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La musique traditionnelle

La musique folklorique de Suède porte l’âme de ses habitants. Et ce, bien qu’elle compte de nombreuses similitudes avec celle des ses voisines scandinaves. Ici, résonnent principalement la mazurka, musique de danse d’origine polonaise, le waltz, version suédoise de la valse et surtout la polska, danse de couple à trois temps commune à tous les pays de Scandinavie... Jouée depuis des siècles par les spelmän, musiciens folkloriques véritables gardiens de la tradition, cette musique a été transmise de génération en génération avant de s’essouffler au début du XXe siècle. Dans les années 1960, la musique folklorique connaît un brusque regain d’intérêt, de nombreux jeunes adhérant aux clubs de musique populaire. Un mouvement aussi amplifié durant les années 1970 par Gärdesfesten, sorte de réponse suédoise à Woodstock. Peu à peu, les racines de la musique traditionnelle suédoise se sont mêlées aux influences modernes comme le blues, le jazz ou le rock, donnant naissance à un style nouveau, sorte de néo-folklore, porté par quelques groupes comme Folk och Rackare dans les années 1970/80 puis Draupner, Hedningarna, Sågskära ou The Tallest Man on Earth (ce dernier étant particulièrement connu hors des frontières suédoises).

Parmi les instruments traditionnels les plus couramment utilisés on trouve le violon, qui est le plus caractéristique de la musique suédoise, la nyckelharpa, qui pourrait se traduire par « vielle à clef » et qui a retrouvé une seconde vie avec le renouveau folklorique des années 1960, la cornemuse suédoise, l’harmonica ou l’accordéon.

Un des plus beaux endroits dans le pays pour croiser des musiques traditionnelles est assurément Skansen, le musée en plein air de Stockholm consacré à la vie folklorique suédoise. Grande fierté des Stockholmois, sortie familiale et adorée des touristes, Skansen est aujourd’hui un lieu de rendez-vous populaire, avec sa multitude de concerts et danses folkloriques l’été, et son marché de Noël qui attire une foule nombreuse chaque année. Les fêtes traditionnelles telles que Midsommar, Valborg et la Sainte-Lucie y sont célébrées. Autrement, au début du mois d’août, se tient à Nämforsen, le festival Urkult, événement des plus familiaux, consacré aux musiques folk d’ici et du monde.

La musique classique

Sans véritable compositeur remarquable pour l’écrire, la musique classique ne jouit que d’une petite histoire en Suède. Le père du genre est Johan Helmich Roman (1694-1758), compositeur baroque, parfois qualifié de « Haendel suédois ». Son œuvre la plus célèbre est la Drottningholmsmusiken, divisée en 33 mouvements courts composés pour les mariages royaux. Au XVIIIe siècle, c’est Joseph Martin Kraus (1756-1792) qui s’illustre en devenant le « Mozart suédois ». Compositeur novateur, il reste mal connu hors de Suède malgré de brillantes compositions marquées par la finesse et les contrastes dramatiques. Aux XIXe siècle, c’est Wilhelm Stenhammar (1871-1927) qui se distingue, notamment comme étant l’un des meilleurs pianistes de son temps. Influencé par le romantisme allemand dans ses premières œuvres, il développe par la suite un style plus suédois, dans lequel se dessine l’impact de Jean Sibelius. À la même époque, citons également le chef d'orchestre et violoniste Hugo Alfvén (1872-1960) dont l’œuvre s’inscrit dans le romantisme tardif. Au XXe siècle, Hilding Rosenberg (1892-1985) s’affirme comme un des pionniers de la composition moderne suédoise.

Dans les arts lyriques, la Suède s’est illustrée à de nombreuses reprises grâce à ses grandes voix. Au XIXe siècle, la soprano Jenny Lind (1820-1887) était une chanteuse d’opéra des plus courues. Tout comme le ténor Jussi Björling (1911-1960) au siècle suivant, qui apparut sur les plus grandes scènes du monde. Une célébrité amplement partagée par la mythique soprano Birgit Nilsson (1918-2005) mondialement connue pour la force et la clarté de ses interprétations. Le siècle fut aussi marqué par le talent du ténor Nicolai Gedda (1925-2017), soliste du Metropolitan Opera, qui connut toutes les plus grandes scènes et la mezzo-soprano Anne Sofie von Otter qui continue d’émerveiller le public par son timbre lumineux.

Si la Suède possède plusieurs ensembles de qualité, c’est clairement l’Orchestre symphonique de Göteborg qui se distingue. Désigné comme l’orchestre national de Suède, il tire notamment son prestige des quelques géants de la direction – Neeme Järvi et Gustavo Dudamel en tête – qui en eurent la charge. L’orchestre réside et se produit au Göteborgs Konserthus mais on peut aussi le voir en plein air dans le Parc Slottsskogen lors de Music Al Fresco.

Le jazz

Les fans du genre le savent, la Suède a une longue tradition jazz. La réputation des festivals de Stockholm et d’Umeå̊ (au nord du pays) attire chaque année un public nombreux et des artistes du monde entier. Fort d’une histoire riche en talents, le jazz suédois prend son envol dans les années 1960 avec le pianiste Jan Johansson (1931-1968). Encore mal connu hors de Scandinavie, l’artiste est pourtant l’auteur de l’album de jazz suédois le plus vendu, Jazz på Svenska, paru en 1964. Il est la figure de proue d’une scène foisonnante où génération après génération se sont croisés des musiciens talentueux : Arne Domnerus qui a enregistré des albums avec James Moody, Art Farmer et Clifford Brown et joué avec Charlie Parker ; Lars Gullin (1928-1976), que certains considèrent comme l’un des meilleurs saxophonistes baryton de l'histoire du jazz ; Bobo Stenson, pianiste dont l’originalité du jeu et des compositions lui ont ouvert la porte du prestigieux label ECM ; le tromboniste Nils Landgren, hyper prolifique ; Magnus Lindgren excellent saxophoniste et figure mondiale du jazz suédois ; ou encore Esbjörn Svensson Trio, qui bouscule les codes du jazz. Citons également Lisa Ekdahl et son soft-jazz assez populaire en France.

Côté scènes, à Stockholm, le Jazz Club Fasching est une adresse bien connue des aficionados, célèbre pour convier des artistes aux esthétiques libres dépassant le simple cadre du jazz. Toujours dans la capitale, les fans de jazz se régaleront aussi à Stampen, une place forte du genre. À Malmö, le club Babel cultive une très bonne réputation et à Göteborg, en octobre, le Festival de Jazz accueille souvent quelques bons noms.

La pop

La Suède sait produire des cartons mondiaux comme nul autre pays. À commencer par les célébrissimes ABBA, stars des années 1970 qui ont fait découvrir la pop façon suédoise au monde entier. Ce groupe devenu légendaire figure toujours parmi les recordmen mondiaux des ventes avec quelque 380 millions de disques écoulés. Étourdissant ! Dans les années 1980, c’est le groupe Europe et son tube The Final Countdown qui fait sensation et vend 8 millions de copies. Depuis, chaque génération comporte son lot de cartons pop suédois affichant des chiffres astronomiques de vente : Roxette (70 millions de disques vendus), à la fin des années 1980, The Cardigans (15 millions de disques vendus), Ace of Base (30 millions) ou encore Kent (3 millions) dans les années 1990. À la même époque, des artistes suédois comme Neneh Cherry ou Dr Alban produisent également, chacun dans leur genre, des hits planétaires. Indéniablement, la Suède possède une patte unique pour élaborer des tubes. Un savoir-faire et une notoriété intacts, entretenus aujourd’hui par des artistes comme Max Martin, l’homme derrière certains des plus grands succès de Britney Spears, Backstreet Boys ou NSYNC ou encore le duo Christian « Bloodshy » Karlsson et Pontus « Avant » Winnberg, responsable de quelques grands moments de pop chez Britney Spears (Toxic, c’est eux), Kylie Minogue, Madonna, Jennifer Lopez ou Kelis.

Encore un mot sur ABBA. Nombreux sont les fans à se rendre en Suède et il serait dommage pour eux de louper Mamma Mia ! The Party. Présenté au cabaret Rondo à Göteborg, Mamma Mia ! The Party s’inspire de la taverne grecque du film et de la comédie musicale. On y retrouve la même ambiance chaleureuse en assistant durant le repas aux performances des chanteurs sur la musique d’ABBA. Les fans ne manqueront pas non plus de se rendre au Musée ABBA, à Stockholm. L’endroit permet de découvrir les costumes, les instruments, les disques d’or et d’autres objets ayant appartenu au groupe. Il est dit qu’on y entre en marchant et qu’on en sort en dansant…

Enfin, tout laisse à penser que la pop suédoise a encore de beaux jours devant elle : en mai 2023, la chanteuse Loreen remporte une nouvelle fois le concours de l'Eurovision, qu'elle avait déjà gagné en 2012. Elle devient la deuxième artiste à réussir cet exploit, et hisse la Suède à la première place du nombre de victoires (7), ex æquo avec l'Irlande.

Les musiques actuelles

Tout le talent que le pays investit dans la fabrique de tubes se retrouve dans la création contemporaine. Le meilleur exemple est sans conteste The Knife. Formé en 1999 par le duo Karin et Olof Dreijer, The Knife est devenu incontournable dans le pays (comme dans le monde), à la fois par son message radical, son atmosphère énigmatique et sa musique électronique bouleversant les codes du genre. Révélé au grand public en 2006 avec leur chef-d’œuvre Silent Shout, le groupe se sépare en 2014, se consacrant à des projets parallèles. Et justement, un des projets de Karin Dreijer se nomme Fever Ray et sa musique est à peu près aussi fascinante et culte que celle de The Knife, quelque part entre le dub et la cérémonie occulte.

Autre Suédoise incontournable, Lykke Li a charmé un large public avec sa pop électronique au cœur gros. Toujours rayon électropop, la chanteuse Robyn est adorée pour ses singles aussi dévastateurs qu’accrocheurs et le duo Icona Pop a marqué les années 2010 avec à son titre I Love It. Électronique encore, mais un brin plus expérimentale, n’oublions surtout pas de mentionner le très prolifique Jay-Jay Johanson et sa musique brumeuse. Autrement, pour bien prendre la mesure de la qualité de la création contemporaine suédoise, toute une constellation d’artistes mérite amplement une écoute : les chansons arty de Jenny Wilson ou Jens Lekman, le rock dégingandé de The Hives, The Hellacopters et (un peu gras) de Viagra Boys ou le hip hop désabusé et nauséeux de Yung Lean. Plus grand public, impossible de ne pas mentionner Avicii, DJ et producteur au succès phénoménal et disparu en 2018. Aux antipodes du genre, on trouve aussi Peder Mannerfelt, figure ultra-respectée de l’underground techno. Citons également le groupe Off The Meds, composé de 3 producteurs house suédois et d'un vocaliste sud-africain, avec leur morceau Karlaplan, un hommage à la place éponyme d'Östermalm. La jeune chanteuse Zara Larsson s'est également fait une place sur la scène internationale.

À Stockholm, les noms les plus importants passent par des grosses scènes comme l’Annexet ou des plus modestes et branchées comme Debaser Strand ou Fållan. À Malmö, les bons concerts se déroulent au Plan B ou au Kulturbolaget. Côté festivals, le pays est, sans surprise, très fourni. Quelques gros rendez-vous à noter : Trästockfestivalen, le grand festival de musique gratuit de Skellefteå, qui installe ses six scènes dans le parc Noranå, Lollapalooza à Stockholm, version suédoise du géant américain, Way out West à Göteborg, une des meilleures affiches du pays ou encore Visfestivalen à Västervik et sa grande scène nichée dans les ruines des châteaux.