Découvrez le Kenya : Musiques et Scènes (Danse / Théâtre)

Le Kenya a toujours été une place forte de la musique en Afrique de l'Est. Dès les années 1950/1960, des artistes comme Fundi Konde, un des premiers guitaristes de cette partie du continent, Daniel Katuga ou George Mukabi enregistrent leur musique, qui plus est sur de grands labels de l'époque comme His Master's Voice (HMV) ou Capital Music Stores (CMS). Au moment de l'indépendance du pays en 1963, l'industrie musicale est alors si vaillante que la légende raconte qu'il y sort des milliers de nouveaux enregistrements chaque mois. Si la dynamique s'est un peu tassée depuis, le Kenya demeure un grand pays de musique du continent africain, où les traditions des nombreuses ethnies telles que le nyatiti ou le taarab côtoient des courants modernes, voire avant-gardistes. Une Histoire qui raconte ô combien il y a mille raisons de venir au Kenya autres que ses paysages.

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La musique traditionnelle

A l’instar de nombreuses régions du continent africain, les traditions musicales kenyanes varient selon les ethnies. Chez les peuples bantous, par exemple, les percussions prédominent et les tambours tels que le fameux ngoma sont très utilisés. Le terme désigne d’ailleurs aussi bien l’instrument qu’une rythmique ou une danse. Chez les Kikuyu, une des tribus bantoues les plus importantes du Kenya, on peut entendre les femmes interpréter des chants et danses traditionnels, destinés aux initiations, mariages, à la chasse ou au travail. Relatifs aux Bantous, les Mijikenda, peuple du littoral kenyan, cultivent quant à eux une tradition folklorique dynamique, elle aussi principalement basée sur les percussions.

Chez les peuples Luo, la musique se distingue par sa syncope et l’importance accordée à la voix. Riches en ornementations vocales, les chansons sont souvent structurées en appels et réponses. Aussi, on trouve ici le sigalagala, un type d’ululation pratiqué principalement par les femmes, généralement point culminant de la performance musicale. L’instrument emblématique de la musique luo, c’est évidemment le nyatiti, un type de lyre à cinq ou huit cordes dont le son fascine le monde entier (le musicien américain Andrew Bird en a par exemple introduit dans certaines de ses chansons). Joué le plus souvent seul, il est cependant parfois accompagné de quelques autres instruments typiques de la région comme l’oporo, longue corne insérée dans une calebasse, ou l’orutu, vièle à une corde. Loin d’être cantonné au folklore ou à la tradition, le nyatiti comporte quelques musiciens stars comme Ayub Ogada, dont les morceaux se sont de nombreuses fois invités dans des films (notamment de The Constant Gardener), Suzanna Owiyo qui mélange sonorités luo et pop ou folk, John « Rapasa » Otieno ou Anyango (de nationalité japonaise).

Chez les Maasaï, historiquement semi-nomades, la musique est traditionnellement dénuée d’instrument, purement vocale et polyphonique. Les rythmiques sont quant à elles généralement assurées par le corps. Chez les voisins Turkana et Samburu, on trouve des instruments à vent comme le kudu, une corne d’antilope, et des chants d’appels et réponses.

Enfin, chez les peuples swahilis, la tradition musicale la plus courante est le taarab, musique métissée, fusion de styles combinant poésie africaine chantée, percussions, instruments à cordes hérités d’Egypte, de l’Inde occidentale et de rites bantous.

Un très beau rendez-vous de musique et danses traditionnelles dans le pays est le Lake Turkana Festival, trois jours de festivités célébrant la richesse culturelle des différentes communautés qui vivent autour du lac Turkana, surnommé la « mer de Jade ».

La musique populaire

Le grand pilier de la musique populaire kényane du XXe siècle est incontestablement la guitare. L’instrument est incontournable dans le pays depuis les années 1950, époque à partir de laquelle des albums de guitaristes congolais légendaires comme Edouard Massengo et Jean-Bosco Mwenda sont accessibles au Kenya. Les musiciens congolais ont d’ailleurs connu le succès très tôt au Kenya, dès les années 1970 et 1980, comme l’Orchestre Virunga. C’est aussi un genre congolais, la soukous, qui est historiquement un des grands favoris du pays. Autrement appelé « rumba congolaise », ce style a connu quelques groupes stars au Kenya comme Super Mazembe et Les Mangelepa.

L’autre esthétique essentielle au Kenya, c’est le benga. Musique pop du peuple Luo, l’un des groupes ethniques majeurs du pays, le benga s’est développé entre la fin des années 1940 et 1960, à Nairobi, mélange de mélodies syncopées imitant le nyatititi et de soukous et kwela sud-africaine. C’est George Ramogi et son groupe CK Jazz qui sont considérés comme les pères du genre. Ce dernier a ensuite été popularisé dans les années 1970 par Shirati Jazz, ensemble formé par Daniel Owino Misiani et Migori Super Stars, premières vedettes de la discipline. Un pilier de l’identité Luo qui fait danser tout le pays. Si vous cherchez le roi (autoproclamé) actuel du benga, c’est vers Ken Wa Maria qu’il faut se tourner. Très grand nom du genre, il se produit très régulièrement dans le pays, et on a pu par exemple le voir par le passé à l’Alliance française de Nairobi ou au Koroga Festival. A noter aussi que le fameux restaurant Carnivore de Nairobi propose quelquefois des concerts où il n’est pas rare d’entendre du benga. Pour l’anecdote, le premier artiste kenyan à avoir foulé les planches du restaurant susmentionné, dans les années 1980, fut Joseph Kamaru. Icône du benga – et activiste reconnu – Kamaru est une influence géante sur les jeunes générations de musiciens ainsi qu’un des meilleurs vendeurs de disques du pays (un demi-million d’exemplaires écoulés sur l’ensemble de sa carrière).

Les musiques actuelles

Nairobi cultive une scène de musiques actuelles hyper dynamique. Si le reggae, puis le hip-hop et le dancehall se sont longtemps taillé la part du lion, la musique électronique et des esthétiques plus variées s’imposent de plus en plus dans les clubs du pays. Côté afro-pop, la grande star est le groupe Sauti Sol, quatre Kényans à l’origine d’un véritable phénomène musical de ces dernières années au Kenya. Ce sont d’ailleurs eux qui ont chanté pour accueillir Barack Obama sur la terre de son père en 2015. Leurs tubes, constamment joués dans les boîtes de nuit, mêlent rythmes pop et sons traditionnels, tout en relatant la vie des jeunes gens, la fête, l’amour... Côté rap, c’est Henry Ohanga, dit Octopizzo, qui rafle la mise : né dans le plus grand bidonville de Nairobi, Kibera, où il tourne aujourd’hui tous ses clips, il est devenu l’un des musiciens les plus populaires d’Afrique de l’Est. Rayon rap toujours, impossible de ne pas parler de Muthoni Drummer Queen, incarnation féminine de la scène rap et électro kenyane. Rappeuse, percussionniste, productrice, Muthoni est une artiste engagée, militante féministe et antisystème. Elle est aussi célèbre pour avoir créé deux festivals : le Kenya’s Blankets and Wine Music Festival, réputé pour son ambiance et sa programmation ainsi que L‘Africa Nouveau Festival en 2015, devenus deux événements majeurs de la culture africaine actuelle où se côtoient concerts, projections, performances, défilés.

Comme à peu près partout sur le globe, le Kenya a vu se développer une scène rap bien à elle. Ici, les artistes rappent en anglais, en swahili, ou en sheng, l’argot local. Hormis les deux mentionnés précédemment, les quelques noms à retenir du genre sont Bamboo et KayCyy, deux MCs locaux qui ont embrassé une belle carrière aux Etats-Unis (surtout le second, proche de Kanye West), Khaligraph Jones, réputé pour son flow ou encore Petra Bockle, Naiboi, Monski et Camp Mulla. Ce dernier groupe est parfois considéré comme les Black Eyed Peas kenyans et a connu un succès massif dans le pays. Après plusieurs décennies de vie sur place, le hip-hop s’est acculturé et a accouché de cousins typiquement locaux comme le genge, qui mélange rap et dancehall – Jua Cali, Nonini et Jimwat en sont les dignes représentants – ou le boomba (aussi appelé kapuka), hybride de rap, reggae et traditions musicales africaines.

Aussi, désormais, la musique électronique n’est pas loin d’être populaire au Kenya. Le genre attire des centaines de personnes autour des platines. Le collectif de DJ EA Wave est un des plus dynamiques du pays et organise de nombreux concerts et soirées dans des hauts lieux de Nairobi tels que le Klub House, très grand complexe à la fois club, bar sportif (retransmission de matchs sur grand écran) et restaurant ou le Muze Club, un immanquable de la vie nocturne branchée de Nairobi. C’est grâce à cette effervescence que la scène électronique kényane croît à vue d’œil, des pionniers DJ Rachael étant aujourd’hui rejoints par de jeunes prodiges tels que Slikback, remarqué pour son électronique rugueuse et épique ou KMRU, plus intrépide et avant-gardiste, insufflant de vrais morceaux du Kenya – via le field recording – dans ses compositions profondes d’ambient-drone. Plus brutal, le duo Duma, signé sur le fabuleux label Nyege Nyege Tapes, propose des productions pleines de bestialité qui ont reçu des éloges de la part de la presse.

La danse

Sans surprise, le Kenya est une terre particulièrement riche en danses ethniques traditionnelles. Pour la plupart, elles jouent toujours un rôle fondamental d'un point de vue identitaire et au sein de la vie de la communauté. Parmi les plus remarquables, citons bien sûr l'adamu, danse sautée des Maasaï ; le mwomboko, danse de couple des Agikuyu, généralement exécutée par les membres les plus âgés de la communauté ; l'isikuti, tradition luhya tout en mouvements énergiques et rapides des épaules, de la taille et des pieds ; ou encore la chakacha, très courante chez les Swahilis.

Certains ensembles ont adapté ces danses rituelles à des chorégraphies pour ballet de type occidental, comme le Nairobi National Dance Ensemble ou Nairobi Dance Company, qu'on peut voir se produire sur la scène du Kenya National Theatre dans la capitale. Par ailleurs, le festival Lamu Art Festival et le centre culturel Bomas Of Kenya proposent leur lot de spectacles de danses traditionnelles kenyanes.

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