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Diversité des origines

Les vestiges amérindiens sont d’une exceptionnelle richesse esthétique. Les céramiques les plus anciennes appartiennent au style koriabo. Ce style, associé à la phase d’immigration karibe du XIIe siècle, se caractérise par des incisions ornementales, des motifs zoomorphes et anthropomorphes d’inspiration fantastique. La période Aristé, comprise entre le XVe et le XVIIe siècle, est marquée par un art funéraire élaboré : décor polychrome et motifs géométriques soulignent les figures ornant les urnes funéraires de cette époque.

De nos jours, sept peuples amérindiens vivent en Guyane, parmi lesquels les Wayanas et les Apalais. Enraciné dans leurs cultures, l’art du ciel de case né au XIXe siècle est devenu un emblème de la culture guyanaise. Bien que symbolique, il connaît depuis peu une popularisation à double tranchant. Un mythe est à l’origine de cette tradition picturale. Il nous parle d’un homme parti à la chasse qui se perd en forêt. Attiré par une musique, il s’approche et est invité par un vieil homme à boire du cachiri. Celui-ci l’initie aux motifs du ciel de case, surtout des monstres aquatiques, qu’il ne faut pas trop regarder sous peine d’être dévoré.

Parmi les nombreux monstres aquatiques de la mythologie wayana, le plus connu est le tulupele. Mi-chenille, mi-jaguar, il empêchait l’accès à la rivière jusqu’à ce que les Indiens fassent la paix et s’allient pour combattre la créature. D’autres animaux du bestiaire wayana embellissent le ciel de case aux côtés des guerriers mythiques : le poisson coumarou, le crapaud, la poule, le tamanoir, la tortue ou encore le serpent.

Dotées de pouvoirs magiques, ces œuvres participent à la protection de la communauté. C’est pourquoi les Wayana n’approuvent pas que les non-initiés confectionnent des ciels de case. Préserver cet art reste un enjeu crucial en Guyane.

Art Tembé

Les bushinengé, encore appelés « noirs marrons », descendent des esclaves africains qui ont fui les propriétés coloniales du Suriname entre le milieu du XVIIe et la fin du XVIIIe siècle. L’art noir-marron, ou tembé, prend sa source en Guyane autant qu’au Suriname. Il regroupe la peinture et la sculpture, qui sont l’apanage des hommes ; la couture tembé étant plutôt pratiquée par les femmes. L’art tembé a tout d’abord ornementé les objets du quotidien avant de passer au format des tableaux. Cependant, les motifs de même que leur signification ne changent pas. Dans les mariages traditionnels, les mariés remettent à leurs épouses un tembé constitué d’entrelacs en signe de leur engagement.  

Les premières sculptures marronnes remontent au début du XIXe siècle : peignes, pagaies, bancs en bois pour l’essentiel. C’est avant tout un art du relief. Pour cela, l’outil est considéré comme l’élément fondateur du tembé. Sans l’instrument, la sculpture sur bois n’existerait pas. L’art marron, loin d’être un art primitif, intègre désormais la technologie en adoptant la tronçonneuse en sculpture ou les moteurs dans ses pirogues.  Dès leurs premières manifestations, au XXe siècle, les peintures tembé s’inscrivent dans la lignée de la sculpture sur bois en reprenant le motif de l’entrelacs combiné aux variations géométriques.

L’artiste-peintre guyanais Franky Amete est représentatif de l'art Tembé. Il se décrit comme un pont entre l’art traditionnel et l’art moderne.

De nos jours

Dans les petites galeries d'art guyanaises, on trouve un brassage d'œuvres modernes et traditionnelles. Des artistes guyanais de naissance ou d’adoption confrontent leurs visions du monde dans des lieux ouverts à tous. La maison culturelle Henri et Marcelle Prévot à Cayenne a ainsi mis en lumière l’artiste-peintre Bimo, originaire du Bénin, mais établi en Guyane. Ses peintures, sculptures et personnages habillés racontent des histoires pleines d’émotion sur le thème de la complexité des rapports humains. Bimo fait feu de tout bois, recyclant le matériel qu’il trouve pour composer des œuvres colorées, à dominante jaune, sa couleur fétiche.

La Galerie d’art K’AN dispose en plus de sa salle d’un atelier pour ceux qui souhaitent s’initier aux techniques du dessin, du modelage ou de la peinture. Peintre et sculpteur, Pat K’an sort diplômé de l’école Boulle en 1976. Mais c’est en autodidacte qu’il apprend la sculpture sur bois. Installé en France, il développe une activité d’artiste animalier tout en poursuivant son exploration de la figure humaine. Arrivé en Guyane en 1995, séduit par la variété des essences locales, il renoue avec la sculpture sur bois. Il ouvre un show-room qu’il transforme ensuite en galerie d’art destinée à faire connaître des artistes de Guyane et d’ailleurs.

L’artiste contemporain béninois Rafiy Okefolahan a présenté dans ses locaux l’exposition « KARNAVAL » qui regroupe des peintures de couleurs vives. Formé à Dakar, Rafiy se définit comme un plasticien pluridisciplinaire. Son travail est mis en valeur par plusieurs galeries européennes et africaines et séduit les collectionneurs en quête des talents de demain.

Hors les murs

Le tout jeune festival Atip’art est organisé par la ville en collaboration avec l’association Muzé Laru. Il s’agit du premier événement street art de Guyane. A cette occasion, des ateliers créatifs ont lieu dans le quartier Simko à Macouria. Les artistes ont collaboré avec les participants pour confectionner une sculpture cubique exposée dans la ville. C’est pour les jeunes Guyanais une opportunité inespérée de se familiariser avec la peinture et ses techniques aux côtés d’artistes expérimentés. Le street artiste Nicolas Quillot alias Scimo aime leur apprendre décalquer des éléments naturels, à la façon d’un pochoir inversé.

Sous la direction de graffeurs confirmés, les jeunes Guyanais ont embelli le collège Antoine Sylvère Félix à Soula. Ont participé les artistes Azer formé en Guadeloupe et Doudou Style, l’une des rares femmes du milieu. Dans ses célèbres trompe-l’œil, Doudou Style aime glisser des pandas, son animal totem.

Ne manquez pas les expositions Hors les Murs du Musée des cultures guyanaises. Le public a ainsi pu admirer les photographies de Frédéric Piantoni. Ses portraits racontent le destin d’individus venus s’installer en Guyane tandis que ses panoramas valorisent les charmes de cette terre méconnue. Une excellente première approche de la Guyane.