Découvrez l'Ouganda : Littérature (BD / Actualité)

L’Ouganda aura peut-être échappé à un colonialisme trop dur, le pays ayant été administré comme un protectorat dès 1894, mais il n’aura pas été épargné par les dérives d’un régime tyrannique à partir de 1971, sous le joug d’Idi Amin Dada. Depuis que le dictateur a été renversé en 1979, la situation reste tendue : le président actuel ne semble pas prêt à lâcher le pouvoir comme en témoignent ses réélections successives et régulièrement contestées. En parallèle, depuis quelques décennies, la littérature a quitté la pure oralité qui était son apanage pour se graver dans l’écrit, elle ne perd pas pour autant de sa verve mais s’offre ainsi la possibilité de se faire entendre au-delà des frontières. Un parti-pris qui paye comme en témoigne le succès du roman de Moses Isegawa, Chroniques abyssiniennes, tout d’abord publié aux Pays-Bas puis traduit dans une quinzaine de langues. Le support numérique, largement exploité, élargit lui aussi l’horizon.

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Les précurseurs

Né en 1931 à Gulu, Okot p’Bitek consacre une thèse à la culture acholi. En s’inspirant des chants traditionnels et de la situation de son pays qui a accédé à l’indépendance en 1962, il écrit Wer per Lawino, qu’il publiera dans sa traduction anglaise (Song of Lawino) en 1966. Cette longue mélopée d’une femme issue d’un milieu rural se découvre en français aux éditions Présence africaine, contrairement à la réponse de l’époux, Ocol, qui lui fera suite. Mais son franc-parler ne plait pas au gouvernement : il doit s’exiler. Son impact sur la littérature ougandaise est néanmoins considérable, il est ainsi habituel d’entendre que certains appartiennent à la Okot school poetry. L’oralité sert aussi le propos politique de son quasi-contemporain, Robert Serugama, né au Buganda en 1939. Revenu subjugué par sa découverte du théâtre de l’absurde en Irlande, il crée dès 1967 une compagnie et écrit A play. Deux ans plus tard, il s’essaye au roman avec Return to the Shadows, une critique acerbe du pouvoir. Après le coup d’État d’Idi Amin Dada, il biaisera en utilisant le mime dans ses pièces Renga Moi (1972) et Amayrikitti (1974). Il quittera malgré tout l’Ouganda de 1977 à 1979, et décèdera mystérieusement l’année suivant son retour. Dans le même ton, le dramaturge Mukotani Rugyendo, né en 1949 à Kigezi et élevé en Tanzanie, a évoqué le climat politique de son pays natal dans And the Storm Gathers.

La voix des femmes

En 1995, certaines auteures décidèrent de créer une maison d’édition : Femrite. Ainsi furent données à lire les œuvres de Goretti Kyomuhendo qui s’était fait remarquer dès 1966 avec The First Daughter. De la même trempe, une autre héroïne sera au cœur de A Novel of Unganda’s Hidden War (2007) qui se déroule durant la dictature. Violet Barungi est également sensible à la question de la condition féminine et évoque dans ses romans (Cassandra, Over My Dead Body) l’éducation ou les mariages forcés. Avec Hilda Twongyeirwe, elle travaillera en 2013 sur la question de l’excision dans Taboo ?

La fin du millénaire est foisonnante : Susan Kiguli reçoit le National Book Trust pour son recueil de poèmes The African Saga tandis que Marie Busingye Karooro Okurut publie The Invisible Weevil, Ayta Anne Wangusa accède à la reconnaissance internationale avec Memoirs of a Mother, et, en cette même année 1998, Moses Isegawa, qui a vu le jour en 1963 à Kampala mais qui s’est installé aux Pays-Bas, fait paraître son premier roman, écrit en néerlandais. Le succès est immédiat et Abyssinian chronicles est traduit dans une quinzaine de langues.

Même reconnaissance pour Monica Arac de Nyeko qui dans Strange fruit (2004) retrace la vie des enfants soldats dans le nord du pays, et pour Jennifer Makumbi avec Kintu (2013). La littérature contemporaine revient à l’oralité, parfois avec le très moderne biais numérique, grâce aux performances du poète Kabubi Herman (Slim Emcee) ou au développement du projet Open Mic Uganda qui vise à promouvoir la poésie et la création orale.

Top 10 : Lecture

La littérature de l'Ouganda

Comme souvent la littérature s’inspire des tragédies qui émaillent l’histoire d’un pays, et c’est d’autant plus vrai en Ouganda où les écrivains ont volontiers exploré la veine militante. En proie à une dictature qui a laissé des cicatrices, la question des enfants-soldats continue désormais de se poser.

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Kintu

Une malédiction lancée en 1750 affecte encore les descendants du coupable trois siècles plus tard. Un premier roman envoûtant et parfois drôle. Jennifer Nansubuga Makumbi, éditions Métailié.

Le commerce, c’est la guerre

À une époque où tout est devenu marchandise, le libre-échange ne porterait-il pas définitivement mal son nom ? Yash Tandon, éditions Cetim Suisse.

La Valise ensorcelée

Comment peut-on être cousines et si différentes, et que contiennent les valises qu’offre à Lilai et Ationo une vieille dame ? Nancy Oloro et Tony Morris, éditions Heinemann.

La Fosse aux serpents

Ivres de fureur et de sang, les soldats font régner la terreur durant la dictature d’Idi Amin Dada. Un roman poignant ! Moses Isegawa, éditions Albin Michel.

Le Griot migrateur

L’auteur n’avait que 9 ans quand son père décida de fuir l’Ouganda en proie à ses premières tragédies, il se souvient. Joseph Kabogoza, éditions l’Harmattan.

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La Quatrième plaie

Un médecin en lutte contre la maladie du sommeil a disparu, Van Tang part à sa recherche mais les enfants-soldats ne lui facilitent pas la tâche. Patrick Bard, éditions Points.

Prisonnier d’Amin Dada

Directeur général de l’aviation civile, l’auteur aura connu les geôles de Nakasero, sa violence et les amitiés qui parfois y naissaient. Wycliffe Kato, éditions l’Harmattan.

Les Oubliés

À 10 ans, comment surmonter son déjà trop lourd passé d’enfant-soldat ? Un psychiatre va venir en aide à Otieno. Derenne, Bonifay, Boinet et Barroux, éditions Bamboo.

Ekifire

Inlassablement, le photographe a côtoyé la communauté LGBT de l’Ouganda au Rwanda pour interpeller sur le sort des exclus. Beau et nécessaire. Frédéric Noy, éditions Neus.

Chimpanzés, mes frères de la forêt

Vétérinaire, l’auteure a eu la chance de vivre au cœur de la plus grande communauté de chimpanzés au monde, dans le parc de Kibale. Sabrina Krief, éditions Actes sud.

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