Les enfants

La place des enfants dans la société chinoise est centrale et complexe. Depuis l'instauration de la politique de l'enfant unique en 1979, assouplie puis abrogée en 2015, les enfants sont devenus les porteurs des espoirs familiaux. Mao déclarait autrefois : « Un enfant qui naît, ce sont deux bras de plus pour édifier le socialisme. » Dans les années 1950, l'avortement fut interdit, entraînant une explosion démographique. Ce n'est qu'à partir des années 1970 qu'une campagne massive de contraception, de stérilisations et d'avortements forcés fut mise en place. La politique de l'enfant unique, soutenue par Deng Xiaoping dès 1978, bouleversa la famille traditionnelle. Les parents, marqués par la Révolution culturelle, reportèrent leurs frustrations sur leurs enfants, souvent qualifiés de « petits empereurs ».

Les familles investissent lourdement dans l'éducation et le bien-être de leurs enfants, parfois au prix de sacrifices financiers importants. Les parents, accaparés par leur travail, disposent de peu de temps pour leurs enfants, tandis que certaines familles recourent à des emprunts pour financer leur éducation. Dans les zones rurales, ces sacrifices aggravent les inégalités sociales en raison de revenus plus faibles et de renoncements à d'autres besoins essentiels.

Les différentes générations

La population chinoise, forte de 1,4 milliard de personnes, se décompose en plusieurs générations reflétant les mutations économiques et culturelles :

La génération Z (1995-2009), environ 260 millions d'individus, est marquée par la mondialisation et la digitalisation. Ces jeunes, souvent célibataires, valorisent le bien-être personnel et redéfinissent les modes de consommation. En effet, ils sont à l'origine de plus de 50 % des dépenses nationales. Considérés comme la « génération Phénix », ils dépensent massivement en gadgets high-tech et loisirs, tout en aspirant à une réussite sociale à l'écart des récits collectivistes.

La génération Y (1980-1994), première à bénéficier de la politique de l'enfant unique, représente un équilibre entre traditions et modernité. Aujourd'hui, une majorité d'entre eux est mariée et a des enfants, devenant ainsi les piliers de la stabilité économique et sociale.

La génération X (1965-1979) illustre le succès des réformes économiques, avec une accumulation de richesse et un rôle central dans la transmission des valeurs.

Les baby-boomers (1946-1964) sont les témoins vivants des mutations profondes de la Chine, ayant traversé des périodes de grandes épreuves et de transformations sociales radicales, notamment la période maoïste et les débuts de la fondation de la République populaire.

L'éducation

L'éducation en Chine est réputée pour son exigence et son intensité. Le système scolaire, structuré autour de la préparation au gaokao (高考), l'équivalent chinois du baccalauréat, impose une discipline rigoureuse qui commence dès le plus jeune âge. En moyenne, les écoliers passent environ 12 à 14 heures par jour sur des activités académiques, incluant les cours, les devoirs et les cours particuliers, selon une étude menée en 2022 par le Ministère de l'éducation. Cette intensité a conduit à des taux élevés de stress scolaire, avec 78 % des étudiants citant la pression des examens comme leur principale source d'anxiété.

Ce système éducatif compétitif est pris très au sérieux par les parents, qui n'hésitent pas à investir massivement pour garantir à leurs enfants l'accès aux meilleures institutions. Dès le plus jeune âge, les familles dépensent des sommes importantes pour des cours particuliers et des activités extrascolaires. En 2019, le coût moyen de l'éducation d'un enfant en Chine, de la naissance à 18 ans, s'élevait à environ 485 000 yuans (62 000 euros). L'objectif ultime, pour beaucoup, est d'intégrer les quatre universités les plus prestigieuses : Qinghua (Tsinghua) et Beijing University (Beida) à Pékin, ainsi que Fudan et Jiaotong à Shanghai. L'entrée dans ces universités repose sur les résultats du gaokao, hautement compétitif.

Cette pression académique est particulièrement intense car elle joue un rôle déterminant dans le futur socio-économique des étudiants. Les meilleurs résultats permettent d'accéder aux universités de renom, tandis que les autres se contentent d'établissements de deuxième ou troisième rang. Les élites politiques du pays étant issues de ces institutions prestigieuses, le système reste fortement ancré et peu susceptible de changement. Parallèlement, l'émergence des écoles internationales et des établissements privés proposant des programmes bilingues reflète aussi l'ouverture du pays sur le monde.

La condition des femmes

La condition des femmes en Chine reflète une tension permanente entre tradition et modernité. Si l'égalité des sexes est inscrite dans les textes depuis la fondation de la République populaire, la réalité est plus contrastée. La politique de l'enfant unique (1979-2015) a eu des répercussions profondes, notamment un déséquilibre hommes-femmes avec un ratio atteignant 116 garçons pour 100 filles en 2014, contre 105 naturellement. Ce déséquilibre a engendré des défis sociaux, compliquant les perspectives matrimoniales pour de nombreux hommes.

Les femmes ont fait des progrès notables dans les domaines de la politique et de l'économie, occupant des postes de direction dans divers secteurs. Cependant, elles restent sous-représentées dans les hautes sphères du pouvoir, comme le Comité permanent du Politburo, et seulement 3 des 27 ministres sont des femmes. Depuis 1997, la Chine est passée de la 16ᵉ à la 53ᵉ place mondiale en termes de représentation parlementaire.
La pression à se marier avant 30 ans reste forte, sous peine d'être stigmatisées comme « shengnu » (« femmes restées sur le carreau »). Cependant, des forums en ligne et collectifs urbains émergent pour défendre leur choix de rester célibataires ou de retarder le mariage.

Cette stigmatisation s'accompagne de discriminations sur le marché du travail, où les employeurs questionnent leur statut marital ou maternel. Pourtant, une nouvelle génération revendique son autonomie et aspire à redéfinir les rôles traditionnels. Les mouvements pour les droits des femmes, bien que limités par les contraintes politiques, gagnent en visibilité dans les grandes villes.

La structure familiale

La famille, pilier historique de la société chinoise, subit de profondes mutations face aux transformations économiques et sociales. Traditionnellement, la famille chinoise était organisée autour d'un modèle patriarcal, avec plusieurs générations cohabitant sous le même toit. Aujourd'hui, l'urbanisation et les exigences professionnelles poussent de plus en plus de jeunes couples à vivre de manière autonome, souvent dans des appartements exigus des grandes villes. Les grands-parents jouent encore un rôle crucial dans l'éducation des enfants, notamment en raison des longues heures de travail des parents. Les réunions familiales restent un moment fort, particulièrement lors des célébrations du Nouvel An chinois, qui symbolisent le lien profond entre les générations.

Les tendances en matière de mariage et de divorce illustrent également ces transformations. Le taux de mariage a diminué au fil des décennies, les jeunes générations repoussant souvent cet engagement en raison des pressions économiques et sociales. Dans les régions rurales, les mariages sont encore marqués par des traditions coûteuses, comme les dots élevées exigées par les familles. À l'inverse, dans les zones urbaines, de nombreux couples hésitent à s'engager en raison du coût de la vie et des attentes matérielles liées au mariage, comme l'achat d'un logement.

Parallèlement, les divorces sont en nette augmentation. En 2021, plus de 3,5 millions de couples ont officiellement divorcé en Chine, un chiffre en hausse constante depuis les années 1980. Si cette tendance traduit une plus grande liberté individuelle et une évolution des mentalités, elle soulève également des questions sur la stabilité des structures familiales et les pressions économiques auxquelles sont confrontés les couples. Le gouvernement a réagi en imposant un « délai de réflexion » de 30 jours avant l'approbation des divorces, une mesure controversée visant à limiter les séparations impulsives.

La communauté LGBTQ+

La communauté LGBTQ+ en Chine fait face à des défis significatifs, mais des progrès lents et notables se manifestent. Bien que l'homosexualité ait été dépénalisée en 1997 et retirée de la liste des maladies mentales en 2001, les discriminations restent répandues. Toutefois, la Chine ancienne n'avait aucun a priori sur l'homosexualité. L'histoire rapporte même un épisode célèbre de la vie de l'empereur Han Aidi (7 à 1 av. J.-C.), qui aurait coupé sa manche pour ne pas réveiller son amant endormi, donnant naissance à l'expression « une passion à découper les manches », longtemps utilisée pour désigner les amours homosexuelles.

Dans les grandes villes comme Shanghai, Shenzhen et Beijing, des collectifs militants ont organisé des événements tels que le Shanghai Pride, un moment emblématique dans l'histoire LGBTQ+ en Chine (initié en 2009, cet événement majeur, bien qu'il ait cessé en 2020, a créé une visibilité importante pour la communauté). Ces initiatives s'inscrivent dans un contexte juridique et politique restrictif, avec des activités souvent surveillées de près.

Pour de nombreuses personnes, le coming-out reste un défi à la fois familial et social, notamment dans les régions rurales où les mentalités sont plus conservatrices. Cependant, des figures comme le réalisateur Fan Popo, connu pour ses documentaires sur les droits LGBTQ+, sensibilisent le public et contribuent à faire évoluer les mentalités, en particulier chez les jeunes.

Le règne du téléphone

Lors d'un voyage en Chine, on se rend vite compte que le téléphone est indispensable. Impossible de faire sans : pour payer, traduire, commander un taxi ou un plat au restaurant. Même les rares personnes sans domicile fixe que vous croiserez font la manche avec un QR code. L'argent liquide ne circule presque plus, où que l'on soit. Le téléphone portable est devenu l'emblème de la modernité et de la connectivité en Chine.

En 2023, plus de 99 % des habitants urbains possédaient un smartphone, positionnant la Chine comme leader mondial en taux de pénétration mobile. Les applications comme WeChat et Alipay ont révolutionné la consommation et les services administratifs, bien que la fracture numérique persiste entre villes et campagnes. Par exemple, en 2021, 88 % des citadins accédaient aux services publics via des applis mobiles, contre 47 % dans les zones rurales. Par ailleurs, Douyin (TikTok) influence fortement la création culturelle et les tendances, tout comme les plateformes de commerce électronique et les réseaux sociaux, qui réunissent vie personnelle et professionnelle, renforçant la connectivité avec le monde.