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Du romantisme au réalisme

La période préromantique est dominée par les poèmes de Joannes Ewald (1743-1781) et les écrits d’Adam Oehlenschläger (1779-1850), dramaturge et précurseur du renouveau poétique danois. Mais c’est son disciple, Hans Christian Andersen (1805-1876), qui obtint une notoriété internationale grâce à ses fameux Contes, sans oublier ses récits de voyage, poèmes et romans. Tous les enfants ont un jour ou l’autre croisé son nom ou lu l’un de ses contes, ou du moins un passage. Et sans même le savoir, les plus petits d’entre eux le connaissent à travers… La Reine des neiges, adaptatée par les studios Disney. La chanson est dans toutes les têtes… et très entêtante. D’autres contes sont aussi illustres : Le Vilain Petit Canard, La Princesse au petit pois, La petite Fille aux allumettes, La Petite Poucette, sans oublier La Petite sirène qui a connu, elle aussi, son adaptation en dessin animé.

Saviez-vous qu’Andersen était né à Odense au sein d’une famille très pauvre ? C’est à l’âge de 14 ans qu’il quitta sa ville natale pour Copenhague. Là, il tenta de faire publier ses poésies et ses premières pièces. C’est alors qu’il rencontra le directeur du Théâtre royal, Jonas Colin, qui le prit sous son aile. Après l’Université, il décida de partir à la conquête du monde, voyageant à travers l'Europe où il noua de nombreuses amitiés : Victor Hugo, Franz Liszt ou encore Charles Dickens, Balzac et Lamartine ! À 30 ans, en 1835, publication de son premier recueil de contes. C'est le début d'une longue carrière au cours de laquelle il en écrivit 164 ! Mettant en scène des rois et des reines légendaires (ou réels), des personnages fantastiques (sirènes et fées) ou des animaux, des plantes et des objets. Il s’inspira énormément de ses souvenirs d’enfance. Contrairement à d’autres conteurs très connus, tels que Perrault et les frères Grimm, Andersen privilégie un langage courant ainsi que des expressions populaires.

Ses six romans sont beaucoup moins connus : L’Improvisateur (1834) ; Rien qu’un violoneux (1837) ; Les Deux Baronnes (1848) ; Conte de ma vie (1855) ; Être ou ne pas être (1857). Par ailleurs, il publia quantité de récits de voyage : Voyage à pied à Amager (1828), Promenade du canal de Holmen (1839), Images d’ombres rapportées d’un voyage dans le Harz (1831), Voyages en Suisse 1833-1873, Le Bazar du poète (1842) qui sont les souvenirs de son voyage en Orient, Visite au Portugal (1866); de la poésie (Fantaisies et Esquisses, 1831 ; Les Douze Mois de l’année, 1832…) et du théâtre (Amour sur la tour Saint-Nicolas, 1829 ; La Mulâtresse, 1839 ; Nouvelle Ruelle de l’accouchée, 1840…).

Bien qu'étant l’auteur danois le plus traduit au monde, il fut longtemps délaissé dans son propre pays, sa reconnaissance ayant débuté à l’étranger.

Dans un genre radicalement différent, le philosophe Søren Kierkegaard (1813-1885), reconnu comme le fondateur de l’Existentialisme international, imposa également son œuvre complexe et novatrice hors des frontières du royaume. En 1846, il publia Miettes philosophiques, et deux ans plus tard Post-scriptum aux miettes philosophiques. Ce post-scriptum, beaucoup plus long que le premier ouvrage, est l’un de ses écrits majeurs. Le titre est bien entendu ironique ! Dans cet ouvrage, l’auteur s’attaque violemment à la philosophie de Hegel. Cet écrit peut être résumé par l’une de ses citations : « la subjectivité est vérité ». Il s’agit d’une interrogation sur la foi : il y fait le distinguo entre la religiosité et l’attitude religieuse.

Changement de décor avec Georg Brandes (1842-1927), créateur vers 1870 d’un mouvement littéraire nommé « la percée moderne » une ouverture pour les écrivains danois aux influences de leurs contemporains étrangers. Parmi les membres du mouvement, le poète et romancier Jens Peter Jacobsen (1847-1885) qui introduisit le naturalisme, le réaliste Henrik Pontoppidan (1857-1943) – très connu en Allemagne, auteur du Roman des Morts – et Karl Gjellerupp (1873-1950).

Au XXe siècle

Johannes V. Jensen (1873-1950) est considéré comme le premier grand nom du XXe siècle. Son cycle littéraire Le Long Voyage lui a valu le prix Nobel… qu’aurait bien pu également remporter Karen Blixen (1885-1962) si son ami Hemingway ne lui avait soufflé la récompense. L’œuvre de la romancière est conséquente et mondialement traduite : en 1937 La Ferme africaine (adapté au cinéma Out of Africa); les Contes d'hiver (1941) ; Le Dîner de Babette (1958) également adapté au cinéma sous le nom de Le Festin de Babette. Par ailleurs, elle écrivit de nombreux récits ainsi que des lettres sur des sujets ayant trait à sa vie ou au monde lors de cette époque de troubles.

Klaus Rifbjerg (né en 1931), très inspiré par la littérature anglo-américaine, est également l’auteur d’une œuvre considérable comptant pas moins de 100 titres (romans, recueils de poèmes ou de nouvelles) ! Écrivain et cinéaste, Henrik Stangerup (1937-1988), « l’enfant terrible de la littérature danoise », connut le succès international avec une trilogie basée sur les trois stades (esthétique, éthique et religieux). A son tour, le romancier Jens Christian Grøndahl s’est imposé pour son intérêt pour l’analyse psychologique et ses personnages féminins mémorables. Quant à Jørn Riel (1931), il s’imposa sur la scène internationale pour ses hilarants récits groenlandais.

Littérature contemporaine

Morten Brask (né en 1970), en 2011 publia Terezin Plage (qui lui valut la reconnaissance des critiques littéraires et le « coup de cœur » des libraires français) suivi de sa seconde fiction romanesque : William Sidis perfekte liv. Autre écrivain contemporain de renom, Svend Åge Madsen (né en 1939), auteur d'une cinquantaine de romans, essais et livres pour enfants et adolescents, de pièces radiophoniques, et de scénarios pour la télévision. Il vit actuellement dans la ville d’Århus. Parmi ses œuvres, citons : La femme sans corps (1986) et Raconter les hommes (1989).

Enfin, la jeune et talentueuse Josephine Klougart, (née en 1985), mélange poésie et prose dans ses nouvelles. Elle fut nominée deux fois pour Le Grand Prix du Conseil Nordique. Son troisième roman, L’un d’entre nous dort (2012), est devenu un best-seller. Autre best-seller féminin qui passionne les Danois et les Français, La Laveuse de morts (2020) de l'autrice d'origine kurde, Sara Omar, qui dénonce les crimes d'honneur et l'oppression faite aux femmes.

Littérature populaire

Moins connus que leurs voisins suédois ou norvégiens, les auteurs de polars danois ont pour figure de proue Dan Turrèll (1946-1993). Sa trilogie traduite en français Meurtres à l'heure de pointe, Mortels lundis, Meurtres dans la pénombre met en scène l’inspecteur Elhers qui mène l’enquête au cœur de Copenhague. Michael Larsen (né en 1961), est connu pour ses thrillers, en particulier Le Cinquième Soleil, également traduits en français. La tradition du roman noir, bien qu'assez récente dans le pays, se développe ces dernières années avec Sara Blædel (1964) qui a publié quatre romans entre 2006 et 2009 ou Anna Grue, l'une des plus lues au Danemark. Elle a sorti son premier roman, Quelque chose pour quelque chose (Noget pour noget) en 2005. Ses débuts lui ont valu le prix de l'Académie des sciences danoise. Sa première véritable source d'inspiration : sa mère qui travaillait comme psychiatre. Dans la même veine, Leif Davidsen, par ailleurs grand reporter, s’est fait connaître avec des romans d’espionnage traduits en plusieurs langues : L’Ennemi dans le miroir (2004) qui a déchaîné les passions ou L’Épouse inconnue (2006) et À la recherche d’Hemingway (2008). Best-seller du genre, Libri di Lucca de Mikkel Birkegaard.

En 2008, le pays a fait ses adieux à Jakob Ejersbo, né en 1968, qui bouleversa la littérature contemporaine danoise : sa trilogie sur l’Afrique (2009), avec ExilRévolution et enfin Liberté, est considérée parmi les plus importantes œuvres scandinaves. L’auteur raconte une histoire basée sur sa propre vie en Afrique, qui n'est pas sans évoquer Karen Blixen, où le monde occidental rencontre le continent noir.

Trois prix Nobel de littérature

Le célèbre prix Nobel de littérature fut remis à trois écrivains danois, peu connus et peu lus en France. Les deux premiers ont été récompensés conjointement en 1917. Karl Gjellerup (1857-1919) est principalement lu pour ses deux premiers romans : Minna (1887) et Le Moulin (1896). Il a également écrit des recueils de nouvelles, des pièces de théâtre et de la poésie. C’est « pour sa poésie variée et riche, inspirée par de grands idéaux » qu’il fut lauréat.

De son côté, Henrik Pontoppidan (1857-1943) est un auteur réaliste connu pour son recueil de nouvelles, Ailes rognées. Il reçut cette haute distinction pour « ses descriptions authentiques de la vie de tous les jours au Danemark ». C’est une période troublée par la guerre qui vit le couronnement de Johannes V. Jensen (1873-1950), puisque c’est en 1944 que l’Académie suédoise l’a distingué « pour la rare force et la fertilité de son imagination poétique avec laquelle se combine une curiosité intellectuelle de large portée et un style audacieux et fraîchement créatif ».