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Un brin de démographie

Parlons chiffres ! En 2020, selon des estimations onusiennes, l’Ouganda comptait près de 45,8 millions d'habitants avec un taux de variation naturelle (différence entre le taux de natalité et le taux de mortalité) parmi les plus élevés au monde : 3,3 %. Les données sont éloquentes puisqu’en 2010 la population globale du pays s’établissait à 32,4 millions, soit un gain de 13,4 millions de personnes en seulement une décennie ! Par suite, la proportion d’enfants de moins de 15 ans tourne autour de 46 % (par comparaison, elle représente 17,7 % de la population française en 2021) et l’âge médian est de 16,7 ans. Autant la base de la pyramide ougandaise des âges est large, autant son apex est effilé, les plus de 65 ans ne constituant que 2 % de la population. Quant à l’espérance de vie à la naissance, qui n’a point cessé de croître lors des vingt dernières années, elle est légèrement supérieure à 64 ans. Le solde migratoire, qui pèse sur la croissance démographique, est également à prendre en compte : sur la période 2015-2020, 843 000 immigrants (réfugiés pour la plupart) se sont établis en Ouganda. La densité de population est de 190 habitants au km². Relativement élevée, elle recouvre d’importantes disparités régionales. Ainsi les districts du nord-est du pays sont peu peuplés alors que bon nombre de leurs homologues méridionaux dépassent allégrement cette barre de 190 hab/km². Actuellement, un quart de la population ougandaise vit en zone urbaine. Le pays demeure donc essentiellement rural. Les dix principaux foyers de peuplement sont Kampala (1,6 million d’habitants dans la cité intra-muros), Gulu (153 000 résidents), Lira (119 200 âmes), Masaka (104 000), Mbale (100 000), Mbarara (97 500), Jinja (93 000), Entebbe (75 000), Mukono (70 000) et Kasese (67 000).

Le nuancier ethnique ougandais

En Ouganda, il existe près d’une cinquantaine d’ethnies se répartissant en deux grands ensembles linguistiques et culturels : les populations d’origine bantoue et celles d’origine nilotique. Les Bantous, dont les groupes principaux sont les Baganda, les Banyankole et les Bakiga, représentent les trois quarts de la population et occupent la moitié sud du pays. Les peuples nilotiques (Acholi, Karamojong, Langi), venus comme leur nom l’indique des rives du Nil au Soudan et en Ethiopie, sont installés dans le nord de l’Ouganda et se singularisent par la prédominance des activités pastorales. Numériquement parlant, les Baganda composent l’ethnie la plus importante (17 % de la population totale). Héritiers culturels du royaume du Buganda, on les trouve notamment dans la capitale et autour du lac Victoria. Au sein des immenses plaines du septentrion, les Acholi, qui constituent 5 % de la population, sont considérés comme les premières victimes du conflit qui durant vingt ans a opposé les rebelles de la LRA aux forces gouvernementales de Museveni, au point que certains observateurs n’hésitent pas à parler de génocide les concernant. L’Ouganda compte également un certain nombre de réfugiés arrivés dans le pays au moment des différentes crises qu’a connues la région : Rwandais et Congolais à l’ouest, Sud-Soudanais au nord et Kenyans à l’est. On recense enfin quelque 9 000 Indiens qui, bien que perçus de l’extérieur comme une communauté, se différencient nettement en termes d’origine et de composition sociale et religieuse.

Mille et un idiomes

La langue officielle est l’anglais. On se rend vite compte que sa pratique, privilégiée par les élites du pays, est très restreinte hors zones urbaines. Bien qu’enseignée à l’école primaire et largement diffusée par les médias, elle serait correctement parlée et comprise par environ 2 millions d’Ougandais, soit à peine 4 % de la population totale. On dénombre par ailleurs plus de quarante langues vernaculaires, bantoues ou nilo-sahariennes. Les langues bantoues comptent pour la moitié des langues du pays et regroupent environ 70 % des locuteurs. Elles sont parlées dans tout le sud du pays, ce qui correspond aux régions administratives de l’Ouest, du Centre et de l’Est. Les langues parlées par plus de 100 000 locuteurs sont d’abord le luganda (langue maternelle de quelque 8,5 millions de citoyens ougandais), le nyanrore, le chiga, le soga, le masaba, le kinyarwanda, le nyoro, le toro, le kenyi, le konjo, le gwere, le luyia et le nyole. Les langues nilo-sahariennes sont, quant à elles, parlées dans le nord et l’est. Ces dernières se divisent en plusieurs groupes : le soudanais de l’est, le soudanais central et le kouliak. Les langues nilo-sahariennes les plus importantes sont le lango, le teso, l’acholi (luo), l’aringa, l’alur, le karamojong, le lugbara, le ndo, le ma’di, le kuman et le kupsabiny. Les langues du groupe kouliak (ik et soo), employées par moins de 7 500 locuteurs, sont menacées de disparition à plus ou moins brève échéance. Outre les familles de langues susmentionnées, le goudjarati et l’hindi sont utilisés par les immigrés indo-pakistanais et le français par quelques Congolais du Kigezi ainsi que par d'anciens réfugiés ougandais revenus de RDC. Terminons, enfin, par le swahili. Cet idiome est le plus important d'Afrique de l’Est : entre 80 et 110 millions de personnes le parleraient du Kenya au Mozambique. Métissage d’arabe et de langues africaines, cette langue (nommée kiswahili) ne constitue une langue maternelle que pour quelque 400 000 locuteurs ougandais, mais environ 90 % des autochtones l’utiliseraient comme langue seconde. Le swahili a toujours été une langue véhiculaire au sein de l’armée et de la police ougandaises. En effet, les membres de ces deux institutions appartenant, depuis le protectorat britannique, à différentes ethnies, la seule langue pouvant assurer une communication efficace est le swahili. Sous le régime d’Idi Amin Dada, le swahili a été méprisé parce qu’il était associé à la brutalité des soldats illettrés, mais après que l’armée tanzanienne a contribué à la chute du tyran, le swahili a été perçu comme la langue prestigieuse des libérateurs. La place allouée au swahili en Ouganda demeure ambiguë, car certains souhaiteraient unifier les Ougandais autour du swahili afin de limiter l’importance du luganda.