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L’Estonie et la Lettonie, majoritairement protestantes

La Lettonie a été christianisée assez tardivement. Aujourd’hui, le protestantisme luthérien est la religion la plus importante. Les catholiques sont concentrés à l’est du pays, en Latgale (influence polonaise). L’Église orthodoxe trouve ses fidèles dans l’importante communauté russophone. La Lettonie compte également six communautés juives.

Quant à la religion dite « ancienne » (ou, en letton, Dievturiba), qui ressemble fortement à celles des Celtes, elle est encore très présente. Il en va de même des traditions quotidiennes. Le point fort de ses cérémonies est le solstice d’été (Ligo, durant le week-end le plus proche du 24 juin). Les vivre sur un des lieux saints anciens (Drusti en Lettonie) vaut largement un séjour de quelques jours. L’être mythique principal du paganisme letton, notamment chanté dans les chansons folkloriques, est Dievs – Dieu, dans lequel sont combinées des notions préchrétiennes et chrétiennes. Dievs reste avec les hommes tout au long de leur vie, mais la déesse Laima est celle qui décide principalement du destin d’un homme. Laima et la déesse Māra sont les principales protectrices des filles orphelines, jeunes mariées, femmes enceintes et des femmes en général. Dans les chansons folkloriques, la nature est personnifiée par plusieurs personnages maternels, dont les principaux sont : Vēja māte – la mère des Vents, Meža māte – la mère Forêt, et Jūras māte – la mère des Flots. Le royaume des morts est régi par Zemes māte – la mère Terre ou Veļu māte – la mère des Âmes.

L'Estonie est considérée comme le moins religieux des trois pays baltes. Les cultes les plus pratiqués en Estonie sont, dans l’ordre d’importance, les religions luthérienne, orthodoxe et baptiste. De la période de domination soviétique on retiendra un personnage important qui a marqué l’histoire de la ville de Tallinn : l’évêque Alexi. Il fut nommé en 1962 à l’âge de 32 ans. Fils d’un vieil aristocrate allemand et d’une Russe pure souche, il a grandi dans un environnement bilingue, ce qui a poussé les autorités à s’intéresser à lui. Il a notamment protégé de l’expulsion les religieuses du couvent de Kuremä. Dans les années 1980, il a tenu un rôle important à la Conférence des Églises d’Europe. La confession orthodoxe est représentée par la communauté russophone de l'Estonie. En 1997, l’Église orthodoxe a été officiellement reconstituée derrière l'archevêque d’Helsinki. L'Estonie compte une minorité religieuse : les Vieux Croyants qui fuirent les persécutions suite aux réformes de l'Église orthodoxe auxquelles ils ne voulaient pas adhérer. Certains s'établirent sur la rive ouest du Lac Peipus, et sont toujours là. Les villages sont connectés par la « Route de l'Oignon » (spécialité de la région), entre Mustvee et Varnja.

La cathédrale de Rīga

À Rīga, la cathédrale de la Nativité, construite par Nikolai Chagin dans le style néobyzantin entre 1876 et 1883, a été bâtie pendant la période durant laquelle le pays faisait encore partie de l’Empire russe. C’est aujourd’hui encore la plus grande cathédrale orthodoxe des pays baltes. Petite anecdote, lors de la Première Guerre mondiale, les troupes allemandes occupèrent Rīga et ont détourné cette grande cathédrale orthodoxe russe en une église luthérienne. Une fois les troupes parties, elle redevient orthodoxe en 1921. Au début des années 1960, les autorités soviétiques ont fermé la cathédrale et converti le bâtiment en planétarium. La cathédrale a ensuite été restaurée une fois que la Lettonie a gagné son indépendance de l’Union soviétique en 1991.

Lituanie : des sites païens au catholicisme

Les Lituaniens, de forte tradition païenne, idolâtrant les forces de la nature, ont été les derniers peuples d’Europe à être christianisés de force, dès le XIVe siècle, par le grand-duc Mindaugas, du fait de son alliance avec la Pologne catholique. L’appartenance à l’empire tsariste y a apporté la religion orthodoxe, déjà implantée en Lituanie depuis le XIVe siècle à la suite de son rapprochement avec Constantinople. Il faut souligner également la présence importante de la religion juive en Lituanie, Vilnius était appelé la « Jérusalem du Nord » jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. Après l’extermination de la population juive par les nazis (250 000 personnes), elle reprend peu à peu de son influence depuis l’indépendance.

La Lituanie est sûrement le plus religieux des pays baltes. Les Lituaniens étaient encore païens jusqu’au XIVe siècle, quand ils adoraient Perkūnas, le dieu du Tonnerre. Ensuite, ils devinrent des catholiques loyaux, mais beaucoup parlent avec une teinte de regret de la perte de leurs rituels païens. Les catholiques y sont majoritaires (80 %) comme chez sa voisine la Pologne. L’Église orthodoxe y est représentée, de même que le sont les luthériens, les évangélistes, les baptistes, l’islam et le judaïsme. L’Église, en Lituanie, est séparée de l’État et les adeptes de toutes les religions y sont égaux devant la loi. Depuis l’indépendance, et afin de refaire de Vilnius un des centres religieux importants d’Europe, les Églises (catholiques en particulier) ont bénéficié de nombreux subsides. Symbole de cette renaissance, le voyage officiel que le pape Jean-Paul II a fait en Lituanie, en 1993.

Pourtant, jusqu’à leur christianisation tardive, les Lituaniens, comme tous les peuples baltes, vénéraient les forces de la nature. Autour de Dievas, le dieu-père, les divinités étaient nombreuses, représentant chaque élément et phénomène naturel. La plus populaire de ces figures est probablement Perkūnas, le dieu du Tonnerre, encore célébré aujourd’hui par la présence de totems. Les Lituaniens vénéraient aussi le feu (la pratique de la crémation était courante). À lire, l’ouvrage d’Algirdas Julien Greimas sur la mythologie lituanienne, Des dieux et des hommes, publié aux PUF. Initiant un mouvement de fond dans l'Europe, les Lituaniens ont accueilli en 1998 le premier rassemblement mondial des religions ethniques (World Congress of Ethnic Religions).

Les fêtes de Noël

La lumière est un élément central dans la vie lettone. En décembre, il ne fait jour que vers 10h du matin, et la nuit tombe vers 15h… Mais dans l’obscurité brillent des milliers de bougies, de guirlandes ou de petites lampes accrochées aux fenêtres, sur les sapins, dans les vitrines des magasins. Dans les temps « antiques », la lumière était un symbole divin. Elle était liée à tous les rites du printemps et de l’été : lorsque les Lettons travaillaient aux champs, la lumière signifiait que le soleil était bien là et pourvoirait à tous leurs besoins. Au début du mois de décembre, presque chaque maison lettone se pare d’une sorte de petit sapin de lumière, formé de bougies électriques disposées en triangle. Dans la nuit, toutes ces petites pointes lumineuses donnent l’impression qu’un génie bienfaisant veille sur le logis, et que le voyageur sera toujours bien accueilli. C’est un peu comme si la personne qui avait allumé ces bougies s’adressait à chaque passant pour lui souhaiter un joyeux Noël. Mais apparemment, cela vient de la tradition chrétienne. Le sapin, comme le marché de Noël, est une « invention » allemande. Les fleuristes vendent des couronnes de l’avent, de toutes les tailles, en sapin, en bois, en mousse, décorées de pommes de pin, de boules de Noël, de marrons et de toutes sortes de bougies. La couronne de l’avent représente la conception cyclique du temps. Le principe est de laisser se consumer une bougie chaque dimanche précédant Noël, et c’est dès le premier dimanche que l’on installe le sapin. Les cadeaux sont déposés au fur et à mesure sous le sapin, mais tout doit être prêt pour le dernier dimanche de l’avent. C’est traditionnellement le Père Noël qui les distribue.

La société lettone, bien que christianisée, est donc en quelque sorte partagée entre ceux qui suivent les rites catholiques, orthodoxes ou protestants, et vont par exemple à la messe (c’est en général le cas des adultes), et ceux qui préfèrent la tradition païenne. Les enfants y sont très tôt initiés, car leurs parents considèrent qu’il est important de perpétuer ces rites. Aussi, à l’école maternelle, des défilés costumés sont organisés, comme pour un carnaval. Les déguisements rappellent symboliquement la vie, la mort ou la nature (animaux, etc.). Le choix entre les deux dépend des goûts, de l’éducation, mais il est très en vogue de préférer la tradition païenne, « plus authentique ». Cette tradition se retrouve jusqu’à la Saiema, le Parlement letton. Des groupes folkloriques viennent entraîner les députés dans leurs rondes. Par leurs chants, leurs danses autour du bâtiment et l’usage d’un gros morceau de bois, ils chassent les problèmes du lieu autour duquel ils dansent. Le bout de bois est ensuite brûlé en grande pompe. Sur le plan gastronomique, il n’existe pas réellement de plat traditionnel, à part peut-être, à la campagne, le museau de cochon accompagné de choucroute et de pommes de terre. Chaque famille invite symboliquement les quatre frères du « festival de l’hiver » (Ziemassvetki) chez elle pour un festin de porc et de pois gris, presque noirs, qui représentent des larmes. Il faut manger tous les pois qui sont dans l’assiette, sinon « ce sont les larmes qui restent ». En plus des gâteaux habituels et des fruits, on prépare des piparkukas, sorte de petits pains d’épice de toutes les formes, accompagnés de vin chaud. Les fêtes sont particulièrement l’occasion, pour le « peuple chantant », de déployer ses talents artistiques : à Noël, on chante et on danse, surtout en famille. Il s’agit avant tout de se rassembler, dans une atmosphère pacifiée, de vérifier que tout va bien. Les cadeaux sont offerts indépendamment de la conduite de chacun (et notamment de la réussite scolaire, pour les enfants), c’est une sorte de « crédit de confiance », une chance de tout recommencer à zéro. La nuit de Noël est la plus longue de l’année. Elle signifie que les jours vont bientôt rallonger et, dans cet esprit, on ne se couche pas. Il faut goûter le cycle éternel de la nature, du temps, de l’année qui recommence. On dit que la nature « se tourne de l’autre côté » juste ce jour-là.