Thomas Vinterberg © taniavolobueva - shutterstock.com.jpg

Dogme95 et enfants de Copenhague

Le 13 mars 1995, les réalisateurs danois Lars von Trier et Thomas Vinterberg signaient à Copenhague le manifeste du mouvement cinématographique Dogme95. S'appuyant sur dix règles nommées «le vœu de chasteté», ce manifeste prône un cinéma plus sobre, brut, défait de tout artifice visuel, en réaction évidemment aux superproductions de l’époque où la forme (artifices, créations en studio et effets spéciaux) prenait le pas sur l'authenticité de la production (lumière naturelle, tournage sur place, prise de son au cours du tournage...). Le premier film réalisé selon cette charte nommé Dogme #1 est Festen (1998) de Vinterberg. Le film ne respecte pas totalement toutes les règles du Dogme95 notamment celle du tournage en 35 mm car le réalisateur choisit de réaliser son film en format vidéo. La même année, Lars von Trier tourna le Dogme #2 : Les Idiots. En 2000, sortit Dancer in the Dark, avec la chanteuse Björk dans le rôle principal, qui obtint la Palme d’or à Cannes et en 2011, Melancholia, plusieurs fois nominé aux Oscars. L’actrice principale, Kirsten Dunst, gagna le prix de la meilleure actrice au Festival de Cannes pour son interprétation dans le film. Plus récemment, furent réalisés Nymphomaniac (2013) en deux parties et The House that Jack Built (2018). Thomas Vinterberg, quant à lui, est connu pour It’s all about love (2003) et La Chasse (2012), relatant l’histoire troublante d'un maître d'école accusé injustement de pédophilie. En 2012, Mads Mikkelsen remporta pour ce premier rôle difficile le prix du meilleur acteur au Festival de Cannes. En 2018, Vinterberg tourna le très spectaculaire (et donc très loin des idéaux du Dogme95) Kursk, avec Mathias Schoonaert, qui relate les évènements désastreux du sous-marin homonyme, quand la même année, le film du danois Rasmus Kloster Bro, Cutterhead, plusieurs fois récompensé en Europe, tenait en haleine les spectateurs, enfermés avec ses protagonistes dans les tunnels du métro de CPH en travaux. Un thriller haletant qui vous glace le sang tout comme the Guilty de Gustav Mölller, son premier long-métrage. Un huis-clos qui se déroule au central d'appel de la police, autour de l'enlèvement d'une jeune femme que le policier de garde au callcenter essaie de retrouver en traçant son téléphone.

Et puis, parmi les cinéastes copenhagois, trois figures féminines sont également emblématiques. Astrid Henning-Jensen, née en 1914, qui fut pendant plus de cinquante ans l’une des seules femmes cinéastes du Danemark ; elle reçut l’Ours d’argent au Festival de Berlin en 1978 pour son œuvre Les Enfants de l’hiver. Susanne Bier doit sa renommée à After the Wedding (2007, nommé aux Oscars) et au très beau Revenge (2011) qui remporta le Golden Globe ainsi que l’Oscar du meilleur film étranger. En 2018, elle réalisa le dérangeant Bird Box avec John Malkovich et Sandra Bullock, distribué par la plateform Netflix. Enfin, on doit à Lone Scherfig, Italian for Beginners (2000), réalisé dans le cadre du Dogme95, suivi de Une éducation (2009), Un jour (2011) et The Riot Club (2014) dont les intrigues se passent en Angleterre. Très récemment en 2019, Lone Scherfig tournait à Copenhague The Kindness of Strangers.

Instituts et événements

En 1966, le ministère danois des Affaires culturelles inaugurait l’École nationale du film du Danemark. Cette institution basée à Holmen, dans le port de Copenhague, part de l’initiative de l’Institut du film danois et compte parmi ses élèves les plus prestigieux Lars Von Trier, Thomas Vinterberg ou encore Pernille Fischer Christensen (Someone You Love, 2014). À Copenhague, en centre ville, se trouve également la Maison du Cinéma de l’Institut danois du film, par ailleurs le siège de la cinémathèque, la Filmhuset, où sont archivés et mis à disposition du public des films du monde entier et de tout genre. Parmi les autres activités cinéphiles : événements, séminaires, projections de spectacles, rencontres avec les artiste et les réalisateurs offrent une programmation variée. Sans compter le Café & Restaurant SULT, qui doit son nom au grand classique de Henning Carlsen.

Côté festivals, la ville danoise accueille en mars le CPH DOX Festival. Le plus grand festival du film de Scandinavie consacré aux films documentaires. Chaque année à cette occasion, les salles de cinéma de Copenhague projettent plus de 200 documentaires réalisés dans le monde entier. De plus, ce festival vise notamment à soutenir le cinéma indépendant et les films expérimentaux. La première quinzaine d’avril, c'est au tour du CPH PIX Film Festival. Nouvelles visions et expressions cinématographiques. Une véritable célébration du cinéma en provenance du monde entier, de tout genre, accompagné de concerts, d'événements spéciaux et de la venue de metteurs en scène internationaux. Enfin, entre octobre et novembre, c’est le MIX Copenhagen Film qui prend ses quartiers dans la ville. Fondé en 1986 par l’Association nationale LGBTQ+, le festival prévoit projections, remises de prix, concours d’écriture, soirées…

Copenhague à l’international

Un film, tourné en 2015, met véritablement en lumière les plus beaux lieux de la capitale danoise :The Danish Girl (de Tom Hooper). Une histoire émouvante basée la vie de l’artiste danoise, Lili Elbe, première personne transsexuelle à avoir eu recours à la chirurgie. Tout au long du film, on aperçoit certains lieux emblématiques de Copenhague comme la Bourse, Snaregade, Nyhavn, Nyboder aou l’Académie royale danoise des beaux-arts. Époustouflant de sensibilité, le film reçut trois nominations aux Golden Globes de 2016 ainsi que quatre nominations aux Oscars, tandis que la même année, l’actrice Alicia Vikander remportait l’Oscar du meilleur second rôle féminin.

Parmi les films passés par Copenhague, citons également Meurtre par intérim (1971) de Umberto Lenzi, Liés par le sang (1979) de Terence Young avec Audrey Hepburn, et tout récemment Domino : La Guerre silencieuse (2019) de Brian de Palma avec Nikolaj Coster-Waldau (Jamie Lannister dans Game of Thrones).

Au petit écran

Mais ce sont les séries télévisées danoises qui font de plus en plus parler d'elles : The Killing (2007-2012), Broen (2011), Borgen (2010), The Rain (2018) ou Thin Ice (2020), Enfer blanc en français. Filmées dans la capitale danoise, tournée au Groenland ou aux îles Féroé, mettant en scène le détroit de l'Øresund et les relations avec la Suède, les problématiques autour de la migration, le contexte géopolitique du pays sur fond d'écologie... En 2021, débarquait sur la plateforme Netflix, Octobre, la nouvelle série policière de Søren Sveistrup, le créateur du succès planétaire The Killing (2007-2012) et de son enquêtrice Sarah Lund.

Aujourd’hui, grâce au succès de ces thrillers, les voyageurs ont le désir de découvrir Copenhague sous un autre jour. La série Borgen raconte l'histoire de Birgitte Nyborg, une politicienne charismatique, qui de façon inattendue, devient la première femme ministre du Danemark. Borgen (« château » en danois) est le surnom du château de Christiansborg, le siège des trois branches du gouvernement : le Parlement, le bureau du Premier ministre et la Cour suprême. Inscrivez-vous aux visites du Nordic Noir Tour, et suivez votre guide qui vous emmènera sur les traces des personnages de ces séries danoises à succès.