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Vignoble jurassien, vers Château-Chalon © barmalini - Shutterstock.com.jpg
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Le vignoble et son histoire

Le vignoble du Jura s’étire sur une bande de terre de plus de 80 km de long, nord-sud avec une concentration plus forte au nord, le sud étant plus parcellaire, lien entre la plaine et le premier plateau (contrefort occidental). Les Gaulois désignaient cette terre fertile par « Ar Bos » qui deviendra Arbois. Le Moyen Âge avec les communautés religieuses en fera une consommation pour les rituels, mais surtout pour les hôtes de passage, d’autant que les routes de l’Or Blanc (le Sel) sont très empruntées. François Ier, Henri IV, Philippe II d’Espagne l’apprécieront. Les turbulences de l’Histoire se feront sentir, au XIXe siècle le vignoble va subir les plus importantes transformations. De 20 000 ha, le phylloxéra à la fin du siècle ramènera à 5 000 ha, ruinant de très nombreuses familles. Malgré l’aide de l’État, la concurrence des vins du sud ne permettra pas d’obtenir un renouveau attendu. Les deux guerres mondiales auront des incidences négatives, les vignerons ne seront pas épargnés. Depuis les années 1970, le Jura s’inscrit dans une politique de développement cohérente, affichant une farouche volonté de produire des vins de haute qualité, une sélection s’est opérée : perdurent aujourd’hui ceux qui ont misé sur la qualité des cinq cépages qui font toute la richesse et la complexité de ces vins.

Le vignoble et ses AOC

Le vignoble du Jura c’est 4 AOC géographiques (Arbois, Château-Chalon, l’Étoile et le côtes-du-jura) et 3 AOC produits (le Macvin, le Crémant et le Marc).

Arbois donne son nom à la première AOC de France (du monde !) le 15 mai 1936. Elle couvre 850 hectares en production débordant quelque peu sur les villages de Mesnay, Vadans, Villette, Les Arsures et surtout Montigny et Pupillin. Depuis 1970, Pupillin a obtenu l’autorisation d’associer son nom à celui d’Arbois dans l’AOC.

L’AOC Château-Chalon, ce sont 50 hectares répartis sur quatre communes : Château-Chalon, Nevy-sur-Seille, Ménétru-le-Vignoble et Domblans. Un seul cépage y est toléré, le savagnin, et fait l’objet d’un contrôle sur pied avant l’annonce de la date des vendanges, lesquelles interviennent très tardivement. Si le raisin analysé dans la vigne ne présente pas toutes les caractéristiques attendues et en particulier les 12 degrés minimum requis, la commission prononce le déclassement. Selon les années, 1 100 à 1 400 hectolitres bénéficient de cette appellation.

L’AOC l’Étoile, c’est la terre de blanc par excellence. Aujourd’hui, une quinzaine de vignerons entretiennent les 80 ha de ceps en production sur les quatre communes de l’AOC, au nord-ouest de Lons-le-Saunier.

Depuis 1937, côtes-du-jura est l’appellation générique qui s’étend du nord-sud, la plus diversifiée puisqu’elle regroupe 722 ha. La route des vins qui la parcourt traverse 60 villages. Seules les terres rigoureusement sélectionnées pour leurs caractéristiques géologiques et leurs structures chimiques et organiques ont droit à l’appellation. Une nouvelle génération de viticulteurs, soucieux de la qualité et du caractère de leurs vins, oriente leur domaine vers la biodynamie.

Depuis 1992, l’AOC macvin du Jura appartient au club français très fermé des mistelles (ou vins de liqueur) d’AOC, il est issu d’une eau-de-vie de raisin et non de vin. Il résulte de l’assemblage du moût des raisins sélectionnés à la sortie du pressoir (2/3) avec un marc du Jura vieilli en fût de chêne, 18 mois minimum pour (1/3). Il titre entre 16° et 22°. Avec un melon frais garni d’une fine tranche de jambon fumé, ou réduit caramel pour rehausser un foie gras, il accompagnera un pain d’épices rafraîchi d’une glace vanille. Avec du crémant il fera un excellent apéritif.

Vient ensuite le crémant-du-jura (AOC). Dès le XVIIIe siècle les vignerons jurassiens maîtrisaient la technique des vins effervescents, on consommait du « Mousseux », ou méthode champenoise. En 1995 obtention de l’A.O.C Crémant du Jura. Tous les cépages du vignoble jurassien peuvent entrer dans sa composition. Pour le blanc au minimum 50 % de chardonnay, pour le rosé 50 % de pinot ou poulsard. Le servir à 6°. Le Crémant du Jura vous accompagnera tout au long d’un repas de l’apéritif au dessert, notamment avec des fromages à caractère.

Dernière-née des AOC du Jura, le marc désigne une eau-de-vie ambrée, soumise à un cahier des charges très strict. Élaboré à partir des cépages historiques jurassiens, il est constitué de tout ce qui reste après la sélection du jus : pellicules, pépins et la rafle. Après avoir fermenté, le marc subit une distillation dans un alambic. Il vieillit ensuite sous-bois pendant au moins deux ans.

Les cépages et leur typicité

Les vins cultivés dans le Jura proviennent de différents cépages : le poulsard, le trousseau, le pinot noir, le chardonnay, le savagnin. Ces cépages donnent toute leur typicité aux vins jurassiens. Petit tour d’horizon.

Tout d’abord, le poulsard ou ploussard (la capitale est Pupillin). Voici un cépage très local, couvrant un peu plus de 20 % du vignoble, soit 80 % de l’encépagement en rouge, principalement au nord du vignoble, il affectionne les terres grasses de marnes bleues et de schistes argileux. C’est un vin pluriel subtil et nuancé. Palette des couleurs, arômes varient selon la vinification, la maturation, le millésime et l’âge ; au fil des ans une jolie une teinte tuilée apparaît. Assemblé au pinot et au trousseau, il peut donner des assemblages particulièrement intéressants. Pour révéler les saveurs d’une quiche ou d’un plat de poisson, pour arrondir une saucisse de Morteau ou une charcuterie de montagne, pour les plats exotiques, choisissez un Poulsard bien frais.

Cépage typiquement jurassien, le trousseau puise sa puissance et délicatesse sur des marnes rouges recouvertes de graviers. Montigny-les-Arsures en est la capitale. Quelques années de vieillissement ont donné à ses tannins un peu de temps pour s’assouplir, s’arrondir, s’équilibrer. On le trouve seul ou en assemblage. Il se marie avec viandes grillées ou petits gibiers en sauce, et les fromages comme le morbier.

Adopté par les vignerons du Jura dès le XIVe siècle, le pinot noir représente qu’un faible pourcentage de l’encépagement (moins de 10 % des cépages rouges). Il se décline en monocépage, le terroir conférant à ce cépage une typicité bien différente des autres vignobles dans lesquels il est travaillé, comme la Bourgogne, on le croise fréquemment lors d’un assemblage avec le trousseau et le ploussard apportant sa structure tannique, sa richesse aromatique et sa précieuse couleur. Il accompagnera très bien une volaille, du thon ou du saumon grillé.

Le chardonnay est le cépage populaire qui a su s’acclimater au Jura et y acquérir une typicité marquée. Il occupe près de 50 % de la surface du vignoble jurassien. Il s’accommode des éboulis calcaires et des terres légères et les vignerons maîtrisent les rendements de ce généreux cépage. Chaque terroir, chaque parcelle en livre une interprétation différente. Il peut être élaboré de trois façons. La première consiste à ne pas ouiller (remplir le tonneau régulièrement pour compenser l’évaporation), ce qui conduit à élever le vin « sous voile » comme pour le vin jaune, en lui conférant un « goût de jaune », typique du Jura. La seconde privilégie l’expression du cépage associée au terroir : l’élevage en cuve, en foudre ou en fût et l’ouillage permettent de rechercher le gras et les arômes primaires. Ils donnent des blancs plus floraux, plus fruités selon la méthode bourguignonne. Associé au savagnin (la proportion de savagnin varie entre 5 % et 40 %), il apportera de la rondeur. Les vins floraux du Jura rehaussent idéalement une quiche, un soufflé au fromage, un gratin ou un poisson grillé ou une crémeuse poêlée d’escargots, des écrevisses voire une coquille Saint-Jacques...

Enfin, le savagnin. Cépage souverain du Jura, il est le seul cépage qui donne naissance au fameux vin jaune. Il occupe un peu plus de 15 % de l’encépagement du Jura (300 hectares sur les 2 000 que comptent les AOC). Il s’exprime sur les marnes bleues, grises ou noires, couvertes d’éléments calcaires. Cépage tardif, il supporte les premiers frimas pour être récolté aux derniers jours des vendanges. Il entre dans l’élaboration d’une vaste palette aromatique de vins, seuls ou en assemblage, ouillés ou non. On le trouve en vin de cépage savagnin après trois ou quatre ans de vieillissement en fût ou de l’assemblé avec le chardonnay auquel il apporte sa force en complément de la rondeur du premier. Ses arômes de noix, curry et amandes permettent de le déguster avec des poissons ou viandes crémés, fromages traditionnels comtois et persillés, volailles aux morilles, et aussi la cuisine exotique.

Le vin jaune, l'or du Jura

Le vin jaune est un vin blanc sec, issu d’un seul cépage le Savagnin. À ne pas confondre avec le Vin de Paille, qui est un vin sucré et issu de plusieurs cépages. Il fait l’objet d’un élevage spécifique. Une fois sa fermentation achevée il est conservé dans des fûts de chêne au minimum 6 années et 3 mois, sans soutirage ni « ouillage » (action visant à compléter le tonneau par un apport de vin, compensant ainsi l’évaporation naturelle), voile naturel de levure se crée à la surface du vin, qui préserve le vin de tout contact avec l’air ambiant. Les levures permettent au vin d’obtenir les caractéristiques organoleptiques si caractéristiques à ce noble produit. On trouve le vin jaune uniquement dans des flacons de verre à la forme spécifique d’une contenance de 62 cl (un litre de jus de raisin se réduit globalement à 62 cl au terme de son vieillissement). Robe dorée, limpide et brillante, aux arômes de noix, épices, fruits à chair blanche, une bouche puissante, marquée par un terroir de marnes bleues, il accompagnera un vieux comté, une cassolette d’escargots, une poularde aux morilles, un foie gras ou tout simplement en apéritif.

Le vin de paille, autre vin typique du Jura

Le vin de paille, vin sucré, n’ayant rien à voir avec le vin jaune.  C’est un vin doux qui oscille de 14,5° à 17° nécessite 100 kilos de raisins frais pour obtenir entre 15 à 18 litres. Aux premiers jours des vendanges, on récolte les plus belles grappes de ploussard, chardonnay ou savagnin, choisissant les plus saines, qui passeront l’épreuve du passerillage (technique vinicole pour enrichir le raisin en sucre par concentration). Il perd de son volume en eau et se concentre en sucre sans subir la pourriture. On dispose les grappes dans un local très aéré sur des claies de bois ou de grillage – qui ont remplacé la paille d’autrefois. Au fil des semaines – voire des mois –, le fruit perd son eau, se concentre en sucre et en arômes. Lorsque la concentration en sucre des grains dépasse 306 g/litre, on le presse dans les premiers jours de janvier et sa fermentation peut durer jusqu’à deux ans. Mais bien trois années de vieillissement sont nécessaires. Il accompagnera un foie gras ou un magret aux épices, comme il renforcera aussi les fromages à pâte persillée, les desserts confits, mais avec le chocolat, il est fondant.