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La minorité hongroise

Du fait de leur nombre (environ 540 000 personnes), cette minorité, vivant sous la forme de diaspora est la mieux organisée du pays. Au niveau politique, les Hongrois de Slovaquie sont représentés par le Parti de la coalition magyare (conservateur autonomiste) et surtout par le parti Most-Híd (libéral de centre droit) membre de la coalition au pouvoir entre 2016 et 2020. Principalement installés dans le sud, le long du Danube, les Hongrois de Slovaquie disposent de nombreuses écoles maternelles, primaires et secondaires en langue hongroise, mais pas d’université enseignant uniquement en hongrois. La chaire de langue hongroise de l’université de Nitra n’a que 50 % de ses cours en langue hongroise. Les jeunes Hongrois faisant des études supérieures partent généralement en Hongrie et ont tendance à y rester après la fin de leurs études. Sur le plan des médias, la radiotélévision nationale slovaque RTVS émet 35 heures par semaine en hongrois, et il existe de nombreuses radios, chaînes de télévision et une quinzaine de journaux en langue hongroise.

Des relations politiques tendues

L’histoire a lié de façon durable le destin des Slovaques, dominés pendant neuf cents ans par les Hongrois. Le traité de Trianon en 1920 vient officialiser la dislocation de l’Autriche-Hongrie à la fin de la Première Guerre mondiale. La carte est redessinée et la Tchécoslovaquie naît en récupérant certains territoires à majorité hongroise, notamment au nord du Danube. Dans ces zones mélangées, la cohabitation se déroule sans heurts. Komarno et Štúrovo connaissent, par exemple, un nombre de mariages mixtes record dans des villes où tous les habitants parlent deux langues, sans aucune tension. Les Slovaques ont acquis au fil du temps le fait que plus on va vers le sud, plus on parle hongrois. C’est au niveau diplomatique que les relations sont plus compliquées. Ce thème est instrumentalisé par les politiques et, tel un match de ping-pong, les dirigeants populistes des deux pays s’invectivent à tour de rôle en jouant sur cette corde nationaliste. Chacun y va de sa sortie médiatique pour défendre son camp en s’appuyant sur certaines blessures historiques non cicatrisées du passé menant à une certaine polarisation.

Les Tchèques

Cette minorité représente 0,8 % de la population slovaque. Parfaitement intégrés, les Tchèques ont une langue proche et un fond culturel commun avec leur sœur slovaque. Des liens étroits unissent ces deux nations et traditionnellement, le président slovaque nouvellement élu effectue sa première visite officielle chez son homologue tchèque. De nombreux étudiants slovaques vont étudier dans des universités tchèques de Brno ou de Prague et de nombreux Slovaques ont de la famille de l’autre côté de la frontière. En effet, lors du « divorce de velours », il était possible de choisir entre la nationalité tchèque ou slovaque. Tous les Slovaques comprennent le tchèque grâce notamment à la télévision qui propose de nombreux films en langue tchèque, principalement par souci d’économie. Même si une rivalité historique existe, notamment dans le sport, avec un léger complexe d’infériorité du côté slovaque, ces deux peuples entretiennent des relations privilégiées.

Les Ruthènes

Cette minorité peu connue représente seulement 0,4 % du total de la population slovaque avec environ 33 000 membres déclarés. Ce peuple au territoire bien délimité, désigné sous le nom d’Ukraine subcarpatique, se trouve aujourd’hui pour une grande partie en Ukraine occidentale autour de Lviv et pour une petite partie à l’est de la Pologne, de la Hongrie, de la Slovaquie et au nord de la Roumanie. L’histoire de cette nation a une trajectoire similaire à celle de la Slovaquie, sauf qu’elle n’a jamais réussi à fonder son propre État. Tout comme la Slovaquie, la Ruthénie a été sous influence hongroise du XIVe siècle à 1918, date de la chute de l’Empire austro-hongrois. Les Ruthènes demandent ensuite à être intégrés à la Tchécoslovaquie tout en demandant une certaine autonomie. Le traité de Saint-Germain-en-Laye de 1919 entérine ce souhait. La première République tchécoslovaque, démocratie parlementaire, était divisée en quatre zones, la Bohême, la Moravie-Silésie, la Slovaquie et la Ruthénie subcarpatique, chacune disposant d’autonomie culturelle, notamment au niveau des langues administratives. Le début de la Seconde Guerre mondiale marque un tournant, la Tchécoslovaquie est démembrée et la Ruthénie déclare son indépendance pour… seulement quatre jours, avant l’arrivée des armées nazies, qui la rattachent de nouveau à la Hongrie d’Horthy, alliée d’Hitler. Les Ruthènes participent ensuite au sein des armées tchécoslovaques à la libération du pays, notamment au col de Dukla, près de Svidník. Après la guerre, l’URSS redessine les frontières et s’adjuge la partie orientale de la Slovaquie, dont Oujhorod (aujourd’hui en Ukraine), capitale régionale de Ruthénie, pour avoir une frontière directe avec la Hongrie. L’unité territoriale de la Ruthénie a éclaté et sa nation est petit à petit tombée dans l’oubli. Pourtant cette communauté qui compte encore aujourd’hui environ 700 000 représentants a sauvegardé sa culture ancestrale. Ruthènes signifie « Petits Russes ». Ce vocable désignait jusqu’au XIXe siècle les habitants de la Rous, territoire du prince de Kiev au Moyen Âge. Les Ruthènes furent d’abord appelés Roussènes ou Russiens, nom qui désignait l’ensemble des Ukrainiens. Aujourd’hui la majorité des Ruthènes vivent à l’ouest de l’Ukraine et parlent une langue très proche de l’ukrainien. Ils utilisent l’alphabet cyrillique, mais sont de confession gréco-catholique (uniate), à la différence des Ukrainiens pour la plupart orthodoxes. Dans les confins orientaux de la Slovaquie, aux frontières avec la Pologne et l’Ukraine, on retrouve cette minorité officielle et parfaitement intégrée. Elle continue de publier deux journaux dans sa langue, tandis que la télévision et la radio nationale diffusent des émissions en ruthène.