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Origines

Le Musée archéologique de Sharjah fait découvrir les Émirats au moment où ils devinrent la terre de passage des premiers hommes. Les vestiges mis au jour dans les Monts Hajar remontent à l'apparition des premiers occupants de la région, il y a plus de 7 500 ans. Les grandes routes commerciales se croisaient ici, à la jonction de l’Afrique et de l’Asie. Du Néolithique à la période islamique, d’intenses échanges culturels se sont développés ainsi qu’en attestent les collections du musée. Aux premières poteries, succèdent en période pré-islamique (-300 à 300), des figurines en bronze comme celle du site de Mleiha (émirat de Sharjah) qui représente un homme tenant un oiseau. La période islamique (jusqu’au VIIe siècle) est particulièrement riche en objets marqués de multiples influences : porcelaine chinoise, céladon thaï, gourde iranienne, textes portugais, entre autres.

La culture émirienne n’a cessé de s’enrichir au gré des mouvements migratoires. Iran, Inde, Pakistan, Bangladesh participent au métissage en toute sérénité. La culture émiratie est avant tout fondée sur les préceptes de l’Islam ainsi que sur les traditions arabes et bédouines qui continuent d’imprégner le quotidien. Par ailleurs, la calligraphie arabe mérite le statut de pratique artistique. Les lettres inspirent des arabesques et des motifs géométriques d’une élégance rare. Parmi les maîtres du genre, Muhammad Mendy, né à Abu Dhabi en 1977 partage son talent sur des supports variés, tels que des fresques dans l’espace public.

Essor de la vie culturelle

À Abu Dhabi comme à Dubaï, le domaine culturel connaît un essor inédit. Dans la capitale, des projets d’envergure clament haut et fort cette volonté. Encore en cours, l’aménagement du quartier culturel de l’île de Saadiyat regroupe déjà Le Louvre Abu Dhabi et la Maison Abraham. D'ici 2025, le Guggenhiem Abu Dhabi et le musée Sheikh Zayed ouvriront. Sur « l’île du bonheur », les traditions ancestrales rencontrent la scène contemporaine. Si les thèmes abordés par les artistes classiques sont assez prosaïques, un réel engouement s’affirme en faveur de l'art abstrait. Les galeries d’art fleurissent à Dubaï, et présentent des artistes étrangers et arabes, comme XVA Gallery et Majlis à Bastakiya, mais aussi des espaces dédiés dans le secteur de Jumeirah, au DIFC et dans la friche industrielle Al-Quoz. La fondatrice de la galerie Lawrie Shabibi, qui défend par ailleurs l’art africain de même que de grands noms émiratis, comme Mohammed Ahmed Ibrahim, comptent parmi les membres fondateurs de Art Dubai.

Art Dubaï accueille au printemps et durant six jours la crème des galeries. On estime que le marché moyen-oriental de l'art pèse 10 milliards de dollars. Sa qualité se vérifie en explorant les galeries dont Art Sawa, Ayyam, Isabelle Van Den Eynde, Green Art, Mojo, Meem, The Shelter, The Jamjar, Total Arts, Opera Gallery, Pro Art, Traffic, The Third Line et notre préférée pour ses choix photographiques ambitieux, The Empty Quarter. Autre manifestation annuelle d’envergure, l’Abu Dhabi Art Festival met à l’honneur les arts visuels et scéniques, ou encore la littérature en proposant nombre d’invités d’exception.

L'Émirat de Sharjah, grand parrain des arts, encourage les expressions les plus novatrices. Dans ce but, le Sultan Al Quassimi, personnage cultivé et collectionneur d’excellence, a ouvert la fondation Barjeel dont la collection abrite toutes les formes de l’art actuel. Toujours à Sharjah, les artistes internationaux sont accueillis depuis 2006 au Sharjah Art Foundation. Les activités de la fondation tournent autour de la promotion des artistes et de l’éducation auprès de tous les publics.

Peinture émirienne

Discipline encouragée depuis peu aux EAU, la peinture s’est affirmée au gré de deux générations de peintres. Parmi les représentants de la première génération, Abdulrahim Salim (né en 1955 à Dubaï) est peintre et sculpteur. Il est considéré comme un pionnier des beaux-arts dans son pays, de même que Hassan Sharif ou Abdul Qader Al Raes et Mohammed Ahmed Ibrahim. Le collectif avant-gardiste « The Flying House » réunit dans les années 1990 et 2000 Hassan Sharif et son frère Hussain Sharif, Abdullah al Saadi et Mohamed Kazem et Mohammed Ahmed Ibrahim. Hassan Sharif (1951-2016) compte parmi les artistes les plus influents du monde arabe. Son œuvre extrêmement variée réunit dessins, performances, accumulations d’objets et collages, pour l’essentiel. Il est le premier à avoir montré qu’un art détaché de la calligraphie était possible. Né lui aussi en 1951, Abdulqader Al Rais est à la fois un précurseur et une référence majeure de la scène émiratie. Les œuvres de cet autodidacte ornent les murs d’innombrables palais et bureaux gouvernementaux, mais aussi de lieux publics à travers des fresques exécutées sur commande. L’Institut du Monde Arabe à Paris a retracé sa carrière lors d’une exposition individuelle, de sa jeunesse au Koweït dans les années 1960 aux toiles réalisées pour l’occasion. Après avoir révolutionné le paysage artistique, Abdulqader Al Rais multiplie les initiatives de promotion de la jeune génération. Il est le premier à s’émerveiller qu’une soixantaine de galeries d’art aient poussé là où, à ses débuts, il n’y avait à peu près rien.

Le plasticien Mohammed Ahmed Ibrahim (né en 1962) s’imprègne des paysages de sa région natale de Khor Fakkan pour « laisser des formes se créer ». Ses sculptures rassemblent des matériaux mixtes (argile, végétaux, papier) dans des pièces qui ne sont pas sans lien avec formation d’archéologue. Il fonde en 1997 l’Art Atelier situé au Khor fakkan Art Centre. Salué lors d’une exposition individuelle à la Sharjah Art Foundation, il expose fréquemment en Europe.

Née en 1956, Najat Makki fait aussi partie des aventuriers de la scène actuelle. L’artiste puise son inspiration dans les émotions que lui procure son environnement. Première femme émiratie à obtenir une bourse gouvernementale pour étudier l’art à l’étranger, elle s’initie à la sculpture puis à la métallurgie au Caire. Son parcours se divise en périodes abstraites, réalistes puis expressionnistes. Si la figure féminine et les symboles sont ses thèmes de prédilection, elle superpose ces dernières années des couches de peinture dans un nouveau genre d’abstraction.

Disciple de Hassan Sharif, Mohammed Kazem (né en 1969) ouvre la voie à la seconde génération d’artistes. Il s’exprime par la vidéo, l'art sonore, la photographie, les objets et la performance pour interroger la mondialisation. Il aime représenter son corps en dessin ou en photo, au cœur d’un tourbillon de changements qu’il s’applique à documenter. En tant que commissaire d’expositions, il dirige des manifestations destinées à promouvoir la nouvelle génération.

Lieux dédiés

Dans le DIFC (Dubaï International Financial Centre), la galerie photo The Empty Quarter, fondée par une princesse et artiste saoudienne, est réputée pour ses choix originaux. Cap sur la friche industrielle d'Al-Qhoz, et la trentaine de galeries d’Alserkal Avenue. Parmi ces bonnes adresses, celle d'Isabelle van den Eynde invite à rencontrer l'art conceptuel régional, la galerie Lawrie Shabibi défend l'art africain, et la galerie The Third Line associe valeurs sûres et valeurs montantes.

La Galerie Zawyeh a été fondée à Ramallah en Palestine, en 2013, avant que la succursale d’Alserkal Avenue soit ouverte. Elle promeut les artistes palestiniens, de Palestine et d’ailleurs, à travers des expositions thématiques itinérantes. Dans Al-Qhoz, à 5 km d'Aserkal Avenue, ne pas manquer la Meem Gallery, engagée aux côtés des artistes de la région, tels que Sohrab Sepehri, Parviz Tanavoli, Mahmoud Obaidi, Kamal Boullata, Dia Azzawi.

À l'est de Downtown, le centre d'art Tashkeel réunit ateliers et résidences d'artistes. Petit bâtiment perdu dans le quartier de Nad Al-Sheba, Tashkeel est un véritable creuset de la scène culturelle où se forment les futurs grands noms du milieu. Ses expositions méritent une visite, ne serait-ce que pour se faire une idée de l'art contemporain local. Des artistes comme Nasir Nasrallah, El Seed et Ammar Al Attar sont passés par Tashkeel.

Dans la zone portuaire d'Abu Dhabi, WAREHOUSE421 a vu le jour à l’occasion d’Abu Dhabi Art Fair 2015. Cet espace écoresponsable présente des expositions temporaires, des ateliers et des débats autour de l'art. Un must pour les passionnés d'art contemporain.

Depuis 2014, l’Etihad Modern Art Gallery expose des artistes émiriens prometteurs ou reconnus aux côtés d’artistes internationaux. Après la visite, l’Art House Café promet une pause surprenante.

Dans un splendide bâtiment, la Jameel Art Foundation perpétue l’œuvre d’une famille de philanthropes qui aide les plus démunis depuis les années 1940. En parallèle, la famille a réuni une collection qui ne cesse de se développer sous le signe de l’influence de la tradition islamique dans l’art contemporain. Des événements tels que la Jeedah Art week mettent ses pépites et protégés en lumière. Art Jameel s’appuie sur des collaborations internationales pour renforcer son soutien aux artistes.

Le mastodonte, premier musée universel du monde arabe, le Louvre Abu Dhabi retrace des millénaires de création artistique, toutes origines confondues. Né d’une association d’ampleur entre la France et les EAU, le bâtiment inauguré en 2017 est signé Jean Nouvel. La particularité de la collection tient au fait qu’elle met en relation des cultures a priori éloignées, que ce soit dans le temps ou dans l’espace.

Street art

À Dubaï, la folie des grandeurs se ressent jusque dans l’art de la rue. Ne cherchez pas de tags ou de graffitis à la sauvette, ils sont plutôt mal vus. En revanche, un projet officiel a permis de redécorer le métro. Quelques spots à travers Dubaï :

City Walk. Une foule d’œuvres publiques borde City Walk, toutes de dimensions et de facture impressionnantes. Les façades abritent deux oiseaux multicolores, une girafe qui semble jaillir d’un mur le long de l’escalier d’un parc, un enfant qui tend son parapluie sous une averse arc-en-ciel ou encore des méduses barbotant sur les piliers d’un pont. Des artistes du monde entier, tels que Rone ou Banksy ont uni leurs pinceaux et leurs bombes pour colorer la longue artère.

Un projet officiel a réuni 16 street artistes pour embellir le Dubai Street Museum : un vieil homme sur une barque, des enfants galopant dans la rue, entre autres. Le Lituanien Ernest Zacharevic a collaboré avec le Tunisien The Inkman, connu pour ses fresques calligraphiques. Le thème de cette galerie à ciel ouvert est le patrimoine et l’histoire des Émirats arabes. Calligraphie, portraits royaux, dallah dorée, jeux d’enfants composent ce bel album d’images traditionnelles. Pas moins de 16 façades le long de 2nd December street témoignent d’une explosion de créativité.

L’artiste Ashwaq Abdullah a composé une fresque en hommage aux fondateurs des Émirats arabes unis, les cheikhs Rached Al Maktoum et Zayed Al Nahyane.

Karama. Halte incontournable, Karama héberge des fresques à couper le souffle. Ses immeubles dévoilent requins, faucons et lions tout le long de 18b street.

En prime : le français Blek le Rat a laissé son empreinte sous la forme d’un tir à la corde, le Britannique Nick Walker a signé un Vandal, le duo polonais Etam Cry a peint une splendide « fille à l’orange ». The London Police marque l’entrée de la zone piétonne de City Walk, la première initiative du genre datée de 2016 !