Art médiéval
Les trésors artistiques du XIIIe au XVIIIe siècle se sont donné rendez-vous au musée des Princes Czartoryski. La collection (Rembrandt, Dürer, David, mais aussi de l’art antique) qui constitue le plus ancien musée de Pologne a été rassemblée par la famille de collectionneurs éponyme.
Le Moyen Âge étant dominé par l’art religieux, la création médiévale se concentre majoritairement dans les lieux de culte. L’art du vitrail occupe une place unique en Pologne. À Cracovie, où une école perpétue la tradition, signalons les vitraux ainsi que les peintures murales de l'église des Franciscains.
Le grand représentant du gothique polonais en sculpture, Veit Stoss, réalise le célèbre retable de la basilique Notre-Dame à Cracovie. Exécuté entre 1477 et 1489, ce retable à cinq tableaux s’impose comme le chef-d’œuvre du gothique tardif. Une fois fermé, ce retable, qui se compose de douze tableaux, illustre la vie de la Vierge Marie. Les volets ouverts font référence à la Légende dorée selon laquelle Marie s’est éteinte en douceur parmi les apôtres. Au sommet, le couronnement de Marie est placé sous la houlette des saints patrons de la Pologne, Stanislas et Adalbert. Confisqué par les nazis, le retable voyage avant de retrouver sa ville d’origine en 1946. Patiemment restauré, il a récupéré toute sa grandeur.
Baroque
La fin du XVIe siècle est synonyme d’explosion artistique aussi bien en sculpture qu’en peinture. L’intérieur des églises s’orne de trompe-l’œil et de sculptures flamboyantes. En peinture, l’or envahit la production qui tend peu à peu vers le rococo. Cette profusion baroque perdure en Pologne pendant plus de deux siècles et touche également la création profane.
En réaction à cette surcharge formelle, un style réaliste s’affirme au XIXe siècle. Les grandes scènes historiques, batailles et portraits de personnalités ont le vent en poupe. L’art traditionnel résiste un temps aux courants avant-gardistes qui secouent l’ouest de l’Europe, notamment l’impressionnisme.
Art historique
L’histoire mouvementée de la Pologne se dévoile à travers l’œuvre du peintre Jan Matejko, né en 1838 à Cracovie. Acclamé comme le plus grand peintre de tableaux historiques de la Pologne, Matejko montre aussi bien les personnages que les événements marquants de son pays. Formé à l’École des beaux-arts de Cracovie, il quête l’inspiration à Munich puis à Vienne. Il n’a que vingt-quatre ans quand il peint Stanczyk (Le Bouffon du roi). Plus tard, il présente ses toiles monumentales au Salon de Paris. Celui qui se considérait au service de sa patrie devient en 1873 enseignant et directeur de l’École des beaux-arts de Cracovie, fonctions qu’il occupe jusqu’à sa mort survenue en 1893. À voir : ses portraits, d’une grande sensibilité, et la fresque qu’il réalise avec ses élèves pour la basilique Notre-Dame de Cracovie. Une statue signée Jan Tutaj lui rend hommage, juste en face de l’Académie à laquelle il s’est longtemps dévoué, et l’on pourra visiter la maison de Jan Matejko, où il naquit et vécut. La halle aux Draps (Sukiennice), par ailleurs, abrite plusieurs de ses œuvres au sein de la Galerie de la peinture polonaise du XIXe siècle, la plus grande collection d’art polonais du monde.
Jeune Pologne
Cracovie est au cœur du modernisme polonais, courant appelé Jeune Pologne (Młoda Polska) qui bouleverse toutes les formes d’expression dans les dernières années du XIXe siècle et s’étale sur deux décennies. Opposés à l’académisme et au naturalisme, ces artistes intègrent les idées de Schopenhauer, Nietzsche et Bergson pour proposer des approches novatrices basées sur l’instinct. L’écrivain et poète Stanisław Przybyszewski (1868-1927) exerce une forte influence sur cette génération. Il publie leur manifeste esthétique dans la revue Zycie (La Vie), diffusée à Cracovie. L’intelligentsia se retrouve autour des revues et des cafés en vogue de la ville. L’artiste Stanisław Wyspiański (1869-1907) se démarque par la multiplicité de ses talents. Vitrailliste d’exception, comme ses compatriotes Matejko et Mehoffer, il incarne l’Art nouveau polonais. Un musée Wyspiański est en projet pour saluer cet artiste, peintre, architecte, écrivain et scénographe. En attendant, une partie de sa collection est visible à la maison Szołayski. Durant sa jeunesse, alors que la Pologne fait partie de l’Empire austro-hongrois, il étudie l’art, l’histoire et la littérature. Jan Matejko lui offre l’opportunité de participer à la décoration de la basilique Notre-Dame. Après des années de voyage, il revient à Cracovie et s’engage dès 1894 dans le courant moderniste. Connu pour ses dessins et son talent de portraitiste, il réalise des œuvres littéraires et graphiques, puis collabore avec le théâtre municipal. Wyspiański conçoit entre autres des fresques polychromes et de magnifiques vitraux pour l’église des Franciscains.
Au début du XXe siècle, la Pologne s’imprègne des révolutions artistiques qui touchent le reste de l’Europe. Le cubisme inspire notamment le brillant Tadeusz Makowski (1882-1932), ancien élève de l’Académie des beaux-arts de Cracovie, qui poursuit sa carrière en France.
Tadeusz Kantor
Homme de théâtre mondialement connu, Tadeusz Kantor (1915-1990) personnifie à lui seul l’avant-garde polonaise du XXe siècle. À ses débuts, Kantor expérimente la peinture tachiste, puis les collages dans lesquels il combine des objets trouvés. Marqué par Picabia et Duchamp, il visite Paris en 1958 puis expose à travers toute l’Europe et jusqu’à New York. Kantor monte ses premiers spectacles à Cracovie, mêlant notamment happening, peinture, écriture, arts de la scène et poésie dans ce qu’il qualifiait de théâtre informel. Personnage haut en couleur, bourré d’humour et de passion, il continue d’inspirer les artistes dans tous les domaines.
L’entre-deux-guerres correspond à une période faste pour l’avant-garde polonaise. Le réalisme socialiste qui touche les pays voisins se développe peu en Pologne.
Le sculpteur Igor Mitoraj
L’œuvre Eros Bendato compte parmi les statues monumentales qui jalonnent la place du Marché principal (Rynek Główny). Représentant une tête aux yeux bandés, elle est signée Igor Mitoraj (1944-2014), l’un des plus grands sculpteurs polonais. Formé au dessin à Bielsko-Biała, puis à l’Académie des beaux-arts de Cracovie, il étudie sous la direction de Tadeusz Kantor. Son maître l’aide à franchir le rideau de fer afin de l’encourager à faire carrière à l’Ouest. C’est à Paris que Mitoraj explore la pratique de la peinture, puis au Mexique, il découvre l’art précolombien qui le décide à s’orienter vers la sculpture. Sa première œuvre monumentale, Le Grand Toscano, est installée à la Défense, près de Paris. L’Antiquité et les mythes occupent rapidement une place centrale dans sa création. Visages ou fragments isolés reposant dans l’espace détenaient pour l’artiste une force expressive inégalable. L’artiste vit temporairement en Italie, où il souhaite s’inspirer de Michel-Ange. En 1985, il bénéficie d’une exposition au château Saint-Ange qui rencontre un immense succès. L’événement marque le lancement de sa carrière internationale. Il décède à Paris en 2014.
Photographie
La Fondation des Arts Visuels de Cracovie met la photographie à l'honneur lors du festival du Mois de la Photo de Cracovie. Parmi les photographes à découvrir, Piotr Uklański (né en 1968), également peintre et réalisateur, expose dans le monde entier ; le Franco-Polonais Nicolas Grospierre (né en 1975) immortalise les vestiges architecturaux de la Pologne ; Zbigniew Dłubak (1921-2005) se lance dans le dessin et la photographie durant la déportation et accomplit l'exploit d'organiser une exposition photo dans un camp de concentration. Par la suite, il enseigne cet art et dirige la revue Fotografia. De même, Mendel Grossmann (1913-1945) introduit un appareil photo dans le ghetto où il est retenu prisonnier. Ses témoignages du quotidien feront ensuite l'objet de publications.
Roman Opalka naît en France de parents polonais, en 1931. Après 1965, l'artiste conceptuel se consacre à un unique projet : capter et matérialiser le temps en peinture. Toute sa vie, Opalka observe le même rituel qui consiste à réaliser son autoportrait photographique chaque jour selon des règles plastiques immuables. Sa démarche est destinée à capturer l'essence de son travail. Certaines de ses œuvres sont visibles au Musée National de Cracovie.
Art urbain
Avouons-le, Cracovie n'est pas le terrain favori du street art. La majeure partie de la population garde une mauvaise image de l'art des rues. Nombre de graffitis ont pour thème le football. Que les étoiles barrées ne vous effraient pas ! Ce sont juste les opposants à l'équipe du Wisla de Cracovie qui expriment leur envie de gagner le prochain match. Deux quartiers à visiter pour découvrir l'art urbain : la zone postindustrielle de Zablocie, et Podgorze qui abrite « Never follow » de Blu, le célèbre street-artiste de Bologne. Dans ces deux quartiers, des artistes de Pologne et d'ailleurs conjuguent leurs talents.
Art contemporain
Depuis une dizaine d'années, le Cracow Gallery Week-end Krakers se déroule fin octobre dans le but de mieux faire connaître l'art vivant. Car la scène contemporaine est d'un dynamisme époustouflant. À sa tête, Malgorzata Golebiewska est une véritable dénicheuse de talents. Parmi les institutions dédiées à l'art contemporain, la galerie-café Bunkier Sztuki, fait la part belle à la photographie. Le MOCAK (Musée d'art contemporain de Cracovie) présente un panorama plus large de la scène artistique des deux dernières décennies, tous médiums confondus.
Les galeries d'art pullulent à Cracovie. Une petite sélection d'art local pour guider vos pas ? Les artistes réputés de la ville exposent à l'étage de Piano Nobile (Rynek Główny 33) : sculpture et art graphique au programme. La Jan Fejkiel Gallery
(ul. Sławkowska 14) valorise la crème de l'art graphique polonais.