Les maisons à colombages
La maison à colombages est l’un des éléments emblématiques du patrimoine alsacien. Si en France elle fait figure de particularité par rapport aux autres régions, elle est néanmoins tout aussi répandue le long du Rhin, en Europe centrale, aux Pays-Bas ou en Lorraine.
Il n’est pas étonnant que la maison alsacienne utilise le bois comme matière première : cet élément se trouve partout dans les forêts alentour et permet de résister à l’affaissement tout en isolant bien. Traditionnellement, ces maisons sont construites par des charpentiers. Chaque élément de la structure s’emboîte dans un « équilibre architectonique ». L’ossature en bois, solide, fait appel à des chevilles de bois. Entre les poutres, les mirs sont composés de mortier de boue et de paille que l’on appelle wickelbodde. Ce torchis est appliqué avec des palançons et est recouvert ensuite de chaux blanche ou aux couleurs très vives. Le toit est incliné à 60° afin de permettre à la neige de ne pas se stabiliser dessus et la toiture est composée de tuiles en forme de queue de castor : biberschwanz.
Chaque maison exprime une symbolique selon les motifs de ses poutres de bois. Le Mann est par exemple caractéristique : deux K opposés l’un à l’autre évoquent la silhouette d’un homme et renvoie à la virilité ou à la force physique. Dans la région de Sélestat, on trouve plusieurs Manns qui évoquent le coq (une tête avec un œil) car cet animal du soleil éloignerait les mauvais sorts des sorcières. Parmi les autres motifs symboliques, la croix de Saint-André évoque la fécondité ou l’union maritale, le losange qui renvoie à la maternité, le siège curule qui indique l’importance sociale du propriétaire, l’arbre de vie (plus présent dans le Sundgau) qui permet de différencier le bien et le mal, les poteaux d’angle décorés…
La plupart des maisons alsaciennes anciennes étaient depuis les années 1970 détruites ou laissées à l’abandon. Cela motiva la création de l'association Maisons paysannes d'Alsace ou de l’association pour la Sauvergarde de la Maison alsacienne qui démontent chaque pièce de l'ossature des maisons vouées à la destruction pour les remonter sur le site de l'Écomusée d'Ungersheim. Plus de soixante-dix bâtiments traditionnels (maisons, échoppes ou ateliers) se côtoient dans un espace de 25 hectares aménagé de manière traditionnelle (champs, rues...).
La plus ancienne maison alsacienne encore sur son lieu d’origine se situe à Rosheim. Elle fut construite en 1154 et est nommée « Maison Païenne ». D’autres maisons très anciennes méritent d’être visitées : la maison Katz (1605) à Saverne, la Cour des Chaines (1592) à Mulhouse, la Maison des Tanneurs, la Maison Kammerzell et la Cour du Corbeau, toutes trois à Strasbourg et datant du début du XVIe siècle.
La Neustadt
Après la défaite de 1870, Strasbourg doit se reconstruire après de très nombreux dégâts. C’est ainsi que naît la Neustadt (nouvelle ville), aujourd’hui classée au Patrimoine mondial de l’Unesco.
La reconstruction de la ville à proprement parler ne prendra que 5 ans mais son extension est l’un des points importants de la nouvelle politique allemande. Le milieu des affaires souhaite des infrastructures performantes (gare, port, circulation, etc.) tandis que les autorités politiques veulent, pour le « Reichsland d'Alsace-Lorraine », une capitale exemplaire, grandiose, toute à la gloire de l'Empire et de la germanité. En 1880 est décidé le nouveau plan de la ville qui prévoit l’ajout de 386 hectares aux 230 anciens. J.-G. Conrath, architecte municipal depuis 1849, prévoit un secteur de prestige réservé aux bâtiments officiels (palais impérial, ministères, siège de l'assemblée régionale, bibliothèque et université). En 1900, tout sera déjà terminé et les secteurs d’habitat se construiront, eux, jusqu’en 1920. La Neustadt est le seul exemple de cette architecture allemande si particulière, les autres quartiers similaires d’autres villes ayant été détruits pendant la Seconde Guerre mondiale.
En visitant ce quartier post-haussmannien, vous découvrirez certaines extravagances architecturales, mêlant la néo-Renaissance italienne, le néogothique et l’Art nouveau. La place de la République est construite autour d’un parc. C’est un ensemble monumental remarquable. Il comprend le Palais du Rhin, bâti dans l’objectif de servir de résidence à l’empereur mais qui servira plus tard d’hôpital militaire et depuis 1920 de résidence de la Commission centrale pour la navigation du Rhin ; la Bibliothèque nationale et universitaire ; le Théâtre National de Strasbourg, ancien Landtag, palais de la diète d’Alsace-Lorraine. Ne manquez pas l’avenue de la Liberté, entre le Palais du Rhin et le Palais universitaire de style Renaissance italienne, conçue comme des Champs-Élysées strasbourgeois avec ses hôtels particuliers et son Hôtel des Postes, de style néo-gothique. Passez aussi devant les Bains municipaux, inscrit aux Monuments historiques et construit entre 1904 et 1911, dans un style néo-classique et néo-baroque. L’Art nouveau n’est pas en reste dans la Neustadt et l’exemple le plus marquant en est sans doute la maison égyptienne, mélange d’Art nouveau et d’orientalisme.
Châteaux forts
L'Alsace est le pays des châteaux ! Ils sont plus de 500 en tout dont plus de 80 visitables ! Construits sur les contreforts des Vosges, ils ont été progressivement abandonnés et bon nombre ne sont plus que des ruines. Grâce au chemin des châteaux forts d’Alsace, vous pourrez en découvrir beaucoup. Le tracé passe par plus de 80 châteaux, sur une longueur d’environ 450 km, de Wissembourg à Thann, complété par le circuit des 3 châteaux du Jura alsacien.
Les plus connus des châteaux pouvant être visités (entrée payante et musées intégrés) sont : le Haut-Koenigsbourg, le Hohlandsbourg, le Fleckenstein, le Lichtenberg, le Château des comtes d'Éguisheim, les Trois Châteaux de Ribeauvillé ou du Haut-Eguisheim. De plus, de nombreux villages alsaciens ont conservé leurs fortifications et donnent un aperçu intéressant de la vie et de l'architecture régionales au Moyen Âge.
Architecture religieuse
Le patrimoine architectural religieux est varié en Alsace. Les églises construites aux XIe et XIIe siècles présentent toutes les spécificités de l’art roman : le plan en croix latine, les parois épaisses, le décor réduit au maximum… L'église Saints-Pierre-et-Paul de Rosheim, l'église Saint-Ulrich de Wissembourg, l'abbatiale de Marmoutier ou encore l'église Saints-Pierre-et-Paul à Sigolsheim comptent parmi les incontournables de cette période stylistique et sont intégrées dans une route des églises romanes d’Alsace qui rejoint 19 édifices importants.
Au XIIIe siècle, l'architecture gothique remplace peu à peu la romane. En 1230 est ainsi construit sur ce mode le croisillon Sud de la cathédrale de Strasbourg. La lumière entre plus, les décorations se font plus variées et colorées. La flamme de la cathédrale de Strasbourg, la collégiale Saint-Thiébaud de Thann, la basilique Saint-Georges de Sélestat, l'abbatiale de Wissembourg, Notre-Dame-de-l'Assomption de Rouffach ou encore la collégiale Saint-Martin à Colmar en sont de parfaits exemples.
L’Alsace offre aussi des curiosités. Le clocher vrillé de Niedermorschwihr en est un exemple frappant et il fait partie de la centaine seulement de clochers de ce genre en Europe. Mais pourquoi est-il vrillé ? Parce que le diable y avait enroulé sa queue ! L'abbatiale d'Ebersmunster, près de Sélestat, est elle aussi très particulière car elle est d’architecture baroque du XVIIIe siècle, style très rare en France.
Certains édifices religieux témoignent de la diversité religieuse en Alsace : un tiers des protestants français sont alsaciens ou d'origine alsacienne. Certaines églises, utilisées successivement ou sous la forme du simultaneum par les deux cultes, en ont été très marquées.
Les juifs d'Alsace ont représenté plus de la moitié du judaïsme français au XVIIIe siècle mais ils ont dû attendre 1791 pour avoir le droit de revenir dans les villes qui leur avaient été interdites. On peut aujourd’hui observer des cimetières, bains rituels et synagogues dans les campagnes même si la majorité des 90 synagogues alsaciennes ont disparu. Synagogues restaurées et musées aménagés forment aujourd’hui un parcours juif passionnant et unique en son genre.
Architecture militaire
L’architecture militaire en Alsace laisse des traces depuis 2 000 ans. L’évolution des fortifications à travers les différentes époques n’a eu de cesse de modeler le paysage. Inscrits dans l’histoire, ces différents ouvrages permettent de mieux comprendre le paysage urbain local, le rôle politique de certains sites comme le fort de Mutzig, la Ligne Maginot ou le Struthof, l’évolution des techniques de défense et des matériaux (apparition de la poudre, crise de l’obus torpille…). Sur les premiers témoins, les châteaux forts, on trouve souvent des meurtrières à niches, parmi les plus anciennes connues en France.
En 1893, les Allemands construisent le fort cuirassé de Mutzig. Cet édifice est alors le premier à présenter les caractéristiques des fortifications du XXe siècle, un essai en quelque sorte. Il est l’un des premiers à se composer essentiellement de béton et à utiliser l’électricité, tout en étant relié en souterrain à d’autres ouvrages spécialisés du même type : c’est la naissance de la fortification éclatée. On en voit surtout dépasser les tourelles d’observation et d’artillerie mais, alors que le fort est à ce moment-là plus puissante fortification d’Europe, personne ne se doute de visu de son importance souterraine.
Après la Première Guerre mondiale, l’architecture militaire en Alsace est essentiellement issue de la Ligne Maginot (André Maginot était ministre de la Guerre), la « grande muraille de France » comme on la surnommait. Avec tout ce qu’avait vécu l’Alsace, son but était de bloquer tout le nord du territoire, en prévision d’une autre vague guerrière éventuelle… Prémonitoire puisqu’elle sera utilisée ! Entre 1930 et 1935, le Four à Chaux, le Schoenenbourg et la casemate Hesch entre autres sont construits, parmi tant d’autres. Aujourd’hui ils se visitent avec des intérieurs reconstitués.