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Les musique et danse traditionnelles

Célèbre pour son histoire mouvementée, le Kosovo l’est moins pour la richesse de sa tradition musicale, à la fois proche et indépendante de sa sœur albanaise. Remontant sans doute au Ve siècle, la musique kosovare a su conserver une vraie singularité tout en ingérant des influences turques héritées de la période ottomane.

Chaque région a ses spécificités. Un bon exemple nous est donné par l’ensemble autochtone Rugova qui préserve et transmet les musiques et danses de la région montagneuse des Alpes dinariques dont il porte le nom, comme la danse du sabre ou la musique jouée avec une feuille de hêtre. Autrefois moyen pour les bergers d’imiter le son des oiseaux, cette dernière pratique est devenue musicale avec le temps et l’on a même tenté par le passé de l’associer à un ensemble philharmonique. 

Passé les régionalismes, on trouve au Kosovo de nombreuses traditions traversant  l’ensemble du territoire. À commencer par les rapsodi, des poèmes chantés, souvent épiques, rapportant des épisodes historiques ou portant principalement sur la patrie, les guerres et ses guerriers illustres. Bien que massivement collectées et répertoriées, ces chansons continuent de se transmettre oralement. Elles sont généralement accompagnées d'instruments traditionnels tels que la qifteli, petit luth à deux cordes proche du saz turc ou la sharkia, un autre luth, à cinq cordes celui-ci. Un vrai concentré d’esprit kosovar dont les grands représentants au travers des âges sont Qazim Ademi (1876-1939) à qui on attribue une soixantaine de chansons du répertoire, Derviche Shaqa (1912-1985), une des figures les plus populaires de la chanson albanophone, Bajrush Doda, considéré comme un héritier du précédent et rapidement devenu le chanteur national de rapsodi, Lefter Çipa (1942-2021), poète dont l’œuvre a largement nourri la rapsodi, Sali Bajram Krasniqi (1919-1987), aussi prolifique que reconnu, auteur de quelque 500 chansons, et enfin Fatime Sokoli (1948-1987), une des figures féminines proéminentes.

Autre tradition importante dans le cœur des Kosovars, la sofra est un ensemble choral masculin, chantant généralement assis autour d’une table, un répertoire urbain traditionnel. Toujours très populaire, cette discipline apparaît principalement lors des mariages ou des manifestations culturelles, parfois accompagnée de qifteli et sharkia et de danseurs. Les sofras les plus populaires sont les Sofra Pejane et Sofra Gjakovare. Les sofras ont été à de nombreuses reprises un tremplin pour des carrières individuelles, l’exemple le plus célèbre étant celui de Ramadan Krasniqi, membre de la Sofra Pejane devenu très populaire en solo.

Chaque génération a à cœur de préserver et rafraîchir les traditions kosovares à sa manière. Par exemple, Rona Nishliu, chanteuse kosovare très populaire qui a représenté l’Albanie en 2012 à l’Eurovision, se produit régulièrement avec des artistes traditionnels. Elle intègre, par ailleurs, pas mal de motifs traditionnels dans ses compositions, tout comme le Zig Zag Orchestra, groupe de rock qui invite le folklore à se mêler au jazz et au ska.

Côté danse, une des plus populaires du Kosovo est la shota d’origine albanaise impliquant des pas synchronisés et un rythme très marqué. Emblématique, la shota est aussi le nom donné à l’ensemble national de chant et de danse, préservant ce pilier de l’identité albanaise – aussi bien au Kosovo que dans le monde. Aujourd’hui, la shota est couramment jouée lors des mariages, des festivals folkloriques et autres événements.

L’importance, la diversité et la persistance de ce folklore se retrouvent dans la multitude de rencontres et de festivals folkloriques organisés chaque année au Kosovo. Les plus importants sont sans doute l’Ethno Festival, rendez-vous ethnographique annuel regroupant chaque année des groupes folkloriques de tout le Kosovo et de toutes origines, ainsi que le Gospojiski Sabor, festival international d’ensembles folkloriques slaves (Ukraine, Moldavie, Serbie, Monténégro, Bulgarie, Roumanie, Macédoine) se tenant à l’occasion de la fête de l’Assomption orthodoxe, sans oublier le Flaka e Janarit, festival artistique pluridisciplinaire qui se déroule à Gjilan qui récompense des artistes dans les différentes disciplines artistiques (poésie, dramaturgie, danses et musiques folkloriques, arts visuels et graphiques, etc.). On peut aussi croiser des musiques et danses folkloriques lors d’événements régionaux comme la fête de la Saint-Georges, le 6 mai (dans le calendrier grégorien) à Novobërdë, Hasi Jehon se tenant à l’ouest de Prizren, où l’on trouve un folklore singulier tant par les chants que les danses ou les costumes, Festari qui met à l’honneur le folklore local de Suha Reka, ou encore l’Hardh Fest, la fête des Vendanges, organisée chaque année en automne à Rahovec.

La musique populaire

Sorte de réponse albanaise au turbo-folk serbe, on entend fréquemment au Kosovo du tallava. Né dans les années 1980 et 1990 entre les mains de la communauté ashkali – peuple albanophone, musulman et jadis nomade apparenté aux Roms –  le genre s’apparente au turbo-folk dans ses voix pop, ses synthétiseurs aux sonorités vaguement traditionnelles et ses basses lourdes empruntées à la techno et au rap. Cela dit, le tallava se distingue de son cousin en proposant une version plus orientale, lente et ouverte à l’improvisation. Quelques représentants éminents : Sefer Osmanov, Leta, Duli, Shkurte Gashi ou Vjollca Hamiti.

Pour la petite anecdote, la superstar de pop Dua Lipa, bien que née à Londres, est d'origine albanaise du Kosovo.

La musique classique

À l’instar de la plupart des pays d’ex-Union soviétique, la musique classique a trouvé au Kosovo un foyer d’adoption important. On peut dater les débuts de la musique classique kosovare aux années 1940, durant l’ère Yougoslave, époque à laquelle sont créées l'orchestre de chambre de la société culturelle et artistique Agimi (1944) ainsi que la première école de musique du pays (1948).

Les premières créations de musique classique au Kosovo étaient des compositions chorales a cappella, réarrangements de musique folklorique. Le premier opéra d'un compositeur kosovar, Goca e Kaçanikut, a quant à lui été écrit par Rauf Dhomi à la fin des années 1970 et aborde la lutte contre les envahisseurs ottomans.

Concernant les ensembles d’importance, depuis les années 1950, l'orchestre symphonique et le chœur de la Radiotélévision de Pristina (RTP) jouent un rôle majeur dans la vie culturelle du Kosovo (ils interprètent autant le répertoire classique que de nouvelles créations de compositeurs kosovars), accompagnés depuis 2000 par la Philharmonie du Kosovo.

Parmi les figures, citons Lorenc Antoni (1909-1991), premier grand compositeur kosovar et fondateur de la première école de musique du Kosovo. Son œuvre a un poids particulier car elle s’appuie sur son étude du folklore albanais au Kosovo, en Macédoine, au Monténégro et en Moravie du Sud et en a tiré deux cents compositions, la plupart vocales. Autre nom à connaître, Rexho Mulliqi (1923-1982) est l’auteur de nombreuses symphonies et de deux ballets. Pour compléter ce trio, citons Rafet Rudi et Zeqirja Ballata, tous deux plus contemporains et avant-gardistes. N’oublions pas de mentionner Mendi Mengjiqi, l’auteur de l’hymne national Europe, et Petrit Çeku, guitariste classique qui a été soliste dans de nombreux grands ensembles philharmoniques.

Il y a peu de salles de concert à Pristina. La majorité des concerts ont lieu à la Salla E Kuqe (la « salle rouge ») installé dans le palais de la Jeunesse et des Sports. Deux événements annuels à signaler dans cette « salle rouge » : le Dam Festival, rendez-vous international des jeunes musiciens dans la musique classique, et le Chopin Piano Fest, élaborant une programmation internationale d’amoureux de Chopin.