La musique traditionnelle, depuis la nuit des temps

La musique chinoise est un art en soi : très différente de la musique occidentale, elle ne se construit, ni ne s'écrit de la même façon. Axée sur l'émotion, la musique traditionnelle ne suit pas un tempo précis et les notes sont contenues dans une gamme appelée pentatonique. C'est pendant la dynastie Han que la musique fait son apparition à la cour (vers 206 av. J.-C.), puis, elle se développe sous la dynastie des Tang (entre 600 et 900 après J.-C.).

Aujourd'hui, il reste de la musique traditionnelle plusieurs styles comme notamment le fanbai, chant liturgique bouddhiste en langue sanskrite, qui est parfois accompagné de percussions. Le yayue est une musique ancienne jouée par les aristocrates à la cour et enfin, le guyue provient de la dynastie Tang et est soit chanté (gezhang), soit joué avec un petit orchestre (taoqu) ou avec la présence de plusieurs types d'instruments (saoqu).

Les instruments traditionnels sont aussi nombreux : il y a le yangqin (une cithare chinoise), erhu (une sorte de vièle), le guanzi (hautbois), le dizi (flûte)… Au premier siècle av. J.-C., plus de quatre-vingts instruments étaient dénombrés.

Forme d'art voisine de la musique, le quyi a souvent été considéré comme le père de l'opéra et du théâtre chinois. C'est une expression combinant le chant et la narration en s'inspirant de la vie sociale. Ancestral et encore très pratiqué, le quyi se décline sous plusieurs formats, différent selon les régions de Chine. Des troupes professionnelles ont été fondées sur chaque territoire pour perpétuer la pratique du quyi.

La musique traditionnelle, très régionalisée, s'exprime dans le sud de la Chine, via des chants de travail (les houzi) mais aussi par les chants dits de divertissement, appelés les shange. La musique nanyin (ou nankouan) est caractéristique du sud-est de la Chine, il s'agit de ballades datant du XVIe siècle, interprétées par un chanteur accompagné de quelques instruments. En 2009, l'Unesco a ajouté la musique nanyin à la liste du patrimoine immatériel de l'humanité. Au Guangxi, des rituels musicaux mettent en scène des percussions en bronze. À Hong Kong et à Canton, le naamyam est un chant narratif proclamé par un orateur.

Un grand intérêt pour la musique classique

La musique classique a pris racine en Chine il y a plusieurs décennies. Le pays a toujours été très séduit par les prouesses des orchestres symphoniques ou philharmoniques venus d'Occident. Avec l'arrivée de Mao Zedong au pouvoir, tous les pianos à queue du pays sont symboliquement brisés et il n'est plus autorisé de jouer le répertoire occidental. Les yangbaxi deviennent les seules œuvres chinoises à pouvoir être interprétées. Elles ne sont que huit et les plus connues sont sans doute Le concerto du fleuve jaune, La lanterne rouge ou encore Le détachement féminin rouge. Après la Révolution culturelle, en 1976, il est de nouveau possible de jouer les œuvres des compositeurs classiques européens. Le nombre d'orchestres a alors explosé, ils sont plus de 70 à se produire dans le pays et 50 millions d'enfants chinois apprennent désormais le piano, suivant des modèles d'artistes comme Lang Lang, Yuja Wang ou encore Yundi Li. Les concerts de musique classique attirent étonnamment un public très jeune, l'âge moyen est de 30 ans dans les salles chinoises alors que chez le spectateur type français, la moyenne est de 61 ans. Autre fait important : les infrastructures dédiées à la musique classique sont nombreuses dans les villes chinoises.

La C-pop, Mandopop ou Cantopop ?

Si la musique est très importante dans la société chinoise, une industrie musicale a commencé à naître dans les années 1970 avec l'essor d'une musique de variété. La figure féminine qui l'incarne est pendant plusieurs années Peng Liyuan. Elle deviendra d'ailleurs, par la suite, première dame du pays quand son mari Xi Jinping accède au pouvoir. Si les voisins ont pu imposer davantage la K-pop (pop coréenne) et J-pop (pop japonaise) auprès de la scène internationale, la C-pop se divise en trois mouvements, dont le sud du pays est le berceau : la Canto-pop (en lien avec la province de Canton), la T-pop (de Taïwan) et la Mando-pop, chantée en mandarin. En termes de sonorités, la C-pop est très large, car elle peut aller du R&B au hip-hop en passant par le rock chinois.

Tout démarre sans doute dans les années 2000 quand le site Internet EolAsia.com[1] émerge sur la toile. Il permet d'échanger de la musique C-pop. Les majors internationales s'intéressent de près à ce nouveau marché et les téléchargements de musique se multiplient. Rapidement, les artistes retenus dans les classements de C-pop sont parmi les personnalités les plus influentes de Chine : Teresa Teng, Sam Hui, Jacky Cheung, Anita Lui ou encore Danny Chan… Certains ont pu contribuer à diffuser ce courant à l'international et d'autres sont devenus également des acteurs à la télévision ou au cinéma chinois. À l'heure actuelle, la Mandopop se trouve plus exposée que la Cantopop et regroupe plus de fans notamment dans les pays voisins à la Chine comme en Malaisie, à Singapour ou encore à Taïwan.

Le rock chinois

Le rock est également un style de musique à part entière, peu éloigné des grands mouvements populaires de la C-pop et porté également par les jeunes générations. Le rock chinois se caractérise par une influence certaine du rock occidental, mais fait preuve de techniques musicales bien chinoises. Le premier groupe à s'inscrire dans cette esthétique fut Pecking All-Stars en 1979, puis il y a eu Cui Jian, considéré comme le premier rockeur chinois. Le musicien, après avoir étudié minutieusement le style occidental et la mise en place de ce mouvement aux États-Unis et en Europe, a monté son petit groupe de rock et a sillonné les cafés de Pékin, puis les salles de concert de Chine. Le seul groupe qui fut visible aux yeux de la scène internationale est peut-être les Taïwanais de Mayday.

L’opéra chinois, un indispensable

L'opéra, au carrefour de plusieurs traditions et enrichi par les influences occidentales, se perpétue en Chine depuis plusieurs siècles. Il s'adapte et se décline suivant les régions de la Chine. Alliant musique (plus exactement le chant), théâtre, acrobaties et arts martiaux, il est populaire en Chine depuis presque un demi-millénaire.

Par exemple, l'opéra appelé huaguxi (littéralement, l'opéra des fleurs et des tambours), s'établit au Hunan et à Hubei. L'opéra cantonais (appelé guangdong xiaoqu) est sans doute le plus connu de tous, il est classé au patrimoine mondial de l'Unesco. Le répertoire de cet opéra, appelé aussi le yueju, comprend près de 6.000 pièces au total. Chaque génération d'artistes contribue à faire rayonner cet art, c'est le cas, dans les années 1940, de Xue Jiaoxian et de Ma Shizeng, mais aussi d'Alan Tam Wing-Lun, figure plus récente de cette pratique, qui a commencé sa carrière dans la Cantopop avant de se tourner vers l'opéra.

Des traditions théâtrales au théâtre contemporain chinois

En ce qui concerne le théâtre, celui-ci naît en Chine sous la dynastie des Yuan, au XIIIe siècle. Les spectacles ressemblaient davantage au cirque, avec des démonstrations de jonglerie, d'acrobaties ou de maniements d'armes. Le théâtre chinois possède également des dizaines de formes différentes, plus ou moins singulières suivant les régions de Chine. Le théâtre moderne (appelé huaju) est apparu dans les années 1920 et se développe beaucoup depuis le décès de Mao Zedong.

La marionnette et les ombres chinoises sont liées au théâtre chinois, qu'il soit chanté ou non. Au sein des opéras, il est également courant de voir des marionnettes s'incorporer au récit. C'est aussi une parade bon marché pour monter des spectacles dans les villages sans avoir à embaucher autant d'acteurs que dans les pièces jouées en ville. En Chine, on trouve différents types de marionnettes : à baguettes, à fils, à tige… dans le sud du pays, les baguettes et les tiges sont celles les plus utilisées. Les marionnettistes sont ainsi appelés « maîtres » et sont respectés des comédiens. Le théâtre d'ombres possède le même succès auprès de la population. Les figurines créées pour assurer le spectacle sont même plutôt grandes (environ 80 centimètres) dans les provinces du Sichuan et du Hunan. Complètement articulées, ces figurines permettent au public de bien voir les détails de l'interprétation et distinguer chaque personnage.

Véritable art du spectacle populaire, l'acrobatie est à la fois liée à la vie quotidienne des travailleurs et à la religion. La première troupe remonte à 1950, puis d'autres, par province, sont fondées officiellement. Les acrobates donnent des représentations dans les usines ou dans les mines, mais aussi dans les villages. Plusieurs numéros sont exécutés, allant de la jonglerie au diabolo, en passant par des démonstrations de qigong. L'acrobatie a donné naturellement lieu au cirque chinois, désignant les arts de variétés chinoises. Contrairement au cirque occidental, le cirque chinois va mêler des extraits d'opéra, du kung-fu ou encore des interprétations de chansons populaires.

La danse, une tradition régionale

Des 56 ethnies chinoises, toutes possèdent leur propre danse. Traditionnellement, ce sont la danse du dragon et la danse du lion qui sont les plus revendiquées. Elles résident dans un défilé dans lequel les danseurs s'immiscent sous une créature colossale et ils la font danser à plusieurs. Il existe aussi des variantes de défilé selon les provinces. Dans le sud du pays, la chorégraphie s'attache à adopter les comportements du lion : les danseurs vont intégrer même des performances d'habileté comme le jonglage. La danse du lion est toutefois moins impressionnante que celle du dragon, qui mobilise de nombreux danseurs.

De même que la musique classique, la danse classique — ainsi que la danse contemporaine — prend une place importante au sein des propositions artistiques chinoises depuis les années 1980. Chaque province ou presque défend son ballet et sa programmation en la matière. Inspiré d'abord par les pièces occidentales, un répertoire chinois s'est constitué, écrit par des chorégraphes chinois qui se sont forgé leur propre identité.

La Chine est aussi un pays caractérisé par ses danses de rue, qu'elles soient urbaines ou « danse de place ». Traduit littéralement du terme guangchangwu, qui les désigne, ces danses sont exécutées sur l'espace public, à l'origine par des retraités, mais de plus en plus de jeunes générations se joignent à l'exercice collectif. Le rendez-vous est souvent donné à une temporalité régulière et l'un des membres du groupe apporte la musique et de quoi la diffuser. Il arrive qu'il y ait plusieurs groupes en même temps dans un même parc ou sur une même place, donnant une impression, pour la personne qui passerait par là, d'une véritable cacophonie !