Cobza © Stephen Barnes - shutterstock.com.jpg
Athénée Roumain à Bucarest © Razvan - iStockphoto.com.jpg
Danses roumaines © Ioan Florin Cnejevici - shutterstock.com.jpg

La musique traditionnelle

Vaste pays aux identités régionales très marquées, on trouve en Roumanie des folklores musicaux très différents selon les territoires. Par exemple, dans la Dobrogea – ethniquement très mélangé – la musique est marquée par les cultures de Turquie, de Bulgarie et des Tatars d’Ukraine. Dans le pays d’Oaș, on entend des chants uniques, très stridents et cultivant des éléments mélodiques archaïques. Ou encore, en Moldavie, on voit des fanfares similaires à celles de la Serbie. Dans l’ensemble, les musiques traditionnelles roumaines sont encore très vivantes et pratiquées. Elles ont pour tronc commun un mélange d’influences hongroises, balkaniques et – lointainement – turques et sont généralement lyriques, épiques ou dramatiques. Dans le genre lyrique, les musiques communiquent la tristesse, l’amour, la nostalgie, le romantisme, l’ennui ou la passion… C’est dans cette famille que l’on peut classer le style folklorique le plus répandu, la doina (« nostalgie »), un type de chanson aux mélodies improvisées. Dans le genre épique, on trouve essentiellement des chants à forme musicale libre. Ce sont des ballades aux thèmes héroïques, fantastiques ou tragiques toujours adaptées au contexte social (comme des repas de noces). Enfin, dans le genre dramatique, on trouve toutes les musiques réservées au théâtre de marionnettes et aux veillées.

Mais un des aspects les plus saillants du folklore roumain est très certainement le taraf. Petits ensembles de musique rom popularisés dans le monde par le fameux groupe Taraf de Haïdouks, les tarafs produisent une musique enivrante et fougueuse à laquelle il est difficile de rester insensible. Traditionnellement composés d’un violon (vioară), d’un nai (flûte de Pan turque) et d’un cobză (sorte de guitare-luth), il incorpore aussi désormais pas mal d’accordéon. Depuis quelques années, la musique traditionnelle rom est mêlée à des sons et rythmes modernes aux influences diverses, le chant prenant le dessus sur la musique (amours déçus, monologues plaintifs…). Cette musique de fête appelée manea (au pluriel manele) est très prisée par les jeunes et a complètement dépassé la simple communauté rom. Une vulgarisation pour certains, un massacre pour d’autres… En tout cas, il est désormais fréquent d’entendre ce type de musique dans des clips ou durant des fêtes. Si le manea concerne la musique rom, l’équivalent existe pour la musique folklorique roumaine : l’etno. Appelé aussi « etno dance », le genre ajoute aux mélodies anciennes les rythmes modernes de la dance et, sans surprise, le cocktail a beaucoup de succès, surtout en été.

Modernisés ou dans leur jus, la musique et les chants traditionnels sont toujours très prisés des Roumains. À tel point qu’une chaîne câblée lui est consacrée, Etno TV, qui diffuse en permanence des chants et danses. L’occasion de voir des chanteurs et groupes s’y produire en costumes typiques de leur région ainsi que d’entendre la plupart des instruments traditionnels : le fameux tambal (aussi appelé cymbalum), dont on frappe les cordes avec de petits marteaux feutrés, le nai, l’ocarină, le bucium (buccin), le cobză, le taragot (la clarinette conique et iconique) ou encore le violon à pavillon (un violon avec un « entonnoir » qui amplifie le son sur le même principe que le gramophone).

Bien entendu, la musique traditionnelle n’est pas consacrée que sur les chaînes câblées. On en voit par exemple au festival des Sources enchantées, rendez-vous dédié au genre se tenant en février à Târgu Jiu. Mais le grand événement de musique roumaine, c’est le festival Maramuzical, quatre jours de folklore et de fête en juillet à Vadu Izei. Autrement, on joue beaucoup de musique traditionnelle durant les fêtes religieuses comme le festival Saint-Georges en avril ou dans des restaurants de Bucarest tels que Hanul lui Manuc, une des plus anciennes auberges de la capitale proposant des concerts quasi quotidiens.

La musique classique

Avant la seconde moitié du XIXe siècle, en Roumanie, la musique est soit folklorique, soit religieuse (musique religieuse byzantine). Deux formes musicales, toujours très vivaces, qui ont inspiré par la suite – et continuent d’inspirer – les compositeurs roumains de la musique savante. Dans les années 1850, l’arrivée dans le pays d’artistes étrangers (musiciens, troupes d’opéra) introduit avec eux des sonorités occidentales. Bientôt, des conservatoires ouvrent à Bucarest et à Iasși. En 1866, l’Opéra national de Bucarest est créé. Très vite, des artistes roumains se distinguent, particulièrement dans le domaine lyrique, avec notamment Haricléa Darclée (1860-1939). Mais c’est George Enescu (1881-1955) qui donne ses lettres de noblesse à la musique roumaine. Ce compositeur, chef d’orchestre, violoniste virtuose et pianiste, est célèbre pour avoir infusé la musique folklorique dans la savante au sein de ses Rhapsodies roumaines. Une idole de la musique symphonique qui inspira de nombreux artistes roumains, parmi lesquels certains sont devenus des références dans leur domaine : Sergiu Celibidache (1912-1996), illustre chef des orchestres philharmoniques de Berlin et de Munich, Cristian Mandeal, élève de Celibidache (et de Karajan) qui fut vingt temps à la baguette de l’Orchestre philharmonique George Enescu, le plus important du pays (et résident du magnifique Athénée roumain), Cristian Măcelaru, chef d’orchestre en devenir, successeur d’Emmanuel Krivine à la tête de l’Orchestre national de France en 2021, ou encore Radu Lupu, pianiste hors du commun, et même Vladimir Cosma, qui réalisa parmi les plus belles bandes-son du cinéma français. Une famille musicale très prestigieuse et qui ne serait pas vraiment complète sans que l’on aborde les quelques immenses talents lyriques qu’abrite le pays. On pense évidemment à Angela Gheorghiu, une des meilleures cantatrices au monde, et Mariana Nicolescu, soprano ayant marché dans les pas d’Haricléa Darclée, mais aussi à Ștefan Pop, l’un des principaux ténors d’aujourd’hui, Ruxandra Donose, mezzo-soprano adorée du public, ou encore Valer Barna-Sabadus, qui déjà très jeune se classait parmi les meilleurs contre-ténors du monde. 

Terre de naissance de György Ligeti et Iannis Xenakis, la Roumanie est aussi fameuse pour la quantité (et la qualité) de ses compositeurs d’avant-garde comme Ștefan Niculescu, à la démarche proche de Ligeti, Horațiu Rădulescu, grand nom de la musique spectrale, Iancu Dumitrescu, à la pratique singulière de la musique acousmatique, ou encore Ana-Maria Avram, qui a exploré l’électronique.

Un des meilleurs moyens de profiter de la musique classique en Roumanie est d’assister au festival George Enescu de Bucarest. Organisé toutes les années impaires, c’est la plus importante manifestation de musique classique organisée dans le pays. Initialement articulée autour de l’œuvre du compositeur George Enescu, la programmation s’est ouverte au fur et à mesure des années et comprend des concerts symphoniques et de chambre, de l’opéra et du ballet. C’est l’occasion de voir des artistes de stature internationale et de grands spectacles tout en découvrant les plus belles salles de concert de Bucarest (l’Athénée roumain, l’Opéra national, la salle du Palais…). Autrement, l’Automne musical de Cluj, se tenant au mois d’octobre, est aussi bien programmé tout comme la Philharmonie de Timișoara tout au long de l’année.

Jazz

Les amateurs le savent : le jazz est chez lui en Roumanie. Arrivé dans le pays durant l’entre-deux-guerres avec des musiciens tels que Sergiu Malagamba, le jazz est interdit après la Seconde Guerre mondiale par le régime communiste avant de redevenir autorisé (et massivement pratiqué) dans les années 1960. Portée par le très influent batteur de jazz Cornel Chiriac, toute une scène roumaine va éclore et multiplier les très bons musiciens tels que les pianistes Eugen Ciceu, Richard Oschanitzky, János Kőrössy ou l’épatant Johnny Răducanu. Bien qu’un peu éteint après la chute du mur, le jazz est toujours très pratiqué en Roumanie et quelques noms continuent de faire briller le pays à l’international comme le saxophoniste Cristian Soleanu, le pianiste Mircea Tiberian ou l’ethno-jazz d’Harry Tavitian.

Si on devait ne retenir qu’un lieu pour écouter du jazz à Bucarest, ça serait sans aucun doute Green Hours. Cet excellent club de calea Victoriei, niché dans une cave souterraine, propose une solide programmation musicale jazz, blues ou encore funk. Autrement le pays organise nombre de très gros festivals dédiés à commencer par le Gărâna International Jazz Festival, généralement très bien programmé, le festival de Jazz à Sibiu ou le Transilvania Jazz Festival.

La dance et la house

Outre la dance, produit marketing très superficiel, la Roumanie possède une vraie belle scène de musique électronique, et particulièrement de house, très réputée dans le monde. Minimale et dépouillée, la house (ou micro-house) roumaine possède une signature propre – que les fans appellent « rominimale » (contraction de « Roumaine » et « minimal ») – portée par des artistes devenus des stars : Raresh, Rhadoo et Petre Inspirescu. Le pays connaît même un tourisme de niche, voyant des clubbers du monde entier venir danser sur cette électronique purement roumaine lors du festival Sunwaves (sur les bords de la mer Noire) ou dans les clubs de Bucarest tels que Control (un des tout meilleurs de la capitale), Kristal (avec une programmation internationale) ou Guesthouse et Deschis Gastrobar, deux adresses très en vogue.

Les danses

Très appréciées des Roumains comme des voyageurs, les danses roumaines sont agréables à regarder et à pratiquer, en particulier lors des festivals dédiés qui se déroulent dans le pays. Parmi les plus fréquentes, on peut citer la hora, une ronde formée par au moins trois personnes évoluant sur une musique folklorique à un rythme modéré, ou le căluș, une danse de fertilité traditionnelle que seuls peuvent exécuter quelques initiés… Dans les régions telles que la Valachie, on peut aussi voir les danses associées aux tarafs comme le brâu, les geamparale ou la sârbă.

À noter qu’il existe un rendez-vous important, le festival de musiques et de danses folkloriques se tenant en août les années impaires à Tulcea, ville du delta du Danube. L’occasion de voir des rencontres de troupes folkloriques locales et étrangères venues d’Europe centrale et de l’Est.