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Richesses vernaculaires

Les sites de Bigo bya Mugyenyi et Ntusi possèdent les plus anciennes architectures de terre d’Ouganda. Il s’agit d’alignements de fossés, talus et plateformes érigés de façon à protéger les cultures locales, notamment contre le passage destructeur des pachydermes ! Autre représentante de l’architecture vernaculaire : la hutte traditionnelle. Toujours circulaire, elle est réalisée dans des matériaux naturels (terre, bois, herbe, boue). L’ossature est réalisée en bois, tandis que la toiture est de chaume. Le roseau est souvent employé tressé sous forme de piliers ou de treillis pour renforcer les structures. Les huttes se composent d’une pièce unique qui peut comporter des cloisons en roseau délimitant les différents espaces d’habitation. Certaines huttes se reconnaissent à leur toit conique, c’est le cas chez les Nkolé et les Ganda ; d’autres possèdent des toits dont le chaume est comme nivelé, créant ainsi des effets de rythme étonnants, c’est le cas chez les Karamajong. Certaines huttes possèdent des toits qui descendent jusqu’au sol, protégeant ainsi l’habitation. On retrouve ce type de structure dans les huttes des Nyoro et des Ganda, dont on remarquera également la façade en roseau dont le seuil prend la forme d’une arche. Les Soga et les Teso, eux, décorent les murs de leurs huttes à l’aide de pigments naturels. Réalisées en matériaux naturels et pensées en adéquation avec l’environnement, ces huttes sont les premières réalisations bioclimatiques du pays ! La plus célèbre de ces huttes est celle que l’on peut observer au cœur du complexe palatial de Kasubi, qui renferme le tombeau des rois du Buganda. Le Muzibu Azaala Mpanga, le bâtiment principal et central, est une hutte circulaire surmonté d’un dôme. La grandeur du royaume de Buganda y transparaît également dans la richesse décorative, comme le montrent les poteaux de bois habillés d’écorces finement travaillées. L’organisation hiérarchique du complexe se retrouve dans l’ensemble des villages gandas organisés autour de la maison du chef qui fait également office de lieu de réunion.

Héritage colonial

Les ruines du Fort de Patiko, également appelé Baker’s Fort, sont les témoins d’une architecture de pierre à visée défensive ; tandis que la Cathédrale Namirembe, la plus ancienne du pays, traduit les désirs d’évangélisation des colons. Si le bâtiment originel date du XIXe siècle, l’édifice actuel, avec sa silhouette en brique de terre et son toit de tuiles, date de 1919. Une fois le Protectorat installé, le pays voit se multiplier églises, édifices administratifs et villas. Ces dernières se reconnaissent à leurs vérandas à colonnades, leurs toits-terrasses, et à leur couleur blanche qui contraste avec la toiture de couleur vive. Les grands édifices, eux, alternent entre style néo – telle la néo-romane Cathédrale Sainte-Marie de Kampala avec ses deux imposantes tours carrées, le très classique Temple Baha’i avec son dôme et ses colonnades ou l’Université de Makerere avec sa tour carrée –, à des styles plus modernes, l’Art déco en tête. Jinja regorge d’édifices aux silhouettes tout en courbes, aux couleurs exotiques et aux enseignes stylisées. Ne manquez pas le Cinéma Odéon ou bien encore le Madlani Building. Autre étonnant témoin de cette période : l’héritage de la communauté indienne. C’est à elle que l’on doit le chemin de fer et ses infrastructures, tel le pont en acier de 140m qui relie Jinja à Kampala. Une fois les travaux achevés, nombreux sont les Indiens à être restés en Ouganda. Soutenus par le protectorat britannique, ils ont pu créer des commerces prospères. Les rues de Jinja sont bordées de leurs nombreuses échoppes. La ville possède également l’une des plus belles demeures indiennes : l’immeuble Madhvani, le plus ancien édifice à deux étages du pays. On admire ses balcons et vérandas ainsi que ses décors de bois finement ciselés. Mais le plus impressionnant témoin de cette présence indienne reste bien sûr le temple hindou de Kampala. Imaginé comme une réplique du célèbre temple de Somnath dans le Gujarat, le temple a été réalisé selon des techniques ancestrales et avec des matériaux traditionnels… vous n’y trouverez donc aucune pièce de fer ou d’acier. En revanche vous pourrez y admirer un intérieur foisonnant baigné de couleurs et de lumière.

Ouganda contemporain

Les volumes simples en béton du modernisme et les rideaux de verre du style international ont été largement utilisés pour symboliser l’indépendance nouvellement acquise du pays. Le ministère des Finances à Kampala en est un bon exemple. Aujourd’hui, le pays multiplie les projets qui renouent avec les savoir-faire et matériaux traditionnels, tout en imaginant des structures respectueuses de l’environnement. Les réalisations les plus évidentes en la matière sont les écolodges. Le Kyambura Lodge est un des premiers à avoir vu le jour sur le site d’une ancienne coopérative de café et représente parfaitement cette architecture caméléon qui se fond dans son environnement, tout comme le récent Nile Safari Lodge à Buliisa dont on admire les cottages sur pilotis et la géométrie des toits rappelant la silhouette des arbres. Autres structures phares, les écoles. La fondation australienne Cotton On s’est lancé le défi de réaliser près de 20000 lieux d’éducation. Design passif, structure de briques d’argile, orientation pensée par rapport aux vents et à la lumière, ces écoles s’adaptent à l’environnement… tous comme les structures hospitalières, à l’image de l’antenne du Mount Sinaï à Jinja dont les panneaux solaires ont été disposés tels des feuilles de bananier pour générer ombre et fraîcheur, ou du Centre de Chirurgie Pédiatrique à Entebe, bâtiment bioclimatique en pisé imaginé par le célèbre architecte Renzo Piano. Parmi les très belles initiatives récentes, il faut également citer le Village Batwa à Gahinga, projet d’habitat durable pensé pour reloger des populations Batwa expulsées de leurs forêts et qui ont contribué à la construction de chacune des maisons ; ainsi que le Village SINA (Social Innovation Academy) dans les environs de Kampala, qui accueille des jeunes en difficulté qui participent à l’édification de huttes traditionnelles, mais aussi de huttes en… bouteilles de plastique ! Et si l’architecture de demain s’écrivait en Ouganda ?