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Epoque précolombienne

Les premières créations artistiques du Panama sont attribuées à la période précolombienne (dès 12 000 ans avant J.-C.). Concentrées dans la partie centrale et le Chiriqui, elles sont l’œuvre des Cuevas. Ce peuple indigène, ainsi que celui des Coclé, déclinera rapidement à l’arrivée des Espagnols. Les céramiques et l’orfèvrerie constituent leurs principales productions. Les tombes des chefs guerriers, qui ont été fouillées à ce jour, renfermaient des artefacts en or comme on peut en admirer au Museo de Panamá viejo - Ciudad de Panama.
Le site Parque Arqueológico, situé à El Caño a révélé dans les années 1930 la preuve de l’existence des « guerriers dorés », des chefs vêtus d’or avant d’être étendus dans leurs tombes. On estime qu’ils ont vécu au Panama à partir de 250 avant notre ère. Plus étonnant encore, leurs corps étaient entourés de fragments de céramiques, possiblement fabriquées pour protéger ou accompagner les chefs des tribus.
Les motifs qui ornent les artefacts montrent le chef en compagnie de son animal totem, mais aussi de créatures surnaturelles, similaires aux vampires occidentaux. Les colons ayant en grande partie ravagé la région, la culture de ces tribus reste méconnue par les archéologues.
Seconde étape dans la découverte de l’époque précolombienne panaméenne, le Parque nacional de Sarigua. Des vestiges vieux de plus de 11 000 ans se découvrent sur ce vaste site préservé.

Epoque coloniale

La colonisation espagnole se poursuit sur trois siècles, à partir de 1538. Dès lors, la culture amérindienne se mélange aux traditions ibériques. L’isthme devenant un passage commercial majeur, les échanges et les influences se multiplient. Alors que les pirates continuent de sévir, les apports africains et caribéens enrichissent la culture indigène.
La domination coloniale dure jusqu’à la toute fin du XIXe siècle, et même jusqu’à la naissance de la République. Durant ces quelques siècles, les pratiques artistiques sont liées à la religion : fêtes religieuses, construction d’églises décorées de peintures et de sculptures sacrées. Cependant, les rites païens et catholiques restent longtemps entremêlés dans ces œuvres.
Le Casco Viejo, quartier historique de la capitale du Panama, est célèbre pour son architecture coloniale du XVIIe siècle. Mais avec l'évangélisation, ce sont la peinture et la sculpture qui se développent. Les dorures recouvrent les retables comme le superbe Altar de Oro de la Iglesia de San José (érigée entre 1671 et 1677). Selon la légende, le retable aurait été sauvé du pillage de Panamá La Vieja, mené par le pirate gallois Henry Morgan, grâce à une ruse des moines. Dans les faits, ses détails baroques indiquent une date de création plus tardive, au XVIIIe siècle.  Également baroque, son autel en bois d’acajou est recouvert de feuilles d'or. C’est l’une des plus belles églises coloniales.
Les églises, concentrées à Panama Viejo (la vieille ville), ont été transférées pierre par pierre dans le Casco Viejo, après le saccage de la ville. Le plus ancien édifice catholique de la vieille ville, Iglesia de la Merced, a été construite en 1671 puis déplacée en 1680. Elle abrite deux chapelles : l’une dédiée à la Vierge Marie, très populaire au Panama, et l'autre renferme un petit mausolée.
La Catedral Basilica Metropolitana de Panamá a été transférée de Santa María la Antigua del Darién à Panama Viejo en 1520, puis reconstruite dans le Casco Viejo en 1674 après avoir subi un incendie et un séisme. Son retable a été façonné par des artistes français au XIXe siècle. Son autel en marbre de Carrare a été consacré par le pape en 2019, lors des JMJ (Journées Mondiales de la Jeunesse).

Guillermo Trujillo et le surréalisme panaméen

Au XXe siècle, les artistes complètent leur formation en Europe où ils découvrent les avant-gardes. Trujillo naît en 1927 dans le village de Horconcitos, dans la province de Chiriqui. Envoyé dans la capitale panaméenne pour poursuivre ses études, il intègre l’école d’architecture avant de se passionner pour la peinture. En 1950, il part pour Madrid et continuera pendant une décennie à opérer des allers-retours entre l’Europe et son pays d’origine. Picasso, Klee et le surréaliste cubain Wilfredo Lam marquent fortement ses débuts. Toutefois, l’iconographie autochtone reste présente dans ses compositions verticales qui évoquent des forêts d’un autre monde.
En 1959, Trujillo obtient une mention honorable à la Biennale de São Paulo. Père de la peintre Isabel de Obaldía, l’artiste s’éteint en 2018.

Richard Prince

Peintre et photographe renommé, Richard Prince est né en 1949 dans la partie américaine du canal du Panama. Ses débuts sont marqués par l’explosion des médias de masse. Prince s’inscrit dans la mouvance de l’appropriation, comme Cindy Sherman ou Barbara Kruger. Il puise dans l’imagerie populaire. À la fin des années 1970, il s’approprie, recadre et détourne les images publicitaires.
L’un de ses motifs récurrents, destiné à déconstruire le mythe américain, est le cow-boy, notamment devenu le symbole d’une grande marque de cigarettes. L’un de ses cow-boys est la première photographie à dépasser la barre du million de dollars lors d’une vente aux enchères qui s’est déroulée chez Christie’s. Adjugée 1 248 000 dollars en 2005 !
Richard Prince est l’auteur de deux des photographies parmi les dix plus chères au monde : Spiritual America (1981) et Untitled (Cowboy) (2000).
Ces dernières années, Prince prolonge sa démarche iconoclaste sur Instagram. Après avoir réalisé le portrait de Natalie Portman en 1998, signé par la jeune actrice et non par Prince, il s’attaque aux réseaux sociaux. Sur Instagram, il entreprend de repérer et de s’approprier des portraits publiés par des inconnus.

Vers l’art contemporain

Haut lieu de la créativité contemporaine, le Museo de Arte Contemporáneo (MAC Panamá) a ouvert ses portes en 1983. Le MAC abrite la modeste collection de l’Institut d’Art Panaméen, fondée par un collectif d’artistes pour pallier l’absence de politique culturelle. À leur tête, le peintre panaméen Alberto Dutary (1928-1997) réinterprète lui aussi les innovations européennes. Après une formation aux Beaux-arts du Panama, Dutary séjourne à Madrid. Il se passionne pour l’expressionnisme abstrait de Willem De Kooning et l’art brut de Jean Dubuffet. À son retour, il s’oriente vers le surréalisme puis vers la néo-figuration, en incorporant des matériaux à ses toiles (tissu, poussière). Longtemps enseignant, il fonde le collectif en 1962 dans le but de promouvoir l’art panaméen. Les initiatives en faveur de la création sont, pour l’essentiel, récentes et privées.  
L’isthme de Panama réserve de belles découvertes culturelles dont le Biomuseo signé Franck Gehry ou encore le mythique canal de Panama. Dédié à l’histoire naturelle du Panama et à la biodiversité, l’étonnant musée conçu par l’architecte canadien se reconnaît à sa structure décalée multicolore.
Le Panama Center of Art and Culture a vu le jour en 2018 grâce à l'artiste américain David Sloan et à l'entrepreneur Ernesto Schwartz. Ce centre culturel doté d’une galerie d’art a pour volonté de soutenir les arts contemporains. Les échanges interculturels sont encouragés notamment avec le programme de résidence. Ouvert à tous les artistes visuels, il accueille des peintres, dessinateurs, street artistes et photographes du monde entier. Les artistes résidents sont invités à laisser une fresque dans le centre en souvenir de leur passage.

Art des rues

Apprécié au Panama, le street-art accompagne toutes les déambulations urbaines. Le Casco viejo de la capitale panaméenne n’est pas avare en perles artistiques. Dans ce foisonnement créatif, un chien revient régulièrement, peint dans différentes tailles et situations. Amusez-vous à le repérer !
Des projets voient le jour dans la capitale, sous la houlette du Bay Arts Alliance. L’association œuvre à la revalorisation des rues par l’art. Diversité et inclusion sont les mots d’ordre depuis 1978. Tous les arts sont mis à l’honneur, y compris l’écriture et le spectacle. Le Bay Arts Mural Project se consacre spécifiquement aux fresques urbaines.
Parmi les récentes réalisations de ce programme, la fresque d’Heather Clements représente un personnage féminin drapé de feuillages, visible sur le Welcome Wall à l’intersection de Sixth Street et d’Harrison Avenue. L’artiste a fait appel à la communauté pour attribuer un titre à sa peinture murale. Essential Growth (croissance essentielle) a été choisie parmi des centaines de propositions, car elle évoque le renouveau et la nature. Le Welcome Wall, qui marque l’entrée du quartier historique sur Ocean Oriental Market, est destiné à être partagé avec d’autres artistes : Jayson Kretzer, Joyful Enriquez ou encore Christon Anderson ajouteront leurs peintures à ce même endroit.

Talents et avenir

Malgré une histoire peu favorable aux arts et à la culture, le Panama ne manque pas de talents. Ils se découvrent en plein air, dans l’espace urbain, mais aussi au DiabloRosso (Avenida Central - Parque de Santa Ana – Ciudad de Panamá). Ouvert en 2006, ce lieu unique est rapidement devenu un incontournable de la vie culturelle locale. Pour autant, son programme de qualité s’adresse à la communauté. Rencontres, lieu d’exposition, ateliers assurent le dynamisme de l’espace. C’est ici que l’on a pu découvrir Ana Elena Garuz, née au Panama en 1971. À travers ses acryliques sur toile, elle déconstruit les dimensions de la sculpture pour les reporter en peinture. Dans ses puzzles picturaux, Ana Elena Garuz reconstitue de nouveaux mondes minimalistes, colorés et abstraits.
La démarche socio-archéologique de l’artiste Donna Conlon (née à Atlanta en 1966) se base sur les objets du quotidien. Ses photos mettent en lumière les contradictions du monde moderne.  Depuis 2006, elle collabore avec Jonathan Harker, né en 1975 à Quito, en Équateur. Leurs vidéos, qui dénoncent les contradictions de l’identité panaméenne, ont été montrées au DiabloRosso, puis au Guggenheim (New York). Une vision à découvrir !