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Une scolarisation qui chute au secondaire

En 1975, à l’heure de l’indépendance du Mozambique, une politique de scolarisation à grande échelle est lancée afin de former un minimum de cadres susceptibles de diriger le pays. Cependant, la décolonisation est suivie d’une période de guerre civile qui durera près de quinze ans, détruisant les écoles et affaiblissant alors considérablement le système éducatif. Durant les années 2000, le gouvernement lance de nouveaux programmes et plans d’action pour répondre à l'après-guerre. Aujourd’hui, environ 50,6 % des adultes sont encore analphabètes, un taux plus élevé dans les zones rurales qu’urbaines. Des disparités régionales existent : 15 % de la population est analphabète dans la province de Maputo contre 70 % dans la province de Cabo Delgado (au nord). Mais cet analphabétise ne concerne en réalité pas les enfants. Depuis dix ans, les progrès sont spectaculaires. Encore près de 50 000 enfants n’étaient pas scolarisés en 2020, contre plus de 500 000 en 2013, selon les chiffres de l'Unesco. Partout au Mozambique, on croise des écolières et écoliers en uniforme le long des routes. L’école y est presque obligatoire. Mais plus l’on vit reculé, plus l’accès à l’éducation est compliqué, des raisons géographiques et financières. Certains enfants marchent des kilomètres sous le soleil pour aller apprendre à lire et à compter. Une fois arrivés à l’école, les élèves sont répartis dans des classes, construites en dur pour les plus chanceux, qui comptent plus de cinquante petits apprentis. Certains parents sont loin d’avoir les moyens d’offrir du matériel neuf à leurs enfants. L'écart entre garçon et fille est minime, ce sont davantage les conditions sociales des parents qui déterminent leurs moyens pour scolariser leurs enfants. En revanche l'accès au secondaire n’a pas évolué depuis dix ans. Au contraire, il se creuse avec plus de 800 000 adolescents qui ne sont pas scolarisés contre 700 000 en 2013. C’est après l’école primaire que les fossés se creusent entre le Nord et le Sud, entre les classes sociales et entre les genres. Les familles les plus pauvres ont tendance à garder leurs enfants à la maison, au champ, comme une force de travail.

Des initiatives d'aide à la scolarité des filles

Si près de 94 % des filles vont à l'école primaire, seulement 11 % continuent dans le secondaire, suivant la même courbe que les garçons, mais plus marquée encore. Pour montrer qu’elles aussi ont le droit à l’apprentissage et à la réussite, le parc national de Gorongosa a créé un programme d’éducation pour les filles avec les « Girls Clubs » pour donner une chances aux jeunes filles de la région d'étudier en secondaire, en leur fournissant uniforme, matériel et école. Démarrée en 2016, l'initiative compte aujourd'hui cinquante « clubs » scolarisant près de 2 000 filles dans des aires très rurales et pauvres. Le fonds Malala de l’Unesco est à l’origine du programme d’apprentissage familial, Family Learning Program, actuellement ouvert sur les provinces de Maputo et de Nampula, où plus de la moitié des adultes sont analphabètes, un apprentissage qui permet aux parents, même ceux qui n’ont pas eu les moyens d’aller à l’école, de pallier la pénurie d’éducation de la petite enfance et de préparer leurs enfants à l’enseignement primaire. L’Organisation des Nations unies pour l’éducation a mis en œuvre l’agenda « Éducation 2030 ». Le CapED collabore avec le gouvernement afin d’améliorer l’éducation primaire des jeunes et des adultes, un programme qui profite à près de 500 élèves, dont 70 % de filles.

La place de la femme paradoxale

En 1990, après la proclamation de l’égalité entre l’homme et la femme, différentes associations de femmes ont vu le jour. Il existe aussi une Union nationale des femmes paysannes, présidée par une femme. Dans son histoire, le rôle de la femme a été valorisé durant les années de marxisme au Mozambique. Le 7 avril a d’ailleurs été instauré comme journée de la Femme, jour de la mort en 1971 de Josina Machel à 25 ans. Elle n'était autre que la fille de Samora et Graça Machel, résistante, femme politique et surtout militante pour les droits des femmes. Chaque année, à partir du 7 avril et pendant un mois, les femmes du pays portent des pagnes à son effigie. Aujourd’hui, ce droit est donc institutionnalisé. Cependant, cette initiative a suscité de nombreuses critiques. L’instauration d’une telle entité n’a pas toujours été jugée comme une priorité pour le développement du pays et la société mozambicaine reste traditionnellement dirigée par des hommes. C'est aussi un symbole déconnecté des réalités du pays où, dans sa grande majorité rurale, la femme s'occupe d'aller aux champs pour la production agricole, les corvées d’eau, la cuisine, les travaux domestiques et l'éducation des enfants. La femme est considérée par les dirigeants comme l’un des piliers du développement rural car elle constitue une force de travail importante, et c’est elle qui met au monde les nouveaux petits travailleurs. La polygamie est fréquente sans qu'on demande l'avis des femmes concernées.

Néanmoins, les mentalités sont assez souples à l’égard des femmes, surtout dans les villes. Il est courant de voir une femme fumer dans la vie quotidienne. Elles fréquentent les bars et cafés, y compris le soir. Le rapport au sexe est dénué de tabous. Cependant, si a priori il fait plutôt bon vivre au Mozambique pour une femme, le poids des structures traditionnelles reste très présent et les mariages ne laissent pas toujours la liberté prévue dans la loi dans les zones rurales.

Des croyances lourdes à porter

Une autre difficulté sociale touche les mères célibataires, et plus encore les mères d’enfants handicapés. Encore trop de monde croit qu’il s’agit du sort de la magie noire ou encore du fruit d’un adultère. Les mères sont alors complètement rejetées et blâmées de la société. Une situation très dure que tente d’inverser l’association Cooperativa luana semeia sorrisos. Créée en 2016 par une femme elle-même mère d’un enfant handicapé, elle veut changer les mentalités pour que les mères cessent d’être considérées comme des sorcières et que les enfants, qui pour beaucoup ne sont même pas diagnostiqués, puissent rester avec leur famille. L’association, qui vit majoritairement de donations, offre un soutien physio-thérapeutique pour les enfants, ainsi qu’un soutien psychologique pour les mères.