La bière de Maredsous © B. Dubrulle.jpg
Les vins namurois © B. Dubrulle.jpg

Bières et brasseries artisanales

La particularité des bières belges est évidemment leur diversité formidable. Elles varient de la bière blonde claire aux bières ambrées, aux lambics, aux bières rouges flamandes, aux brunes aigres, aux bières fortes et aux stouts. La plupart des bières sont achetées ou servies dans des bouteilles plutôt que des canettes (bien que les vertus de la canette soient vantées par certaines micro-brasseries et que celle-ci revienne en force !). Presque chaque bière a son propre verre de marque, parfois de forme unique. Et si tout cela ne suffisait pas à prouver que la bière est une chose sérieuse en Belgique, en 2017 l’Unesco a inscrit la culture de la bière belge sur sa liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité.

Parmi la multitude de bières belges – parmi lesquelles on retrouve les classiques Stella Artois, Jupiler, Leffe (voir plus loin) ou Grimbergen –, on peut citer premièrement les trappistes. Sur 12 abbayes produisant des bières en Europe, 5 sont belges : Westmalle, Westvleteren en Flandre ; Chimay, Orval et Rochefort en Wallonie, la dernière citée étant produite à l'abbaye Notre-Dame Saint-Rémy de Rochefort, non loin de Namur. 

Les lambics – typiquement belges – doivent leur goût acide très spécifique à une fermentation spontanée par des levures sauvages et ne sont donc pas ensemencées. Parmi les lambics on ne peut pas passer à côté de la Gueuze, de la Kriek, de la Framboise ou encore de la Faro. Il existe également d’autres variétés peu connues en France comme la bière dite Saison, à la fermentation rapide et au taux d’alcool faible, généralement autour de 4 % vol. alc. ou la bière de table, à seulement 1,5 % vol. alc. qui est devenue rare, mais que l’on servait pourtant dans les cantines scolaires jusque dans les années 1970.

Bières namuroises

Dans la région de la Meuse namuroise, deux abbayes ont une bière dont le nom rayonne partout en Belgique et à l'étranger : Leffe (Dinant) et Maredsous (Anhée). Elles ne sont toutefois pas brassées sur place et dépendent de grands groupes brassicoles, AB InBev pour la première (n° 1 mondial) et Duvel-Moortgat pour la seconde (le plus grand groupe brassicole belge indépendant).

De taille plus modeste bien que déjà importante au niveau belge, la Brasserie du Bocq (Yvoir) a été fondée en 1858. On y brasse une gamme complète de bières plutôt traditionnelles dont la Blanche de Namur (référence à Blanche, comtesse de Namur et reine consort de Suède et de Norvège au XIVe siècle). À Dinant encore (Falmignoul), la Brasserie Caracole est la mère de toutes les micro ou petites brasseries de la région. François Tonglet y brasse toujours au feu de bois des bières aux noms qui évoquent la région : Caracole (escargot) ou Saxo (référence à Adolphe Sax) par exemple. Son caractère artisanal indéniable doublé d'une longue expérience (elle a démarré en 1992 à Namur) en fait une brasserie reconnue par ses pairs et largement appréciée des connaisseurs. 

À Mettet (Saint-Gérard), on brasse à l'abbaye de Brogne une bière du même nom qui possède la triple caractéristique d'être bio, brassée sur place (mais par des laïcs, l'abbaye n'étant plus active) et d'y côtoyer un petit vignoble amateur (600 pieds, plantés en 2003) . Plus près du centre de Namur, à Malonne, la Brasserie du Clocher est quant à elle installée dans une ancienne église désacralisée. Dans cette micro-brasserie, on produit une Philomène déclinée en quelques versions différentes. L'ambiance autour de la production est assez bon enfant mais la qualité est au rendez-vous. A l'abbaye Notre-Dame du Vivier (Marche-les-Dames), la Clem' de Castro ravive le style des bières d'abbaye. 

Enfin, la Houppe s'est imposée en quelques années comme la bière namuroise de référence, celle à laquelle les habitants s'identifient. Installée dans l'ancienne brasserie Balon-Perin en 2015, la Brasserie de l'Échasse est vite devenue la préférée des Namurois. Elle prit donc tout naturellement le nom de Brasserie Artisanale de Namur, dirigée par cinq passionnés. Ses bières, la Houppe et la Jambes en l'Air, sont chargées de références à l'univers namurois. 

La renaissance des vins belges

Côté vin, la Belgique possède une petite production viticole. On a d’ailleurs pratiqué la culture de la vigne au plat pays dès le IXe siècle. La baisse des températures en Europe du Nord à la fin de la Renaissance pendant le « petit âge glaciaire » a eu raison de la viticulture dans la région jusqu’au XIXe siècle. Parmi les raisons qui précipitèrent la fin du vignoble dans nos contrées, on peut aussi citer le protectionnisme de Napoléon qui fit arracher les vignes en Wallonie et le phylloxéra qui détruisit le vignoble partout dans le monde à la fin du XIXe siècle et au début du suivant.

Il y aurait aujourd’hui en Belgique environ 400 hectares de vignes (entre 75 et 100 au début du siècle, moins de 200 en 2014).

La Belgique dispose de quatre appellations d’origine protégée (AOP) : Hageland (1997), Haspengauw (2000) et Heuvelland (2005) en Flandre et Côtes de Sambre et Meuse (2004) côté francophone. À cela, il faut ajouter les IGP Vin de Pays des Jardins de Wallonie et Vlaamse Landwijn ainsi que les dénominations « vin mousseux de qualité de Wallonie » et « crémant de Wallonie » (2008).

Les premiers vignobles de l'ère «moderne» étaient encore de taille modeste et les travaux y étaient souvent empiriques. C'était le cas à Torgny, le village le plus méridional de Belgique où l'on disait autrefois que si la viticulture fonctionnait, c'était grâce à sa situation géographique privilégiée.  Puis, il y en eu d'autres : à Trazegnies (Hainaut), à flanc de terril ; sur les coteaux de Huy ou à Villers-la-Ville ; dans le Hageland (Brabant flamand). Des exploitations généralement de taille modeste qui suscitaient finalement plus la moquerie que l'admiration. La situation est bien différente aujourd'hui : la professionnalisation du métier, l'amélioration des techniques, la recherche des cépages adéquats, le temps qui passe et permet aux vignes d'acquérir de la maturité et enfin l'indéniable changement climatique font que la viticulture wallonne, namuroise en particulier, n'a rien à envier à la plus grosse part de la production française.

En 2020, la vigne exploitée couvrait 587 hectares. La production a quintuplé au cours des dix dernières années. La production de vin effervescent est majoritaire avec 870 000 litres pour 660 000 litres de vin blanc et 240 000 litres de vin rouge. Le rosé ferme la marche avec un peu plus de 80 000 litres. 54 % du vin belge est produit en Wallonie. 

Les vins namurois

Château Bon Baron

L'année 2003 fut une année charnière pour la viticulture wallonne. Les premières 3 000 bouteilles de la Cuvée Ruffus (à Estinnes, près de Binche) sortent cette année là. Actuellement, la production s'élève à 350 000 bouteilles pour 30 hectares. La même année, Jeanette Van Der Steen s'installe à Lustin (Profondeville) en provenance de sa Hollande natale. Il existait autrefois une tradition viticole dans la vallée mosane et à Lustin en particulier, où l'on trouve des traces de plantation de la vigne dès l'an 1018. Jeanette se prit de passion pour la viticulture, se forma et prépara le sol sur un terrain d'un hectare. L'année suivante, en 2004, elle planta 2 500 ceps, répartis sur sept cépages différents, quatre blancs (auxerrois, chardonnay, pinot gris et Müller-Thurgau) et trois rouges (pinot noir, cabernet et acolon). La petite activité familiale de départ se développa rapidement, si bien qu'il fut très vite question d'acquérir d'autres terres. Château Bon Baron était né. Sa particularité principale est d'être implanté sur des terroirs variés et éloignés les uns des autres. Saint-Héribert à la limite de Profondeville est le vignoble belge situé à l'altitude la plus élevée. Le vignoble du Domaine Bon Baron couvre 17 hectares. 

Domaine du Chenoy

Après une carrière longue de quarante ans comme administrateur de l'éleveur Grafé-Lecocq, Philippe Grafé fait un pas de côté mais souhaite rester dans le milieu du vin. Il fait l'acquisition d'une ancienne ferme à Emines (La Bruyère) et en 2003, il plante 25 000 pieds de vignes spécialement adaptées au sol et au climat local. Cépages récemment créés pour résister à ces conditions, il s'agit de cépages issus de croisements entre plusieurs autres. On les appelle hybrides ou interspécifiques : Solaris, Helios, Bronner ou Regent, par exemple. Les deux années suivantes, le vignoble a grandi avec la plantation de 17 000 pieds supplémentaires. Philippe Grafé a donc du convaincre et vaincre deux écueils : le regard porté par le consommateur lambda sur la viticulture belge et le goût désarçonnant de ces cépages différents. Le Domaine du Chenoy produit des vins blancs, rouges, rosés et effervescents. En  2014, le vignoble est passé à la culture biologique. Et en 2017, Philippe Grafé a cédé son domaine aux frères Despatures, déjà actifs dans la viticulture en France. Ils assurent depuis la pérennité du domaine pionnier dans la région, désormais tourné vers l'avenir.

 Domaine du Ry d'Argent

Voisin direct du Chenoy, le Domaine du Ry d'Argent a démarré en 2005, soit peu de temps après l'exploitation de Philippe Grafé. Avec un constat et une optique de départ fort différents puisqu'il s'agissait ici de donner un autre souffle à une exploitation agricole familiale classique. Jean-François Baele venait en effet d'arriver à la tête de la ferme gérée jusque-là par ses parents. Admiratif du résultat obtenu par le Chenoy et certain que ses propres terres pouvaient elles aussi convenir à la viticulture. Dans un premier temps, il fit le choix également de planter des cépages interspécifiques sur une surface de 5 hectares. Les premières cuvées virent le jour en 2008. Par la suite, le succès et l'apprentissage grandissant, Jean-François Baele se mit à produire des vins effervescents puis intégra progressivement des cépages conventionnels en plantant plusieurs parcelles (auxerrois, pinot gris, chardonnay). Au total, le domaine couvre 13,5 hectares sur 4 terroirs différents dont une toute petite parcelle bio.

Château de Bioul

Vanessa Vaxelaire transforma le château familial en un domaine viticole en 2008 (11 hectares, bio depuis 2020) et veille à sa préservation avec son époux Andy. La visite du château est liée à la découverte du vignoble et au parcours Made in Bioul mis en place par la maîtresse de maison : musée de la Vigne et du Château, découverte du chai, dégustation, restauration et boutique : l'expérience est complétée depuis peu par des possibilités d'hébergement pour les groupes. Inspirée par Philippe Grafé, Vanessa Vaxelaire a fait le choix des cépages interspécifiques : Johanniter, Muscaris, Pinotin. Même s'il n'a été labellisé bio que récemment, le vignoble de Bioul a toujours été travaillé dans le strict respect de la nature, sans désherbage et sans intrants, avec le respect de la biodiversité.

Domaine de la Falize

Petit dernier des domaines viticoles namurois mais uniquement par la superficie et l'âge (2012) car il a tout d'un grand. Son propriétaire s'est donné les moyens d'évacuer tous les problèmes inhérents à un jeune domaine et à la difficulté de pratiquer la viticulture en Belgique. Il a notamment collaboré avec Peter Collemont (Clos d'Opleeuw), considéré comme le pape belge du chardonnay. Il a également confié la vinification à une jeune œnologue particulièrement douée et précise, Morgane Favory. Les vins du Domaine de la Falize, en biodynamie, rares et forcément onéreux, sont présents sur quelques grandes tables du pays. À l'instar des grands bourgognes, blancs comme rouges sont vinifiés en monocépages (chardonnay et pinot noir).

 

Un autre domaine digne d'intérêt devrait voir le jour prochainement. Le Clos de Mostombe à Landenne (Andenne) devrait être doublé d'un centre œnotouristique installé à Thon-Samson.