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Produits caractéristiques et restauration

Le riz est omniprésent au Japon, tant comme base pour des sushis que comme accompagnement. On utilise ici la variété « japonica », comme en Chine et en Corée, prisé pour ses grains courts et sa texture légèrement collante. Les nouilles se déclinent en trois variétés principales : les soba, les udon et les rāmen. Les soba sont des pâtes de sarrasin, dégustées froides ou chaudes, alors que les udon sont des pâtes de blé épaisses, consommées dans une soupe de bœuf ou de porc. Les rāmen sont des nouilles d'origine chinoise développées à Fukuoka, à base de farine de blé, qu'on mange en soupe. Également originaire de Chine, le tofu est particulièrement commun dans la cuisine japonaise.

Côté viande, on pense bien sûr au fameux bœuf de Kōbe, de la race wagyu, dont les bœufs sont bichonnés et même massés pour assurer la tendreté d'une viande, extrêmement persillée, dont le prix peut atteindre jusqu'à 500 €/kg. Elle est grillée sur des plaques d'acier ou présentée en fines tranches pour cuire dans un bouillon. Le bouddhisme a interdit la consommation de bœuf, voire de la viande rouge en général, jusqu'à la fin du XIXe siècle. De ce fait, la viande bovine est restée un produit modérément consommé et plutôt coûteux. La viande de porc, beaucoup moins chère, est par contre très commune, tout comme le poulet. Les Japonais, comme beaucoup d'Asiatiques, sont majoritairement intolérants au lactose. Toutefois, on retrouve une production locale de lait à Hokkaido, d'excellente qualité, très réputée dans le Japon pour sa richesse en matières grasses.

Poissons et fruits de mer ont toujours été la pierre angulaire de la cuisine japonaise ; en témoigne le marché aux poissons de Toyosu, à Tokyo, le plus grand marché de ce genre au monde, qui a remplacé l’emblématique marché de Tsukiji en 2018, devenu trop exigu. Un thon rouge de 278 kg y a même été vendu au prix record de 2,7 millions d'euros en 2019. Poissons et fruits de mer doivent être toujours très frais et il n'est pas rare que les restaurants disposent d'aquariums où le poisson est tué au moment de préparer le plat, pour garantir une fraîcheur optimale. Depuis les eaux glacées de la mer d'Okhotsk, au nord, jusqu'aux lagons tropicaux des Ryūkyū, on retrouve une infinie diversité de poissons, de mollusques et de crustacés. Au Japon, le surimi (littéralement « pâte de poisson ») n'est pas un ingrédient secondaire et entre dans la composition de nombreux plats et produits comme le kamaboko, connu pour son motif de spirale rose et blanc. La consommation très controversée de viande de baleine est très ancienne dans le pays mais elle est restée minoritaire jusqu'à la Seconde Guerre mondiale où elle était une source importante de protéines et de graisses dans un pays dévasté par les combats. Aujourd'hui, si 15 % des Japonais disent manger parfois de la viande de baleine, elle ne représente que 0,1 % de la viande consommée dans le pays. A noter, pour ceux qui seraient tentés, que les cétacés sont au sommet de la chaîne alimentaire – à l'instar des grands poissons comme le thon ou l'espadon – et que, par accumulation, ils stockent énormément de métaux lourds dans leur chair, tel le mercure.

Le poisson peut également servir de condiment, comme le katsuobushi (pétales de bonite séchée), ingrédient majeur du dashi, un bouillon également parfumé avec du miso (pâte de soja fermenté) et du kombu, une sorte d'algue connue sous le nom de varech en français. Les algues sont essentielles à la cuisine japonaise. On notera bien sûr le nori, une algue très fine, que l'on retrouve en plaque pour réaliser les sushis ou aromatiser divers plats. Sans oublier le wakame – très riche en vitamines – à la texture croquante et légèrement élastique, apprécié en salade ou sauté. La sauce soja (shoyu) est omniprésente au Japon, tout comme le vinaigre de riz (su) et le mirin, un vin de riz sucré et léger. La sauce teriyaki est un mélange de sauce soja, de sucre et de mirin, très utilisée, souvent épaissie avec de la fécule. Le ponzu est une sauce également populaire, réalisée à base de sauce soja, de sucre et de jus de certains agrumes comme le yuzu.

Si la cuisine japonaise ne manque pas de goût, elle emploie peu d'épices à proprement parler à part le poivre. On notera toutefois le shichimi, un mélange de piment rouge, de zeste de mandarine, de sésame, de pavot, de graines de chanvre, de nori et de sancho (poivre du Sichuan). On citera également d'autres aromates comme le shiso, aux feuilles très parfumées, le karashi, proche d'une moutarde forte française, sans oublier bien sûr le wasabi, une plante proche du raifort, connue pour sa racine très aromatique et piquante. Sa culture capricieuse et sa conservation délicate en font un aliment rare et généralement hors de prix. La pâte verte servie dans la quasi-totalité des restaurants de sushis hors du Japon est une mixture de raifort européen, beaucoup moins coûteux.

On retrouvera également une grande variété de légumes comme les légumes-feuilles (komatsuna ou épinard-moutarde, chou chinois, mizuna, shungiku ou feuilles de chrysanthème). Notons également le daikon ou radis blanc, les pousses de bambou, les racines de lotus, le navet, la carotte, la pomme de terre, l'igname et la patate douce. Le potiron kabocha, le concombre, le melon d'hiver (toogan), l'aubergine, les haricots verts, les fèves et les pousses de soja sont également très populaires. Le konnyaku ou konjac possède un tubercule extrêmement riche en amidon mais très pauvre en calories, qui peut être transformé en gelée que l'on sert en lanières ou en tranches fines dans les soupes ou les pots-au-feu.  Le terme « tsukemono » désigne des pickles de légumes macérés avec de la saumure ou du vinaigre. Le beni shōga est le tsukemono à base de gingembre que l'on sert avec les sushis. Les champignons jouent un rôle très important également. Le shiitake est le champignon japonais le plus répandu, mais on notera également le shimeji, l'enokitake, l'eringi et le matsutake. Les plus courageux pourront tester le nattō, des graines de soja fermentées qui développent non seulement une odeur âcre très puissante mais lui donnent une texture gluante, généralement repoussante pour les non-Japonais.

Pour les voyageurs qui débarquent au Japon avec un budget restreint, il est tout de même possible d'avoir un très bon aperçu de la cuisine locale et certains restaurants proposent des plats et des formules tout à fait accessibles, notamment à l'heure du déjeuner, entre 7 et 10 €. Citons les izakaya, de petits restaurants où les jeunes (et moins jeunes) travailleurs (ouvriers comme cadres) viennent dîner avant de rentrer chez eux. Les teishoku désignent des restaurants – souvent familiaux – qui proposent différentes formules et servent les plats généralement en même temps, sur un plateau. Côté street food, on notera que les Japonais sont très attachés à la propreté des lieux publics et manger dans la rue est assez mal vu. Cependant, durant les festivals, des rues entières peuvent être occupées par des vendeurs ambulants (yatai). S'il peut nous paraître impoli de manger une soupe de nouilles bruyamment, en aspirant l'air en même temps, cette technique est tout à fait normale au Japon et permet de dévorer une soupe de nouilles rapidement tout en la faisant refroidir. Au restaurant, le personnel sert soit de l'eau, soit du thé (chaud ou froid). Il est toujours possible d'en redemander par la suite et il n'est pas nécessaire de commander d'autres boissons.

Les basiques de la cuisine japonaise

Le riz est un élément central que l’on retrouve dans de nombreux plats. Le donburi, par exemple, se compose d’un grand bol de riz généralement garni d’oignons grillés et d’omelette, qui se décline à l'infini avec le katsudon (porc pané ou tonkatsu), le gyūdon (lamelles de bœuf), l'unagidon (anguilles grillées), l'oyakodon (poulet), le kimuchidon (kimchi coréen), le tekkadon avec du sashimi de thon (ou sakedon avec du saumon) ou encore le tendon avec des tempura, généralement de crevettes. Les onigiri sont un en-cas bon marché (1-2 €) que l'on retrouve partout sous forme d'une boulette de riz à sushi moulée en forme de triangle, fourrée de poisson cuit (thon, saumon, anguille) ou parfois de fromage frais ou de viande, enveloppée dans un carré de nori. Autre option bon marché, le bentō est l’équivalent d’un panier-repas que l'on trouve de partout dans le commerce et notamment dans les gares (ekiben) pour un prix assez bas (5-7 €). Ce plat préparé dans une boîte compartimentée est généralement composé de riz, d'une petite omelette, de poulet ou de poisson avec des légumes. Un peu avant midi, il est aussi commun que des vendeurs de bentō s'installent sur les trottoirs dans les quartiers d'affaires ou devant les administrations. Les kiritanpo sont des bâtonnets de pâte de riz grillés, utilisés comme garniture pour les soupes.

Les tempuras se composent de légumes (courgettes, carottes, etc.) ou de crevettes, poisson ou huître couverts d’une fine pâte à beignet. On citera aussi le kakiage (tempura à base d'ingrédients hachés), l'aburaage (tofu frit) et le karaage (tempura enrobé de fécule et non pas de pâte à beignet). Le toriten est un tempura de poulet venant d'Ōita sur l'île de Kyūshū. Le kushikatsu se compose de viande, fruits de mer et légumes, panés et piqués sur des pics en bois. Les yakitoris sont des brochettes de poulet, de bœuf, de poisson ou encore de champignons, laquées avec une sauce sucrée. A noter, les yakitoris bœuf-cheddar que l’on retrouve en France sont une invention purement occidentale.

Les marchés de rue seront également l'occasion de goûter au fameux takoyaki (boules de pâte à base d’œufs fourrées avec des morceaux de poulpe) originaire d’Osaka, aux ganmodoki (croquettes de tofu aux légumes), aux yakiimo (patates douces cuites sur un lit de pierres, un peu comme les marrons chauds) ou encore aux gyozas (raviolis farcis de porc, de chou et de poireau). Impossible de ne pas citer l’okonomiyaki, une crêpe de chou blanc râpée couronnée de porc (buta), de calamar (ika), de légumes (yasai) ou mixte (mikkusu), recouverte d'une sauce brune, épaisse et sucrée, de mayonnaise, de sauce soja et de copeaux de bonite séchée (katsuobushi). Les meilleures okonomiyaki viendraient d'Hiroshima.

Les recettes de nouilles sont légion au Japon, aussi bien froides que chaudes, sautées ou servies dans un bouillon. Les rāmen sont des nouilles de blé très populaires que l'on sert dans un bouillon très aromatique avec de la viande et des œufs à la coque cuits à basse température (onsen tamago). Il existe une multitude de déclinaisons comme les tonkotsu rāmen de Hakata, servies avec un bouillon très riche à base de porc, l'onomichi rāmen couronnées de tranches de porc braisé dans un bouillon à la sauce soja, ou encore les miso rāmen de Sapporo, servies dans un bouillon au miso. Enfin les « Taiwan » rāmen de Nagoya viennent bien du Japon, quoique inspirées de la cuisine taïwanaise, et sont couronnées de bœuf haché très pimenté.

Les soba se consomment chaudes dans une soupe (kake soba), ou froides avec du nori et trempées dans une sauce de soja (zaru soba). Le yakisoba est un plat de nouilles sautées d’inspiration chinoise, accompagnées de viande, fruits de mer et légumes avec de la sauce soja. Malgré son nom, cette recette n’est pas préparée avec des soba, mais des rāmen. Le yakiudon est la variante à base de nouilles udon, plus charnues. Les sōki soba d'Okinawa, qui est également une recette à base de nouilles de blé, sont servies dans un bouillon dashi et garnies de san-mai niku (poitrine de porc) ou soki (côtes de porc). Les locaux aiment y verser quelques gouttes de kōrēgūsu, une décoction aux piments marinés dans de l'alcool de riz. Le champon est une soupe de nouilles, de légumes et de fruits de mer venant de Nagasaki.

Beaucoup de recettes de nouilles se présentent sous forme de soupes, qui sont une part essentielle de la cuisine japonaise, même si elles ne contiennent pas toutes des nouilles, comme la très classique soupe miso ou misoshiru, composée d'un bouillon et de miso, bien que d'autres ingrédients, tels que des légumes, des algues, du tofu, de la viande ou des fruits de mer, peuvent y être ajoutés. Le yudofu est une recette de tofu mijoté dans un bouillon parfumé d'algue kombu, originaire de Kyoto.

On retrouve certains plats au wok comme le chanpurū, typique de la cuisine d'Okinawa, composé de tofu avec différents types de légumes, viandes ou poissons et du concombre amer (gōyā). Le rafute est un plat emblématique d'Okinawa, à base de poitrine de porc caramélisée avec du sucre et de la sauce soja. Le tataki désigne une technique de cuisson du poisson ou de la viande – généralement du thon ou du bœuf – saisi très brièvement au-dessus d'une flamme ou à la poêle, puis mariné rapidement dans du vinaigre et enfin coupé en tranches fines et assaisonné avec du gingembre. Le tataki viendrait de la préfecture de Kōchi, sur l'île de Shikoku. Le robata-yaki n’est pas un plat mais un type de cuisson, sorte de barbecue offrant des ingrédients des plus variés : viande, fruits de mer, poisson, légumes, etc., qui sont grillés devant les clients à la demande. Le teppanyaki est assez similaire, mais le gril à charbon est remplacé par une plaque chauffante où les aliments sont grillés à la manière d’une plancha. La viande est parfois appréciée crue également. C'est le cas du basashi, une spécialité de sashimi de viande de cheval, venant de Kumamoto, sur l'île de Kyūshū.

Le jingisukan – comprendre « Genghis Khan » – est un plat d'agneau cuit sur un plaque chauffante avec des pousses de soja, des oignons et des champignons. L'agneau et le mouton sont quasiment inexistants de la cuisine japonaise et ce plat retrouve les influences de la cuisine du nord-est de la Chine, bien qu'il fût inventé à Hokkaido. Autre plat surprenant, le curry japonais ou karē se décline avec trois accompagnements : le riz (karēraisu), les nouilles (karē udon) et sous forme de chaussons frits (karē-pan). Introduit au Japon pendant l'ère Meiji (1869-1913) par les Britanniques qui occupaient alors l'Inde, ce curry est moins piquant et plus sucré que son pendant indien. Il se prépare avec une sauce épaisse liée avec de la farine à la manière d'un jus de viande, et il contient carotte, pomme de terre et oignon. Le porc, le bœuf et le poulet sont les viandes les plus populaires. Le katsu-karē, très apprécié, est garni avec du tonkatsu (escalope de porc pané).

Il existe également des plats plus robustes appréciés en hiver. On pense au nabemono, à mi-chemin entre un pot-au-feu et une fondue, qui se décline sous différentes formes. Le célèbre shabu-shabu est probablement le nabemono le plus connu, composé de fines tranches de bœuf, de nouilles, de tofu, de légumes et de champignons que l'on cuit instantanément dans un bouillon aux algues. Très populaire également, le sukiyaki est proche du shabu-shabu, mais les aliments sont cuits dans un bouillon plus aromatique et servis avec de la sauce warishita (sauce soja, mirin, saké et sucre) et de l'œuf cru battu. Mais citons également l'oden (croquettes de poisson, bœuf, œufs durs, chou, radis blanc), le yosenabe (viande, fruits de mer, œufs durs, tofu et légumes) et le motsunabe (abats de bœuf ou de porc), originaire de Fukuoka. Le chankonabe – traditionnellement servi aux sumos – contient de nombreux ingrédients comme des boulettes de viande, du poulet, du chou chinois et des nouilles udon. Le senbei-jiru est une soupe avec viande ou poisson, garnie de chou, de champignon et de galette à base de farine de blé (otsuyu senbei), venant de Tōhoku. A Hokkaido, on déguste l'ishikari-nabe, garni avec du saumon, des légumes-racines et des champignons. Dans la même région, on trouve le sanpeijiru, également à base de saumon, mais moins sophistiqué.

L’art du poisson cru

Impossible de compléter cette introduction de la cuisine japonaise sans évoquer les sushis et les sashimis. Si les Japonais n’en mangent qu’occasionnellement, ils constituent néanmoins une parenthèse majeure de la gastronomie nippone et ils ont bien souvent une tout autre saveur sur place. Le sushi est un terme générique désignant plusieurs spécialités à base de riz vinaigré (shari). On retrouve ainsi le classique nigiri-zushi, sous la forme d’une tranche de poisson cru posée sur une boule de riz enduite d'une touche de wasabi, parfois entouré d'une lanière de nori. Le maki-zushi est la version que nous connaissons le mieux, constitué d’un rouleau de nori qui enserre une garniture au riz, au poisson et aux légumes. Servi dans un bol, le chirashi-zushi est constitué d’un lit de riz sur lequel sont disposées différentes variétés de poisson, de fruits de mer avec parfois omelette et champignons shiitake. Enfin l’inari-zushi est une poche de tofu frit, remplie de riz ainsi que de divers autres ingrédients (viande, poissons, champignons). Les très populaires osaka zushi sont des sushis carrés, nommés hako zushi ou « sushis boîte » que l'on garnit de poisson cru, d'anguille laquée ou d'omelette. Le temaki est un type de sushi où le nori est roulé en forme de cône et garni de riz, de poisson, de fruits de mer et de légumes.

Les sushis dans leur ensemble peuvent contenir des ingrédients très variés : anguille (unagi), coquille Saint-Jacques (hotate), crabe (kani), crevette (ebi), omelette (tamago), oursin (uni), maquereau (saba), saumon (sake), seiche/calamar (ika) et bien sûr thon (maguro). Sans oublier le thon gras (toro), une pièce très prisée provenant du ventre du poisson, réputé pour fondre en bouche. Le sashimi quant à lui est un émincé de poisson ou de fruits de mer crus, accompagné d'un peu de sauce soja et parfois de wasabi. Il est généralement servi en entrée d'un repas traditionnel, car la saveur délicate du poisson ne doit pas être troublée par le goût d'un aliment déjà cuit. L'ika sōmen est un sashimi de calamar venant d’Hokkaido. Le sashimi le plus sulfureux du Japon est préparé à base de fugu. La chair translucide de ce poisson-globe envoie chaque année plusieurs Japonais à l'hôpital ! En effet, la plupart des organes du fugu sont toxiques et la moindre erreur peut rendre le plat mortel. Des années d’entraînement expliquent le prix faramineux de ce plat, allant jusqu’à 100 € par convive. Une expérience toutefois plus folklorique que gustative, la saveur du fugu était plutôt neutre.

Kaiseki ou l'art de la cuisine impériale

En 1449, le shōgun Yoshimasa Ashikaga fait construire un pavillon de thé faisant partie du Ginkaku-ji (pavillon d’argent), à Kyōto, alors capitale de l'empire du Japon, pour y célébrer la cérémonie du thé ou chanoyu. Inspirée par le bouddhisme zen, elle devient non seulement un art, mais un véritable culte et sa pratique se traduit alors que par l'utilisation d'ustensiles précieux et coûteux, l'occasion pour les seigneurs de faire étalage de leur richesse. Le kaiseki ryōri est une cuisine rituelle qui s’est développée à partir de la cérémonie du thé au XVIe siècle. Elle permettait de fournir aux pratiquants un repas léger avant qu’ils ne boivent le thé vert matcha, qui peut être agressif pour l’estomac.

Littéralement, kaiseki se traduirait par « pierre de poche de poitrine » en rapport avec la pratique de certains moines de ceinturer des pierres chaudes contre leur ventre pour couper la faim. Le terme, plus généralement, reste ambigu, car il désigne un repas constitué de nombreux petits plats servis ensemble, mais peut être également accompagné de saké. L'expression cha-kaiseki fait donc uniquement référence au kaiseki servi avec du thé. Initialement, cet en-cas se résumait à quelques plats simples servis avec le thé, de manière frugale, par les moines bouddhistes. Au fil du temps, ce type de repas a évolué, gagnant en raffinement, une fois servi aux tables des empereurs et des samouraïs, ainsi que dans les nombreuses maisons de thé de Kyōto.

Summum du raffinement à la nippone, ce repas est composé d'un ensemble de plusieurs plats – jusqu'à 14 – et nécessite une grande maîtrise et un sens de l'esthétique pointu. Chaque plat consiste en une petite portion composée de quelques ingrédients, présentés élégamment dans des plats finement décorés. On retrouve entre autres du sashimi, des légumes servis avec de la viande, de la soupe, une grillade, des légumes cuits servis froids, un plat de riz, des légumes en saumure, un plat vapeur, du pot-au-feu (nabe) et pour finir un dessert : fruit, crème glacée ou pâtisserie. La saisonnalité des ingrédients est particulièrement importante. Ce repas, généralement dégusté dans un cadre paisible, souvent avec vue sur un jardin zen, a bien sûr un coût, entre 100 et 300 € par personne.

Desserts, fruits et thé

La pâtisserie japonaise (o-kashi) traditionnelle est le parent pauvre de la gastronomie nippone. On retrouve en effet un nombre assez limité de spécialités qui ont souvent comme similitude l’indétrônable anko, ou pâte de haricots azuki. Le thé matcha est devenu commun dans les desserts également, même si c’est une tendance récente. Le terme wagashi désigne divers types de bouchées généralement servies avec du thé, comme le mochi (pâte de riz gluant), un grand classique, le plus souvent garni d’anko. La pâte de haricots permet également de garnir les manjū (brioches vapeur), les dorayaki (sortes de pancakes) ou les taiyaki (crêpes fourrées moulées en forme de daurade, symbole de chance). Les higashi correspondent plus ou moins à ce que l'on désigne comme des biscuits en Occident. Les pancakes sont très appréciés dans le pays et on adore les hottokeki, sortes de pancakes très épais et moelleux. C’est aussi le cas du cheesecake soufflé, créé au Japon dans les années 1940, qui est très aérien. Les crèmes glacées (aisukurīmu) au lait de Hokkaido sont très renommées.

Le climat varié du Japon permet la culture d'un grand nombre de fruits, depuis les très classiques pommes, oranges, fraises et pêches, jusqu'aux espèces moins connues comme la poire nashi, le kaki, l'akébia ou la nèfle. Vous le remarquerez rapidement : au Japon, les fruits sont chers, voire très chers. En effet ici ils ne sont pas seulement vus comme des aliments, mais également comme des  présents à offrir soit à ses proches soit comme cadeau d'entreprise, à la manière d'un bouquet de fleurs rares. Ainsi les fruits sont bichonnés, soignées, empaquetés avec un soin infini et généralement sertis dans de beaux emballages immaculés. Mais cette pratique est évidemment très coûteuse et les fruits au Japon peuvent atteindre des prix complètement invraisemblables. On trouvera ainsi les fraises blanches White Jewel ou le dekopon – un croisement entre une orange et une mandarine appelé aussi shiranui – à 10 € la pièce. Les énormes pommes Sekai Ichi coûtent quelque 20 € l'unité. On citera bien sûr les pastèques carrées de Zentsuji à 90 €, les mangues Taiyo no Tamago de Kyushu à 100 € la pièce ou encore le melon vert Sembikiya à 140 €. La star reste néanmoins le melon Yubari de Hokkaido dont le prix dépasse facilement les 200 €. En 2019, un melon a même été vendu aux enchères pour 42 500 €. Toutefois ces fruits haut de gamme ne sont pas des produits de consommation du quotidien mais des cadeaux de prestige et on peut trouver sans problème des fruits relativement abordables dans certains magasins, notamment les bananes, importées d'Asie du Sud-Est, qui sont bon marché.

Généralement on sert des pâtisseries dans les cafés, les restaurants se limitant surtout aux crèmes glacées. Le thé vert est la boisson nationale du Japon, depuis que les premières graines furent importées de Chine au IXe siècle. Le sen cha est le thé vert le plus connu et sa qualité comme son prix sont très variables. Le hōji cha se distingue par son goût fumé alors que l'ama cha a un goût sucré. On le boit lors du hana matsuri (fête des fleurs), au mois d'avril. Le genmaicha contient du riz complet. Le célèbre thé matcha est une poudre amère à base de feuilles de thé vert, il est utilisé lors de la cérémonie du thé. Cette poudre est battue avec un petit fouet jusqu'à obtenir une couche de mousse à la surface. Le gyokuro est considéré comme le meilleur thé vert du Japon. Les feuilles sont plus foncées que celles du sen cha et son arôme est plus fort. Le thé doit être infusé dans une eau à 50-60 °C environ et non pas bouillante. Il existe de nombreuses boissons à base de thé, comme le bubble tea originaire de Taïwan, contenant des billes de tapioca gélatineuses et du lait de soja.

Entre saké et whisky

Alcool emblématique du Japon, le saké (nihon shu) est très différent des digestifs servis dans les restaurants asiatiques en Europe, souvent de l'alcool de riz chinois, très corsé. Le saké est un alcool de riz léger à seulement 17°. Il existe plus de 2 500 variétés de nihon shu. Il peut être karakuchi (sec) ou amakuchi (doux). Il peut se consommer chaud (atsukan) ou froid (reishu). La fabrication du saké de riz fut introduite depuis la Chine au IIIe siècle, et cet alcool devint rapidement un produit de prestige pour l'aristocratie japonaise tout comme le clergé qui l'utilisait pour certains rituels. Malgré son nom de « vin de riz », sa fabrication se rapproche plutôt de celle de la bière. On ensemence ainsi le riz avec une levure, dite « kōji-kin », qui va transformer l'amidon du riz en sucres simples, déclenchant la fermentation. On distingue deux qualités de saké : le futsū-shu qui représente la majorité des sakés de consommation courante, et le tokutei meishō-shu, de qualité supérieure, qui contient un pourcentage important de riz poli (sans son) avec au minimum 15 % de ferments de kōji.

Le shōchū est un alcool de patate douce, d’orge ou de riz à 30°, souvent accompagné de soda et de jus de citron (chūhai ou chū-hi). Sinon, laissez-vous tenter par l’umeshu, une liqueur de prunes très délicate, à seulement 10-15°. On peut la boire aussi bien glacée en été que chaude en hiver. L'awamori est une eau-de-vie de riz propre à Okinawa, allant de 30 à 43°. L'awamori est vieilli dans des pots en argile traditionnels et on peut le boire pur, sur glace et en cocktail. Apparue à la fin du XIXe siècle, la bière est très populaire au Japon. Les marques de bières nationales les plus connues sont Kirin, Asahi, Sapporo, Yebisu et Suntory, mais il y en a bien d'autres, sans compter les microbrasseries qui deviennent de plus en plus populaires.

Si ça peut surprendre au premier abord, le whisky possède pourtant une place importante au Japon. Bien que la production n’ait commencé qu’à la fin du XIXe siècle avec l’ouverture du pays sur le monde, le Japon en est aujourd'hui le quatrième plus gros consommateur mondial. Il existe plusieurs sociétés produisant du whisky au Japon, mais les deux plus connues sont Suntory et Nikka. Jusqu’à la fin des années 1990, la production et la consommation japonaise reste néanmoins domestique, mais plusieurs prix récents ont fait s’envoler la reconnaissance mondiale envers les whiskies japonais, ainsi que le prix de certaines bouteilles qui se vendent à plusieurs milliers d’euros. La distillerie Karuizawa, située dans la préfecture de Nagano, au creux des Alpes japonaises, est connue pour ses whiskies d'exception. En effet, cette maison, fermée officiellement depuis l’an 2000, ne distille plus mais embouteille toujours des whiskies devenus des objets de collection rarissimes, d'où leur prix exorbitant : en 2020, une bouteille de Karuizawa de 52 ans d'âge a été vendue par Sotheby’s pour la bagatelle de 413 000 €.