Architecture traditionnelle
L’architecture traditionnelle malgache porte aujourd’hui encore la marque des premiers habitants de l’île, pour la plupart originaires de Bornéo et d’Indonésie. Ces derniers construisaient des maisons sur pilotis de plan rectangulaire, aux toits de chaume à pentes raides, soutenus par un pilier central (à la dimension sacrée et souvent oint de sang lors de la construction), et dont les poutres se croisaient pour former des cornes de toit, le plus souvent sculptées. De cette architecture originelle subsiste également l’emploi donné aux matériaux naturels et locaux, ces derniers variant selon les régions. Sur la côte Est, le matériau phare est le ravinala, plus connu sous le nom d’arbre du voyageur. Cette essence, symbole du pays, est utilisée pour réaliser la structure portante et la charpente du toit à 2 versants de ces maisons sur pilotis. L’ossature de la structure est fixée grâce à un système de tenons et mortaises, tandis que les chevrons sont fixés à l’aide de liane ou raphia. Toujours à l’Est, les habitants du pays Tanala privilégient le bambou. Pour le plancher, les plus gros éléments sont refendus, débarrassés de leurs nœuds, écrasés, puis séchés avant d’être posés sur les solives. Les parois, elles, sont réalisées à l’aide de panneaux très légers de planchettes entrecroisées, tandis que les couvertures sont faites d’une superposition de couches de bambous écrasés, pliées à la panne faîtière et fixées par des éclisses (lames de bois). Dans la région de Tuléar, les pêcheurs Vezo et les agriculteurs Masikoro utilisent, eux, le vondro, un jonc très léger, idéal pour fixer les structures en roseaux. Leurs villages sont souvent protégés par des palissades en bois. Dans le Grand Sud, ce sont d’infranchissables clôtures d’épineux qui protègent les habitations des Antandroy. Ces dernières sont, le plus souvent, sur pilotis, de plan carré, basses et composées d’une pièce unique. Leur structure est faite en planches de fantsiholitra (petit arbre épineux) fixées sur un cadre en bois grâce à un système de tenons et mortaises. Originellement, ces habitations ne possédaient pas de fenêtres, mais trois portes en bois (porte d’entrée pour les femmes, porte arrière pour les enfants, dernière porte pour les hommes). Dans la tradition Antandroy, les jeunes filles décorent les murs de fines nattes tressées multicolores. Chez les Mahafaly, les habitations sont plus sommaires avec des parois faites d’un enchevêtrement de tiges d’aloès ou de sisal et dont les interstices sont colmatés avec de la bouse. Dans le Nord, les habitations sur pilotis mettent en valeur les propriétés du raphia, dont la queue et les nervures sont utilisées pour réaliser les panneaux des planchers, parois, portes et couvertures. A l’Ouest, les habitations de plan carré, surélevées, avec des vérandas périphériques, sont protégées par des toits pentus en palmes et des murs en torchis (boue mélangée à de la paille et collée sur un treillage de bambou ou de nervures de palmes). Dans les Hautes-Terres, difficile de ne pas être charmé par les effets chromatiques provoqués par la rencontre de la lumière et de la terre latéritique aux nuances de rouge utilisée par les Betsileo et les Imerina. Ces habitations en pisé (maçonnerie faite avec de la terre argileuse et des cailloux, que l'on comprime sur place dans un moule) permettent une très bonne isolation de la maison. Chez les Imerina, comme dans l’ensemble du pays, l’habitation n’est jamais qu’un simple abri, elle revêt au contraire une forte dimension symbolique et cosmologique, du fait de l’application des principes du Vintana.
Qu’ils s’organisent de façon concentrique autour des cases des chefs ou qu’ils s’étirent en longueur à partir de la case du fondateur, les villages malgaches s’organisent selon des principes phares qui révèlent l’organisation hiérarchique de la société. Les chefs se réservent le coin Nord-Est, symboliquement le plus fort. Cette direction marque celle des ancêtres, et c’est dans cet espace sacré que sont placées les aires cérémonielles. Le Nord symbolise la croissance, l’Est, l’autorité et la richesse, et on réserve aux Sud et à l’Ouest tout ce qui relève du profane. Des dispositions que l’on retrouve au sein de chaque enclos familial et dans chaque demeure. Avant toute construction, un astrologue est consulté pour s’assurer la faveur des cieux. Une dimension symbolique poussée à son apogée chez les Zafimaniry, instigateurs de la tradition des bois sacrés. Dans les forêts d’altitude de l’Est, à l’écart du monde, ce peuple d’artisans chevronnés a développé une maîtrise du travail du bois sans pareille. Leurs villages se composent de maisons disposées d’Est en Ouest, construites en bois de palissandre et en bambou, dont les structures sont assemblées sans aucun clou. Le pilier central, les poteaux d’angles et les façades extérieures des murs comportent d’élégantes rainures, tandis que les portes et fenêtres sont gravées, sur les deux faces, de motifs géométriques ou inspirés de la nature, empruntés aux traditions ancestrales du pays. Les pignons des maisons sont également surmontés de deux oiseaux sculptés. Tirant profit des essences locales se prêtant parfaitement à l’ébénisterie et à la menuiserie fine, les Zafimaniry ont su développer un artisanat étonnant dont la combinaison d’incisions géométriques dans le bois donne l’illusion de la mosaïque, et qui transparaît dans leurs élégants greniers sur pilotis sculptés et dans leur mobilier aussi beau qu’ingénieux (chaises en palissandres, pots de miel et autres ustensiles ornés de frises sculptées, luminaires). Malheureusement, le pays subit les affres d’une dangereuse déforestation qui réduit chaque jour un peu plus le nombre d’essences locales (ces dernières sont d’ailleurs souvent remplacées par du bois d’œuvre usiné)… un phénomène qui rend le savoir-faire Zafimaniry encore plus précieux et sacré.
Art funéraire
Le culte des ancêtres est l’un des principes fondateurs de la société malgache. A l’origine, les dépouilles étaient laissées au cœur même des éléments naturels (affleurements rocheux, coteaux…), ou placées dans des cercueils faits de rondins évidés et laissés dans des grottes ou bosquets, et parfois recouverts de planches de bois maintenues par un tas de pierres. Dans les Hautes-Terres, les anciennes tombes en terre et lieux de sépultures primitifs étaient souvent indiqués par de grandes pierres dressées. Les tombeaux de pierre Betsileo étaient souvent réalisés dans les anfractuosités rocheuses des falaises et n’étaient, de ce fait, uniquement atteignables que par d’imposantes échelles. On raconte que pour les funérailles du dernier roi de l’ancien Royaume d’Isandra, des ouvriers mirent 15 jours à construire une échelle de 24 m de haut pour hisser le bœuf sacrifié puis le corps du défunt dans la grotte funéraire ! Les premières tombes en dur étaient partiellement ou entièrement souterraines, de plan rectangulaire, et faites de pierres empilées ou cimentées avec de la maçonnerie. Dans le Sud du pays, les Mahafaly ont développé des structures funéraires monumentales qui ressortent d’autant plus que la région n’abrite aucun haut-relief. Grands édifices carrés de 10 à 15 m de côté, et de 1 à 1,50 m de hauteur, ces tombeaux sont constitués de pierres grossièrement taillées sur les parties externes et de pierres brutes entassées dans la partie interne recouvrant le compartiment funéraire ; de pierres levées dressées au milieu de la façade principale et à chaque angle de l’édifice ; et d’arbres-pieuvres plantés contre l’édifice de part et d’autre de la façade principale. Ces tombeaux sont surmontés d’étonnants éléments décoratifs : les aloalos, poteaux de bois hauts de 1,50 à 1,80 m et sculptés, sur leurs fûts, de motifs géométriques et, à leurs sommets, de figures orientées vers l’Est évoquant la personnalité et la vie du défunt ; et de crânes de zébus sacrifiés lors des funérailles. Le nombre de crânes présents sur le tombeau est ainsi proportionnel à la richesse du défunt. Voilà qui explique pourquoi nombre de ces tombeaux se situent en bordure de routes ou dans des lieux passants… le défunt veut affirmer son rang social et sa prospérité. D’ailleurs, certains n’hésitent pas à y inscrire de façon bien visible le coût total de la construction ! Certains tombeaux sont entourés d’un mur de ciment que les familles décorent de fresques naïves aux couleurs vives et aux sujets parfois étonnants. L’art funéraire Sakalava-Vezo, lui, opte pour un peu moins d’ostentation, comme en témoignent les fasambezo (cimetières) où les tombeaux de bois sont entourés de totems sculptés, notamment de motifs érotiques, symboles de vie et de fertilité, et de motifs remémorant la vie du défunt. Quelle que soit la région, « la demeure pour l’éternité constitue l’enracinement dans la terre des ancêtres ».
Puissance du Royaume de Madagascar
De tous les grands royaumes qui régnèrent sur le pays, c’est sans aucun doute le Royaume de Madagascar ou Royaume Merina qui laissa l’empreinte architecturale la plus forte, notamment lors de son apogée au XIXe siècle. Son architecture se fit défensive, comme en témoignent les ruines du Fort Hova et du Manda Fort, étonnants édifices circulaires réalisés à l’aide d’un ciment composé de corail, de sable, de coquillages et d’œufs. Mais les témoins les plus évidents (et les plus anciens) de cette puissance royale sont les rova, aires sacrées et fortifiées trônant fièrement au sommet des collines des Hautes-Terres. Classée au Patrimoine mondial de l’Unesco, le Rova d’Ambohimanga en est le plus célèbre exemple. Sa position élevée offre une vue panoramique sur les alentours, tandis que son système de fortifications composé d’une série de fossés et de 14 portails de pierre en traduit toute l’importance stratégique. Le lien à la nature est maintenu de façon permanente grâce à la présence de grands arbres sacrés et royaux, et à la proximité des grandes cultures en terrasse au Nord et au Sud de la cité. Certaines parcelles y sont encore bordées de murs en bauge (tamboho), alors que la muraille principale est faite d’un noyau en terre recouvert d’un épais enduit, fait d’un ciment à base d’œuf. On raconte d’ailleurs qu’il aurait fallu plus de 16 millions d’œufs pour réaliser toutes les fortifications de la cité royale ! L’autre célèbre rova est bien sûr le Rova (Palais de la Reine) d’Antananarivo, alors appelée « la ville des 1 000 guerriers ». C’est au XVIIe siècle que le roi Andrianjaka y bâtit un village fortifié protégé par de nombreux fossés circulaires et 7 portes fermées par d’imposants disques de pierre en latérite. On y retrouve également cette idée de ville-paysage et d’agriculture urbaine comme le montrent bien les rizières et cressonnières entourant la cité. Au cœur de ces rova se développèrent des cités royales comprenant palais, pavillons, fontaines et bassins royaux, lieux de culte (bois sacrés, arbres royaux, pierres de sacrifice), et tombeaux royaux, tous reliés par une multitude d’escaliers et de passerelles. La place publique y jouait un rôle central. Le Rova d’Ambohinga abrite notamment le Palais du Roi qui date de 1788 et dont le toit repose en grande partie sur une unique pièce de palissandre qui aurait été rapportée de la côte Est de l’île par 2 000 esclaves. Le sommet du madrier sculpté représente une paire de seins symbolisant la polygamie du roi… et donc son pouvoir ! A côté des palais, les tombeaux étaient également de grands symboles de pouvoir. C’est sous le règne d’Andrianampoinimerina que se fige un système de distinctions symboliques. Les souverains et les membres de la famille royale sont les seuls à bénéficier d’une « maison sacrée » (trano masina) placée au-dessus de leurs tombeaux. Les nobles peuvent prétendre aux « maisons froides » ainsi dénommées car elles ne possèdent pas d’âtre à la différence des maisons sacrées. Ces maisonnettes sont construites à la manière de petites maisons de madrier par des charpentiers.
En matière stylistique, l’architecture merina a été influencée très tôt par les Occidentaux présents sur l’île. Au début du XIXe siècle, Radama Ier instaure une politique d’ouverture commerciale avec la Grande-Bretagne. Ce traité va avoir un impact majeur sur l’architecture. Routes, manufactures et écoles sortent de terre. Mais ce sont surtout les missionnaires-artisans de la LMS (London Missionary Society) qui vont révolutionner le style merina. Ce sont eux, en effet, qui introduisent l’usage de la brique dont la teinte typique sera baptisée « rouge missionnaire ». Les maisons de missionnaires se caractérisent par la simplicité de leur plan en équerre… une forme qui inspira le nom donné à ces maisons. Trano Skera est un dérivé malgache du mot square anglais qui signifie lui-même angle droit ! Le temple, lui, est réalisé en pierre, symbole de son caractère sacré.
L’architecture merina est également marquée par une influence française. Dès le début du XIXe, Louis Gros introduit les premiers éléments franco-créoles sur l’île : toitures à 4 pans couvertes de bardeaux, étages, colonnes et arcades, galeries couvertes et varangues et usage systématisé de la brique et de la pierre. Des éléments qui vont influer sur l’architecture des palais et tombeaux royaux et qui vont être repris par le plus célèbre architecte de l’époque : Jean Laborde, gascon d’origine, qui obtint les faveurs de la grande reine Ranavalona Ire. La monumentalisation des édifices se poursuit, comme en témoigne, sur la colline d’Antananarivo, le Palais Manjakamiadana (« où l’on règne sans souci »), également appelé Palais de la Reine, aux proportions impressionnantes : 30 m de long, 18 m de large, 41 m de haut. Ce vaste édifice en bois était soutenu par un énorme pilier central en palissandre haut de 39 m. La structure en bois fut ensuite recouverte d’une enveloppe de pierre par l’architecte de la LMS James Cameron. L’influence de Jean Laborde se fit également ressentir dans l’architecture des tombeaux. C’est à lui que l’on doit l’introduction de murs maçonnés où sont installés des lits de pierre recevant les défunts. Construits en briques crues ou cuites (la brique cuite est plus résistante et permet la création de décors et de reliefs plus marqués), et parfois, pour les familles les plus aisées, en pierre de taille, les tombeaux les plus impressionnants comportent deux niveaux avec arcades, balustres et corniches. Cette évolution de l’art funéraire est en réalité calquée sur l’évolution des maisons merinas, les fameuses trano gasy. De simple et modeste maison en terre, la maison merina s’agrandit, et s’élève désormais sur plusieurs étages, s’ornant de vérandas (ouvertes à l’Est, fermées à l’Ouest) soutenues par des colonnes extérieures. Les toits à double pente ont désormais des combles, et leur chaume est souvent remplacé par des tuiles en terre cuite. Progressivement, on voit apparaître des grilles en fer forgé élégamment sculptées, des panneaux de verre français, et des enduits de béton sur les briques pour les protéger et permettre un travail décoratif. La ville haute de Fianarantsoa abrite de beaux exemples de cette architecture domestique. On y découvre des maisonnettes en brique avec des toits de tuiles en écailles de poissons, des lambrequins de bois peints, des volets et huisseries de fenêtres colorés et d’élégants balcons ouvragés. Pour terminer ce tour d’horizon de la puissance merina, il convient de citer l’ancien site industriel de Mantasoa édifié par Jean Laborde. Il s’agissait alors de la première cité de Madagascar à produire fer, fonte, poudre, verre, savon… Avec son toit à 4 pentes débordant sur une large véranda, la maison de Jean Laborde fait souffler un air de Gascogne sur le site ! A ne pas manquer non plus : le Bassin Royal construit avec des pierres sèches et du mortier de chaux, et le tombeau Soamandrakizay (« beauté éternelle ») de forme carrée, avec 10 piliers arrondis supportant d’impressionnants balustres, et orné de beaux parements de pierres taillées.
Epoque coloniale
Au début du XXe siècle, la puissance coloniale française va radicalement transformer Antananarivo. Jusque-là, l’ensemble des activités étaient centralisées dans la ville haute, la ville basse étant quasiment entièrement recouverte de rizières. Mais soucieux de s’affranchir de la royauté merina dont la ville haute est le fief, les Français décident d’assécher une vingtaine d’hectares de marais et de rizières et de créer un nouveau quartier baptisé Analakely. Deux grands escaliers escarpés de 160 marches sont construits pour adapter le site à la topographie accidentée, tandis qu’un réseau d’égouts couverts, des fontaines publiques et des installations électriques font entrer ce nouveau quartier dans la modernité. L’architecture coloniale qui se développe partout sur l’île possède différentes facettes. Cette dernière se fait d’abord religieuse. Première église catholique en dur du pays, l’église d’Ambodifotatra impressionne par sa monumentalité (35 m de long, 10 m de large et 12 m de haut). La structure originelle est faite en pierre de taille et moellons de granit, utilisant comme liant la latérite mélangée à du gravillon et du sable, et sera ensuite renforcée par l’ajout d’une charpente en fer. Son autel en plaques de fonte coulée dans les arsenaux de la Marine Française et présentant des motifs en rosaces et des bas-reliefs sculptés est un immanquable. D’une façon générale, temples et églises se caractérisent par une certaine sobriété stylistique. L’architecture coloniale se fait aussi militaire, mais avec des accents résolument éclectiques. Diego-Suarez (Antsiranana), aux Nord, conserve en partie son atmosphère d’ancienne garnison française avec ses artères tracées au cordeau, son arsenal, sa caserne, son tribunal de style néoclassique et son Hôtel de la Marine tout en élégantes arcades, patios et coursives très néo-mauresques. Et ne faites pas l’impasse sur l’Alliance Française. Cette dernière est installée dans l’ancien marché couvert dont la structure métallique fut confectionnée dans les célèbres Ateliers Eiffel. Le bâtiment administratif de l’armée à Mahajanga est un autre bel exemple de cette architecture militaire mêlant éclectisme et adaptation au climat. Voyez sa large véranda, ses combles assurant une excellente isolation, ses fines colonnes en fonte, et surtout ses rambardes sculptées comme de la dentelle. Un travail du décor que l’on retrouve dans les villes thermales. Antsirabe, surnommée « la Vichy malgache », en est le plus bel exemple. L’Hôtel des Thermes attire tout de suite le regard avec ses pannes faîtières décorées, ses marquises, ses clochetons, ses lambrequins finement ciselés et ses élégantes colonnes. En matière résidentielle, les villes, et notamment la capitale, voient se développer les maisons de négociants dont les rez-de-chaussée à colonnes soutiennent de grandes vérandas, tout en créant des galeries protectrices pour les passants. Mahajanga est sans doute la ville la plus intéressante en matière d’architecture résidentielle. En plus des influences coloniales, vous y lirez également des influences indiennes et musulmanes dans les portes sculptées, les balcons fermés par des persiennes, et les mosquées de la ville. Enfin, la période coloniale est indissociable des grands travaux de génie civil, à commencer par les réalisations ferroviaires. La ligne FCE (Fianarantsoa-Côte Est) comprend ainsi 21 tunnels, 42 ponts et 17 gares. Les gares font d’ailleurs l’objet de toutes les attentions décoratives comme en témoignent celle d’Antananarivo avec ses frontons, jeux d’arcatures et fenêtres géminées ; et celle d’Antsirabe aux accents orientalisants.
Depuis l’Indépendance
Dès les années 1960, le pays connaît un exode rural massif engendrant une croissance urbaine impossible à juguler et la naissance de nombreux bidonvilles, notamment autour de la capitale. Des difficultés que les différents gouvernements tentent de masquer à grand renfort de constructions massives, notamment dans le secteur industriel. Ces dernières ont rapidement été qualifiées « d’éléphants blancs », comprenez des infrastructures mal conçues, surdimensionnées et bien souvent inutiles, à l’image de l’Unité Textile de Toleana ou de la Tannerie de Diego-Suarez. Une fois réélu, Marc Ravolamanana avait bien lancé le MAP (Madagascar Action Plan) 2007-2012 qui visait à « transformer les structures économiques, sociales et matérielles du pays dans un esprit réaliste et positif »… mais très vite, il fut évident que ce plan favorisait essentiellement la région des Hautes Terres dont était originaire le président. Cependant, son souhait d’attirer les investisseurs étrangers, lui, fut en grande partie réalisé, comme en témoignent les nombreux gratte-ciel qui sortent de terre dans la capitale. La Tour Redland avec ses 33 étages, la Tour Sipromad de 100 m de haut, ou bien encore la Résidence Little Manhattan comptent parmi les plus hautes. Une architecture de verre et de béton qui semble fort éloignée de la tradition malgache, tout comme le projet de Colisée du président Andry Rajoelina. Pour célébrer les 60 ans du pays, en 2020, le président a commandé la construction d’une vaste arène de béton censée accueillir des spectacles sur l’histoire du pays. Cette aberration architecturale provoque aujourd’hui encore des remous, notamment parce qu’elle modifie totalement la physionomie du rova originel de la ville et menace même sa protection par l’Unesco. Fort heureusement, certains projets contemporains ont fait le choix du respect de la tradition. L’ancien consulat de France à Ambohidahy est une transposition à grande échelle de la maison traditionnelle des Hautes-Terres ; tandis que la Préfecture d’Antananarivo est une réinterprétation des maisons nobles merinas avec sa belle façade de brique, ses colonnes soutenant les avant-toits et ses pignons arborant fièrement le rouge missionnaire. Inauguré en 2021, le nouveau terminal international d’Antananarivo est une ode à la nature malgache. Les éléments phares de ce terminal de verre et d’acier sont ses auvents. Leurs structures porteuses et les charpentes en lattes des faux plafonds sont en sohihy, bois dur local également utilisé dans la construction de pirogues ; les charpentes complémentaires sont en pins ; tandis que l’ensemble du parvis est planté d’arbres et fleurs endémiques. Un lien avec la nature que mettent en avant les différents écolodges du pays. Face aux défis climatiques toujours plus importants, le WWF, le Barefoot College Madagascar et le ministère de l’Habitat ont lancé, en 2020, le 1er concours d’architecture écologique. Objectif : concevoir un bâtiment universitaire à Ambatolampy au Sud de la capitale. C’est le cabinet AMA qui a décroché le 1er prix avec son projet habillé de terre rouge latéritique de la région, mais aux formes modernes et bioclimatiques. Un concours qui a permis à certains architectes malgaches de s’interroger sur la question de la durabilité et du nécessaire retour aux sources d’une architecture traditionnelle bioclimatique avant l’heure !