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Une population à majorité urbaine

L'Italie est peuplée de 60 360 000 habitants (2019) et compte une forte densité, de 201 hab./km². Les régions les plus peuplées sont le Latium, la Lombardie, la Campanie, la Sicile et le Piémont. Il faut préciser que 70 % de la population italienne est urbaine (75 % pour la France) et que ce réseau urbain italien se compose d’un très grand nombre de petites villes. Deux seulement dépassent le million d’habitants : Rome (4e ville d'Europe, 2,87 millions d’habitants) et Milan (1,37 million), devant Naples (moins d'1 million) et Turin (890 000). Une cinquantaine dépasse les 100 000 habitants, dont 11 comptent entre 200 000 et 500 000 habitants. Si le Piémont est très peuplé, tout comme la région de Milan et celle des lacs, les Dolomites égrènent des villages au fil des vallées. Les deux principales villes, Bolzano et Trente, ne dépassent pas 250 000 habitants. Mais la densité de population évolue avec les saisons, à l'image de Cortina d’Ampezzo qui ne compte que 7 000 habitants en basse saison contre 40 000 en pleine saison de ski ou de randonnée.

Une population autochtone vieillissante

L'espérance de vie est de 80,6 ans pour les hommes et de 85,1 ans pour les femmes, l'une des plus élevées d’Europe. Son taux de fécondité est l'un des plus bas du monde, avec 1,3 enfant par femme (en 2019), il est donc insuffisant au renouvellement des générations. Une démographie inquiétante pour le pays le plus âgé du monde après le Japon. Ces chiffres traduisent un véritable phénomène de société, un changement de mentalités dû à l’urbanisation, à l’enrichissement, et aussi à la baisse d’influence de l’Eglise, notamment parmi les jeunes. Il y a cependant de fortes disparités entre régions, et principalement entre un « grand Nord », déficitaire quant à sa natalité, et un Mezzogiorno (le Sud) dont le solde naturel est resté excédentaire.

Une migration historique Sud/Nord

Pendant les années 1960, l’Italie vit son miracle économique. Le taux de croissance annuel était de 6 % et le chômage dans le Nord quasi inexistant. Cependant, dans le Sud, la situation reste grave et l’écart entre les deux parties du pays se creuse de plus en plus. Les habitants du sud de l’Italie s’étaient tournés jusque-là vers le Nouveau Monde : 700 000 New-yorkais descendent encore de cette diaspora et l’on estime à l’heure actuelle que 58 millions de personnes sont d’origine italienne dans le monde. Mais la situation florissante du « triangle industriel » formé par Turin, Gênes et Milan pousse bon nombre de Calabrais, Siciliens et Napolitains à s’embarquer sur le treno del sole. Entre 1951 et 1961, le nombre d’immigrants italiens du Sud tentant leur chance dans le Nord est évalué à 2 millions, dont presque 600 000 s’installent à Milan. L’intégration n’est évidemment pas facile, surtout à cause d’une sorte de racisme. Dénommés avec mépris terroni (bouseux du Sud), ils ont longtemps eu la réputation d'être ignorants, paresseux, irrespectueux de certaines normes hygiéniques et surtout civiques. Ces stéréotypes très accentués finissent par disparaître dans les années 1970, au moment où l’immigration interne se stabilise et avec elle les problèmes d’intégration, si bien qu’aujourd’hui 50 % de la population milanaise a des origines méridionales. Les immigrés venus d’ailleurs ont remplacé les Italiens du Sud mais très peu. La dernière estimation en 2018 établit à 5,054 millions le nombre d'immigrés vivant en Italie, soit 8,3 % de la population totale.

Une langue italienne métissée

La langue italienne garde des traces incontestables du continuel métissage auquel ce peuple a été exposé pendant des siècles. Ainsi, ragazzo et magazzino (garçon et entrepôt) sont des mots d’origine arabe (les Arabes furent longtemps présents en Sicile), tandis que albergo, banca, guardia ou sapone (hôtel, banque, garde, savon) sont d’origine germanique.

Charles Quint plaisantait en disant qu’on parle à Dieu en espagnol, aux hommes en français et aux femmes… en italien ! L’italien est, en effet, une des langues latines les plus mélodieuses. Formée très tardivement, elle n’apparaît en tant qu’idiome littéraire qu’au XIIe siècle, l’aristocratie et les écrivains italiens ayant longtemps préféré parler le latin, le provençal ou le français. Cette évolution a été progressive puisque, à la fin du XIIIe siècle, Marco Polo écrivit son très célèbre Il Milione en franco-vénitien. Peu à peu, une langue s’est constituée et formalisée, grâce à des auteurs tels que Dante, Boccace ou Pétrarque. Ceux-ci utilisaient le dialecte toscan, qui est à l’origine de l’italien tel que nous le connaissons aujourd’hui. A partir du XVIsiècle, la Renaissance exercera une fascination sur l’Europe et les emprunts aux langues italiennes se multiplieront, notamment dans les ouvrages des grands écrivains français de l’époque.

Les dialectes régionaux du Nord

Avec l’uniformisation de l’enseignement, la télévision, la radio, les dialectes perdent peu à peu de leur importance, mais restent une référence culturelle et historique essentielle pour comprendre l’Italie. Dans la région alpine et pré-alpine, la répartition par groupes linguistiques est de plus de 60 % pour les italophones, et de 35 % pour les germanophones. Une petite minorité parle le français et le ladin. Les autres langues minoritaires sont l’occitan (Piémont, Ligurie), le slovène (Frioul-Vénétie Julienne)… De même, le provençal est parlé par 90 000 personnes établies depuis les XIIIe et XIVe siècles (Vallée d’Aoste, nord du Piémont).

Le ladin, langue des Dolomites

Le ladin est un reliquat de la langue romane qui était autrefois bien plus parlée dans cette région alpine. C’est seulement dans les vallées les plus reculées et les plus isolées que le ladin a pu se maintenir. Avec l’unification italienne, tous les territoires où étaient pratiqués les dialectes ladins passèrent progressivement de l’autorité autrichienne à celle de l’Italie. Le mouvement nationaliste italien a toujours considéré les dialectes ladins comme des dialectes italiens, ce que réfutent ceux qui les parlent. C’est seulement lorsque l’autonomie administrative du Tyrol méridional fut instituée que les ladinophones ont vu leurs droits reconnus en tant que minorité culturelle. On parle encore le ladin dans les Dolomites : à Cortina d’Ampezzo, dans le val Gardena, le val Fassa et autour de Bolzano.

Les Dolomites : région trilingue

La province autonome de Bolzano compte environ 470 000 habitants. Ceux-ci sont répartis entre 116 communes dont les principales sont Bolzano (chef-lieu), Merano, Bressanone, Brunico, Laives et Vipiteno. Le Haut-Adige, comme la vallée d’Aoste, est une région officiellement multilingue. En fait, les deux tiers (70 %) de ses habitants sont de langue maternelle allemande et moins de 5 % de langue maternelle ladine des Dolomites. Les italophones (25 %) sont concentrés surtout dans le chef-lieu, Bolzano (Bolzen en allemand), et dans les localités de Merano (Meran en allemand), Bressanone (Brixen en allemand), Laives (Leifers en allemand) et Bronzolo (en allemand Branzoll). Les ladinophones (5 %) sont surtout dans le val Gardena (Gherdëina) et dans le val Badia. Dans la province autonome de Bolzano, la signalisation est entièrement bilingue, en italien et en allemand. Vous y entendrez plutôt Grüssgot (bonjour en bavarois) que Bongiuourno. Dans les municipalités de langue ladine de la province, la signalisation est majoritairement trilingue (ladin, allemand et italien).

Le français dans la Vallée d'Aoste

Région historiquement franco-provençale, au sein des Etats de Savoie, puis du royaume de Piémont-Sardaigne, la Vallée d’Aoste ne suivit pas le sort de la Savoie et de Nice, qui furent soumises à plébiscite et rattachées à la France en 1860, et resta au sein du nouvel Etat unitaire italien. Dès lors, la région n’a cessé de lutter contre les attaques faites à sa culture. La période fasciste fut particulièrement violente avec une politique d’italianisation systématique. L’interdiction de la langue française contribua à bouleverser durablement cette société montagnarde isolée. Tous les toponymes furent italianisés (Aoste en Aosta, Saint-Pierre en San Pietro, Morgex en Valdigna d’Aosta, Chamois en Camosio, Champorcher en Campo Laris, etc.). Le français étant banni, la population se limita à la pratique orale du franco-provençal, toléré par les autorités. En réaction à ces mesures autoritaires, on vit se constituer un courant de résistance culturel animé par un jeune juriste, Emile Chanoux. Ce dernier, à la tête de la « Ligue valdôtaine pour la protection de la langue française dans la vallée d’Aoste », va mener une action systématique en faveur de la défense du français. Ses revendications linguistiques vont bientôt aller de pair avec des revendications fédéralistes. Réfugié en France, Chanoux retourne dans la vallée d’Aoste en 1943. Là, il est arrêté, le 18 mai 1944, par les autorités fascistes et meurt dans la nuit. Sensible à la question linguistique, Charles de Gaulle avait envisagé un moment l’annexion de la Vallée d’Aoste à la France, encouragé en ceci par un courant rattachiste important parmi les Valdôtains. Cependant l’opposition farouche des Américains, doublée par les difficultés saisonnières de passage entre la France et la vallée (les tunnels n’existant pas), conduisit à l’abandon de ce projet. De Gaulle va toutefois obtenir l’assurance d’un régime d’autonomie pour la vallée. L’après-guerre a permis un retour officiel du français, avec le statut d’autonomie. Les années 1960 et 1970, avec le développement industriel et touristique, ont accéléré la modernisation de la région. Aujourd’hui il n’est pas rare d’entendre parler français dans la vallée, également parlé dans les hautes vallées du Piémont.

Le dialecte milanais : un héritage ancestral

En 600 av. J.-C., les Gaulois s’installent dans la région de Milan, et leur culture influence la vie et les mœurs des populations préexistantes. Le nom même de Milan dériverait du mot celte Mediolanum. Pareillement, le nom Brianza (zone géographique au nord-est de Milan) dérive du mot celte brig, « lieu en hauteur » et Lecco du mot leukos, « bois, forêt ».

A partir de 222 av. J.-C., Milan est occupée par les Romains. Le latin classique, qui n’est parlé que par les élites, est vulgarisé par le peuple et devient l’idiome officiel. Le mélange des populations « barbares » avec les peuples romanisés accélère l’action de vulgarisation du latin, engendrant ainsi le dialecte milanais, dit également meneghino, soit la langue parlée par les serviteurs, le petit peuple. Le dialecte milanais est donc très proche du français car il est constitué de 70 % de mots d’origine latine. Cependant, comme pour la plupart des dialectes italiens, l’influence des dominations étrangères a laissé des traces très importantes. Ainsi nous retrouvons dans le dialecte milanais des mots d’origine espagnole, autrichienne et française : artichaut devient en milanais articiock et jambon, giabun.