Denis Villeneuve au 71e Festival du Film de Cannes. (c) Andrea Raffin-shutterstock.jpg
Xavier Dollan entouré des acteurs de Matthias et Maxime au  Festival de Cannes en 2019 © taniavolobu.jpg

De 1950 à 1970

C'est à la fin des années 1950, lors de la Révolution tranquille, que le cinéma québécois commence à se détacher du cinéma canadien anglophone, à la recherche de son identité propre. Aidé par les financements publics, il acquiert une reconnaissance locale, mais aussi un rayonnement international grâce à la qualité de ses productions. Le documentaire Les Raquetteurs (1958), de Michel Brault et Gilles Groulx, est considéré comme la première œuvre majeure de la filmographie québécoise. Suivant un congrès de raquetteurs à Sherbrooke dans les années 1950, ce court-métrage s’inscrit véritablement dans la vague « candid eye », qui consiste à filmer avec un certain humour les sujets à leur insu et ouvre ainsi la porte à des œuvres documentaires encore plus proches du réel. En 1964, Gilles Groulx revient avec Le Chat dans le sac, premier long-métrage de fiction où un jeune couple arpente le Montréal des années 1960 en se posant de grandes questions sur la politique et l'amour. Il flotte dans ce film, où des acteurs non professionnels improvisent des dialogues, un esprit Nouvelle Vague. Michel Brault, quant à lui, réalise deux œuvres iconiques du 7e art québécois, Les Ordres (1974) et Mon amie Max (1994). Brault travaillera sur plusieurs de ses œuvres avec Pierre Perrault (réalisateur d’Un pays sans bon sens (1970), véritable représentant du cinéma « vérité ») notamment sur Pour la suite du monde (1963). Dans les années 1970, où la tendance est aux films documentaires mettant en scène les milieux ouvriers et les gens ordinaires, le cinéaste Gilles Carle se démarque par ses films populaires, comme Les Mâles (1970), La Vraie nature de Bernadette (1972), La Mort d'un bûcheron et plus tard Maria Chapdelaine (1983). De cette période, on retient également Mon oncle Antoine (1971) et Kamouraska (1973) de Claude Jutra et J. A. Martin, photographe (1976, primé au festival de Cannes) de Jean Beaudin.

Des années 1980 à nos jours

Pour le cinéma québecois, les années 1980 sont tout aussi riches en œuvres convaincantes. En 1984, Micheline Lanctôt remporte la prestigieuse récompense du Lion d'argent à la Mostra de Venise pour son œuvre Sonatine et le cinéaste Denys Arcand conquiert le public européen et américain avec Le Crime d’Ovide Plouffe. Il revient deux ans plus tard avec la comédie applaudie par la critique Le Déclin de l'Empire américain (1986, premier volet d’un triptyque imaginé par le cinéaste) et gagne une nomination au Festival de Cannes et à Hollywood en 1989 pour Jésus de Montréal. De nombreuses œuvres de réalisateurs emplis de talent retiennent également l’œil des critiques : Un zoo la nuit (1987) et Léolo (1992) de Jean-Claude Lauzon, Trente-deux films brefs sur Glenn Gould (1993) et Le Violon rouge (1998) de François Girard, Un crabe dans la tête (2001, lauréat de trois Prix Jutra et deux Prix Génie) d’André Turpin, Atanarjuat, la légende de l'homme rapide (2001, Caméra d’or à Cannes) de Zacharias Kunuk ou, en 2003, La Grande Séduction de Jean-François Pouliot. La même année, Denys Arcand marque un grand coup avec Les Invasions barbares (deuxième volet de son triptyque), qui obtient une panoplie de récompenses internationales : les prix de la meilleure actrice pour Marie-José Croze et du meilleur scénario au Festival de Cannes 2003 ; trois Césars pour le meilleur film, le meilleur scénario et le meilleur réalisateur ; et l'Oscar du meilleur film en langue étrangère en 2004. L'Âge des Ténèbres (2007), dernier opus de la trilogie, est bien moins apprécié que les précédents. Arcand réalise plus récemment le long-métrage Le Règne de la beauté (2014) et La Chute de l'Empire américain (2018), où le réalisateur revient sur son obsession pour la fin de notre civilisation. Sans aucun effet spécial, ce sont les détails du fonctionnement de notre société qui intéressent le célèbre réalisateur. Ces dernières années, citons également À tous ceux qui ne me lisent pas (2018, Yan Giroux) qui nous fait découvrir le Québec d'aujourd'hui à travers les yeux du poète maudit Yves Boisvert ; La Grande noirceur (2019, Maxime Giroux) ; La Femme de mon frère de Monia Chokri, Prix coup de cœur du jury dans la catégorie Un certain regard au Festival de Cannes 2019 ; ou encore 14 jours 12 nuits de Jean-Philipe Duval, sélection canadienne pour les Oscars 2021 et Les Oiseaux Ivres par Ivan Grbovic même sélection pour l'année 2022.

Trois piliers québecois

Parmi les fiertés québecoises, on compte trois réalisateurs ayant apporté une renommée mondiale à la ville de Montréal : Jean-Marc Vallée, Denis Villeneuve et Xavier Dolan. On doit au premier des œuvres comme C.R.A.Z.Y. (2005), Café de Flore (2011), qui connaît un immense succès, Dallas Buyers Club (2013), mettant entre autres en vedette Matthew McConaughey dans le rôle d'un cowboy violent, macho et homophobe, adepte du rodéo, de l'alcool, de la cocaïne et du sexe, qui se retrouve diagnostiqué séropositif, Wild (2014) et Demolition (2015). En 2017, il réalise la série à succès Big Little Lies et, un an plus tard, il est nommé Compagnon de l'ordre des arts et des lettres du Québec. Il décède brutalement en 2021, laissant de nombreux projets en chantier.

Dans un autre style, plus sombre et mystérieux, Denis Villeneuve collectionne les distinctions depuis 1991. Villeneuve enchaîne les succès avec des œuvres comme  Un 32 août sur Terre (1998), Maelström (2000), film racontant les déboires soudains d'une enfant gâtée, Polytechnique (2008), récompensé par 5 Prix Jutra lors du gala de 2010, Incendies (2010), Prisoners (2013), Enemy (2013), Sicario (2015, en sélection officielle au Festival de Cannes 2015), Arrival (2016), Blade Runner 2049 (2017) et Dune, première partie, sorti en 2021.

Enfin, Xavier Dolan, véritable génie de la nouvelle génération de réalisateurs, n’a rien à envier à ses collègues québecois. J'ai tué ma mère (2009) est le premier long-métrage très remarqué de ce jeune prodige. Dolan réalise également Les Amours imaginaires (2010), vivement salué par la critique, tout comme Laurence Anyways (2012), qui raconte l'histoire d'un impossible amour entre un homme et une femme après que l'homme a décidé de changer de sexe. Suivent Tom à la ferme (2013), Mommy (2014), Grand Prix du jury à Cannes et César 2015 du meilleur film étranger, Juste la fin du monde (2016), Grand Prix du Festival de Cannes, et The Death and Life of John F. Donovan (2018). Son dernier long-métrage Matthias et Maxime sort en 2019 et est nommé pour la Palme d’Or à Cannes. En 2023 il sort sa première série : La Nuit où Laurier Gaudreault s'est réveillé.