Traineau à chiens. (c)ImagineGolf-iStockphoto.com .jpg
Portrait de Jack London (c) DR.jpg
Chiens de traineaux. (c) Natalya Rozhkova - shutterstock.com.jpg

Une invention des peuples du Nord

Bien que non officiellement prouvé, il semblerait que les chiens d’attelage furent utilisés par les peuples autochtones du Nord pour se déplacer en hiver depuis une époque aussi lointaine que 6 000 ans av. J.-C. Il suffit de s’imaginer les conditions extrêmes des régions nordiques, avec leurs épaisses couches de neige – parfois durcies par le froid – et l’absence de chemins ou de pistes, pour saisir l’intérêt capital que revêtait ce moyen de transport. Les premiers explorateurs et trappeurs européens adoptèrent également le traîneau à chiens, un moyen des plus efficaces pour transporter hommes, denrées alimentaires et marchandises sur de grandes distances dans un territoire sauvage entièrement recouvert par la poudreuse et des lacs et rivières gelés. À la fin du XIXe siècle, dans la région du Klondike, au nord-ouest du Canada, les chiens de traîneau se montrèrent tout aussi utiles alors que la ruée vers l’or battait son plein. Les chercheurs d’or s’en servaient pour transporter leurs effets personnels, leur mobilier, les vivres ou encore le bois. C’était aussi le moyen privilégié pour la livraison du courrier, laquelle s’effectuait deux à trois fois par mois à Dawson City. Vu la forte demande, ce sont donc des milliers de chiens de traîneau qui arpentaient le territoire minier du Klondike. Plus récemment, au milieu du XXe siècle, ce fut au tour de la Gendarmerie royale du Canada (GRC) de découvrir les côtés pratiques de ce mode de transport pour ses déplacements dans le Grand Nord canadien. Mais si de nos jours le traîneau à chiens sert encore aux Autochtones, il ne figure plus au premier rang pour les déplacements, la motoneige ayant bien sûr pris le relais.

Il vaut ici la peine de mentionner un événement important de l’histoire du traîneau à chiens : en 1925, à Nome en Alaska, une épidémie de diphtérie a fait craindre le pire. Glace et blizzard empêchaient tout envoi de médicaments par avion ou par bateau. Les grosses bêtes poilues ont alors pris part à l’effort de sauvetage en acheminant le sérum salvateur jusqu’à la localité isolée. Le leader des chiens du dernier attelage, Balto, est depuis immortalisé en statues, l’une près du zoo de Central Park à New York, l’autre dans le centre-ville d’Anchorage en Alaska. À savoir qu’une course annuelle commémore cet exploit, l’Iditarod Trail Sled Dog Race, que l’on surnomme également « route du sérum » ou « course de la miséricorde ».

L’appel de la forêt

C’est lors de la ruée vers l’or (1896-1899) dans la région du Klondike, entre l’Alaska et le Yukon, que le traîneau à chiens se popularisa vraiment. Jack London, auteur américain épris d’aventure et de nature sauvage qui s’embarqua en 1897 sur la piste du Klondike, contribua à faire connaître cette épopée. Il arrive en Alaska par le passage intérieur entre la Colombie-Britannique et l’Alaska pour rejoindre Dyea et Skagway et, de là, Dawson City en passant par le lac Bennett. Arrivé à Dawson City à la fin de l’automne, il passe l’hiver sur place à écouter des histoires de chercheurs d’or qui lui inspireront ses romans les plus célèbres, comme L’Appel de la forêt, Croc-Blanc, Les Enfants du froid, Belliou la fumée ou Le Fils du loup. Entre réalité et fiction, ses livres permettent de se plonger dans cette époque fascinante qui a tant marqué le territoire du Yukon. Mais, entre tous, L’Appel de la forêt est sans conteste son plus grand succès. C’est dans la cabane de Louis Bond, au Yukon, que London rencontre le chien Jack, futur modèle de Buck, le héros de ce roman. Ancien chien domestique choyé sous le confortable soleil de Californie, la vie de Buck change du tout au tout lorsqu’il est vendu à un trafiquant de chiens de traîneau dans la région du Klondike. Il devra s’habituer à la rudesse du climat du Grand Nord et à celle des hommes perdus dans ce coin de territoire mais aussi à lutter contre le froid, les autres chiens, les hommes et la faim. Il trouve le réconfort auprès de son dernier maître, mais celui-ci est malheureusement assassiné par des Autochtones. Buck s’enfuit alors dans la forêt et cède à l’appel de la vie sauvage. L’Appel de la forêt a fait l’objet de multiples adaptations cinématographiques et télévisuelles depuis plus d’un siècle. La première adaptation est réalisée en 1908 tandis qu'en 2020 est sortie sur les écrans la version de Chris Sanders, qui met entre autres en vedette Harrison Ford et Omar Sy, et qui combine des prises de vue réelles et de l’animation.

Races de chiens et composition de l’attelage

Élevés par les peuples autochtones du Nord, les chiens de traîneau sont les descendants des loups domestiqués à des fins de transport et de chasse. Parmi les plus anciennes races de chiens de traîneau, on retrouve le malamute d’Alaska qui garde encore de nos jours sa grande cote de popularité. C’est un chien puissant, reconnu pour sa force et son endurance, tout comme le chien inuit du Canada, originaire du nord du pays, bien que ce dernier soit plus petit que son confrère le malamute. Tant le malamute que le chien inuit du Canada sont inscrits en tant que races pures auprès du Club canin canadien.

Au XIXe siècle et au début du XXe siècle, le commerce des fourrures et la ruée vers l’or dans le Klondike ont définitivement popularisé ce mode de transport. Pour répondre à la demande sans cesse croissante, des races mixtes ont vu le jour, notamment le Mackenzie River Husky, un chien puissant fort à l’aise dans la neige profonde. Avec l’avènement des courses de traîneaux à chiens au XXe siècle, un nouveau critère de sélection est entré en ligne de compte : la vitesse. Est ainsi introduit au Canada le husky de Sibérie, une race pure provenant de Russie qui donna aussi naissance au husky d’Alaska (ou Alaskan Husky), issu de croisements avec d’autres races de chiens de course tels que les lévriers, les setters et les braques.

La composition de l’attelage est tout aussi importante que la sélection des chiens et est divisée en quatre catégories. On retrouve toujours un ou deux chiens de tête, placés tout à l’avant et qui dirigent et guident l’attelage. Viennent ensuite les chiens de pointe qui servent essentiellement à encourager les chiens de tête. Les chiens qui obtiennent cette position sont très souvent de futurs chiens de tête en formation. La paire de l’attelage qui se trouve juste devant le traîneau est la plus puissante, celle dont la mission consiste à maintenir le traîneau sur la piste : ce sont les chiens de barre. Tous les autres chiens positionnés entre ceux de tête et ceux de barre sont les chiens du centre.

Les chiens de tête sont dirigés à la voix par le conducteur. Selon le parcours et les conditions météo, il peut se trouver à l’arrière sur le traîneau, à marcher devant l’attelage ou bien à courir à l’arrière. Quant au terme « musher » qui désigne le conducteur, il puise son origine dans un malentendu linguistique. Alors que les premiers conducteurs canadiens français criaient « Marche ! » à leur attelage, les explorateurs anglais entendaient « mush ». Voilà pour la petite histoire !

Courses

Devenu un loisir d’hiver hyper populaire, le traîneau à chiens a atteint le statut de discipline sportive. Plusieurs courses annuelles sont organisées, tant sur le sol canadien qu’en Alaska (en 1908, la All Alaska Sweepstakes fut la toute première course de traîneaux à chiens au monde) ou dans les États du nord des États-Unis, souvent programmées simultanément avec des carnavals d’hiver. De nombreux pays en dehors du continent nord-américain ont également joint le mouvement, comme le Groenland, la Scandinavie, la Russie et même la France. Si certaines courses visent davantage le divertissement, d’autres au contraire font partie d’un circuit professionnel où les gagnants empochent divers prix en plus d’accumuler des points au classement. Ces compétitions peuvent prendre la forme de sprints, c’est-à-dire des courses sur de courtes distances, ou alors carrément d’épreuves d’endurance s’étalant sur plusieurs jours durant lesquels les mushers parcourent des centaines de kilomètres chaque jour. Pour un repos bien mérité, voire obligatoire, le circuit des courses d’endurance est ponctué des fameux « checkpoints », lieux où l’on s’assure de la bonne santé de tous, chiens comme humains, et où l’on échange conseils et histoires de course.

Au Canada, la plus célèbre course d’endurance est la Yukon Quest. Jusqu'à récemment, elle proposait un parcours de 1 600 km entre Fairbanks en Alaska et Whitehorse au Yukon. Désormais les participants ont le choix entre trois circuits qui débutent à Whitehorse (160 km, 400 km et 725 km).

Des expériences à portée de main

Il est temps de passer à la pratique. Pour ce faire, la Belle Province met à disposition un large éventail de possibilités, allant de la balade d’une heure ou deux à l’expédition de plusieurs jours avec nuitées en tipi, en tente de prospecteur, en refuge ou en chalet. Peu importe l’option choisie, la visite du chenil est généralement incluse et il est possible de prêter main-forte au moment d’atteler les chiens ou encore de participer au service de leur repas lors des pauses. Si certains optent pour le confort relax du traîneau, d’autres préfèrent mettre la main à la pâte et conduire leur propre attelage, option privilégiée pour vivre pleinement l’expérience du traîneau à chiens. Et pour ne rien gâcher, prévoyez de vous emmitoufler de la tête aux pieds. Si vous n’avez pas le parfait attirail de l’aventurier hivernal, n’ayez crainte : accessoires et vêtements chauds peuvent être loués ou même prêtés sur place. Vérifiez toutefois si cela est possible au moment de votre réservation, pour ne pas être pris au dépourvu au moment venu.

Pour vivre cette aventure nordique des plus authentiques, rien de plus facile, les pourvoyeurs et les entreprises spécialisées dans le domaine sont présents dans pratiquement toutes les régions touristiques du Québec. Les pourvoiries et auberges de la forêt proposent généralement toutes cette activité lors de la saison froide, sans oublier les nombreuses entreprises de location de motoneige qui offrent bien souvent des excursions guidées, de quelques heures à quelques jours. On ne peut passer sous silence l’expérience ultime que constitue une excursion en traîneau à chiens dans la toundra arctique au Nunavik, dans le Grand Nord québécois. Un retour aux sources avec ce mode de transport hivernal, jumelé à un partage des connaissances avec le peuple inuit dont la présence dans ce territoire remonte à des millénaires. En plus du traîneau à chiens, les séjours vous permettent également de découvrir la faune et la flore locales, d’apprendre à construite votre propre igloo ou encore de faire l’expérience du fameux chant de gorge. Inoubliable ! Pour d’autres bons plans, consultez le site web de Québec Aventure Plein Air.