Retour en 2019. Les touristes parcourent la planète en toute insouciance, les vols n'ont jamais été aussi peu chers. Un seul pays résiste encore et toujours. L'Arabie saoudite ne délivre pas de visa aux touristes. Le 27 septembre, le pays prend le monde par surprise et annonce l'ouverture de ses portes avec effet immédiat. Mais voilà, un virus inconnu fait son apparition et paralyse la terre entière. L'Arabie saoudite referme ses portes aussi vite qu'elle les a ouvertes et suspend même le hadj, le pèlerinage à La Mecque. 2022, le tourisme reprend timidement son envol, les pays lèvent les restrictions d'accès et sanitaires les uns après les autres. Pour marquer le coup et prendre sa revanche sur un lancement raté faute à la pandémie, l'Arabie saoudite annonce l'attribution d'un visa à l'arrivée pour les détenteurs d'un passeport européen au mois d'avril. Après un siècle de repli sur soi, le pays accueille les visiteurs à bras ouverts et multiplie les campagnes pour promouvoir la nouvelle destination. Avec des paysages somptueux de déserts et de montagnes, des fonds marins préservés gisant sous des eaux turquoise, des vestiges archéologiques de première importance et une culture riche et variée reposant sur l'hospitalité, le pays ne manque pas d'atouts pour devenir une des étoiles les plus brillantes du firmament touristique mondial.

AlUla, le site incontournable

S'il ne fallait retenir qu'un seul site à visiter, ce serait AlUla. L'oasis a été choisie comme ambassadrice de l'Arabie touristique, faisant le lien entre des civilisations ancestrales et une contemporanéité investie par l'art. La palmeraie s'étire dans une étroite vallée encadrée de falaises de grès rose à la beauté renversante. De l'eau, des accès aisément contrôlables, des roches tendres, il n'en fallait pas plus aux Dadanites pour faire de l'endroit la capitale de leur civilisation au VIe siècle av. J.-C. Les tombes aux Lions creusées dans la montagne ainsi que les vestiges d'une ville encore en fouilles témoignent de la puissance de Dadan. Ils ont été chassés par les Nabatéens au IIe siècle av. J.-C. Cette tribu venue du Yémen s'est forgé une richesse inépuisable avec le contrôle des routes caravanières de la péninsule. Ils ont laissé en héritage la nécropole de Hegra, aux tombeaux si particuliers. Avant d'occuper Pétra, plus au nord, les Nabatéens ont élu domicile sur un plateau sablonneux parcouru de montagnes moutonnantes.

120 tombes y ont été creusées, ornées de façades à portiques en escalier, des bétyles sont gravés pour toujours dans un étroit défilé débouchant sur les vestiges d'un temple. L'Empire romain a précipité la chute des anciennes civilisations arabes, mais le commerce a perduré et AlUla est restée une étape caravanière importante. L'eau présente en abondance dans les sols a permis aux tribus locales de se sédentariser pour cultiver des arbres fruitiers. Un gros village s'est formé, aux maisons de pierre et de pisé, au souk animé par les artisans locaux et les cafés. Aujourd'hui, le gouvernement saoudien investit massivement à AlUla pour en faire une destination d'exception. Le vieux village est en cours de restauration pour accueillir hôtels et restaurants. Tous les hivers, les vallées environnantes accueillent le Winter X Festival, un grand rendez-vous de l'art contemporain, où des oeuvres monumentales sont exposées en plein air. La musique profite de la splendide salle de concert Maraya, une folie architecturale recouverte de milliers de miroirs reflétant l'extraordinaire beauté des paysages qui l'entourent. De nombreuses activités sont proposées aux amoureux de la nature. Randonnée entre les montagnes spectaculaires, via ferrata et escalade pour les plus audacieux, observation des étoiles dans une nuit dénuée de pollution lumineuse ou encore buggy dans les vallons sablonneux sont à inscrire au programme des réjouissances.

Riyad, une capitale vibrante

AlUla ne saurait éclipser les autres atouts du pays, à commencer par Riyad, la capitale de ce pays grand comme 4 fois la France. C'est ici que les avancées sociétales promises par le prince héritier Mohammed bin Salmane sont les plus perceptibles. Les femmes conduisent et travaillent, certaines ont laissé tomber le niqab (voile couvrant le visage), d'autres fument aux terrasses des cafés. La population est à l'image du pays, jeune et active. La ville s'est énormément développée depuis les années 1950 et aujourd'hui, plus rien ne sépare la vieille ville de l'ancienne capitale Diriyah, classée au patrimoine mondial de l'UNESCO. Le choc des époques permet de traverser l'histoire du jeune pays fondé le 23 septembre 1932 et la formidable ascension du clan Saoud. Le 15 janvier 1902, Abdulaziz bin Saoud s'empare de la forteresse d'Al Masmak et ravit Riyad au clan Rashid. En 1936, il lance la construction du Palais de Murabba, 2 kilomètres plus au nord. L'édification de ce palais préfigure l'entrée de l'Arabie saoudite dans l'ère de la modernité. C'est le premier bâtiment à être électrifié, à posséder un ascenseur et l'eau courante dans les salles de bains. Une route goudronnée est construite pour permettre au roi d'y accéder. Il marque aussi les débuts de l'extension de Riyad, une métropole qui n'a de cesse de grignoter le désert. Le coeur historique de la capitale est relié aux différents quartiers de la ville par de larges artères. Chaque roi a marqué la ville de son empreinte. Khalid a son aéroport, Abdullah son centre d'affaires aux tours de verre et d'acier, Fahd son phare, le Kingdom Centre, qui toise la capitale du haut de ses 300 mètres. Les princes et princesses se tournent vers les arts et soutiennent fondations, galeries et " concept stores ". Grâce à eux, Riyad est devenue un pôle vibrant de la représentation des formes artistiques dans le monde arabe. En bons citadins, les habitants de Riyad s'échappent le week-end pour une randonnée au " Edge of The World ", une ligne de falaises surplombant le plateau du Najd ou pour faire ronronner les moteurs de leurs 4x4 dans les dunes rouges du Parc national de Thumamah ou d'Al-Muzhamiyah. Dans la lignée du plan " Vision 2030 " destiné à sortir de la dépendance au pétrole, ils visitent leur pays. Ils partent en excursion dans les anciens villages du Najd aux maisons de pisé à frontons crénelés chaulés de blanc ou poussent jusqu'aux portes du Rub' al Khali, le désert le plus hostile au monde, et à l'oasis d'Al Ahsa.

Al Hofuf et l'oasis d'Al Ahsa, de belles excursions

À l'est de l'Arabie saoudite, la ville d'Al Hofuf et l'oasis d'Al Ahsa se confondent pour former une destination touristique passionnante et variée. Côté ville, le souk traditionnel de Qaisariya est l'un des plus vibrants du pays. S'il a brûlé en 2012, il a été reconstruit à l'identique avec ses arcades, ses allées étroites et ses boutiques débordantes de marchandises en tout genre. Pendant que le Palais d'Ibrahim termine de se refaire une beauté, il faut aller flâner dans les ruelles du vieux Koud, un quartier préservé qui restitue l'ambiance de l'Arabie saoudite pré-unification. L'hôtel Al Koot, seul établissement historique du pays, permet de s'initier aux subtilités de la gastronomie d'Al Ahsa, dont le riz rouge hasawi, le plus cher et le plus nourrissant. Cernée par le désert du Rub' Al-Khali, aux températures extrêmes, l'oasis d'Al Ahsa est la plus vaste au monde. Avec 3 millions de palmiers, la région est le plus grand centre de production de dattes du pays. Il faut venir fin septembre pour assister à la récolte et voir les hommes grimper pieds nus les troncs élancés. La traversée de la palmeraie mène à la montagne d'Al Qarah, une étonnante formation calcaire isolée. Le vent et la pluie ont créé des failles et des galeries qui permettent de parcourir la montagne de l'intérieur tout en profitant d'une température constante de 25 °C, hiver comme été. Il ne faut pas quitter Al Hofuf sans avoir effectué une virée au lac Jaune, entouré de douces dunes de sable blond et bordé de hautes herbes.

La Mecque et Médine, pieuses escapades

En basculant à l'ouest du pays, s'ouvrent les portes des provinces de La Mecque et de Médine. Si la première ville demeure réservée aux musulmans, la seconde accueille dans son périmètre sacré pèlerins et touristes du monde entier. Médine est le berceau de l'islam, la cité où s'est réfugié le prophète Mahomet après avoir été chassé de La Mecque, le lieu des toutes premières mosquées. La Mosquée an-Nabawi fondée en 622 a été maintes et maintes fois remaniée pour recevoir toujours plus de fidèles. Outre son caractère historique, elle est aussi le lieu de la sépulture du Prophète. Il règne dans la ville une atmosphère de religiosité sereine, de joie contenue. L'accès aux lieux saints de l'islam se fait traditionnellement par Djedda. La ville baignée par la mer Rouge est la seule d'Arabie saoudite à accueillir les visiteurs du monde entier depuis toujours. Ses habitants sont fiers de son esprit d'ouverture, de son cosmopolitisme et de sa vieille ville. Le quartier d'Al-Balad est classé au patrimoine mondial de l'UNESCO pour ses maisons en blocs de corail et ses fenêtres en saillie de bois ajouré, qui permettait de prendre le pouls de la rue sans être vu. Ses habitants perpétuent la tradition des métiers d'art, qu'ils soient potiers, tourneurs sur bois, menuisiers, teinturiers, artistes peintres... En fin de journée, les marchands des souks ouvrent les lourds volets de bois de leurs boutiques et les ruelles s'animent alors qu'une légère brise tempère la moiteur de la ville.

Djedda et le sud, entre montagnes et farniente

Djedda est également un bon point de départ pour gagner le sud du pays, dont les paysages, l'architecture et le climat vont à l'encontre des clichés tenaces qui collent à la peau du pays. Ici, point de dunes de sable, mais des montagnes. À Taïf et ses 1 800 mètres d'altitude, l'air fraîchit déjà. Au mois d'avril, des parfums de rose embaument ses environs. La région est spécialisée dans la culture de la rose de Damas, qui sera ensuite transformée en parfums capiteux et huiles odorantes. Plus au sud, les maisons en pierre de la province d'Al Bahah traduisent des hivers rigoureux. Elles ne sont jamais plus belles que dans l'impressionnant village abandonné de Thee Ain, une citadelle minérale adossée à la montagne. La chaîne des Sarawat poursuit sa course jusqu'au Yémen, traversant la province de l'Asir. Le Jebel Soudah semble toiser Abha la capitale, du haut de ses 3 000 mètres. Depuis le sommet accessible en voiture, le regard se perd sur les pentes rocheuses parcourues d'arbustes, dans des fonds de vallées abruptes, sans perdre de vue des colonies de babouins tapageurs. Une route spectaculaire serpente jusqu'au village de Rijal Alma, ses mosquées et maisons en pierre aux volets colorés. L'une d'elles a été transformée en musée et permet d'admirer l'al-qatt, l'art pictural de l'Asir. Il s'agit de fresques colorées aux motifs géométriques symboliques. Les campagnes de la région sont ponctuées de hautes tours de guet en pisé trahissant un passé animé par le brigandage et les querelles entre tribus. Les vieux villages d'adobe au style yéménite encadrent des lopins en espalier où poussent fraises, bananes, raisin ou figues. En obliquant vers le sud-ouest, on se laisse glisser jusqu'à Jezan et les îles Farasan. Les bancs de sable blanc, les eaux d'un turquoise profond invitent à jouer les Robinson Crusoé le temps d'une nuit en camping sauvage. En choisissant le sud-est, on flirte avec la frontière du Yémen jusqu'à gagner Najran et ses maisons-fortes de pisé vraiment impressionnantes.

" Vision 2030 ", l'ambitieux plan de développement

Dans son ambition de développer le tourisme résumé dans le plan " Vision 2030 ", l'Arabie saoudite prévoit de remodeler les somptueux paysages de la région de Tabouk, au nord. Le projet NEOM, doté de 500 milliards de dollars, prévoit la construction d'une ville résiliente, d'une station de ski et de loisirs, d'une station balnéaire façon Maldives. The Line sera une cité linéaire à émission nulle en carbone, longue de 170 km, interdite à la circulation, et parcourue par un métro à grande vitesse qui ne mettra que 40 minutes d'un bout à l'autre de la ville. Elle est positionnée au débouché du golfe d'Aqaba, en bordure de la mer Rouge. Le Jebel al Lawz, culminant à 2 500 mètres dans la chaîne du Hedjaz, a été choisi pour accueillir une station d'altitude, des pistes de ski et un immense réservoir. Les travaux devront être achevés en 2028, les Jeux Asiatiques d'hiver ayant été attribués à l'Arabie Saoudite. Plus au sud, le chapelet d'îles au large de la côte entre les villages d'Al Wajh et d'Umluj, devient le Red Sea Project. Les îlots de sable immaculé et couronnés de fonds coralliens somptueux doivent accueillir hôtels et resorts de luxe en mesure de rivaliser avec les paradis tropicaux hyper-luxueux que sont les Maldives ou les Seychelles. Si le projet NEOM peut sembler démesuré, il est à l'image d'un pays décomplexé cherchant à rivaliser avec ses voisins des Émirats ou du Qatar, capable d'investir des sommes astronomiques servant à dessiner un nouveau futur pour son peuple. Les Saoudiens accueillent ce dessein avec une immense fierté et se réjouissent de l'esprit conquérant de leur jeune dirigeant, le prince héritier Mohammed bin Salmane.

Il demeure tout de même des recoins grandioses qui devraient échapper aux coups de pelleteuse dans la région. Le fantastique canyon de Wadi Disah, ses montagnes de grès rose et sa palmeraie, les vestiges nabatéens méconnus d'Al Bad ou la côte sauvage du golfe d'Aqaba et ses montagnes tombant dans des eaux translucides raviront les amateurs de paysages éternels.

 

INFOS FUTÉES

Quand ?

Il fait très chaud en Arabie saoudite, le thermomètre peut dépasser les 50 °C en été. La meilleure saison s'étend de novembre à mars, avec des températures clémentes en journée, voire fraîches la nuit. Des ondées passagères sont à prévoir, ainsi qu'une doudoune si vous vous rendez dans les montagnes ou passez la nuit dans le désert.

L'hiver marque la saison des festivals en Arabie saoudite : " Riyadh Season " d'octobre à décembre, " Winter at Tantora " de fin décembre à fin janvier à AlUla. Djedda vibre en été avec son " Summer Festival " et Taïf s'anime lors de la cueillette des roses fin mars début avril.

Durée

Comptez au moins une semaine pour avoir un aperçu de la diversité des paysages que l'Arabie saoudite a à offrir. Il faut 4 à 6 semaines pour faire le tour du pays.

Budget

Hôtels et location de voiture affichent des tarifs comparables à ceux pratiqués en Europe.
En revanche, une excursion à la journée ou un séjour organisé sont destinés aux bourses bien garnies. Comptez minimum 100 € par jour et par personne.

Public

L'Arabie saoudite s'adresse à tous les publics : aventuriers de l'extrême désireux de se frotter à l'hostilité du désert, randonneurs amateurs de paysages somptueux, passionnés d'archéologie et de civilisations anciennes, plongeurs en quête de fonds préservés. Couples et familles sont les bienvenus. En revanche, l'homosexualité est criminalisée.

Les plus

Une grande variété de paysages toujours plus spectaculaires.

Un sens de l'hospitalité réel et bienveillant.

Des sites touristiques encore peu fréquentés et la sensation d'être pionnier.

Les moins

Une volonté de s'ouvrir aux touristes, mais riches de préférence.

L'interdiction de l'alcool et une certaine absence de convivialité.

Des offres d'excursion très chères, prévues en groupe et programmées autour des week-ends. Beaucoup de sites et musées fermés pour rénovation.

S'informer

CONSULAT D'ARABIE SAOUDITE

29, rue des Graviers

Neuilly-sur-Seine.

Tél. : 01 47 47 62 63

Vous pouvez effectuer une demande de visa en ligne ou obtenir un visa à l'arrivée si vous êtes muni d'un passeport européen.

VISIT SAUDI - OFFICE DE TOURISME SAOUDIEN - Plus d'informations sur le site

Toutes les informations touristiques se trouvent sur leur site. Très complet, il délivre des idées de séjour, de bonnes adresses pour toutes les destinations et des infos pratiques.

ALULA - Plus d'informations sur le site

Pour AlUla, les visites de sites ou d'activités peuvent être réservées à l'avance sur ce site Internet.