Néolithique

L’Homme de Néandertal aurait commencé à naviguer entre les îles il y a 100 000 ans mais il faut attendre la fin de la dernière ère glaciaire, il y a 11 700 ans, pour qu’Homos sapiens s’installe véritablement sur ces terres. Les îles du nord-Égée portent la trace des premiers habitants néolithiques dans quelques sites exceptionnels, à l'organisation sociale et urbaine poussée pour la période. Il s'agit notamment du site de Poliochni, sur l'île de Lemnos, qui constitue la plus ancienne "ville" organisée excavée en Europe (Ve-IIe millénaires av. J.-C.) ou encore du site fortifié de Palamari, sur l'île de Skyros, admirablement conservé (IIIe-IIe millénaires av. J.-C.).

3200-2000 av. J.-C

Cyclades : la civilisation des idoles

Vers 3 200 avant notre ère débute l’helladique, c’est-à-dire la protohistoire grecque, période qui s’étend jusqu’au Xe siècle av. J.-C. Les Cyclades ne sont pas encore entrées dans l’âge du bronze qu’elles donnent naissance à la première « civilisation » grecque. D’Antiparos à Syros en passant par Milos et Amorgos, on retrouve les mêmes statuettes polies aux traits émaciés. Admirez ces idoles au musée d'Art cycladique, à Athènes : leurs lignes sont si pures que ceux qui les découvrirent au XIXe siècle imaginaient qu’il s’agissait d’une production nettement plus tardive, de la période archaïque. Il faut attendre un siècle pour que l’on se rende compte que ces œuvres dignes de Picasso sont bel et bien préhistoriques. Depuis, on ne cesse d’en apprendre davantage sur ce peuple de marins et de commerçants dont on retrouve la trace jusqu’en Serbie.

Statuettes d'art cycladique © GEORGIOS GKOUMAS - Shutterstock.com.jpg

2700-1200 av. J.-C.

Les Minoens : une histoire à réécrire

Installée en Crète et à travers la mer Égée, la civilisation dite minoenne a inventé les premiers alphabets grecs, laissé de nombreux vestiges et disparu vers 1200 avant notre ère. En l’état actuel des recherches, voilà à peu près tout ce que l’on sait. Tout le reste est remis en cause aujourd’hui : ce peuple ne s’appelait pas les Minoens, n’était pas une thalassocratie, ne possédait pas de palais, etc. Le Britannique Sir Evans, principal découvreur de cette civilisation en 1900, est parti d’un raisonnement faux : les Minoens sont les descendants du mythique roi Minos. En fait, les Minoens s’appelaient sans doute les Kaphti, ils n’avaient pas de roi et leur organisation ne reposait pas sur des palais, mais sur des greniers à blé où convergeait une société semble-t-il très égalitaire. En 2012, l’État grec a bien lancé un projet pour tout reprendre à zéro, mais les financements ne suivent pas. En attendant, à Knossos (Crète), on visite toujours l’improbable reconstitution d’un « palais » qui n’a jamais existé.

Femmes minoennes © Grafissimo - iStockphoto.com.jpg

1650-1100 av. J.-C.

Les Mycéniens : les mythes du Péloponnèse

Implanté surtout dans le Péloponnèse, ce peuple appelé les Achéens par Homère est lui aussi un mystère. À Mycènes, lorsque les premiers savants découvrent les murs cyclopéens, les tombes circulaires et la porte des Lionnes, ils sont si impressionnés que toute une civilisation est baptisée « mycénienne ». Là encore, Sir Evans va mettre la recherche sur une fausse piste, en imaginant la fondation d’un royaume mycénien par les Minoens. Il est vrai, la civilisation crétoise a dominé les échanges avec la Grèce continentale, lui transmettant au passage son alphabet, le « linéaire B ». Mais, pour le reste, c’est encore très flou. Durant l’Antiquité, les Grecs eux-mêmes s’interrogèrent sur les ruines héritées des Mycéniens, disparus vers 1100 av. J.-C. Faute de réponse, ils créèrent des mythes en attribuant aux Cyclopes la construction des énormes murs de pierre, en faisant de Persée le premier roi de Mycènes, etc.

1300-900 av. J.-C.

Siècles obscurs : les premiers sanctuaires

Longtemps méconnue, la période qui va de la fin des Mycéniens au début de l’Antiquité bénéficie à présent d’un nouvel éclairage. Durant ces quatre siècles dits « obscurs », certes la population de la Grèce a baissé et la connaissance de l’écriture s’est perdue, mais les arts n’ont cessé d’évoluer (périodes orientaliste, proto-géométrique et géométrique) et les hommes ont continué de bâtir des temples, dont ceux à l’origine des sanctuaires de Délos et d’Olympie. Et, surtout, les chercheurs ont mis fin à des affirmations selon lesquelles Minoens et Mycéniens auraient disparu à cause d'un cataclysme (l’éruption de Santorin), d’une invasion (les semi-légendaires Doriens) ou de révoltes (contre des régimes supposés tyranniques). Aucune de ces hypothèses n’est plus avancée, mais plusieurs facteurs combinés sont envisagés.

VIIIe-Ve siècles av. J.-C.

Période archaïque : l’émergence des cités

La période archaïque marque le début de l’Antiquité. Au sortir des "siècles obscurs", les Héllènes sont présents en Grèce, mais aussi en Asie Mineure (actuelle Turquie) et à Chypre. Alors que les Phéniciens fondent Carthage (814 av. J.-C.) et dominent la Méditerranée, les Grecs se tournent vers eux pour retrouver la maîtrise de l’écriture. L’alphabet phénicien est modifié avec l’ajout des voyelles : c’est le premier alphabet complet, plus tard adapté par les Romains. Cette révolution en annonce d’autres. La population du monde grec croît et l’agriculture est florissante. Le commerce se développe, mais il faut attendre 650 av. J.-C. pour que les Grecs de Lydie (actuelle Turquie) frappent la première monnaie hellène. Au VIIIe siècle av. J.-C. naissent des cités indépendantes. Elles ne comptent encore que de 500 à 1 500 habitants et restent dominées par l'aristocratie. Toutefois, au VIIe siècle av. J.-C., plusieurs villes commencent à réduire les privilèges de la noblesse. Sous l’influence de penseurs comme l’Athénien Solon, la politique devient l’affaire d’un plus grand nombre. Les prémices de la citoyenneté permettent l’émergence au VIe siècle av. J.-C. de la polis : une cité-État dirigée par et pour ses habitants. Le citoyen acquiert des droits, mais aussi des devoirs, comme la conscription obligatoire. La taille des armées augmente, débouchant sur l’invention de la phalange hoplitique : des fantassins lourdement armés (hoplites) qui avancent en rangs serrés. Les cités se font conquérantes et, face à leur accroissement démographique, créent des colonies. De la mer Noire à Marseille, le monde grec connaît une expansion immense. Au contact des Phéniciens, des Syriens et des Égyptiens, la philosophie grecque prend forme (VIe siècle av. J.-C.) et l’art fait un bond phénoménal : les massives statues de kouros (jeune homme) et de koré (jeune fille) apparaissent dans les Cyclades au VIIe siècle av. J.-C., les peintres délaissent les formes géométriques au profit du figuratif, la poésie se développe sous l’influence des récits homériques. La religion et la mythologie constituent avec la langue le socle commun d’un monde grec par ailleurs très divisé. Les conflits sont en effet nombreux, surtout entre Athènes et Sparte qui cherchent à contrôler le Péloponnèse.

Ve-IVe siècles av. J.-C.

Époque classique : l’âge d’or grec

Tout commence avec les guerres médiques (490-479 av. J.-C.). Face aux Perses (alors appelés les Mèdes) qui soumettent les Grecs d’Asie Mineure, les cités rivales s’unissent. En 490 av. J.-C., les Athéniens écrasent les troupes de Darius à Marathon. En 480 av. J.-C., 300 Spartiates dirigés par le roi Léonidas se sacrifient aux Thermopyles, avant que la flotte grecque l’emporte à Salamine. Enfin, le 27 août 479 av. J.-C., les hoplites athéniens confirment la défaite perse lors de la bataille de Platées. Cette victoire permet l’émergence de la démocratie à Athènes en 510 av. J.-C. La cité est alors riche et puissante. Sa réussite repose sur la maîtrise de la mer. Avec son port du Pirée, sa flotte commerciale et ses galères de combat (les trières), Athènes exerce une véritable hégémonie sur le monde grec. Depuis la fin des guerres médiques, elle dirige la ligue de Délos, alliance regroupant une partie des cités contre les Perses. Progressivement, Athènes se comporte de manière impérialiste envers la ligue, confisquant le trésor commun prévu en cas de guerre. Cet argent sert pour financer, entre autres, le Parthénon, achevé en 432 av. J.-C. Sparte redoute que l’empire athénien lui fasse perdre le contrôle du Péloponnèse. C’est ainsi qu’éclate la guerre du Péloponnèse (431-404 av. J.-C.). Le conflit embrase l’ensemble du monde grec, opposant presque toutes les cités rangées soit du côté de Sparte, soit du côté d’Athènes. Cette dernière semblait avoir l’avantage avec sa flotte, son alliance et son stratège Périclès. Malgré de brillantes victoires, Athènes est affaiblie par une épidémie de peste et par la désastreuse expédition de Sicile (413 av. J.-C.). La victoire de Sparte n’est toutefois pas totale, puisque Thèbes et Corinthe apparaissent comme ses nouvelles rivales. Mais elle se traduit pour Athènes par la disparition de son empire et par la fin de la démocratie, remplacée par un régime tyrannique. Pendant deux siècles, Athènes a prospéré, sa population a doublé (400 000 habitants au début du Ve siècle av. J.-C.) et, surtout, elle a joué un rôle moteur dans le développement des arts, des sciences et de la philosophie.

Bataille de Marathon en - 490 © Grafissimo - Shutterstock.Com.jpg

510 av. J.-C

Naissance de la démocratie à Athènes

Paradoxalement, ce sont les Spartiates qui ont permis la naissance de la démocratie, en aidant les Athéniens à renverser le tyran Hippias en 510 av. J.-C. Aussitôt, le réformateur Clisthène établit les bases du régime : une écclésia (assemblée) composée de citoyens égaux qui votent les lois et parmi lesquels sont tirés au sort les 500 membres de la boulè (conseil) chargés de rédiger les lois. Mais sur environ 200 000 habitants à l’époque de Clisthène, seuls 10 % sont citoyens : esclaves, métèques (non-Athéniens) et femmes n’ont pas le droit de vote. La démocratie va toutefois faire tache d’huile de Kos à Rhodes en passant par Cyrène (Libye) et Syracuse (Sicile). D’autres villes optent pour le second grand modèle politique grec, celui de Sparte. Lui aussi garantit l’égalité, mais selon un mode de vie collectif et militaire, aux dépens des arts et des libertés individuelles, et en conservant certains aspects de la tyrannie.

461-431 av. J.-C

Le siècle de Périclès

Cet âge d’or atteint son apogée pendant ce qu’on appelle le « siècle de Périclès » (461-431 av. J.-C.). La cité compte alors des hommes remarquables tels les historiens Thucydide et Hérodote ou le sculpteur Phidias, auteur du Parthénon. Elle est le foyer des philosophes Platon et Socrate, d’orateurs comme Protagoras (mouvement des sophistes), des dramaturges Eschyle, Euripide et Sophocle. La ville attire aussi le mathématicien Pythagore et le médecin Hippocrate. Malgré la fin de la démocratie, la cité continuera de rayonner, avec le sculpteur Praxitèle ou le philosophe Aristote, précepteur d’Alexandre le Grand.

359 av. J-C.

Le règne de Philippe II de Macédoine

Depuis la fin de la guerre du Péloponnèse, des conflits entre Thèbes, Athènes et Sparte fragilisent les cités. Cela profite au royaume de Macédoine, situé au nord de la Grèce. Fondée au VIIIe siècle av. J.-C., la dynastie des Argéades est originaire d’Argolide (Péloponnèse). Mais la population macédonienne est perçue comme « barbare », c’est-à-dire non-grecque. À partir de 359 av. J.-C., Philippe II de Macédoine soumet les peuples voisins (Illyriens, Thraces…), puis s’empare des colonies athéniennes de Macédoine (354 av. J.-C.). Les redoutables phalanges macédoniennes sont ensuite appelées par Thèbes, et la Thessalie est intégrée au royaume. Les cités tentent des alliances, résistant aux Macédoniens tant par les armes que par de violents discours (Les Philippiques du tribun athénien Démosthène). Philippe l’emporte toutefois lors de la bataille de Chéronnée en 338 av. J.-C. Contrôlant toute la Grèce à l’exception de Sparte, il propose une union sacrée afin de libérer les cités d’Asie Mineure sous contrôle perse. Mais Philippe meurt assassiné en 336 av. J.-C.

356-323 av. J.-C.

Alexandre le Grand

Macédonien de langue grecque et élève du philosophe Aristote, le plus grand conquérant de l’histoire n’était pas considéré comme grec par la plupart des Grecs de l’Antiquité. Et son héritage est aujourd’hui revendiqué autant par la petite Macédoine du Nord voisine que par les Iraniens, les Afghans ou les Égyptiens. Tout cela fait d’Alexandre le Grand le personnage le plus universel de l’histoire grecque. Il a changé le monde ne serait-ce qu’en faisant disparaître l’Empire perse, ennemi héréditaire des cités grecques. Mais, surtout, ses campagnes ont diffusé l’hellénisme jusqu’à l’Inde. Et si son vaste empire s’est effondré aussitôt après sa mort, ses diadoques (généraux) ont fondé des dynasties de l’Égypte au Moyen-Orient qui ont perduré trois siècles et donné naissance à une nouvelle culture gréco-orientale. Celle-ci servira de socle aussi bien aux Romains qu’aux Byzantins et aux Ottomans.

Alexandre Le Grand © marekuliasz - Shutterstock.com.jpg

IIIe av. J.-C.

Epoque hellénistique : l’héritage d’Alexandre

Le plus célèbre des conquérants n’a que 20 ans quand il succède à son père. Après avoir maté une révolte des cités, Alexandre le Grand reprend l’idée d’une union sacrée contre les Perses. En mai 334 av. J.-C., une armée de 45 000 Macédoniens, Grecs et Barbares débarque en actuelle Turquie. Les troupes de l’empereur perse Darius III sont vite mises en déroute. Alexandre descend vers l’Égypte, où il est fait pharaon et fonde Alexandrie (331 av. J.-C.). Il fonce ensuite vers le cœur de l’Empire, capture Babylone et Persépolis, puis, à l’été 330 av. J.-C., il succède à Darius III qui vient d’être tué. Le jeune Macédonien se lance vers l’Inde. La vallée du Penjab, puis celle de l’Indus sont prises. Alexandre n’ira pas plus loin. Au printemps 325 av. J.-C., face à la grogne de ses soldats, il regagne sa capitale, Babylone. Là, entouré de sa femme Roxanne, de maîtresses et d’amants, il est pris dans une tourmente de rivalités, jalousies et révoltes. Il meurt, sans doute empoisonné, le 11 juin 323 av. J.-C. Son empire se disloque aussitôt. Mais ses généraux, les diadoques, créent des dynasties hellénistiques, dont trois vont durer jusqu’à l’arrivée de Rome. En Égypte, Ptolémée fonde le royaume des Lagides qui s’éteint à la mort de Cléopâtre (30 av. J.-C.) et où Alexandrie remplace Athènes comme capitale culturelle du monde grec. Au Moyen-Orient, Seleucos érige l’immense Empire séleucide. La Grèce elle-même est longtemps disputée avant que la dynastie des Antigonides s’impose au IIIe siècle av. J.-C. Tandis que les villes macédoniennes de Pella et de Thessalonique émergent comme centres politiques, Sparte et Athènes résistent.

215-148 av. J.-C.

Les guerres de Macédoine

C’est au prétexte de « libérer les Grecs » que Rome déclenche les guerres de Macédoine (215-148 av. J.-C.). Pendant près de 80 ans, quatre conflits opposent les Romains aux Antigonides. Ces derniers bénéficient du soutien de Carthage et de l’Empire séleucide avant de se retrouver isolés. Quant à Rome, au départ, elle n’est qu’une petite puissance. Mais elle est fascinée par la culture grecque et va se lancer dans la conquête des cités. Ces dernières se rallient tantôt à un camp, tantôt à l’autre. Toutefois, les Grecs penchent de plus en plus pour Rome. La République du Latium devient leur premier partenaire économique et, surtout, elle a prouvé son amour de l’hellénisme en adoptant les dieux de l’Olympe. Ainsi, lors de la Quatrième Guerre de Macédoine (150-148 av. J.-C.), les cités refusent de se soulever contre les Romains, provoquant la fin du royaume de Macédoine. En 146 av. J.-C., la Grèce actuelle est rattachée à Rome en tant que province de Macédoine.

IIe siècle av. J.-C.- IVe siècle apr. J.-C.

Époque romaine : paix et prospérité

Les choses commencent mal. En 146 av. J.-C., après avoir rasé Carthage, les Romains détruisent Corinthe. La cité avait été un précieux allié contre les Macédoniens. Mais Rome prend le prétexte d’un léger différend pour s’emparer du Péloponnèse et prouver sa supériorité militaire. Cela n’empêchera pas des révoltes grecques comme celles de Pergame (Asie Mineure) et d’Athènes en 129 et 88 av. J.-C. Puis les Romains se montrent généreux : ils financent la reconstruction de Corinthe et, en 27 av. J.-C., Jules César fait de la cité la capitale de la nouvelle province d’Achaïe (sud de la Grèce). La transformation de la République en Empire coïncide avec la plus longue période de paix jamais connue par les Grecs : la Pax Romana (27 av. J.-C.-180 apr. J.-C.). Privées de leurs armées, les cités bénéficient d’un environnement économique favorable. Grâce à l’Empire qui s’étend bientôt à toute la Méditerranée, les marchands n’ont plus à craindre les pirates et renouent des liens étroits avec les cités grecques d’Égypte, de Chypre, d’Asie Mineure, d’Italie ou de Gaule. La passion des empereurs pour l’hellénisme se traduit par la création de nombreux monuments : Porte d’Hadrien à Athènes, villa de Néron à Olympie… Les Romains érigent aussi des aqueducs, des villes et des routes comme la Via Egnatia reliant Rome à Byzance. Au sein de l’Empire, les idées circulent plus facilement. La culture et la langue grecques se répandent aussi bien dans l’élite romaine que chez les commerçants de Palestine. Dans la moitié orientale de l’Empire, textes et inscriptions sont plus souvent rédigés en grec qu’en latin. Artistes et auteurs copient à l'envi les œuvres grecques. Bref, l’hellénisme n’a jamais été aussi puissant. Mais les idées voyagent aussi dans l’autre sens. Ainsi, le christianisme pénètre en Europe via la Grèce. L’apôtre Paul y séjourne à deux reprises entre 50 et 58. Si ses prédications sont rejetées par les stoïciens d’Athènes, il forme des communautés dans le Péloponnèse, en Macédoine et en Thrace. Le lien qui s’établit entre christianisme et hellénisme va accompagner les mutations de l’Empire romain, permettant à celui-ci de perdurer à Byzance jusqu’en 1453.

V. 270-306

Saint Démétrios

C’est le martyr chrétien le plus vénéré chez les orthodoxes, faisant de sa ville natale, Thessalonique, un haut lieu de pèlerinage aussi bien pour les Grecs, les Bulgares que les Russes. Issu d’une riche famille convertie, il entame une campagne d’évangélisation durant la plus dure persécution anti-chrétienne et cela alors que les co-empereurs Dioclétien et Galère pensent faire de Thessalonique la capitale romaine. Il est donc rapidement exécuté. Ce qui va assurer sa notoriété, ce sont surtout les miracles qui lui sont attribués après sa mort, notamment la défense de sa ville contre les envahisseurs avars et bulgares au Moyen Âge. Thessalonique constitue en effet le principal point de rencontre avec les nouveaux peuples arrivés depuis le VIe siècle. Et ce sont deux autres saints de Thessalonique, Cyril et Méthode, qui lanceront la conversion des Slaves à partir du IXe siècle, propageant le culte de Démétrios jusqu’à Kiev.

Saint Demetrios © Zvonimir Atletic - Shutterstock.Com.jpg

330

Avènement de la période byzantine

À partir du IIe siècle, l’Empire romain est fragilisé par la montée du christianisme et les invasions des Germains et des Huns. Les chrétiens remettent en cause le culte unificateur voué à l’empereur. Ils sont donc combattus par des persécutions. Mais comme celles-ci visent surtout l’élite gréco-romaine, la nouvelle religion est progressivement tolérée. Quant aux invasions, on pense y remédier en scindant l’Empire en deux, entre Orient et Occident : d’abord administrativement en 285, puis de manière totale en 395. Entretemps, Constantin (306-337) réunifie temporairement l’Empire. Mais l’empereur fait surtout deux choses : il se convertit au christianisme et déplace la capitale en Orient, où l’hellénisme est perçu comme le meilleur rempart de la « romanité ». En 330, il désigne une ancienne colonie grecque : Byzance. Plus tard renommée Constantinople, puis Istanbul, elle est idéalement placée, entre Asie et Europe. Les choix de Constantin sont confirmés par ses successeurs : ils font du christianisme la religion officielle (392) et, quand l’Empire d’Occident disparaît (476), Constantinople devient le siège de la chrétienté.

330-1453

L’Empire byzantin

La Grèce actuelle est l’héritière la plus directe de l’Empire romain d’Orient, dit byzantin. Presque inconnue des manuels d’histoire français, cette superpuissance du Moyen Âge bat pourtant tous les records de longévité en Europe : onze siècles. De langue grecque et successeurs de la Rome antique, les « Byzantins » se désignaient eux-mêmes comme des « Romains ». Cet empire va longtemps conserver des territoires jusqu’en Italie. Bien que combattu par les catholiques, il servira de modèle aux futurs États européens : armée efficace, fiscalité équilibrée, large accès à l’éducation, droit romain enrichi, etc. Si les Byzantins posent les bases du christianisme, ils continuent d’étudier les auteurs antiques et se montrent tolérants envers les autres cultes. Le rayonnement de Byzance sera tel qu’il permettra l’émergence de la Renaissance italienne après la prise de Constantinople en 1453 par les Ottomans.

VIe siècle – XVe siècle

Hellénisme et christianisme

Le premier choc intervient au VIe siècle avec l’invasion des Slaves. Ceux-ci fondent des sklavinies (colonies autonomes), comme en Macédoine et dans le Péloponnèse, puis des royaumes, en Bulgarie (635) et en Serbie (780). Les Slaves resteront une menace constante, à peine endiguée par la christianisation lancée par Cyril et Méthode depuis Thessalonique. À partir du VIIIe siècle, l’Empire byzantin est secoué par un conflit religieux (la crise iconoclaste), tandis que les Arabes islamisés s’emparent de larges territoires, dont l’Égypte. L’autre danger vient d’Occident, où le pape et les rois germains contestent la suprématie de Constantinople. Prenant le titre d’empereur d’Occident en 800, Charlemagne va jusqu’à modifier le dogme chrétien pour asseoir son autorité, ce qui aboutira au schisme des Églises d’Orient et d’Occident en 1054. Malgré les spectaculaires reconquêtes de Basile II (976-1025), Byzance ne peut plus défendre la Grande-Grèce (Italie du sud et Sicile) : au XIIe siècle, celle-ci est conquise par les Normands soutenus par le pape. En 1204, c’est l’ultime rupture : les croisés et les Vénitiens capturent Constantinople et la Grèce. Dépecé par les catholiques, l’Empire byzantin est alors donné pour mort. Pourtant, il est rétabli dès 1261. Avec la dynastie Paléologue (1261-1453), il connaît même un nouvel âge d’or dont témoignent les églises de Mistra (Péloponnèse). Cette « Renaissance Paléologue » influence les arts européens et annonce la Renaissance italienne. Si Byzance a survécu, c’est que ses bases sont solides : administration et fiscalité efficaces, droit romain constamment enrichi, capacité d’assimilation de peuples variés, armée expérimentée… Les Paléologue récupèrent ainsi la plus grande partie de la Grèce et de l’Anatolie. Alors que la Crète, les îles Ioniennes, Nauplie et les Cyclades restent aux mains des Vénitiens, un nouvel ennemi déferle : l’Empire ottoman. Fondée en 1299, cette puissance turque et musulmane conquiert peu à peu les territoires byzantins. Constantinople elle-même est assiégée quatre fois avant que ses remparts cèdent sous les coups des canons de Mehmed II, le 29 mai 1453.

1347-1923

Période ottomane : islam et pragmatisme

L’histoire de la Grèce ottomane n’est pas la même selon les territoires. La Thrace est conquise à partir de 1347 et massivement islamisée. À l’inverse, les Cyclades restent longtemps vénitiennes et elles ne seront jamais réellement occupées par les Ottomans. Tinos n'est elle-même capturée qu’en 1715. Corfou, elle, ne fut jamais ottomane, demeurant vénitienne jusqu’à son annexion par la France en 1797. Le cas de la Crète est plus complexe : les Ottomans s’emparent de l’île deux siècles après Constantinople, en 1646, y installant de nombreux colons turcs. Ainsi, les musulmans représentent la moitié de la population crétoise jusqu’à être chassés de l’île en 1923. Quant à l’actuelle Turquie, elle conservera d’importantes communautés grecques à Trébizonde, Smyrne ou Constantinople. Par pragmatisme, les Ottomans font montre de tolérance religieuse. Certes, ils encouragent les conversions à l’islam au moyen d’incitations fiscales, mais, globalement, ils laissent les « infidèles » pratiquer leur culte. En 1492, le sultan Bajazet II prend sous sa protection les juifs chassés d’Espagne et du Portugal. Cette décision répond d’abord au besoin de repeupler les cités prises lors de la conquête. C’est ainsi que Thessalonique devient pendant quatre siècles la plus grande ville à majorité juive d’Europe. Dans le même esprit pratique, le patriarche de Constantinople se voit confier la responsabilité de tous les chrétiens des Balkans, qu’ils soient grecs ou slaves, orthodoxes ou catholiques. L’objectif est de délester les pachas (gouverneurs) de la collecte de l’impôt communautaire. Le favoritisme dont profite l’Église grecque se traduit aussi par une quasi-invulnérabilité des monastères, en particulier ceux du mont Athos. Là, les moines maintiennent vivante la mémoire de l’Empire byzantin, entretiennent une langue et des traditions séculaires, puis deviennent le fer de lance de la résistance.

1771-1825

Laskarina Bouboulina

Messieurs, si vous devez un jour glisser un mot doux à une Grecque, dites-lui que c’est une bouboulina : c’est le plus beau compliment que vous puissiez lui faire. Née en captivité chez les Ottomans à Constantinople et issue d’une famille d’armateurs arvanites (des Albanais orthodoxes hellénisés) de l’île d’Hydra, Laskarina Bouboulina est l'héroïne grecque de la Guerre d’indépendance (1821-1829). Veuve d’un capitaine de l’île de Spetses, elle se fit construire l’Agamemnon, un navire armé de 18 canons, et prit en 1820 la tête d’une flottille pour bloquer Nauplie, avant même le début du conflit. Elle perdit ensuite un fils durant la bataille d’Argos (mai 1821) et se remaria avec le général Kolokotronis, participant avec lui à la libération du Péloponnèse. Redoutée des Ottomans, mais prise dans des conflits internes, Bouboulina retourna à Spetses où une vendetta familiale causa sa mort.

1821-1829

Guerre d’indépendance grecque

La Grèce retient le 25 mars 1821 comme date du début du soulèvement, à Patras. Dans les faits, la devise « la liberté ou la mort » est brandie dès les 15-17 mars 1821 dans plusieurs localités du Péloponnèse. Les causes sont multiples : affaiblissement de l’Empire ottoman, morcellement de la Grèce en potentats locaux, augmentation des impôts, etc. Le conflit s’étend de la Macédoine à la Crète, mais les indépendantistes se divisent. Les Ottomans et leurs alliés égyptiens reprennent toute la Grèce, à l’exception de Nauplie et d’Hydra. Le massacre de Chios (avril 1822) et le siège sanglant de Missolonghi (avril 1826) provoquent l’indignation. L’émotion relayée par Delacroix, Hugo, Byron et Lamartine suscite la naissance de mouvements philhellènes. Ces derniers font pression sur les États européens pour soutenir les Grecs. Le 6 juillet 1827, le traité de Londres marque un tournant avec l’intervention de la Russie, de l’Angleterre et de la France en faveur des Grecs. La victoire navale de Navarin (20 octobre 1827), puis l’expédition française de Morée et la neuvième guerre russo-turque obligent finalement les Ottomans à se retirer du sud de la Grèce le 14 septembre 1829.

1829-1913

Une jeune nation sous influence

La fragile République hellénique qui naît à l’indépendance représente environ un tiers de la Grèce actuelle. Prenant pour capitale Égine, puis Nauplie, les chefs rebelles choisissent Jean Capo d’Istria comme premier chef d’État. Mais ce Gréco-Vénitien, qui fut ministre russe, ne fait pas l’unanimité : il est assassiné le 31 octobre 1831. Dès l’année suivante, les monarchies « protectrices » (Grande-Bretagne, Russie et France) font renverser la République. Le Royaume de Grèce est instauré, avec, à sa tête, le prince bavarois Othon Ier. Régnant en monarque absolu, celui-ci lance la modernisation du pays, s’installe à Athènes (1834) et entreprend le projet de la « Grande Idée » (Megali Idea), celui de réunir les territoires peuplés par les Grecs avec Constantinople comme capitale. Soutenant des révoltes, comme en Crète (1841), il échoue à agrandir son royaume, ne faisant que creuser la dette publique et provoquer la colère, tant des Ottomans que des Européens. Il finit renversé par une révolution en 1862. Ses successeurs, Georges Ier et Constantin Ier, des princes danois choisis eux aussi par les grandes puissances, vont pourtant poursuivre le projet de la Grande Idée. Malgré une inquiétante dette publique, des crises politiques et une lourde défaite en 1897 face aux Ottomans, la Grèce récupère les îles Ioniennes auprès des Britanniques (1863) et une partie de la Thessalie (1878). Puis, à l’issue des Guerres balkaniques (1912-1913), le pays prend sa forme actuelle, à l’exception des îles du Dodécanèse qui seront cédées par l’Italie en 1947.

1914-1918

La Première Guerre mondiale

Au cours du conflit, le pays se déchire pour savoir quel camp rejoindre. C’est le « Schisme national » : d’un côté, le roi Constantin Ier, pro-allemand, de l’autre, son Premier ministre, Elefthérios Venizélos, favorable à l’Entente. L’arrivée de troupes franco-britanniques sur le front de Macédoine exacerbe les tensions. En 1917, le roi donne l’ordre de tirer sur des soldats français. Paris et Londres font alors destituer Constantin, et Athènes entre en guerre à leurs côtés. Classée parmi les vainqueurs, la Grèce obtient une partie de la Turquie actuelle lors du traité de Sèvres (1920).

1922

La Grande catastrophe

Grâce au soutien franco-britannique, Venizélos songe pouvoir achever la Grande Idée. Il lance l’armée vers Constantinople. Mais tout bascule en 1922. À Athènes, Constantin remonte sur le trône, provoquant l’arrêt immédiat de l’aide de Paris et de Londres. Et, surtout, Atatürk remobilise l’armée ottomane qui reconquiert l’Asie Mineure. Après les massacres de musulmans par les Grecs, la vengeance des Turcs est tout aussi terrible. C’est la « Grande Catastrophe » : la perte de terres habitées par les Hellènes depuis des millénaires. Elle se solde par la mort de centaines de milliers de chrétiens et l’exode d’un million de Grecs d’Asie Mineure. Sur le plan politique, ce bouleversement provoque la fin de l’Empire ottoman, la naissance de la Turquie (1923) et la chute de la monarchie grecque (1924).

1936 – 1941

Metaxas au pouvoir

La Grèce se reconstruit dans la douleur. Alors que les déracinés d’Asie Mineure apportent avec eux toute une culture orientale, des centaines de milliers d’habitants slaves, turcs et juifs sont chassés. Paralysée par la corruption et l’instabilité politique, la IIe République est renversée par le général Ioannis Metaxas en 1936. Celui-ci suspend le Parlement et rétablit la monarchie. Son régime autoritaire emprunte certains aspects du fascisme. Mais Metaxas se montre plus tolérant que ses prédécesseurs envers les minorités. Il impose également une approche moderne du tourisme, par exemple en faisant repeindre à la chaux blanche les maisons des Cyclades. Mal aimé par son peuple, Metaxas est aussi redouté des démocrates occidentaux qui le jugent pro-allemand. Le dictateur devient pourtant un héros national en refusant l’ultimatum de Mussolini le 28 octobre 1940 (« Jour du Non »). Après une farouche résistance contre les Italiens, la Grèce est envahie par l’Allemagne nazie en avril 1941.

1941-1945

Occupation et résistance

Durant l’occupation, le pays connaît deux traumatismes majeurs : la famine de l’hiver 1941-1942 (plus de 250 000 morts) et l’extermination de 86 % de la population juive. L’autre fait marquant, c’est l’intensité de la résistance, organisée en deux mouvements rivaux, royalistes et communistes. Aux embuscades et sabotages, les Allemands répondent par de féroces représailles. En tout, la Seconde Guerre mondiale provoque la mort de 574 000 Grecs (8 % de la population). En 1944, les communistes parviennent à libérer le territoire. Toutefois, sous la pression des Britanniques, ils sont écartés du pouvoir. Cela provoque la Guerre civile grecque (1946-1949), premier affrontement de la guerre froide. D’un côté, le roi Georges II et l’État sont soutenus par Londres et Washington. De l’autre, l’insurrection communiste est aidée par la Yougoslavie de Tito, mais rapidement lâchée sous la pression de Staline. En effet, à Yalta (1945), les Alliés s’étaient entendus pour que la Grèce intègre la sphère occidentale, tandis que le reste des Balkans devait passer sous contrôle soviétique. Au nom de cet accord, les communistes grecs sont pourchassés. D'anciens collaborateurs des nazis reviennent aux affaires, tandis que les Américains utilisent pour la première fois le napalm à grande échelle. Le conflit fait 150 000 morts et entraîne un vaste exode.

1922 - 2020

Manolis Glezos

Le 30 mai 1941, il commet le premier acte de résistance en Grèce en retirant le drapeau nazi flottant sur l’Acropole. C’est l’un des nombreux épisodes de la vie de ce militant de gauche non communiste. Engagé contre la dictature de Metaxas dès le lycée, Glezos est un opposant farouche aux Allemands, au régime pro-britannique puis à la junte des colonels. Ce qui lui vaut une condamnation à mort, onze années en prison et cinq ans d’exil. Élu plusieurs fois député, y compris lorsqu’il est incarcéré, il rejoint le Pasok en 1984, promeut la démocratie locale dans son île de Naxos, siège comme eurodéputé, puis prend la tête de la gauche radicale, bientôt renommée Syriza. Opposé aux mesures d’austérité après la crise de 2009, il est le député le plus confortablement élu de l’histoire du pays, en 2014. Mais, dès 2015, il critique le gouvernement Tsipras et quitte Syriza. Il meurt à Athènes le 30 mars 2020.

Le 21 avril 1967

La dictature des colonels

Au sortir d’une décennie de guerre, la Grèce est plongée dans la pauvreté. Le régime monarchique constitutionnel est dominé par Constantin Karamanlis (1907-1998), à droite, et Georges Papandréou (1888-1968), au centre gauche. Le pays reste fragilisé par une faible industrialisation, la dette, la corruption et une fonction publique aussi pléthorique qu’inefficace. Face à cette situation, un groupe d’officiers s’empare du pouvoir le 21 avril 1967. Emmenée par Georges Papadopoulos, la « dictature des colonels » entend restaurer l’ordre et relancer la Grande Idée. Avec le soutien des États-Unis et de la Grande-Bretagne, les communistes sont emprisonnés, le rock et les cheveux longs, interdits. L’Europe s’émeut lorsque, le 17 novembre 1973, des chars prennent d’assaut l’École Polytechnique, à Athènes. Mais c’est un autre événement qui va causer la chute du régime. Affaiblie, la junte tente de redorer son blason avec l’Enosis : l’union de la Grèce et de Chypre. Le 15 juillet 1974, les militaires grecs renversent le président chypriote Makarios. La Turquie craint pour la minorité chypriote turque et envoie son armée capturer la partie nord de l’île. Le fiasco est tel que les colonels abandonnent le pouvoir.

Depuis 1974

Une démocratie fragile

Depuis le retour de la démocratie, à l’été 1974, le pays a opté pour la fin de la monarchie. Il a été dirigé en alternance par deux partis politiques et trois dynasties familiales : la Nouvelle Démocratie, de centre droit, avec les clans Karamanlis et Mitsotakis, et le Pasok, de centre gauche, avec les Papandréou. Mais le système est gangréné : corruption, cadeaux fiscaux aux armateurs et à l’Église, emplois fictifs dans la fonction publique, etc. Le 1er janvier 1981, la Grèce intègre la Communauté européenne. Pays pauvre dans un « club de riches », elle profite d’énormes aides structurelles. Un premier choc intervient à la chute des régimes communistes. Chassés par la pauvreté, 900 000 Albanais s’installent en Grèce à partir de 1991. La même année, la petite République yougoslave de Macédoine déclare son indépendance. C’est le début d’un long conflit : Athènes refuse l’utilisation du terme « Macédoine » et va jusqu’à asphyxier son voisin par un blocus économique (1995-1996). Le nationalisme grec est par ailleurs alimenté par les guerres de Yougoslavie (1991-1999). Au nom de l’amitié gréco-serbe, Athènes condamne les interventions de l’Otan en Bosnie et au Kosovo, et des extrémistes grecs participent au massacre de Srebrenica (1995). La fin de la guerre froide se traduit aussi par un rapprochement avec la Bulgarie et la Turquie. Si l’entente est durable avec Sofia, l’arrivée au pouvoir de Recep Tayyip Erdoğan à Ankara (2003) ravive les tensions. L’organisation des Jeux olympiques (2004) creuse encore la dette.

2009

La crise grecque

En octobre 2009, le Premier ministre Georges Papandréou révèle l’ampleur du déficit. Placée sous tutelle, la Grèce obtient de nouveaux prêts assortis de conditions draconiennes : réduction des dépenses publiques, hausse des impôts, baisse des retraites et suppression de 25 % des postes de fonctionnaires. Si l’État est sauvé, l’économie s’effondre. La crise est aussi morale et politique. En 2015, pour la première fois, les électeurs rejettent le système Pasok-Nouvelle Démocratie : ils confient le pouvoir au parti de gauche Syriza. Mais le Premier ministre Alexis Tsipras est contraint de poursuivre la politique d’austérité. Et il doit faire face au départ d’environ 500 000 Grecs et à l’arrivée de centaines de milliers de réfugiés fuyant, entre autres, le conflit syrien. Malgré un retour à l’équilibre budgétaire (2017) et un compromis avec Skopje sur le nom de « Macédoine du Nord » (2018), Syriza est battu aux élections de 2019, permettant à Kyriakos Mitsotakis de devenir Premier ministre.

2021 -

La Grèce brûle

En 2019, le réseau MedECC (réseau d’experts méditerranéens sur les changements climatiques et environnementaux), prévenait que le réchauffement actuel était de +1,5 °C par rapport aux moyennes de la période préindustrielle en Méditerranée. Le constat s'est vérifié sur le terrain. En 2021, le feu a ravagé plus de 50 000 hectares dans le nord de l'île d'Eubée. Depuis, le touristes sont appelés à la plus grande vigilance. Il ne se passe plus une année sans que des incendies ne touchent des îles grecques ou le continent. En 2023, la Grèce a vécu l’été le plus chaud de son histoire : le pays a enregistré jusqu’à 80 incendies par jour, avec d'autres immenses incendies. Outre la Grèce continentale, les îles de Rhodes, Corfou et l’Eubée à nouveau ont été particulièrement touchées.