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L’âge d’or de la poésie

Durant la période coloniale japonaise, la poésie a connu un âge d’or grâce, entre autres, à des auteurs comme Yi Sang, Yun Dong-ju et Pak In-hwan ou encore Ko Un.  Yi Sang (1910-1937) est considéré comme un poète très avant-gardiste et a souvent été appelé « le Rimbaud coréen ». Mort très jeune, à l’âge de 26 ans, il a apporté une touche novatrice à la littérature grâce à son langage et grâce aux thèmes littéraires utilisés. Il rejoint en 1934 Le Cercle des Neufs (avec entre autres Kim Girim, Lee Taejun, Park Taewon…) et publie plusieurs de ses oeuvres dans le journal qui porte le même nom que leur groupe.  En 1936, il est emprisonné au Japon pour délit d’opinion. Il décède peu de temps après sa libération, des suites de la tuberculose. Ce qu’il faut comprendre, c’est qu’il était interdit sous l’occupation japonaise de promouvoir la culture coréenne. C’est pour cette raison qu’il a été réhabilité et republié seulement après l’Indépendance. Un prix littéraire créé en 1977 porte son nom. Il est également possible de visiter sa maison dans le quartier de Seochon. C’est un lieu d’expositions culturelles. Influencé par le dadaïsme et le surréalisme, il a expérimenté des nouvelles formes de langages et a peint à la fois ses tourments et son moi intérieur sans pour autant se couper du monde extérieur. Voici quelques-unes de ses oeuvres à découvrir en français : L'inscription de la terreur ; Écrits de Sang ; Perspective à vol de corneille et Les Ailes.

Yun Dong-ju (1917-1945) est un poète sud-coréen également mort très jeune en prison où il a été incarcéré après avoir été accusé de commettre des actes anti-japonais. Il étudie les lettres dans l’actuelle Université Yonsei où il essaie en vain de faire publier ses premiers poèmes dans le recueil Ciel, vent, étoiles et poésie. Le recueil sera finalement publié en 1948, ce qui fera de son auteur l’un des symboles de la résistance contre l’impérialisme japonais. Son oeuvre est empreinte d’une grande sensibilité. Il évoque le sentiment d’abandon, le départ de la terre natale. Dans son autre recueil La vie et la mort, il met en conflit la lumière et l’obscurité, la vie et la mort… Désespoir, anxiété, solitude sont des thèmes récurrents qui teintent sa poésie. Il est possible de découvrir à Séoul un musée qui lui est consacré.

Pak In-hwan (1926-1956), tout d’abord libraire à Séoul, commence à publier ses poésies dans un journal dès 1946. C’est grâce au recueil collectif Une nouvelle ville et un choeur de citoyens, publié en 1949, qu’il obtient un certain succès. Sa poésie est empreinte de la modernisation et de l’évolution de la Corée du Sud et de leurs conséquences sur les hommes : désespoir, perte de repères et d’identité.

Quant à Ko Un (né en 1933), moine bouddhiste entre 1952 et 1962, il a été très actif dans le mouvement pro-démocratique contre la dictature militaire et a suivi un chemin littéraire riche : président de l’Association des écrivains libres de Corée et président de l’Association des écrivains du peuple, il a reçu de nombreux prix. C’est en 1958 qu’il publie ses premiers poèmes. Les thèmes principaux sont le désespoir, l’absurdité de l’existence, puis plus tard le combat pour l’équité et la justice. Voici quelques-unes de ses oeuvres traduites en français : Qu’est-ce ? ; Sous un poirier sauvage ; Poèmes del’Himalaya ; Fleurs de l’instant.

Des auteurs contemporains

Commençons par Jae-Hoon Choi, né en 1973 à Séoul. Il a écrit, entre autres, Le Château du baron de Quirval, recueil de nouvelles publié 2010. Pour écrire ces sept nouvelles, l’auteur s’est inspiré de personnages littéraires européens comme le Marquis de Sade ou encore Sherlock Holmes, et les a transposés dans la Corée contemporaine. Il a également publié en 2012 le roman Sept Yeux de chats qui a reçu un prix littéraire.

Mentionnons aussi Yun Dae-Nyeong (né en 1962) qui, après avoir vécu une enfance plutôt pauvre, est entré à l’université et en est ressorti diplômé en littérature et langue françaises. Passionné par l’écriture, il reçoit ses premiers prix littéraires lorsqu’il est au lycée. Le succès vient dès 1990 grâce à l’obtention du prix du Nouvel écrivain. S’en suivent de nombreuses récompenses comme le Prix du Jeune artiste d’aujourd’hui (1994) ; le Prix Yi Sang (1996) ; le prix de littérature contemporaine (Hyundae Munhak, 1998) et le prix littéraire Yi Hyo-seok (2003) ! À découvrir, les romans Je suis allé voir un vieux film, Entre terre et ciel ou encore Pourquoi le tigre est-il allé à la mer ?

Impossible de passer à côté de Kim Yeong-ha (né en 1968) auteur considéré comme l’un des chefs de file de la nouvelle littérature de la Corée du Sud. Après des études universitaires et son service militaire, il décide d’embrasser une carrière littéraire. Il publie alors, en 1995, son premier récit Une méditation à travers le miroir puis l’année suivante La Mort à demi-mot pour lequel il reçoit le Prix du Nouvel Écrivain. Il a écrit depuis de nombreux ouvrages, recueils de nouvelles et également un roman historique Fleur noire. Parlons à présent d’une plume féminine : Mia Yun. Née en 1956 à Séoul, Mia Yun est à la fois autrice, traductrice et journaliste. Elle grandit en Corée du Sud où elle a eu accès à un grand nombre d’ouvrages étrangers. C’est grâce à toutes ces lectures qu’elle a su qu’elle voulait devenir elle aussi écrivain. Elle écrit ses premiers poèmes à 11 ans. Elle a quitté la Corée du Sud pour suivre ses études universitaires au City College de New York où elle vit toujours. En 1998, elle publie son premier roman, traduit en français en 2007 seulement, sous le titre Les Âmes des enfants endormis. Dans ce récit, Mia Yun peint le portrait d’une femme qui doit, dans les années 1960, faire vivre ses trois enfants comme elle peut. Quelques années plus tard, en 2004, elle publie Translations of Beauty.

Né en 1948, Yi Mun-yeol est l’un des auteurs coréens les plus traduits en français. Il est l’auteur de chroniques politiques et également de nouvelles. Il a entre autres écrit Le Fils de l’homme, L’Ombre et l’obscurité, La Promenade de l’escargot. Il aime, par l’intermédiaire de son écriture, s’intéresser aux injustices sociales, à ce qui se passe à l’intérieur des communautés, la perte d’identité et aussi aux questions existentielles. C’est avec sa nouvelle Pour l’empereur qu’il a gagné toutes ses lettres de noblesse. Dans ce récit, il évoque la compétition du pouvoir à travers la Corée depuis le XIXe siècle jusqu’à la Guerre de Corée. Yi Mun-yeol a reçu de nombreux prix à travers les décennies.

Hwang Sok-yong, quant à lui, est né en 1943 sous l’occupation japonaise. Lors de la guerre du Vietnam, il s’occupe d’effacer les preuves des massacres des civils. Il relatera cette traumatisante expérience dans sa nouvelle La Pagode (1970), récit qui reçoit un prix et qui lui ouvre les portes de la vie littéraire. C’est son roman Jang Gil-san (sorti en 1974) qui devient un best-seller et lui offre une grande notoriété. Citons également le roman L’Invité (2001) qui évoque la division de la Corée, et puis récemment Toutes les choses de notre vie (2011) relatant la vie des trieurs de la décharge de Séoul, ainsi que Au soleil couchant (2017).

Le Manhwa

Le Manhwa est l'équivalent du manga en Corée. Née sous l'occupation japonaise il y a environ un siècle, cette bande dessinée coréenne a longtemps été soumise aux censures et interdictions de la colonisation puis du régime autoritaire, et il a fallu attendre les années 1980 avant qu'elle soit enfin reconnue à sa juste valeur en Corée du Sud et puisse s'exprimer librement. Des revues comme IQ Jump ou Young Champ ont été créées sur le modèle des revues japonaises et les auteurs ont laissé libre cours à leurs désirs créatifs, multipliant ainsi les styles d’expression. Aujourd'hui, les bandes dessinées coréennes sont publiées par millions, et sont quasiment aussi populaires que les mangas au Japon. En France, la Corée a été l'invitée d'honneur du 30e festival international de la bande dessinée d'Angoulême en 2003, et l'engouement pour les Manhwa n'a cessé de grandir depuis. Parmi d'autres, l'éditeur Casterman traduit désormais de nombreux Manhwa, notamment dans sa collection « Hanguk » consacrée exclusivement aux œuvres coréennes.

Littérature jeunesse

Pour les plus jeunes d’entre nous, voici aussi quelques auteurs et livres à découvrir. Les auteurs de littérature jeunesse proposent un mixte entre l’art contemporain et abstrait et l’art folklorique et traditionnel. Chan-Ok et Picquier Jeunesse sont deux éditeurs spécialisés dans la littérature asiatique. On trouve aussi des albums sud-coréens chez Didier Jeunesse et MeMo éditions.

C’est dans les années 1900-1920 qu’une littérature de jeunesse a commencé à éclore sous l’influence de certains intellectuels désireux de voir les futures générations transformer et sauver la nation. Le premier magazine pour la jeunesse, Sonyeon, est créé en 1908 par l’écrivain Nam-sun Choi (1890-1957) : textes éducatifs et également littéraires y sont proposés. Malheureusement, l’invasion de la Corée par le Japon le fait disparaître deux ans plus tard, car interdiction d’écrire des textes patriotiques ! Les manuels d’école sont également interdits. Tout simplement, les Japonais par un décret de 1911 interdisent l’enseignement du coréen et de l’histoire de la Corée. Il faut attendre 1922 pour que l’enseignement du coréen retrouve sa place. Jeong-hwan Bang (1899-1931) publie un recueil de contes intitulés Cadeau d’amour où l’on retrouve des contes comme La Belle au bois dormant et Cendrillon. C’est le premier ouvrage littéraire pour les enfants publié en Corée. Il a également participé dès 1923 à la publication d’un magazine littéraire et culturel pour les enfants appelé Eorini. Comptines, poèmes voient également le jour pendant toutes ces années et ce jusqu’en 1938 où le coréen est à nouveau interdit.

Entre 1945 et 1950, il y a un nouvel essor de la poésie et des revues pour enfants. La guerre entre les deux Corées ralentit à nouveau la production. Il faut alors attendre les années 60-70 pour que l’édition jeunesse fleurisse. C’est aussi la naissance des collections de livres proposant des traductions d’œuvres classiques et des œuvres coréennes. Évoquons par exemple l’auteur So-chun Kang (1915-1962) qui a écrit des œuvres pour la jeunesse considérée comme moralisatrices, imaginaires et naïves. À côté de lui, l’auteur Won-soo Lee (1911-1981) propose des ouvrages plus réalistes et critiques où la guerre et la pauvreté ont toute leur place. C’est dans les années 80 que naissent les albums coréens, et à partir des années 90, on assiste à un véritable essor de la littérature jeunesse. L’édition s’intéresse particulièrement à la culture coréenne. Certains écrits populaires sont réécrits et illustrés, les auteurs méconnus sont alors redécouverts.