Fontaines et abreuvoirs

Les fontaines et les lavoirs furent une première avancée dans la quête pour l’eau. Finie la corvée d’aller la chercher, au prix de grands efforts, à la rivière. Elle arrivait au cœur du village. De même, fini le lavage du linge à genoux au bord des cours d’eau. Les lavandières se tenaient debout autour du lavoir, une position plus confortable. Des puits existaient aussi. Il fallait manœuvrer un treuil à manivelle pour en tirer l’eau. Témoignages d’une époque révolue, les fontaines et lavoirs sont devenus des décors photogéniques dans les villages. De nombreux exemples de parsèment les communes. En voici quelques-uns :

Au Bar-sur-Loup, on peut admirer une fontaine au niveau du square Seytre. Le bassin reçoit l’eau par deux tubes en fer forgé, ornementés. Le bassin en pierre de taille est mouluré en partie haute et en partie basse. Place de la Fontaine, on peut voir un lavoir surmonté sur toute sa longueur d’une barre de bois pour égoutter le linge. A côté se trouvent une fontaine et un abreuvoir en pierre de taille.

À Bézaudun-les-Alpes, on est accueilli place des Tilleuls par le murmure d’une fontaine couverte.

À Bouyon, une jolie fontaine à quatre faces rafraîchit les habitants au cœur du village.

Dans le secteur hautement pastoral de Caussols, existent de nombreuses fontaines et abreuvoirs. On peut admirer un abreuvoir de 1933 aux Gleirettes, près de la RD112. Un panneau précise qu’il a été édifié par le Génie Rural. Un ancien abreuvoir à moutons, tout en longueur, est aussi visible au niveau de l’Embut de Caussols. Dans le secteur des Claps, on peut voir d’anciennes citernes destinées à retenir les eaux pluviales. Ce système de citernes était la seule façon de conserver l’eau dans ce secteur isolé.

À Châteauneuf-Grasse, chemin de la Grande Fontaine, se trouve un triple ensemble fontaine-lavoir-abreuvoir, alimenté par un captage d’une source de la Brague. La fontaine a été le seul point d’eau au village jusqu’à la fin du XIXe siècle.

À Cipières, une jolie fontaine de 1893 orne la place du village, avec son lavoir du XVIIe siècle.

À Conségudes, une jolie fontaine octogonale accueille les visiteurs place de la mairie. L’eau sort de la bouche de têtes de lions antiques.

À Courmes, en contrebas du village se trouve un lavoir couvert par une charpente de bois et un toit de tuiles, jumelé à une fontaine en pierre de taille qui l’approvisionne en eau.

À Coursegoules, on peut encore admirer le lavoir et la fontaine adjacente, tous deux couverts. La municipalité y expose des photos d’époque, très instructives.

Aux Ferres, une fontaine de 1893 à deux verseurs métalliques se trouve sur la place devant l’église Saint-Jacques.

À Gourdon, la belle fontaine classique à quatre faces, datant de 1852, est constituée d’un large bassin formant quatre demi-cercles. L’eau sort de la bouche de têtes humaines antiques. A côté se trouve le lavoir de 1870, qui s’inscrit à l’intérieur d’un bâtiment. On peut encore voir une longue barre métallique qui devait servir à égoutter le linge.

À Gréolières, un lavoir et une fontaine de grande taille se trouvent à l’entrée du village.

À La Roque-en-Provence, un joli lavoir couvert, au bas du village juste avant le pont de France.

À Opio, une petite fontaine toute simple datant de 1894, près de la mairie. Composée d’une vasque conique, elle est adossée à une pierre verticale. Dans le quartier de San Peyre se trouve une jolie fontaine-lavoir rénovée qui était utilisée par les habitants jusqu’à la fin du XIXe siècle.

À Roquefort-les-Pins, une fontaine de la fin du XIXe siècle, avec un vaste bassin de pierre, est intégrée à l’espace urbain moderne du quartier des plans, en face de la mairie.

Au Rouret, la fontaine-lavoir de Troussane se trouve dans un quartier excentré. Ce lavoir, qui date du XVIIIe siècle faisait partie des rares points d’eau communaux accessibles. Il a été transformé en fontaine en 1959. Au centre du village, la fontaine-lavoir Saint-Pons, abritée par une charpente de bois et un toit de tuiles.

À Tourrettes-sur-Loup, sur la place de la Libération se trouvent une fontaine et un abreuvoir. A côté, une autre fontaine plus importante est creusée sous la roche. Plus loin, à 1 km environ du village se situe le lavoir de Font Luègne (la fontaine lointaine) ; abrité par une charpente de bois et un toit de tuiles. Ce lavoir est de faible profondeur, ce qui suggère que les lavandières y travaillaient à genoux.

À Valbonne on peut encore admirer une fontaine de 1834 devant l’ancienne mairie en plein cœur du vieux village. Plus loin, en bordure de village, se trouve la Fontaine Vieille. Elle a été la seule fontaine, hors village, à alimenter celui-ci jusqu’au début du XIXe  siècle. La Brague servait alors d’abreuvoir, de lavoir et d’égout. La route ayant été surélevée, la fontaine paraît à présent encastrée dans le trottoir. Des pans de l’aqueduc romain de la Bouillide qui desservait Antipolis sont encore visibles dans le parc de la Valmasque.

Le canal du Foulon

Grasse, son accroissement démographique et le développement de l’industrie du parfum. À la fin du XIXème siècle, l’approvisionnement en eau par la source de la Foux ne suffit plus à répondre aux besoins de la ville. Il faut trouver une solution, mais l’idée de l’exploitation de la Siagne et du Loup crée des tensions avec Cannes. C’est alors un cantonnier de Gourdon qui aurait fait connaître la source du Foulon à la municipalité de Grasse. 280 à 300 litres d’eau par seconde de débit au départ de Gréolières, sur une pente générale de 1,5 mètre par kilomètre jusqu’à la capitale du parfum. La commune l’achète en 1874, et le projet de création du Canal du Foulon est approuvé par le ministère de l’Agriculture en 1887. Les travaux commencent dans la foulée, menés de jour comme de nuit. Une taxe sur les vins, les alcools et les graisses est votée pour financer en partie ce chantier estimé à plus de 2 millions de francs.

 

Le canal est construit en briques, recouvert d’un enduit en ciment et protégé par des dalles de pierre. Les 22 tunnels mesurent au total 2 603 mètres, la traversée des ravins s’effectue au moyen de siphons ou de ponts aqueducs. L’inauguration a lieu en juillet 1889. Une grande fête est organisée pour célébrer cette nouvelle arrivée d’eau potable à Grasse. Le concepteur du projet, M. Pellegrin, est même décoré de l’ordre du mérite agricole.

 

Seulement, à peine en fonction, le canal maçonné montre des signes de faiblesse. Sa fragilité résulte de sa mauvaise conception, mais aussi du parcours qu’il emprunte : 26 kilomètres souvent à flanc de montagne. Les éboulements sont fréquents. Il faut entreprendre des travaux de renforcement. À de multiples reprises, les habitants du pays grassois ont recours à une autre source, qui émerge à quelques centaines de mètres à peine du canal, sur un terrain communal appartenant à la ville de Cipières. Avec son débit de 30 à 50 litres d’eau par seconde, elle vient pallier les défaillances du Foulon.

 

En 50 ans de service, les réparations du canal ont coûté 20 fois la dépense initiale. Au sortir de la guerre, un arrêté déclare les travaux d’utilité publique. Ils durent jusqu’en 1957. Le canal est reconstruit en tuyaux de taule d’acier, posés sur quelques 10 000 supports en béton.

 

Problème – encore, les tuyaux des années 50 sont de mauvaise qualité et s’oxydent rapidement. Ils demandent un entretien constant. La conduite de Gourdon, par exemple, est très endommagée. 8 510 tonnes de peinture sont appliquées jusqu’en 1980. On envisage d’entreprendre de gros travaux, mais rien n’est fait... jusqu’en 2019. La réhabilitation du canal de Foulon commence justement sur la commune de Gourdon.

 

La visée du renouvellement des canalisations obsolètes est aussi bien économique qu’écologique. 1,4 millions de mètres cubes d’eau sont perdus chaque année en raison des fuites. Soit 10 % de la production. Plus de 100 perforations ont été comptabilisées. Les nouveaux tuyaux sont protégés de la corrosion par des résines, appliquées à l’intérieur et à l’extérieur. L’objectif du Syndicat Intercommunal des Eaux du Foulon (SIEF), c’est de rénover 1 kilomètre de canalisation chaque année. De quoi continuer à alimenter en eau 90 000 Azuréens et protéger l’une des ressources les plus précieuses.

Quelle randonnée !?

Bon nombre de sites internet partagent des itinéraires de randonnée le long du viaduc du Foulon. Et pourtant, l’accès est désormais interdit ! Il est recommandé d’emporter une lampe frontale pour ne pas se cogner la tête dans les tunnels, de bien se chausser pour éviter d’avoir les pieds mouillés... Peu importe l’équipement, c’est non. Ce parcours est exclusivement réservé au personnel d'entretien du canal et ne peut être emprunté par des randonneurs.

Le canal du Loup

Vous connaissez maintenant l’histoire du canal du Foulon... et vous vous demandez peut-être à quoi correspondent ces autres tuyaux, visibles depuis la place Victoria, à Gourdon. C’est le canal du Loup. Lui a été inauguré en 1911, pour conduire les sources de Gréolières et de Bramafan jusqu’à Cannes, en passant par Cipières, Courmes, Le Bar-sur-Loup ou encore Châteauneuf-Grasse. Il s’arrête aujourd’hui à Mougins et mesure 39 kilomètres de long. Son débit de transit moyen est de 40 000 mètres cube d’eau par jour.