Détails architecturaux du Palais de l'Alcazar à Séville. © Visual Intermezzo -shutterstock.com.jpg

Séville, petit berceau de cinéma

Si Séville n'a pas le palmarès d'une cité comme Madrid, qui peut se targuer d'avoir vu grandir Almodóvar ou d'avoir accueilli les plus grands lieux de tournage de la Casa de Papel, son histoire cinématographique n'est pas en reste pour autant. La première projection sévillane de cinéma se donne au Salon Suizo, le 17 septembre 1896. Une petite salle qui se trouvait alors Calle Sierpes. On y montre des vues de différents cinéastes, dont le deuxième film d'un cinéaste français alors peu connu, Georges Méliès. L'année suivante, l'arrivée du cinématographe Lumière booste la production locale et l'engouement du public, montrant cette fois des images de la ville et documentant notamment les inondations que subit celle-ci à la fin du siècle. Dans les années 1910, de nombreuses salles éphémères, théâtres et lieux de projection voient le jour, et en 1925 est inauguré le Ciné Pathé, premier complexe dédié au septième art, toujours en activité aujourd'hui calle Cuna.

Séville reste un lieu de cinéma durant la seconde moitié du vingtième siècle, accueillant les tournages nationaux tout en restant attachée à une image de tradition, parfois au détriment de la cité. Notons tout de même la venue du cinéaste Luis Buñuel, qui y tourne Cet obscur objet de désir (1977), dans le barrio de Santa Cruz. Le personnage de Conchita, tour à tour incarnée par Carole Bouquet et Angela Molina, est d'ailleurs originaire du même quartier. A l'époque, le cinéaste Alberto Rodriguez n'a alors que six ans, mais ce Sévillan de naissance et de cœur baigne déjà dans le cinéma. Après des études d'image et son à la faculté des sciences de l'information de Séville, il s'oriente vers une carrière de scénariste. Son premier court-métrage Banco (1997), réalisé avec son camarade Santi Amodeo, remporte de nombreux prix et lance une carrière nationale rythmée par les succès critiques et populaires. Habitué des Goyas, les César espagnols, il y présente Groupe 7 en 2012, un film policier qui se retrouve nommé dans seize catégories. Deux ans plus tard, c'est avec La Isla Minima qu'il triomphe, remportant pas moins de dix Goyas, dont celui du meilleur film et du meilleur réalisateur. Il a depuis dédié une série à la cité qui l'a vu naître, La Peste (2018), un drame historique retraçant les tribulations de la population de Séville au XVIe siècle. Un défi relevé haut la main par cet enfant du pays, qui ne l'a jamais vraiment quitté.

Le Real Alcázar star de cinéma

Nous l'évoquions plus tôt, nombreuses sont les productions qui se sont arrêtées au pied des monuments sévillans. Parmi celles-ci, citons le chef-d'œuvre de David Lean Lawrence d'Arabie, tourné au tout début des années 1960. La ville et son architecture mauresque y prend tour à tour les traits du Caire ou de Damas, et l'on peut reconnaître de nombreux lieux et bâtiments comme l'Hôtel Alfonso XIII, le Parc de María Luisa ou encore la Casa de Pilatos, ainsi que les Alcazares Royaux, stars incontestées de Séville à l'écran. Ces derniers, par leur architecture unique, ont attiré les stars et les grands projets à la recherche de palais ensoleillés. Georges Lucas y place par exemple une partie des décors de Naboo, la planète de Padmé Amidala dans L'attaque des Clones (2002). La Plaza de España apparaît également en lieu et place de la planète Theed, dans ce même film. En 2015, le palais gagne une notoriété internationale grâce à la série anglo-américaine Game of Thrones, qui choisit ce cadre idyllique pour représenter le pays de Dorne d'où est originaire Oberyn Martell (incarné par Pedro Pascal). D'autres lieux de tournages sont disséminés dans et autour de Séville, ce qui vous permettra si vous le souhaitez de réserver un Game of Thrones Tour, à la rencontre de ces héros assoiffés de pouvoir et ces héroïnes prêtes à tout pour en découdre. Si votre estomac et votre sensibilité ne vous permettent pas de supporter cette série sans tabous, dirigez-vous plutôt vers la comédie Knight and Day (2010) avec Tom Cruise et Cameron Diaz. Vous pourrez vous promener avec eux dans les rues de Séville, avant de vous diriger vers la Plaza de Toros de la Real Maestranza, également représentée dans le film. Les fans de l'acteur américain seront cependant déçus d'apprendre que, pour le tournage de Mission Impossible II, la ville de Séville fut remplacée par des décors américains et australiens, afin de réduire les coûts. Mais les vrais amateurs de la cité ne seront pas dupes.

Lieux et moments de cinéma à Séville

Si le Ciné Pathé est le plus ancien cinéma de la ville encore en activité, bien d'autres salles ont depuis envahi les rues et les centres commerciaux de Séville. Les multiplex dominent le paysage urbain, tandis que quelques salles art et essai subsistent encore, de sorte que le connaisseur autant que l'amateur de blockbusters pourront y trouver leur compte. Parmi ces adresses, la plus grande est sans conteste le Nervion Plaza, avec ses vingt écrans. Il vous faudra néanmoins maîtriser la langue de Cervantes pour apprécier ces salles, car la version originale n'est pas forcément répandue dans ces complexes. Pour être sûr de pouvoir apprécier vos projections, rendez-vous dans le lieu le plus enclin à diffuser cette V.O. en ville, le Avenida 5 Cines. Toutefois, si vous enfermer dans un cinéma pendant vos vacances ne vous ressemble pas, vous pourrez profiter de séances de cinéma gratuites et en plein air durant le festival Veranillos del Alamillo, chaque été au Cortijo del Alamillo, sur l'île de la Cartuja. De nombreux autres quartiers organisent également des projections estivales dès la nuit tombée. Restez donc à l'affût de tels événements autour de la Cueva del Agua à l'est de la ville, ou dans le parc Rosario Valpuesta au Sud. Enfin, le panorama cinématographique de Séville ne saurait être complet sans évoquer le Festival Cine Sevilla, grande messe du cinéma européen qui rassemble les cinéphiles de tous horizons chaque automne dans la capitale andalouse. Un événement réparti entre trois hauts lieux de la culture sévillane, le Nervion Plaza déjà évoqué, le Teatro Alameda et le Teatro Lope De Vega. L'occasion rêvée d'un petit aller-retour hivernal sous le soleil, pour autant que la cité ait ravi votre cœur de touriste comme celui de cinéphile.