Histoire des Alpes-Maritimes
L’histoire de la Côte d’Azur n’est pas un long fleuve tranquille. Région bénie des dieux, mais territoire convoité, elle subit au cours des siècles les assauts de peuplades conquérantes qui veulent chasser l’occupant pour prendre sa place : entre Massilia (Marseille) et Nikaïa (Nice), villes fondées par les Grecs, la Provence et la côte furent pendant longtemps l’objet de guerres incessantes qui ont fortement marqué le mode de vie de ses habitants et laissé leur empreinte sur l’architecture régionale, le plus souvent défensive. Terre d'histoire, les villes et les villages sont les témoins de la période romaine et portent les traces massives du Moyen Âge derrière leurs tours de pierre et leurs remparts fortifiés. Des guerres de la Renaissance à la conquête du comté de Nice après la Révolution, jusqu’à l’arrivée des aristocrates anglais sur les plages du territoire à la Belle Époque, la Côte d’Azur n’a eu de cesse d’être colonisée.
1 000 000 ans av. J.-C
Dans la grotte du Vallonet située sur la commune de Roquebrune-Cap-Martin, l’homme (Homo erectus ou Homo antecessor) était également présent il y a un million d’années. Là aussi, de grands carnivores se sont succédé comme le tigre à dents de sabre, le loup ou la panthère. C’est l’un des sites les plus anciens où la présence humaine est attestée par des preuves archéologiques.
400 000 et 380 000 ans av. J.-C
Au pied du mont Boron à Nice, dans la crique de Terra Amata, des chasseurs d’éléphants, de cerfs, de rhinocéros, d’aurochs et de sangliers domestiquent le feu qu’ils allument avec des brindilles de bois et qu'ils entretiennent avec des herbes marines.
170 000 ans av. J.-C
Une série de fouilles archéologiques a permis de mettre au jour des pierres taillées, des outils rudimentaires ainsi que des ossements d’animaux ayant servi de nourriture à des hommes préhistoriques (Homo erectus, homme de Neandertal et Homo sapiens). Le fait le plus marquant, preuve de la présence d’une vie humaine sur le sol azuréen il y a 170 000 ans, demeure la découverte de l’os frontal d’un Homo erectus en 2011 dans la grotte du Lazaret à Nice. Ce site préhistorique date du paléolithique moyen et se trouve au pied du mont Boron.
Vers 700 av. J.-C
Les Phéniciens commencent à coloniser la contrée azuréenne. Ils créent des comptoirs marchands le long du littoral à Menton, Monaco, Villefranche-sur-Mer, Nice, Antibes et introduisent la culture de la vigne et de l’olivier. Mais l’intérieur des terres continue à appartenir à des tribus semi-sauvages qui se déchirent entre elles comme les Vedianti, les Nerusi, les Oratelli, les Décéates et les Ligures qui, en période de disette, descendent de leurs montagnes et pillent les comptoirs de la côte.
154 av. J.-C
Les Romains commencent à pacifier et à coloniser le pays pour assurer la sécurité de leurs convois. Le pays se métamorphose et se couvre de routes et de monuments. Les Romains tracent la voie Aurélienne qui suit le littoral jusqu’en Italie.
13 av. J.-C
Tandis que l’empereur Auguste vient en personne réduire les dernières tribus rebelles et les soumettre à une obéissance définitive, toutes les anciennes colonies de Marseille passent sous autorité romaine. Les noms des peuples vaincus sont inscrits sur un gigantesque monument élevé à la gloire des armées romaines : c’est le fameux trophée des Alpes ou trophée d’Auguste, encore visible aujourd’hui à La Turbie. La pax romana perdure jusqu’à la fin de l’Empire romain d'Occident : c’est une période de grande prospérité où le peuple romain administre les deux rives de la Méditerranée baptisée Mare nostrum (Notre Mer), trace des routes, développe l’agriculture ou stimule le commerce des huiles et des vins.
313
Après la conversion de l'empereur Constantin, le christianisme se répand rapidement dans toute la Provence où les paysans ont pris l’habitude de quitter les mas isolés pour se regrouper dans des villages fortifiés autour d’un point d’eau dans l’arrière-pays. Marie-Madeleine s'y serait réfugiée pour prier le reste de sa vie dans une grotte de la Sainte-Baume. La tradition la dit enterrée à Saint-Maximin par le saint du même nom. Le pays se couvre de nouveaux monuments : chapelles campagnardes sur les collines, églises fortifiées dans les bourgs, couvents et monastères.
410
Les Barbares venus du nord et de l'est, les Wisigoths, les Burgondes, les Ostrogoths et les Francs envahissent la région, détruisent villes, villages et remparts dans une apocalypse de massacres, d’incendies et de pillages : l’Empire romain s’effondre.
732
Les Arabes venus d’Espagne et d’Afrique du Nord s’emparer du littoral pour remonter vers le nord sont arrêtés par Charles Martel à Poitiers. Sur leur passage ils auront exterminé les 500 religieux des îles de Lérins, abbaye fondée par saint Honorat en 410.
IXe siècle
Le premier royaume de Provence est créé. Seulement, les Sarrasins reviennent en force et envahissent à nouveau la Provence depuis le golfe de Saint-Tropez et de Grimaud qui, pendant tout le Moyen Âge, connaît les affres de la guerre, des exactions et des pillages.
Du Xe au XVe siècle
La Provence passe ainsi de mains en mains. Successivement propriété du comte de Barcelone puis du duc d’Anjou, la Provence traverse de grandes épreuves : les guerres générées par des rivalités entre les familles régnantes, la grande peste noire (1347-1349), le brigandage et les mauvaises récoltes.
En 1419
Le comté de Nice est définitivement détaché de la Provence et rattaché aux États de la Maison de Savoie. Unique province maritime enserrée dans le royaume de France, Nice et son comté occupèrent une place originale durant quatre siècles.
1480
Après la mort du « bon roi René » d’Anjou qui s’éteint à Aix, la région est offerte à Louis XI et devient française en 1486.
De 1486 à 1789
Des guerres sévissent dans la région. L’architecture fortifiée des villages du moyen et haut pays ainsi que les nombreuses fermes, un peu isolées, hérissées de barbacanes et de redoutes, en sont les vestiges.
1524
Sous le règne de François Ier, les troupes de Charles Quint envahissent la Provence. Les villes de Saint-Laurent, Villeneuve-Loubet, Antibes, Grasse se soumettent mais pas Marseille, l’armée de l’empereur s’installe alors quelques jours à Nice. Les troupes françaises quant à elles pénètrent à Nice en pillant tout sur leur passage. La guerre se termine par la défaite de François Ier à Pavie en 1525.
1536
La huitième guerre d’Italie. François Ier décide de s’attaquer au duc de Savoie, un des principaux alliés de Charles Quint. Il envahit la Bresse et la Savoie et s’empare de Turin. Reste à Charles III son “très fidèle comté de Nice” qu’il défendra pendant 25 ans. L’armée de Charles-Quint (qui vient au secours de son beau-frère Charles III) envahit la Provence. Entrée à Nice le 21 juillet, elle traverse le Var le 26. Les Français ayant pratiqué en Provence la tactique de la terre brûlée, Charles-Quint repasse à Nice en septembre, son armée décimée par la faim.
1543
Les Français, alliés aux Turcs, assiègent Nice qui résiste sous les exhortations d’une sorte de Jeanne d’Arc locale nommée Catherine Ségurane tandis que les guerres civiles religieuses succèdent aux guerres d’Italie.
1635
Alors que toute la région est de nouveau livrée aux pillages et aux massacres, les Espagnols s’emparent d’une partie de la côte et des îles de Lérins avant d’en être chassés en 1637.
De 1688 à 1697
Sous le règne de Louis XIV, le duc de Savoie entre dans la guerre dite « de la ligue d’Augsbourg », coalition dirigée contre la France.
1691
Le comté de Nice, conquis par le maréchal Catinat, redevient français pour une courte période, car le traité de Turin de 1696 rend au duc Victor-Amédée tous les territoires qu’il avait perdus.
1705
De rage, Louis XIV reprend la ville de Nice et fait raser la citadelle jusqu’au sol en 1705.
1706
L’armée autrichienne reprend la ville et s’empare de Grasse. Chaque campagne fait déferler des troupes qui pillent, violent, incendient, tuent dans la désolation et la misère. La Provence a bien du mérite d’avoir chaque fois relevé ses ruines, reconstruit ses châteaux, replanté ses champs et ses oliviers.
De 1790 à 1860
De nombreux émigrés se réfugient dans le comté de Nice et s’y livrent à des manifestations contre-révolutionnaires semblables à celles des émigrés de Coblence. La Convention forme trois départements : les Bouches-du-Rhône, le Var et les Basses-Alpes avec les lambeaux de l’ancienne province de Provence. Le département du Var qui s’étend jusqu’au fleuve Var aux portes de Nice constitue la frontière : le point de passage le plus fameux était un pont de bois à Saint-Laurent-du-Var, maintes fois emporté par les crues ou démoli par les guerres, mais toujours reconstruit à la même place où se trouve aujourd’hui le double pont de franchissement de la voie ferrée et de l’autoroute A8. Toujours sous la Convention, la ville de Nice est conquise par le général Anselme. Masséna, enfant de Nice, est alors chef de bataillon dans le régiment des volontaires du Var et Bonaparte reçoit son brevet de commandant.
1794
Dugommier achève la conquête du comté de Nice qui redevient français pour vingt ans.
1814
Dans la foulée du premier congrès de Vienne, les troupes du roi de Sardaigne reprennent possession du pays.
1815
Napoléon débarque sur une plage de Golfe-Juan entouré d’une poignée de fidèles. Il traverse Grasse puis les Alpes-de-Haute-Provence et rallie Grenoble par l’itinéraire qui porte aujourd’hui le nom de « route Napoléon ». Il arrive le 20 mars à Paris sans avoir tiré un seul coup de fusil. Après Waterloo, le comté de Nice est encore une fois enlevé à la France.
1860
L’Italie cède à la France la Savoie et le comté de Nice en remerciement de l’aide apportée par Napoléon III à la cause de l’indépendance italienne. Le territoire de la région dessine ses contours presque définitifs : le département du Var conserve son nom, mais perd le canton de Grasse qui forme aujourd’hui avec l’ancien comté de Nice, le département des Alpes-Maritimes à l’intérieur duquel coule le fleuve Var !
1860 marque aussi l’arrivée du chemin de fer, qui va considérablement faciliter l’accès à la région dont la réputation et douceur de vivre a fait le tour de l’Europe. C’est l’essor du tourisme aristocratique. La Côte d’azur attire les souverains et les membres des familles royales. Le littoral méditerranéen, séduit rapidement les élégantes et les messieurs qui, marchant le long du bord de mer, éblouis par tant de lumière et enivrés par la qualité de l’air, font de ce rivage un lieu prisé des aristocrates, des fortunés et des anonymes. Tous viennent y prendre leurs quartiers d’hiver et les plus beaux endroits du coin sont alors pris d’assaut : de belles demeures rivalisant d’originalité sont construites sur les hauteurs de Cannes, Nice, Antibes et Menton, constituant aujourd’hui le témoin de l'enthousiasme effréné de ces gens pour la région comme les Anglais et leur reine Victoria sans oublier le futur roi Edouard VII ou les Russes avec l’impératrice Alexandra Feodorovna (veuve du tsar Nicolas Ier) qui sont les premiers à s’y installer. Les modestes agglomérations de pêcheurs deviennent alors en 50 ans d’élégantes stations balnéaires.
1887
L’homme de lettres Stéphen Liégeard, amoureux de ses rivages, écrit ce qui allait devenir son ouvrage le plus célèbre : la Côte d’Azur. Dans ce livre, l’auteur y décrit « cette plage baignée de rayons qui mérite notre baptême de Côte d’Azur » : le mot est lâché, le mythe est lancé !
1930
Les Américains débarquent et font de la Côte d’Azur le rendez-vous chic de la belle saison. Artistes, écrivains, musiciens, riches industriels apportent avec eux le jazz, les bars américains, une certaine forme d'opulence et de joie de vivre. C’est l’apogée du « culte du soleil ». Une grande première qui finira de lancer le mythe de la « French Riviera ».
1940
L’Italie déclare la guerre à la France, l’armée italienne occupe Menton mais Nice n'est pas annexée.
1942
La zone libre est envahie par l’armée allemande à la suite du débarquement des troupes alliées en Afrique du Nord. Le 27 novembre de la même année, la flotte française (115 bâtiments) se saborde à Toulon pour ne pas tomber entre les mains des forces de l’Axe.
1944
La VIIe armée américaine, sous les ordres du général Patch et constituée principalement de la Ire armée française libre commandée par le général de Lattre de Tassigny, débarque au Dramont dans la région de Saint-Raphaël, libérant la Provence en moins de deux semaines.
1947
La haute vallée de la Roya jusqu’à Tende devient à son tour définitivement française à la suite du traité de paix signé avec l’Italie.
1950
Avec l'avènement des congés payés, et la fin des rentes coloniales, la colonie anglaise majoritairement présente par le passé sur la « French Riviera » finit par se dissoudre dans la foule des nouveaux arrivants. Le tourisme de masse entraine la construction de nouvelles infrastructures sur le littoral, mais également en montagne avec la construction de stations de sports d’hiver. Isola 2000 étant l’une des précurseurs.