Les principaux styles architecturaux sur la Route 66

Le style victorien se caractéristique du milieu à la fin du XIXe siècle est relatif à l'époque de la reine britannique Victoria (1837-1901). Il renvoie à plusieurs autres styles dont les plus courants sont le néo-Renaissance, le néogothique, le style italianisant et le néogrec. Parmi les villes qui ont mis à l’honneur ce style, Chicago et Los Angeles sont en bonne place. A Chicago, l’essentiel des maisons de style victorien qui ont survécu au grand incendie de 1870 se trouve dans les quartiers de Old Town et de Lincoln Park. A Los Angeles, des vestiges subsistent dans les quartiers résidentiels d’Angelino Heights et Westlake.

L’architecture Art déco, née en France à la fin de la Première Guerre mondiale, s'étendit à de nombreux pays, dont les États-Unis où ce style architectural persista jusque dans les années 1940. Il connut son apogée au début des années 1930. Il est caractérisé par la pureté des lignes, la simplification des formes géométriques, la blancheur des façades. De nombreux théâtres, bâtiments publics, églises et gratte-ciel du début du XXe siècle aux États-Unis font appel à cette architecture (St. Wenceslaus Church et Century Tower à Chicago, Tulsa Union Depot, Tower Station U-Drop Inn Café à Shamrock, Kimo Theatre à Albuquerque, El Rey Theater à Los Angeles, Los Angeles Public Library, etc.). Tulsa, en Oklahoma, est l'une des villes où l'Art déco exulte et qu'il faut à tout prix visiter.

Le style googie, aux nombreux autres noms (doo-wop, space age, populuxe, etc.), s'est développé au cours des années 1940-50 et est relatif à l'âge atomique et la conquête spatiale. Il toucha aussi bien les véhicules (les « belles américaines ») que les enseignes, surtout celles pourvues de néons, et la forme même des bâtiments modestes (motels, cafés, stations-service, casinos, dômes, etc.), mais aussi plus importants (universités et centres de convention). Dans l'architecture googie, les formes en boomerang, en goutte d'eau ou en étoile, voire en soucoupe volante (!) sont souvent utilisées. Ironiquement, son style arrondi, géométrique et très futuriste pour l'époque est devenu aujourd'hui très rétro ou vintage, pour reprendre une expression anglo-saxonne à la mode.

Le style École de Chicago émergea après le Grand incendie de Chicago, en 1871, fut représenté par des noms tels que William Le Baron Jenney, Louis Sullivan, Daniel Burnham, John Wellborn Root, William Holabird et Martin Roche. C'est cette école qui mit au point et généralisa l'utilisation des charpentes d'acier pour la conception des gratte-ciel. Des constructions qui devinrent rapidement récurrentes afin de rationaliser au maximum l'espace. Le but était d'associer des considérations esthétiques et pratiques. Des magasins et des restaurants étaient installés dans les étages inférieurs et des bureaux dans les étages supérieurs. Le style général de leur large structure carrée était de type néoclassique. Le premier gratte-ciel fut le Home Insurance Building, un immeuble de 10 étages construit entre 1884 et 1885 par William Le Baron Jenney. Il fut détruit après sa fermeture, en 1931.

La Prairie School traite pour sa part de l'architecture résidentielle. L'un de ses grands noms fut Frank Lloyd Wright (1867-1959), dont on peut voir de nombreuses créations à Oak Park, en banlieue de Chicago (maison et studio de Frank Lloyd Wright, plus d'une vingtaine de résidences de particuliers, Unity Temple, etc.) mais aussi à Chicago même (maison de Frederick C. Robie) et dans des villes sur la Route 66 comme Dwight (First National Bank), Springfield (maison de Dana Thomas) ou Tulsa (Westhope, dite maison de Richard Lloyd Jones).

L’architecture Pueblo Revival (ou Santa Fe style) est née dans le sud-ouest des États-Unis vers 1910. Elle tire son inspiration de l'architecture des pueblos traditionnels mais également de celle des missions espagnoles nombreuses dans la région. Elle se caractérise par des bâtiments en adobe d’un à deux niveaux aux toits plats, bordés de parapets qui prolongent des murs épais. Ces derniers sont munis d’ouvertures par lesquelles font saillie des vigas (poutres en bois). La rencontre de cette architecture avec l'Art déco a donné lieu à l'architecture Pueblo Deco.

Quoi voir et où ?

Les stations-services, qu'il s'agisse des marques iconiques comme Philips 66 ou Sinclair, voire plus classiques comme Texaco, Shell et autres – toujours visibles aujourd'hui sur le parcours – ou bien des marques comme WB (Whiting Brothers) ayant disparu au fil du temps, empruntent très souvent le style googie. L'exception notable est la Tower Station & U-Drop Inn and Tower Café de Shamrock, de style Art déco.

Il en est de même pour les motels, que vous rencontrerez à l'infini tout au long de la route. Parmi les nombreuses villes traversées, on évoquera tout particulièrement Tucumcari, célèbre pour sa rue principale (Route 66) bordée de dizaines de motels vintage à souhait.

Les diners, dont le concept est issu des premiers wagons-restaurants, sont des restaurants préfabriqués de forme parallélépipédique, d'un style qui mélange bien souvent l'Art déco et le googie avec l'inox employé pour les comptoirs, le formica pour les tables, des sols à damiers, du skaï (bien souvent rouge) pour les banquettes ou les sièges de bar, et des enseignes au néon. Parmi eux, les Valentine's Diners sont les représentants d'une célèbre chaine de diners créée au Kansas par Arthur Valentine au début des années 1930. Aux diners, on peut associer les streetcars, d'une taille plus modeste, installés plutôt dans les villes, et dont les modèles qui ont survécu sont assez rares aujourd'hui (ne pas manquer celui de Gardner dans l'Illinois).

Les bâtiments publics font souvent appel aux styles victorien ou Art déco. Toutes les villes d'importance ont soigné la restauration de ces bâtiments. Parmi les plus remarquables, on citera la Old Courhtouse de Saint-Louis ou la Jasper County Courthouse de Carthage, et les hôtels de ville de Saint-Louis (style néo-Renaissance), Pasadena, Los Angeles ou encore Beverly Hills. Parmi les bâtiments privés, on soulignera ceux qui s'éloignent parfois des styles les plus courants, tel le Shrine Mosquee à Springfield, de type arabisant.

Les anciens théâtres que vous trouverez sur la Route 66 (Rialto à Joliet, Wildey à Edwardsville, Coleman à Miami, Kimo à Albuquerque, théâtres de Downtown Los Angeles, Chinese Theater à Hollywood, etc.) font essentiellement appel au style Art déco.

Les églises, temples, chapelles et autres édifices religieux se trouvent partout et en très grand nombre, notamment dans la Bible Belt, du sud de l'Illinois au Texas. Les styles sont multiples et varient énormément d'une région à l'autre. Parmi les plus célèbres édifices, on citera les Old Cathedral et New Cathedral à Saint-Louis, et l'église Our Lady Queen of Angels–La Placita dans Downtown Las Vegas.

Les ouvrages d'art. Il s'agit ici des ponts. Qu'il s'agisse de ponts à treillis métallique (les plus courants) ou de ponts en béton, voire en bois, certains sont de véritables œuvres d'art, beaucoup sont fermés à la circulation, ce qui ne veut pas dire qu'ils ne soient pas entretenus et préservés. Parmi les plus fameux, on peut citer, dans l'ordre : le Ruby Street Bridge à Joliet, dans l'Illinois, qui est un pont basculant dont la particularité est d'être l'un des premiers traversés sur la Route 66 ; le Old Chain of Rocks Bridge, entre Illinois et Missouri, qui enjambe le Mississippi au nord-est de Saint-Louis, avec un léger coude sur son parcours, et est uniquement piéton ; le Devil's Elbow Bridge, perdu au milieu de la forêt, au sud de Rolla dans le Missouri ; le Brush Creek Bridge, à la sortie ouest de Riverton au Kansas, est le dernier des trois ponts de type Arch Bridge (des ponts à arcs en béton) qui se trouvaient sur le tracé de la Route 66. Le Cyrus Avery Route 66 Memorial Bridge, anciennement 11th Street Arkansas River Bridge, à Tulsa dans l'Oklahoma, est un superbe exemple de pont de style Art déco ; réservé aux piétons, il est parallèle au tracé de la Route 66. Le Rock Street Bridge, à la sortie de Sapulpa (toujours dans l'Oklahoma), est un magnifique pont piétonnier, métallique et aujourd'hui couvert de rouille. Le Pony Bridge (ou Canadian River Bridge), à Bridgeport (Oklahoma) est l'un des plus longs ponts à traverser sur l'itinéraire (1,2 km). Le Rio Puerco Bridge, à environ 20 miles à l'ouest d'Albuquerque, au Nouveau-Mexique (Route 66 de 1930-40), est lui aussi piétonnier. Le Old Trails Arch Bridge qui surplombe le Colorado, accessible par Topock (dans l'Arizona) et le Moabi Regional Park (en Californie), est réservé au passage d'un pipeline. Enfin, le Colorado Street Bridge (ou « Suicide Bridge »), situé sur l'alignement de 1930-40 de la Route 66, se trouve à l'ouest de Pasadena.

Deux mentions spéciales pour le pont en bois couvert de Glenarm (Illinois), le Sugar Creek Covered Bridge, un peu à l'écart de la Route 66, qui est l'un des derniers ponts de ce type ; et pour le London Bridge de Lake Havasu City, également hors Route 66, qui fut acheté à la ville de Londres pour être reconstruit aux États-Unis.

À tous ces bâtiments, édifices et structures qui parsèment la Route 66, il convient d'en ajouter d'autres, exceptionnels ou très localisés sur le parcours : l'arche de Saint-Louis, les capitoles de Springfield et d'Oklahoma City, les round barns (de rares granges arrondies) des Grandes Plaines, dont celle d'Arcadia, les bâtiments en adobe (briques à base de terre séchée, durcies au soleil) de Santa Fe (Palace of the Governors, New Mexico Museum of Art, etc.) et des pueblos du Nouveau-Mexique, et, bien sûr, les gratte-ciel modernes de Chicago (Willis Tower, John Hancock Center, Trump International Hotel & Tower, etc.) et de Downtown Los Angeles (U.S. Bank Tower, Aon Center, Gaz Company Tower, Bank of America Center, etc.).