Quand la fumée se dissipe
La pollution de l'air en Chine est un sujet si alarmant qu'il fait régulièrement la une des médias internationaux depuis 30 ans. Le smog, cet épais brouillard de pollution, s'invite en effet continuellement dans les villes de Chine du Sud et du pays tout entier. Mais depuis quelques années, il semble se dissiper. En effet, depuis les années 2010, la Chine mène une véritable guerre contre la pollution atmosphérique, si bien que les taux de particules fines dans l'air sont en recul année après année. Des dizaines de centrales à charbon ont fermé leurs portes tandis que des complexes industriels ont été déplacés loin des agglomérations. Malgré des progrès bien réels, la plupart des grandes villes de Chine du Sud ne respectent toujours pas les normes fixées par l'Organisation mondiale de la Santé. En 2019, on estimait que 1,85 million de décès en Chine sont à imputer à une qualité de l'air déplorable. L'année 2023 a été la seule à faire exception à cette amélioration continue, en raison d'une forte reprise de l'activité économique après la crise du Covid-19. Pour relancer l'économie après la pandémie, plusieurs villes, à l'image de Canton (Guangzhou) et de Shenzhen, deux villes de Chine du Sud, ont levé certaines restrictions environnementales, en assouplissant notamment les régulations entourant les véhicules à moteur thermique, dans le but de stimuler l'industrie automobile du pays.
Ce programme national d'amélioration de la qualité de l'air s'inscrit dans un objectif de neutralité carbone fixé à 2060. Pour l'heure, la Chine reste le premier émetteur mondial de gaz à effet de serre, principalement en raison des nombreuses centrales à charbon qui fournissent 58 % de l'électricité du pays. La Chine consomme en effet à elle seule la moitié du charbon produit dans le monde, si bien qu'elle émet un quart des émissions de gaz à effet de serre au monde. La neutralité carbone semble donc un défi monumental que la Chine amorce d'ores et déjà en investissant massivement dans les énergies renouvelables. À l'heure actuelle, l'équivalent d'un terrain de foot de panneaux photovoltaïques est installé toutes les heures en Chine.
L’environnement comme source d’innovation
Alors que la lutte contre le réchauffement climatique devient une problématique d'ampleur planétaire, la Chine a bien compris que l'écologie était un marché économique particulièrement prometteur. Elle a ainsi engagé près de 20 milliards d'euros d'investissements pour se positionner comme le porte-drapeau des technologies de décarbonisation. Le pari est d'ores et déjà réussi, puisqu'elle est aujourd'hui le leader mondial du secteur des innovations dans les technologies propres, dont elle détient à elle seule 15 % des brevets, avec 12 000 brevets déposés en 2021. Elle est alors le premier producteur mondial d'ampoules basse consommation, d'éoliennes, de panneaux solaires, de chauffe-eau solaires ou encore de batteries pour voitures électriques.
Le pays assoiffé
L'eau, tout comme l'air, est une victime du productivisme chinois. On estime ainsi que 80 % des réserves d'eau souterraines sont contaminées par des polluants tels que les métaux lourds ou l'arsenic, tandis que 30 % des rivières sont considérées comme dangereuses. Le pays compte même plusieurs localités surnommées localement les « villages du cancer », en raison du nombre anormalement élevé de cancers dont souffre leur population. La Chine du Sud dénombre 459 villages du cancer, puisqu'elle compte plusieurs des rivières les plus polluées de Chine, à l'image du fleuve bleu, ou de la rivière des Perles, dont les rives sont bordées d'usines et de champs. L'eau provenant de ces cours d'eau n'est pas directement consommée par la population, bien consciente du danger, mais vient arroser les hectares de champs qui nourrissent ensuite le pays de légumes devenus impropres à la consommation. La culture du riz, dont est spécialisé le Sud du pays, pose particulièrement problème, alors que l'on estime qu'entre 10 et 45 % des récoltes des rizières sont contaminées par des métaux lourds.
Le problème est d'autant plus crucial que la Chine ne détient que 6 % des réserves d'eau mondiales, pour une population qui représente 17 % des habitants du globe. Les aquifères, c'est-à-dire les nappes souterraines d'eau, s'en trouvent alors surexploitées, bien que le Sud de la Chine se sorte mieux que le Nord à ce niveau, puisqu'il est bien plus gâté en cours d'eau. Pour ne rien arranger, le pays subit des sécheresses à répétition, dont la fréquence et l'intensité anormales sont à imputer au réchauffement climatique. En 2022, le fleuve Yangtsé, ou fleuve bleu, plus long fleuve chinois, qui marque la limite de la Chine du Sud, a ainsi connu une sécheresse historique, et vu son débit d'eau baisser de moitié par rapport aux moyennes saisonnières.
Les parcs nationaux
Le Sud de la Chine, plus forestier que le Nord, compte de nombreux parcs nationaux et autres aires protégées. La région abrite d’ailleurs la toute première réserve de Chine, créée dès 1956 : la chaîne de montagnes Dinghushan. Il s’agit de basses montagnes tapissées d’une forêt tropicale humide, qui a la particularité d’être une forêt primaire, c’est-à-dire inchangée par l’Homme. En plus de son importance écologique, elle revêt aussi un rôle spirituel, puisqu’elle est considérée comme un lieu sacré par la religion bouddhiste. Le Sud abrite d’autres parcs nationaux montagneux, à l’image du très célèbre parc forestier de Zhāngjiājiè. Ses montagnes formant de véritables colonnes de roche ont inspiré des artistes du monde entier, et notamment les réalisateurs des films Avatar, qui les ont utilisées pour illustrer les reliefs de Pandora. Ces montagnes sont formées par le karst, un phénomène géologique qui apparaît lorsqu’une roche soluble, comme du calcaire, se voit sculptée par l’eau, au point de former des reliefs étonnants. Le karst de Chine du Sud est classé au patrimoine mondial de l’Unesco, en tant « qu’exemple le plus spectaculaire au monde de karst tropical humide ». Le parc national Wulingyuan illustre lui aussi ce phénomène.
Les aires protégées chinoises répondent en revanche rarement aux exigences nationales, si bien que le parc national Pudacuo, ouvert en 2007, est le premier du pays à être conforme aux normes de protection fixée par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN). Le parc abrite ainsi une biodiversité exceptionnelle, et notamment une centaine d’espèces animales menacées.