Un potager généreux

L’agriculture sur l’archipel est avant tout vivrière, et rares sont les fermes qui produisent en grande quantité. Pommes de terre, maïs, avocats, manioc, patates douces, gombos, aubergines, poivrons, haricots verts, rouges ou noirs, courges dont le très apprécié giraumon, tomates, piments-oiseau, oignons, le moins que l’on puisse dire de la palette des légumes, c’est qu’elle dépayse agréablement le palais. Sans oublier l’arbre à pain aux fruits très nourrissants, rapporté du Pacifique, dont la chair rappelle après cuisson la texture et le goût du pain. Également appelé breadfruit, ce fruit est connu sur les îles grâce au capitaine Blight, célèbre pour sa traversée du Pacifique à bord du fameux navire, le Bounty.

Le ackee fut introduit dans la région au XVIIIe siècle par les esclaves noirs en provenance de l’Afrique de l’Ouest. Attention la chair ferme et jaune de ce fruit est toxique lorsqu’il n’est pas mûr. Le gombo est un petit légume vert qui se mange jeune et tendre. Une fois coupé il libère un jus visqueux très apprécié pour épaissir les plats. Enfin la christophine – de la famille des courges – ressemble légèrement à une poire verte. Finement coupée, elle est sautée ou gratinée et libère son doux goût de pomme de terre.

Le paradis des fruits

Si les fruits sont aujourd’hui innombrables sur les îles, il n’en a pas toujours été ainsi. A son arrivée dans le Nouveau Monde, Christophe Colomb n’y découvrit que peu de fruits indigènes, tels l’ananas et la goyave. Très vite, les échanges commerciaux avec les autres régions du monde, Afrique, Asie et Pacifique, vont permettre l’introduction de nouvelles espèces qui s’adapteront merveilleusement à leur terre d’asile. Ainsi, le citron, la mangue et la canne à sucre sont originaires d’Asie, un des héritages de la colonisation britannique, sans oublier la noix de coco, originaire du Pacifique.

Tous les fruits exotiques les plus incroyables, connus et méconnus, aux parfums et aux saveurs riches et subtiles, sont au rendez-vous des tables bahaméennes. Parmi les plus connus, citrons verts ou jaunes, oranges, mandarines, bananes, avocats, pastèques, ananas, noix de coco, prennent des saveurs exceptionnelles. On découvrira avec plaisir les moins communs, cédrats, papayes rafraîchissantes, caramboles sucrées et acidulées, en forme d’étoiles lorsqu’on les découpe en rondelles, fruits de la passion à la pulpe acidulée, goyaves délicieusement sucrées, canne à sucre, corossols acidulés et rafraîchissants, pommes cannelle ou encore la sapotille au subtil goût d’abricot.

Poissons et crustacés à l’honneur

Entouré par des eaux très poissonneuses, les Bahamas ont de tout temps intégré des produits de la mer dans leur gastronomie. L’océan Atlantique, avec ses récifs coralliens, donne des poissons de toutes sortes, habitués des récifs ou migrateurs, espadon, mérou, wahoo, mahi mahi, langoustes, crevettes, crabes, ainsi que divers mollusques. La tradition de la pêche perdure et, tout au long des côtes, se succèdent de petits villages de pêcheurs dont les barques colorées reposent sur le sable. Souvent regroupées en coopératives, les communautés de pêcheurs déversent sur les marchés des produits frais.

Ici, on n’est jamais à court d’idées pour accommoder le poisson, servi grillé, en sauce, relevé d’épices et ainsi de suite. Espadons, thons, rougets et daurades, parmi les plus courants, alimentent la table bahaméenne. Le mérou (grouper), véritable institution de la cuisine bahaméenne, s’accommode de différentes façons, en sauce à la mangue, au vin blanc, en sauce relevée d’épices. Les crustacés et les fruits de mer sont légion. La langouste grillée, arrosée d’un filet de citron vert, en curry ou accompagnée de noix de coco, est incontestablement la reine des tables touristiques. Les crabes sont eux aussi fort savoureux. Le crabe de terre, land crab, cousin du crabe de mer dont la chair est savoureuse, abonde en été quand les averses le délogent de sa tanière au crépuscule. On le cuit dans sa coquille, type crabe farci, avec des épices.

La conch, emblème des Bahamas

La conch ou lambi en français, tient une place d’honneur sur la table bahaméenne. Contrairement aux îles voisines où l’on impose l’interdiction de la pêche pendant les périodes de reproduction, et où certains se damneraient pour en consommer, la pêche et la consommation de conques ne connaissent pas de trêve aux Bahamas, ce qui n’est pas sans inquiéter les spécialistes et militants écologistes. Ce coquillage très courant est lié aux rites les plus anciens. Les Amérindiens l’ont sculpté en outils, en bijoux, l’ont utilisé comme instrument de musique et de communication. Aujourd’hui, une fois consommé, il sert à la décoration des jardins ou des intérieurs bahaméens.

Ce grand mollusque connu pour sa spectaculaire coquille presque baroque cache une chair blanche et très ferme qui devient un rien caoutchouteuse à la cuisson. C’est pourquoi elle nécessite une préparation particulière avant toute cuisson. Attendrie au marteau, salée, fraîche et crue, taillée en petits dés, relevée de poivrons rouges et d’oignons, la conch est au cœur de délicieuses entrées comme la simple conch salad, aromatisée d’oignons, de céleri, de coriandre, marinée dans le citron vert. Le conch chowder, est une soupe épaisse de lambi avec tomates, bacon, carottes, poivrons, pommes de terre et épices. Les cracked conch sont des lamelles de conques frits dans une pâte, servis accompagnés de frites. Les conch fritters sont des beignets d’un mélange de conques, de poivrons, d'oignons, de tomates, en boulettes, enrobés d’une pâte de maïs, servis en entrée avec une sauce mayonnaise ou tartare. Quant au très savoureux grilled conch, il est préparé en papillote sur un grill, souvent au barbecue, avec oignon, ail, épices et jus de citron frais.

Plats typiques

Plus encore que le conch, l'aliment le plus répandu et le plus consommé par les Bahaméens demeure le poulet. Sur les cartes des restaurants, on retrouvera également mouton, porc et bœuf. La viande de bœuf est importée, et en général d’excellente qualité. La viande rouge demeure rare dans la diète bahaméenne. Marinée dans de savoureux mélanges d’épices, elle est cuisinée en ragoût ou en grillade.

Le peas’n rice est le plat le plus classique de la cuisine locale. Le riz est préparé avec des pois, puis cuisiné avec des tomates, relevé d’épices et d’oignons, avec parfois du bacon. C’est un plat peu cher et nourrissant qui est fort populaire. Il accompagne presque toujours le plat principal, de viande ou de poisson. Sinon le fire engine – que l’on peut littéralement traduite par "camion de pompier" – est un plat composé de corned-beef longuement mijoté, servi avec du riz blanc. La souse est une soupe traditionnelle dont les ingrédients (oignon, céleri, viande ou poulet, pied de cochon ou langue de mouton ou queue de bœuf et poivrons) cuisent longuement dans l’eau.

Le dimanche, le petit déjeuner bahaméen se compose très souvent du boiled fish, une savoureuse soupe de poisson (généralement de mérou), sans oublier la soupe calalou, un potage crémeux et de porc salé, parfois garni de chair de crabe. Ce crustacé est d’ailleurs très populaire et on se sert de sa carapace pour le garnir de chair de crabe que l’on fait gratiner au four, sous le nom de baked crab. Les grouper fingers sont des filets débités en lamelles et frits en beignets servis en hors-d’œuvre. En guise d’accompagnement, en plus du riz, on sert également de l’igname rôti, de la patate douce, de la banane plantain frite et bien sûr de l’arbre à pain sauté.

Quelques gourmandises bahaméennes

La pâtisserie la plus connue est le Johnny cake, un petit pain de farine cuit à la poêle qui tirerait son nom de l’habitude que les marins avaient de l’emporter au cours de leurs voyages en mer ou « journey » on l’appelait alors le « journey cake ». Sa forme arrondie lui vaut d’être également appelé pain de lune. Il accompagne volontiers le petit déjeuner. Le duff à la goyave est un pudding bouilli, anglais d’origine, une espèce de gâteau roulé à la confiture de goyave, avec de la cannelle et de la muscade. Long à préparer et peu courant, il est souvent l’invité des tables de fête. Profitez de l’occasion si vous en croisez un sur une carte. La crème glacée à l’anone est également une gourmandise très prisée.

Les boissons: entre rhum et fruits exotiques

Les fruits exotiques pleins de saveur et de vitamines se consomment en jus servis bien frais : mangues, fruits de la passion, goyaves, corossols, etc. Sans oublier l’eau de coco délicieusement rafraîchissante qui est servie nature ou avec du lait et du gin. On peut aussi citer le switcha, une citronnade faite avec le jus de différents citrons locaux. Les deux bières locales sont des blondes qui répondent aux doux noms de Kalik ou de Sands, très légères et blondes.

Le rhum est la boisson nationale par excellence. Tous les degrés existent de 40° à 80°. Le rhum bahaméen est le John Watlings. Il existe en version aromatisée au coco ou à la banane de la marque Ricardo. Si vous voulez apparaître comme un connaisseur, vous ne boirez du rhum qu’après le coucher du soleil comme le veut la coutume locale. On trouve aussi de la liqueur, Nassau Royale, qui est l’un des ingrédients de nombreux cocktails. De ce côté la carte est bien fournie, rhum et fruits obligent. On retrouve le Planteur (jus de lime, rhum et triple sec), le Bahama Mama (rhum de canne et rhum de coco, jus de citron, d’ananas, d’orange et grenadine), le Yellowbird (rhum blanc, liqueur de banane, Brandy d’abricot, jus d’ananas) ou encore le Goombay Smash (rhum, rhum de coco, jus d’ananas, de citron, triple sec).

Restauration et habitudes alimentaires

Influence américaine oblige, les Bahaméens ont une fâcheuse tendance à manger rapidement et à privilégier toutes les formes de restauration pratique. Ils mangent un peu n’importe où, sur un quai, sur une plage, dans une voiture. Ils sont nombreux à fréquenter les cafétérias et fast-foods. La cuisine à emporter a aussi les faveurs d’un grand nombre. Beaucoup de restaurants proposent une formule take away (à emporter) et un service de livraison à domicile. Sur les Out Islands, de petits kiosques de nourriture à emporter ou à consommer sur place fleurissent en fin de journée.

Le développement touristique a popularisé de nombreuses spécialités de la cuisine internationale. Pizzas, hamburgers, sushis sont communs sur les cartes des restaurants et que les inconditionnels se rassurent, les enseignes de fast-foods à l’américaine ne manquent pas. Et si la gastronomie bahaméenne mérite toute votre attention, on retrouve également d’exquises surprises entre cuisine du monde et grands classiques des Antilles, faisant des Bahamas une terre propice pour la fusion food, notamment dans les grands hôtels qui abondent dans l’archipel.