Au nord de Rodrigues, Port Mathurin, chef-lieu et unique port de l'île, est une bourgade paisible, hétéroclite et gaie. Peu de voitures circulent dans le centre de cette ville mouchoir de poche, majoritairement fréquentée par des piétons et encore composée de nombreuses échoppes en bois et tôle comme autrefois. Incongruité historico-politique : les noms de rue sont parfois signalés en anglais alors que la plupart des habitants ne parlent que le français et le créole. Les enseignes des magasins, elles, hésitent entre la langue de Shakespeare et celle de Molière, et se contentent souvent de porter les noms de leurs propriétaires, en grande majorité chinois ! Par sa porte masquée d'un rideau à grosses fleurs, un salon de coiffure laisse entrevoir une petite pièce dans laquelle une dame pose des bigoudis à sa cliente. Plus loin, une enseigne à rallonges indique : " Cuisine, salle à manger, ameublement, on fait aussi les réparations "... Des saucisses sèchent dans la vitrine. Dans la boutique du Chinois, un supermarché avant l'heure, on trouve (presque) tout : mobylettes, téléviseurs, machines à laver, cartes postales, vêtements et quelques produits alimentaires. À l'approche de Noël, un sapin en plastique décoré de guirlandes synthétiques trône au milieu d'un bric-à-brac invraisemblable... Toute une ambiance !