bari, qui forment le troisième groupe ethnique de la RDC. Mais ils sont assez peu représentés, sauf dans quelques chefferies au nord-est du pays. À la frontière est, autour des grands lacs, on trouve également des Hamites, plus ou moins métissés, parmi lesquels on trouve les pasteurs Tutsi.  On a affirmé que des traits culturels seraient communs aux sociétés parlant les langues nilotiques, notamment la valeur prédominante accordée au bétail et aux activités pastorales.

Groupe soudanique. L’essor économique du Soudan à partir du XIVe siècle aurait provoqué une explosion démographique qui aurait eu pour conséquence l’essaimage de populations vers le Sud. Présentes essentiellement dans le nord-est du pays, quelques ethnies s’apparentent dès lors au groupe soudanique central. Parmi les principales ethnies, on trouve les Zande, les Mangbetu, les Ngbandi, les Ngbaka, les Mbanja... Leur organisation sociale repose sur une aristocratie formée par les descendants des premiers conquérants et sur une royauté de nature guerrière. Ces populations sont assez récentes (entre le XIVe et le XIXe siècle) : elles sont venues du Nord s’installer dans le bassin de l’Oubangi-Uélé, dans les provinces Equatoriale et Orientale, refoulant vers le Sud les peuples bantous.

Diversité linguistique

L’Afrique abrite quatre supra-familles linguistiques distinctes : Afro-asiatique, Niger-Congo, Nilo-saharien et Koisan. Le Congo se singularise par une multitude d’ethnies que l’on peut regrouper en grands ensembles ayant une implantation territoriale bien marquée et qui se définit très souvent par une base linguistique commune : la langue est ainsi la caractéristique principale de la communauté, c’est la première « distinction culturelle palpable ».

Quatre langues nationales cohabitent à côté du français, la langue officielle héritée de la colonisation belge, et qui sont par ordre d’importance : le swahili (ou kiswahili) dans les provinces de l’Est ; le lingala dans le nord et nord-est ainsi qu’à Kinshasa ; le kikongo dans les provinces du Kongo Central et de l’ex Bandundu (Kwango, Kwilu, Mai-Ndombe) ; et le tshiluba dans les Kasaï et une partie de l’ex grand Katanga.  L’anglais ayant été ajouté comme langue officielle à l’époque de Kabila père.

En dehors de ces quatre grandes langues nationales, on dénombre des centaines de dialectes s’y rapportant. Les 246 langues locales identifiées dans le pays font partie du patrimoine immatériel tel que reconnu par l’UNESCO. Celles-ci appartiennent à trois groupes linguistiques différents, selon leur origine ethnique commune : 212 sont affiliées au groupe de langues bantoues, 21 relèvent du groupe soudanais ; et 13 des langues oubanguiennes.

Français. Le français est la langue officielle en RDC, consacrée par la Constitution. C’est la langue de l’administration, de l’enseignement et des médias. Bien que son usage tende à diminuer au profit des langues nationales et dialectes oraux, faute d’accès à l’enseignement (ou d’un enseignement de la langue défectueux) pour une grosse partie de la population congolaise... La pratique du français est plus métissée et chantante qu’en Europe. Elle y est soumise à l’influence du lingala et des autres langues nationales notamment. Ainsi qu’à la grande créativité des Congolais, et des Kinois en particulier qui ne cessent de se l’accaparer, de la triturer et de la mélanger. Ce qui rend le français du Congo (comme ailleurs en Afrique) très dynamique, poétique et vivant.

Kiswahili. Les langues swahilies sont un groupe de langues bantoues de l’Afrique de l’Est qui sont le fruit d’un métissage de langues africaines, d’arabe et du persan, conséquence de la longue campagne esclavagiste des « Arabo-Swahili » dans cette région au XIXe siècle. La plus utilisée et populaire de ces langues est le kiswahili (« langue swahilie » en swahili), une version standardisée et adoptée comme langue nationale au Kenya, en Ouganda et en Tanzanie. C’est cette version que l’on retrouve – parmi de nombreux dialectes s’y référant – à l’est de la RDC. C’est la langue la plus parlée du pays, par environ 40% de la population congolaise mais limitée essentiellement aux provinces de l’ex grand Katanga (Lualaba, Haut-Lomami, Haut-Katanga, Tanganyika), du Maniema, du Nord et du Sud-Kivu, ainsi que dans l’ex Province Orientale (Ituri, Haut-Uele, Tshopo).

Lingala. Le lingala a fini par s’imposer comme langue nationale majoritairement utilisée à Kinshasa, ainsi que dans les provinces septentrionales, et nord-orientales (soit 27,5% de la population). On la qualifie de « langue sans manières », caractérisée par un style assez direct et de tradition essentiellement orale. Elle fut vulgarisée par la musique et sous l’impulsion de Mobutu dont c’est la langue d’origine. Tirant son origine des Bobangi, entre le fleuve Congo et l’Ubangi, le lingala s’est également répandu grâce au commerce fluvial et par les migrations de l’armée, dont il est l’idiome de prédilection depuis l’époque coloniale. Mais le lingala est surtout la langue vernaculaire grâce à laquelle il est possible de communiquer dans presque toute la RDC, grâce à son influence (langue de la capitale, musique, médias...). Il est également parlé dans le nord de l’Angola, et au Congo-Brazzaville.

Kikongo. Le kikongo appartient, comme les trois autres langues nationales, à la famille des langues bantoues. Il est usité par environ 17% de la population, dans les provinces du Kongo-Central,  Kwango, Kwilu, Mai-Ndombe, et dans une moindre mesure à Kinshasa et à l’ouest du Kasaï. Langue parlée par le peuple Kongo (les Bakongo), on la retrouve aussi dans le nord-ouest de l’Angola, ainsi que dans le sud du Congo-Brazzaville et sur la côte sud du Gabon. Il existe aussi un kikongo « commercial » appelé « kituba » ou « kikongo ya l’Etat », et majoritairement utilisé dans l’administration, à l’est de sa zone d’influence principalement (dans l’ex province du Bandundu). Il s’agit d’une version de la langue simplifiée, fortement mélangée avec le français, et dont la fonction vernaculaire permet d’être compréhensible par les locuteurs des divers dialectes issus du kikongo.

Tshiluba. C’est l’idiome des Baluba, parlé dans la partie centrale de la RDC, notamment dans les Kasaï,  et dans le nord de l’ex grand Katanga (Lomami), couvrant une population d’environ 17%. Le tshiluba constitue cependant la deuxième langue musicale du Congo-Kinshasa après le lingala, grâce à la riche culture musicale traditionnelle des Luba-Kasaï qui participent à son rayonnement. Le tshiluba fait partie de la famille des langues bantoues, du groupe de langues luba au côté du kiluba (luba-katanga), du luba-sanga (kisanga), du luba-hemba (kihemba) et du kanyoka.