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Musée de l'Acropole © ali caliskan - Shutterstock.com.jpg

Splendeurs antiques

A l’époque archaïque, le temple domine la cité. Au départ essentiellement de brique crue et de bois, ce dernier, désormais rectangulaire et périptère (entouré d’un péristyle à une rangée de colonnes), est de plus en plus souvent érigé en pierre. A cette époque, les temples sont de plan très simple, constitués d’une pièce unique appelée naos ou cella. L’époque classique représente, elle, l’âge d’or de l’architecture grecque, caractérisée par une quête du rationnel et de l’harmonie. Le plan des temples s’étoffe en suivant le schéma suivant : pronaos (entrée ou vestibule) – naos (sanctuaire contenant la statue de la divinité, souvent à 3 nefs) – opisthodome (porche postérieur symétrique). C’est à cette époque que se développent les ordres grecs.

L’ordre dorique s’illustre par sa simplicité. Massives et trapues, les colonnes y jouent un rôle porteur, ne possèdent aucune base et leurs chapiteaux sont vierges de tout décor. Le Parthénon, symbole de la politique de prestige menée par la Grèce, délaisse les matériaux modestes des époques précédentes pour la majesté du marbre et illustre dans toute sa splendeur l’harmonie dorique. L’Héphaistéion, dans la ville basse, est un autre chef-d’œuvre de marbre. De nombreuses recherches menées dès le XIXe siècle ont d’ailleurs révélé que ce marbre n’avait alors pas la blancheur qu’on lui connaît aujourd’hui, mais était au contraire paré de couleurs, sublimant notamment l’importante et imposante statuaire !

L’ordre ionique se manifeste, lui, par son élégance et sa légèreté. Les colonnes sont plus graciles, reposent désormais sur une base et leurs chapiteaux se parent de deux volutes. Le Temple d’Athéna Nike et l’Erechthéion, tous deux sur l’Acropole, en sont de parfaits exemples. Une grande importance est donnée à la recherche des proportions idéales et les architectes, pour souligner la majesté des édifices, n’hésitent pas à réaliser quelques corrections optiques sous forme d’incurvation et d’infléchissement des lignes, afin d’éviter les impressions d’affaissement ou de trop grande verticalité. La décoration est aussi plus travaillée. Les entablements qui reposent sur les colonnes entre les chapiteaux et le toit s’ornent de corniches et de frises rythmées par des triglyphes, éléments sculptés en saillie. Les trésors, petits édifices votifs recevant les offrandes, permettent aux architectes de laisser libre cours à leur imagination, notamment à travers une décoration tout en moulures et frises sculptées. L’époque hellénistique est celle de la monumentalité et du faste. Désormais, les temples – dont les portiques s’allongent, doublent leur travée et gagnent un étage – ne sont plus les seuls bâtiments phares de la cité. Théâtres, salles du conseil et gymnases se multiplient. Des thermes font même leur apparition. Les portiques, toujours plus impressionnants, délimitent l’espace des sanctuaires et des places publiques, tandis que des propylées (porches monumentaux) font leur apparition sur l’Acropole. Ce savant jeu de robustesse et de légèreté est souligné par une décoration raffinée mêlant les ordres dorique et ionique, en y ajoutant un troisième ordre, l’ordre corinthien, avec ses feuilles d’acanthe et ses colonnes crénelées. Étonnamment, l’ordre corinthien sera surtout utilisé par les Romains aux désirs de grandeur pour le moins monumentaux, comme l’illustre bien le Temple de Zeus Olympien au pied de l’Acropole.

Cette période est également marquée par une montée de l’individualisme. Désormais, les riches et puissants décorent leur villa avec luxe pour montrer leur réussite. Ces maisons s’organisent autour d’une cour centrale entourée d’un péristyle. Les décors en mosaïque y sont d’un grand raffinement. En parallèle se développe un urbanisme raisonné qui présidera à la construction de nouvelles villes comme Le Pirée. L’urbaniste Hippodamos de Milet conçoit un schéma directeur sous forme de plan géométrique par lequel la ville se trouve quadrillée par des rues rectilignes qui se coupent à angle droit formant des îlots de même dimension comprenant 8 maisons... un nombre qui ne doit rien au hasard, l’urbaniste cherchant par là même à contrôler le nombre d’habitants dans la cité. Il sépare également les zones et fonctions de la ville (zone commerçante, zone militaire, zone cultuelle et publique, zone d’habitation) pour en faciliter la lecture. L’agora, servant de trait d’union entre les différentes zones, est le lieu central de la cité et ses portiques permettent tout à la fois de circonscrire sa position et d’offrir aux citoyens d’agréables espaces ombragés. Un plan directeur logique et raisonné qui, vous n’aurez pas manqué de le remarquer, ne s’est pas appliqué à Athènes !

Athènes byzantine et ottomane

Du IVe au XVe siècle, la Grèce fait partie de l’Empire byzantin. Cette période, que l’on qualifia souvent d’obscurantisme médiéval en opposition à la grandeur éclairée de l’Antiquité, a pourtant donné à la Grèce de superbes témoins d’un étonnant syncrétisme où l’architecture se fait le lien entre cultes païens et traditions chrétiennes. Désormais religion officielle, le christianisme a besoin de nouveaux édifices pour marquer sa puissance. Les chrétiens vont donc développer de nouvelles solutions architectoniques sur les structures gréco-romaines existantes. Les thermes servent de modèle aux baptistères et les mausolées des empereurs inspirent les sanctuaires. Quant aux basiliques – qui servaient jusqu’alors de marchés couverts, places publiques et cour de justice –, elles deviennent des églises. Elles devaient permettre à l’assemblée de se tourner vers l’autel… c’est ainsi qu’est né le plan longitudinal ou plan basilical avec sa salle centrale entourée de colonnades. Puis la Grèce va progressivement adopter un plan centré en forme de croix. La décoration est extrêmement raffinée, comme en témoignent les somptueux décors de mosaïques et fresques colorées. Les mosaïques sont alors constituées de cubes de pâte de verre colorée par des oxydes métalliques et appliqués sur un lit de ciment frais, avant d’être couvertes de fines feuilles d’or ou d’argent. L’église de la Vierge installée dans le Parthénon est l’illustration parfaite de ce syncrétisme entre cultes païens et tradition chrétienne, tandis que le monastère de Daphni, non loin de la capitale, impressionne par son église à plan central octogonal décoré de somptueuses fresques et mosaïques.

Du XVIe au XIXe siècle, la Grèce est intégrée au puissant Empire ottoman. De nombreuses églises byzantines sont transformées en mosquées, adaptant ainsi des sanctuaires chrétiens aux rites de l’islam. Pour les mosquées construites de toutes pièces, les Ottomans privilégient des proportions modestes, les mosquées se limitant bien souvent à une salle de prière. Hammams, bazars et caravansérails jalonnent le territoire. A Athènes, on peut encore voir les vestiges de la mosquée Fethiye et des bains turcs.

Néoclassique et modernisme

1821, la Grèce est libérée du joug ottoman et célèbre son indépendance. La jeune nation cherche à redonner à ses cités leur caractère authentiquement grec. Il est alors décidé de faire table rase du passé ottoman. Le roi Otton Ier, ancien prince de Bavière, fait venir de nombreux architectes étrangers qui vont importer le style néoclassique. Ce style, qui reprend tous les codes de l’architecture antique (colonnes, pilastres, frontons, monumentalité…), permet aux Grecs de refermer la parenthèse ottomane en renouant avec leur passé le plus glorieux. C’est aussi un moyen pour le pays de se rapprocher encore un peu plus des autres pays d’Europe très friands de ce style. C’est particulièrement visible à Athènes, devenue capitale en 1834. Un tout nouveau quartier sort de terre et témoigne d’un renouveau urbanistique majeur pour la ville : la création de larges et grandes artères, telles les rues Stadiou et Panepistimiou, inspirées des grandes avenues des capitales européennes. Sous l’impulsion de l’architecte danois Theophil Hansen, secondé ensuite par l’Allemand Ernst Zeller, la capitale se pare de centaines d’édifices publics aux allures de temples classiques. C’est à Hansen que l’on doit notamment l’Académie (dont les colonnes ioniques sont inspirées de l’Erechthéion), la Bibliothèque Nationale en marbre (inspiré du style dorique du temple d’Héphaïstos), ou bien encore l’Université. Le néoclassique est également très prisé des classes aisées, les armateurs en tête, qui se font ériger des villas cossues aux rez-de-chaussée rythmés de colonnes doriques et pilastres encadrant des porches monumentaux en saillie, tandis qu’à l’étage, élégantes colonnes ioniques et balcons ornent les façades. Frontons et bas-reliefs sculptés sont alors très à la mode. La maison du grand archéologue Schliemann et son tombeau décoré de colonnes, caryatides et d’une réplique du Temple d’Athéna Nike en sont de parfaits exemples.

En 1933, au large d’Athènes, la Charte d’Athènes est signée à l’occasion du 4e congrès du CIAM (Congrès Internationaux d’Architecture Moderne). Manifeste du mouvement moderniste et théorie d’un urbanisme fonctionnaliste, cette charte reprend tous les points édictés par Le Corbusier, alors figure clé du CIAM. De nombreux immeubles d’Athènes portent la marque de ce modernisme : utilisation du béton armé, grandes baies vitrées, absence d’ornementation…Un grand programme avait même été initié par le ministère de l’Éducation pour populariser le modernisme et contrer les vives critiques dont il faisait l’objet du fait de son aspect austère. Ce programme consistait notamment en la construction de nombreuses écoles. Les années 1950, elles, sont marquées par une pression démographique toujours plus importante sur la ville, phénomène qui pousse les promoteurs à raser des quartiers historiques entiers pour construire toujours plus vite et à moindre coût des barres d’immeubles sans âme et des habitations aux qualités pour le moins discutables, dans un enchevêtrement irraisonné qui donne à la ville une impression de désordre dont elle aura du mal à se départir. Un phénomène qui contraste totalement avec le néoclassicisme toujours très populaire après-guerre et utilisé pour les grandes réalisations publiques. Les années 1960 marquent, elles, l’avènement du style international dont le mur-rideau de verre est le grand représentant. Les bureaux de Valsamakis sur la place Kapnikareas en sont un bon exemple. Un style international mêlant harmonieusement verre et béton dans des édifices aux lignes sobres et épurées que l’on retrouve dans trois créations phares de l’époque : l’ambassade des USA par Walter Gropius, le Terminal Hellenikon Est par Eero Saarinen, et la Fondation Nationale Hellénique par Constantinos Doxiadis, dont la façade de marbre lisse n’est pas sans rappeler les œuvres d’Oscar Niemeyer, autre grande figure de ce style international. A la même époque, la ville voit naître ses premiers gratte-ciel, tandis que Xenia, le grand plan gouvernemental de promotion touristique, fait apparaître un peu partout de nombreux hôtels au design résolument moderne.

Architecture contemporaine

Au début des années 2000, l’architecte italien Mario Botta imagine le siège administratif de la Banque Nationale de Grèce, dont la moderne monumentalité mêlant les nuances de beige de la pierre, le noir du granit et les teintes claires du bois contraste de façon étonnante avec le classicisme des édifices voisins. Mais ce sont bien les JO d’Athènes 2004 qui vont marquer un tournant majeur pour la ville. Athènes s’est d’abord dotée de nouvelles infrastructures sportives, dont son Complexe Olympique imaginé par Santiago Calatrava. L’un des éléments phares en est le Stade Olympique avec son toit de verre et d’acier suspendu par des câbles à une grande arche. Les JO sont également l’occasion pour la ville de repenser entièrement son centre-ville. Il s’agit alors de le rendre plus agréable à vivre pour les visiteurs comme pour les habitants. Une grande promenade piétonne pavée comme au temps de l’Athènes antique relie désormais l’ensemble des sites archéologiques et, le soir venu, elle s’illumine de somptueux jeux de lumière imaginés par Pierre Bideau (créateur génial de l’éclairage de la tour Eiffel) ; le réseau du métro est étendu ; et une rocade nouvellement construite permet désormais le contournement d’une partie de la ville. Tandis que le centre d’Athènes retrouve des allures de village, d’anciens sites industriels abandonnés sont réhabilités, à l’image de l’ancien complexe gazier du Gazi transformé en un grand centre culturel baptisé Technopolis, ou bien encore de l’ancienne Brasserie Fix qui accueille désormais, dans un décor résolument industriel, le Musée National d’Art Contemporain.

Les JO achevés, l’effervescence ne retombe pas et la ville continue à mener tambour battant une politique culturelle, multipliant notamment la création de musées et centres culturels ultra modernes. Les deux plus célèbres de la ville sont sans aucun doute le Musée de l’Acropole et le Centre Culturel Stavros Niarchos. Le premier est l’œuvre de Bernard Tschumi. Considéré par certains comme l’élégant pendant du Parthénon et par d’autres comme une « verrue postmoderne » ayant nécessité la destruction d’une partie d’un quartier historique (un comble pour un musée !), ce dernier ne laisse personne indifférent. Bâtiment ultra moderne de verre, d’acier et de ciment gris, le musée s’organise autour d’une cella ceinte de colonnes d’acier (en nombre égal à celles du Parthénon) et offre une vue étonnante sur les fouilles archéologiques en cours via un sol en verre. La Fondation Stavros Niarchos est, elle, l’œuvre de Renzo Piano. Créé sur une île artificielle, l’édifice surplombe légèrement la baie. L’architecte y a également dessiné un vaste parc reliant le bâtiment à la mer. Les deux éléments phares y sont l’Opéra et la Bibliothèque Nationale, tous deux reliés par une agora, une élégante canopée y assurant une protection contre le soleil… soleil qui inonde les panneaux photovoltaïques placés en nombre sur les bâtiments. En parallèle, nombreux sont les architectes athéniens à promouvoir des actions moins grandiloquentes et mieux ciblées de façon à donner envie aux habitants de réinvestir les différents quartiers de leur ville, notamment le centre. Piétonisation et végétalisation sont les maîtres mots. L’agence Point Supreme Architects (qui rêve encore à son projet fou baptisé « Athens by Hills » redonnant à chaque colline de la ville une fonction principale et transformant le quartier de Kallithea en vaste parc reliant l’Acropole à la mer !) multiplie les interventions élégantes et durables dans la ville, comme avec le très populaire bar/centre culturel Six D.O.G.S dont les structures de terre et de bois sont résolument durables.