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Une société swahilie conservatrice

A Zanzibar, 99 % de la population est musulmane contre 35 % en Tanzanie continentale. Les Zanzibarites pratiquent un islam sunnite proche de celui existant dans la péninsule arabique, où est situé le sultanat d’Oman, qui a dominé l’île pendant deux siècles de colonisation. D’autant plus que cette occupation était intense et récente, jusqu’à la révolution de 1964. L’île de Pemba est la plus conservatrice, de très loin, vivant de la culture du clou de girofle principalement et adoptant un mode de vie très rural et traditionnel. Les habitants ne semblent pas intéressés par un développement touristique de leur île et ne prêtent pas grande attention aux quelques visiteurs qui y séjournent. L’île d’Unguja est actuellement dans une dualité, entre l’ouverture des mœurs au contact des nombreux touristes qui visitent leur île, et la préservation des traditions d’une société profondément conservatrice, principalement sur l’éducation et le travail des femmes. Deux mondes moins hermétiques aujourd’hui qu’il y a une dizaine d’années, mais qui doivent cohabiter sur fond de tensions. En 2004, des fondamentalistes ont essayé d’imposer la charia à Zanzibar, perpétrant quelques attentats, saccageant la maison du mufti, la plus haute autorité religieuse musulmane de Zanzibar. Mais depuis leur incarcération, aucune menace fondamentaliste n’est venue ternir l’image de Zanzibar. L’île de Mafia est éloignée d’Unguja et de Pemba, et proche du continent. Les Swahilis là-bas sont plus festifs et ont des mœurs plus ouvertes, proches de celles des musulmans de Tanzanie continentale. Non pas en raison de la présence des touristes (limités à des hôtels de plongée sous-marine) mais par la présence de beaucoup de Tanzaniens continentaux.

L’éducation, maillon faible de la société zanzibarite

La scolarité est officiellement obligatoire et gratuite en Tanzanie pendant les sept années de l’école primaire et les quatre ans du secondaire, soit en principe entre 6 et 18 ans. On compte plus de 200 écoles publiques, et une centaine d’écoles privées sur l’archipel, un lycée et deux universités. L’uniforme est obligatoire. Le taux officiel d’inscrits en primaire est de 98 % pour une génération, contre 25 % en 1961, avant l’indépendance. Dans les faits, beaucoup moins d’enfants fréquentent l’école primaire. Les raisons sont multiples : éloignement de l’école (on croise souvent les enfants en bord de route qui marchent pendant des kilomètres), surpopulation des classes et manque d’intérêt des parents eux-mêmes pour l’éducation. Contre toute attente cependant, le système éducatif tanzanien remporte globalement un demi-succès, avec un taux d’alphabétisation de 69 %, ce qui laisse derrière la Tanzanie une soixantaine de pays sous-développés. A Zanzibar, le niveau d’éducation est plus faible que le niveau national et les élèves moins performants en lecture et en maths. La plupart viennent de familles très modestes de pêcheurs ou de paysans travaillant dans les plantations. Beaucoup travaillent dans les plantations de clous de girofle à Pemba, selon l’ONG Irin. L’inégalité entre les sexes dans une société encore traditionnelle est forte et beaucoup de filles pâtissent de l’âge légal pour le mariage fixé à 15 ans (contre 18 ans pour les garçons) quand il s’agit de poursuivre ou non leurs études dans le secondaire, d’autant plus dans une société aussi traditionnelle que celle de Zanzibar.

Des salaires faibles malgré la manne touristique

Les expatriés des entreprises étrangères implantées dans le pays font figure de privilégiés par leurs salaires plus élevés que la moyenne, justifiés par leurs compétences, leurs niveaux de responsabilité et le chiffre d’affaires généré. Les fonctionnaires, surtout ceux des ministères, ont des conditions de travail assez avantageuses en termes d’horaires, et sont certains de toucher un salaire fixe. Les salariés bénéficient d’une couverture sociale et cotisent pour leurs retraites. Les salariés des lodges et resorts ont des salaires convenables lorsqu’ils sont à la réception ou au service, et assez faibles lorsqu'il s’agit de faire du ménage ou du bricolage. Ceux du secteur informel, eux, n’ont aucune garantie. Le salaire médian des salariés déclarés s’élève à 22 US$ par mois. Pour les chauffeurs-guides, il est de 120 US$, mais il peut osciller de 50 à 200 US$. Quand il est question de chômage, il n’existe pas de chiffre fiable même si la Banque mondiale l’estime à environ 7,4 % de la population active à Zanzibar.

Une pauvreté dans les villages qui contraste avec les hôtels

La vie quotidienne dans les villages proches des plantations est dure, du fait de la faiblesse de leurs équipements, à l’archaïsme des techniques de culture, et à l’absence de ressources pour financer l’investissement. On voit dans les villages côtiers proches des hôtels de luxe les cases construites en parpaing ou en banco très rudimentaires, les femmes qui cuisinent au feu de bois et vont chercher de l’eau au puits. Souvent les enfants ne sont pas chaussés et il n’y a pas ou peu d’électricité. En ville, dès que l’on s’éloigne des quartiers touristiques, on peut deviner la pauvreté des habitants qui achètent tout sur le marché informel. Un hôpital privé a été construit récemment, mais l’hôpital public laisse à désirer et l’île manque de dispensaires et de pharmacies. L’espérance de vie est de 61 ans pour les hommes, et 64 ans pour les femmes (moyenne 2020).

Prostitution et sida très marginaux

Les prostituées sont rares et discrètes sur l’île, invisibles dans la rue, contrairement à de nombreux pays d’Afrique ou en Tanzanie continentale, notamment à Dar es Saalam. La prostitution existe néanmoins à Stone Town et dans les bars à touristes de la côte, mais n’est pas ostentatoire. Quelques femmes, souvent venues de Tanzanie continentale, se postent dans les clubs festifs mais rien n’indique qu’elles sont spécialement des prostituées. Le taux de sida est assez faible (0,6 % de la population) en raison des traditions musulmanes strictes pratiquées sur l’île. Il concerne néanmoins 10 % des prostituées de l’île et tend à s’étendre avec l’explosion de la consommation d’héroïne injectée.