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Par monts et par vaux

Déplions la carte et jetons un œil sur le relief ougandais. Entamons notre succincte étude par les basses terres (600 à 900 mètres d’altitude) : ces dernières, représentant environ 9 % de la superficie du pays, sont situées dans l’ouest et le nord-ouest du pays, dans le graben (fossé d’effondrement) du rift occidental. L’altitude la plus basse (614 m) et les températures les plus chaudes sont enregistrées céans. Accédons désormais au plateau (900 à 1 500 m), soit 85 % de la surface nationale. Composé de terres arables et de pacages, il est géomorphologiquement et climatiquement hétérogène. Aussi distingue-t-on les savanes piquetées d’épineux du nord et du nord-est – où saillent, de loin en loin, de trapus inselbergs granitiques – et les plus fertiles pénéplaines du centre et du sud, ponctuées de marécages et irriguées de lacs (Victoria, Kyoga, Wamala, Bisina…) et de rivières (Katonga, Kafu, Nil, Ssezibwa…). Poursuivons notre enquête topographique sur les hautes terres (1 500 à 2 500 m). Couvrant approximativement 5 % du territoire, les highlands sont majoritairement situés dans le sud-ouest du pays. Le très arrosé Kigezi, bordé par la RDC et le Rwanda, jouit de la plus grande notoriété parmi ces terres d’altitude. Avec ses collines luxuriantes couvertes de petites parcelles cultivées, avec ses superbes forêts (Bwindi, Echuya…), avec ses magnifiques plans d’eau (Bunyonyi, Mutanda…) et avec les Virunga en toile de fond, il est parfois surnommé « la Suisse de l’Afrique ». Moins spectaculaires, les Bushenyi Hills (entre Ibanda et Bushenyi), les Isingiro Hills (au sud-ouest du lac Mburo) et les Kitara Uplands (à l’est et au sud-est de Fort Portal) parachèvent le panorama des hautes terres. Gravissons, enfin, les montagnes (de 2 500 à 5 100 m), c’est-à-dire 1 % de la superficie de l’État ougandais. Cantonnées dans les marches occidentales et orientales du pays, elles font le bonheur des randonneurs. Englacé, le toit du pays, le pic Margherita (5 109 m), domine les cimes du Rwenzori, un massif très jeune (3 millions d’années) né de la surrection de roches cristallines. A contrario, le stratovolcan isolé et éteint qu’est le mont Elgon (4 321 m) daterait d’au moins 24 millions d’années. Plus généralement, les sommets du Rwenzori se démarquent, en matière d’orogénèse, des autres montagnes de plus de 3 000 mètres (mont Moroto, mont Kadam, Muhavura, Gahinga et Sabinyo) issues d’éruptions volcaniques successives (les basaltes du Mgahinga National Park nous le remémorent) antérieures (20 millions d’années pour le mont Moroto) ou postérieures (entre 2,6 millions d’années et 130 000 ans pour la partie ougandaise des Virunga) à la formation de la chaîne dominée par le pic Margherita.

Et au milieu coule un fleuve

Un pan non négligeable du pays est recouvert, de façon temporaire ou permanente, d’eau. En guise d'exemple, le lac Victoria, le plus grand plan d'eau douce d’Afrique (près de 70 000 km2), baigne le sud ougandais. Il fut ainsi dénommé au mitan du XIXe siècle par l’explorateur britannique John Speke en l’honneur de sa souveraine. Au ponant, les lacs Albert (5 300 km²) et Edward (2 300 km²), traversés par la frontière ougando-congolaise et parties intégrantes de l’Afrique des Grands Lacs, ainsi que le lac George, nettement plus petit que les précédents (250 km²), ont également été baptisés en l'honneur de membres de la famille royale britannique par des explorateurs originaires du Royaume-Uni (le premier par Samuel Baker, les second et troisième par Henry Stanley). Situé au beau milieu du pays et alimenté par le Nil, le lac Kyoga a aussi une superficie conséquente (1 720 km²). Le Nil, parlons-en ! Le fleuve, long de quelque 6 700 km, s’échappe du lac Victoria (1 134 mètres d’altitude) à Jinja. Sous le nom de Nil Victoria, il rejoint – après s’être joué de trois barrages (Owen Falls, Bujagali et Isimba) qui relâchent ses eaux à raison de 650 à 1 500 m3/s – ledit lac Kyoga (1 033 m) qui constitue une portion navigable. Viennent ensuite, en aval, Masindi Port (une petite ville qui fut, naguère, l’un des centres névralgiques des flux commerciaux régionaux), le barrage hydroélectrique de Karuma puis, au sein du parc éponyme, les surpuissantes Murchison Falls (en ces lieux, 300 m3 d’eau s’engouffrent par seconde dans une brèche de moins de dix mètres de large : effet Venturi garanti !). Le Nil Victoria suit ensuite son cours jusqu’au lac Albert (620 mètres d’altitude) où il devient, comme de bien entendu, le Nil Albert. D’ici, il lui reste 210 km à parcourir, à travers des terrains marécageux, jusqu’à la frontière sud-soudanaise (614 mètres d’altitude, soit le point le plus bas du territoire national). En résumé, avant de devenir le Bahr el-Jebel au Soudan du Sud, le Nil, en Ouganda, méandre sur 540 km, accuse 520 mètres de déclivité et épand des alluvions fluviatiles sur toute sa longueur.

À propos du Rift

L'Ouganda est lové entre les branches orientale et occidentale du Rift est-africain, une faille, un fossé, une cassure (tels sont les sens du mot anglais rift) qui court sur plusieurs milliers de kilomètres du Mozambique à la mer Rouge et au golfe d'Aden. Fruits d'une activité tectonique intense depuis 30 millions d'années, volcans, dépressions et grands lacs jalonnent la Rift Valley. Cette faille devrait séparer, un jour, les plaques africaine (sur laquelle l'Ouganda et le rift occidental sont situés) et somalienne. Au sein de la « perle de l’Afrique », le mont Elgon, margeant le rift oriental, témoigne de l’ancienneté de ce système de failles est-africain. C’est toutefois vers le rift occidental (ou rift albertin) qu’il faut tourner le regard pour se rendre compte du dynamisme géologique de la région. Céans, les effets des failles tectoniques (la principale et les secondaires) sont prégnants : présence d’un graben (dépression) au fond duquel coule la Semliki et reposent les lacs Edward et Albert, de horsts (blocs soulevés entre deux grabens) symbolisés par le Rwenzori, de montagnes jeunes (Virunga) et de sources d’eau chaude (Rwagimba, Sempaya…). La sismicité et l’activité volcanique de la zone sont également perceptibles : en attestent, à 30 km de la frontière ougandaise, les volcans Nyiragongo et Nyamuragira (RDC) qui ont érupté plusieurs fois depuis le début du XXIe siècle…