Les salins à Walvis Bay © kavram - Shutterstock.Com.jpg
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De quoi vit un pays « désertique » ?

La Namibie est vaste et très peu peuplée. Le pays compte parmi les plus faibles densités de population au monde après la Mongolie, soit trois habitants par kilomètre carré. Une grande partie du territoire étant désertique, ni vie ni culture ne peuvent s’y déployer.
Avec une économie sous domination sud-africaine avant l’indépendance tardive de 1990, la Namibie se retrouve aujourd’hui principalement aux mains des Blancs namibiens. À l’instar de son grand voisin du sud, celle-ci reste très dépendante du secteur primaire. Le secteur minier est à l’origine de 12 % du PIB namibien, mais son influence est bien plus importante car il représente 50 % du total des exportations namibiennes. Aussi riche en rentabilité qu’en diversité, on y trouve d’abord le diamant d’où la Namibie tire la moitié de ses recettes en devises. Le pays exploite également l'uranium, avec l'ouverture en 2016 de la mine géante d'Husab, près de la ville d'Erongo. Cette mine, déjà premier employeur du secteur, place le pays en course pour devenir le troisième producteur mondial d'uranium. On extrait également le zinc avec la mine Skorpion, au sud. Les villes de Tsumeb et Otavi sont connues pour leur sous-sol riche en plomb, germanium, argent, lithium et cuivre. La région d’Uis renferme de l’étain. Sur la côte atlantique, on extrait du sel grâce aux salines de Walvis Bay, les plus grandes du monde. C’est décidément le sort de toutes les régions que de voir exploiter leurs sols.

Redistribution des terres

Le secteur agricole correspond à seulement 6 % du PIB, mais entre 25 et 50 % de la population sont dépendants de cette activité au cœur de la réforme agraire. En fait, 1 % de la population, la population blanche, contrôle 44 % des terres arables du pays. Une loi agraire prévoit l’acquisition de la moitié de ces terres privées par l’État et leur redistribution à des fins de réinstallation. Les nouveaux fermiers noirs recevront également des prêts pour pouvoir les développer. Malgré des critiques sur sa mise en place comme le manque de formations des nouveaux fermiers ou la corruption, cette réforme séduit beaucoup de Namibiens qui y voient une continuité de l’idéologie de l’indépendance. Mais ces promesses tardent à se concrétiser.
Les populations des terres « communales » élèvent des types de bétail différents en fonction de leur culture et de leur habitat. Mais le domaine de l’élevage est principalement orienté vers l’exportation. L’élevage bovin de type extensif est réglementé par une législation stricte en vue de faciliter une exportation vers l’Europe des viandes provenant de ces zones dites « commerciales ». Depuis quelques années, avec l’élevage de gibier tel que l’autruche ou l’oryx, on assiste au développement du game ranching.

Des eaux poissonneuses, et donc à protéger

Avec 1 400 km de côtes, les eaux namibiennes abondent en poissons et suscitent la convoitise de nombreux navires étrangers. Représentant 3 % du PIB en 2019, la pêche a connu un développement continu depuis l’indépendance. On pêche aujourd’hui des sardines, anchois, maquereaux et colins en abondance. Mais la concurrence des bateaux étrangers et la surexploitation des ressources sont rudes pour les pêcheurs et les risques pour la pérennité du secteur et de l’économie des villes côtières bien présents. Si plusieurs quotas de pêche sont déjà en vigueur, d’autres solutions politiques et techniques sont encore en préparation en complément.
Devenu le deuxième poste d’exportation namibien, le secteur industriel reste en faible croissance malgré le succès de certaines activités comme le conditionnement de la viande et des pêches. L’alimentation et les boissons occupent la moitié de la main-d’œuvre du secteur avec les Namibian Breweries, ces brasseries qui exportent massivement vers l’Afrique du Sud et sur le reste du continent. Il faut dire que qui dit braai, ou barbecue, dit que la bière coule à flots !

La Swapo toujours à la tête du pays

La politique namibienne est plutôt stable, et pour cause, le parti au pouvoir n’a pas changé depuis les années 1990 et les premières élections en tant que pays indépendant. L’Organisation du peuple du Sud-Ouest africain (SWAPO) monopolise la scène politique du pays. Les tentatives des partis d’opposition pour créer un front commun ont toujours échoué. Sam Nujoma fut réélu en 1994 et 1999. La domination de la SWAPO est telle que ce sont deux de ses ministres qui lui succéderont à la tête de l’État. Hifikepunye Pohamba, entre 2005 et 2015, recevra même le prix Mo-Ibrahim saluant sa « bonne gouvernance » en Afrique. La Namibie se démarque alors comme un modèle de démocratie africaine. Hage Geingob prend la suite en 2015. Pourtant, lors du dernier scrutin en 2019, le parti signe le plus mauvais score jamais obtenu (56 %). Certains y voient une sanction pour avoir été incapable de résorber les inégalités et la question de la réforme agraire. Aussi, pour éviter une législation que des investisseurs pourraient percevoir comme hostile aux affaires, le président devra trouver un équilibre délicat entre les pressions exercées par les cadres de la SWAPO, une partie de l’électorat et un contexte économique défavorable.

Une économie vulnérable malgré ses atouts

En dépit de ses atouts, l’économie demeure vulnérable aux conditions météorologiques et reste dépendante du secteur minier et de la santé économique et politique de l’Afrique du Sud. Avec un taux de croissance de 5 % en 2015, le pays subit dès 2016 un net ralentissement suivi d’une entrée en récession en 2017. En 2019, les mauvaises performances de l’agriculture et de l’industrie minière entretiennent cette récession. Cependant, ces secteurs se sont globalement redressés à partir de 2020. Mais c’est au tour de la pandémie de Covid-19 d’assommer l’économie namibienne et les effets de cette reprise. En 2020, le PIB chute de 8 % et le secteur touristique est arrêté en plein essor. Comment la Namibie va-t-elle remonter la pente ? Doucement. Pas à pas, la reprise de l’économie est soutenue par le secteur minier. Selon la direction générale du Trésor, le grand défi pour les autorités est alors d’aller au bout des réformes structurelles en attente pour relancer la croissance, puis « poursuivre son ajustement budgétaire sans fragiliser la reprise ».

La Namibie tournée vers l’avenir

La Namibie possède plusieurs atouts pour une reprise solide de sa croissance : son infrastructure moderne, son potentiel touristique et une stabilité politique lui assurent une bonne image pour attirer et rassurer les investisseurs étrangers. Néanmoins, et malgré une corruption relativement faible, le pays révèle des lacunes quant à son attractivité, 84e sur 138 au classement du Forum économique mondial, et son environnement des affaires, 108e sur 189 au classement Doing Business de la Banque mondiale. Pour autant, face à la nécessité de diversifier la base productive nationale, les autorités comptent attirer des investissements dans de nouveaux secteurs comme le tourisme ou le tertiaire. En effet, l’économie reste fortement dépendante de l'exploitation minière, tandis que la demande limitée de main-d'œuvre non qualifiée entraîne une concentration du travail dans l'agriculture de subsistance.

Et le tourisme dans tout ça ?

Tout comme le pays, le développement du tourisme en Namibie est très récent. Devenu rapidement une source incontournable de devises, le tourisme est aussi un levier puissant pour l'emploi et le développement des communautés locales. Des milliers de touristes visitent chaque année les parcs nationaux comme la réserve animalière d'Etosha, les déserts du Kalahari et du Namib, le Damaraland et la côte ouest-atlantique. La majorité, 70 % des touristes, est composée d’Allemands et de Sud-Africains, avec ces dernières années une hausse des visiteurs originaires d’Italie et de France. À la suite d’investissements importants, les structures d’accueil ont considérablement augmenté, mais avec une tendance vers un tourisme qualitatif plutôt de type écotourisme, voire luxueux, et vers le voyage à taille humaine, davantage que le tourisme dit « de masse ». La mode aux guestfarms, les fermes d’hôte, et aux petits lodges confirme cette orientation. Et tant mieux !

Les ressources profitent-elle à tous ?

La plupart des ressources du pays ont déjà été mises en valeur et l’offre actuelle reste dynamique et s’adapte aux nouvelles demandes des différents marchés. Malgré cet optimisme, un des défis majeurs pour cette activité principalement contrôlée par la population blanche consiste à intégrer la population noire au plus haut niveau de sa hiérarchie afin que les ressources profitent réellement à tous. La promotion d’employés noirs dans certains établissements « classiques » du secteur et le développement du tourisme communautaire géré de manière inclusive sont des solutions déjà en place. Ces réformes mettront du temps à porter leurs fruits mais les Namibiens ont à cœur de les relever ensemble.

La naissance d’un tourisme communautaire

De nombreux camps et villages culturels ont vu le jour récemment à travers toute la Namibie. Ce programme consiste en la mise en place de zones protégées délimitées appelées conservancies et de les faire accepter comme unités locales de gestion dans les zones rurales. Cette unité s’occupe des problèmes de conservation et du développement économique au sein de la conservancy pour un partage plus équitable des ressources avec les communautés impliquées et directement affectées. Une initiative originale et en faveur du développement du tourisme durable. Ceux qui sont à la recherche d’une vision authentique de la Namibie pourront passer quelques nuits dans un de ces restcamps ou campings immergés dans la vie locale.

Vers un accord sur le premier génocide du XXe siècle

Il aura fallu attendre mai 2021 pour que l’Allemagne demande pardon au peuple namibien et reconnaisse officiellement  le génocide herero et nama entre 1904 et 1908. L’Allemagne promet une aide de 1,1 milliards d’euros pour aider au développement des communautés persécutées. Mais aujourd’hui, en 2022, l’accord n’étant toujours pas adopté, le premier parti d’opposition, le Mouvement démocratique populaire, orchestré par McHenry Venaani, demande que l’accord soit remis sur la table des négociations, regrettant que les premiers concernés, à savoir les communautés herero et nama, n’aient pas été assez mobilisés dans les discussions. Les relations entre les deux pays sont-elles en bonne voie d’apaisement ?